Critiques pour l'événement Les Misérables
18 nov. 2017
9/10
47
C’était une gageure de résumer mille pages en 1H30. C’est ce qu’a magnifiquement réussi la jeune passionnée et passionnante Manon Montel en adaptant, en mettant en scène et en jouant « Les Misérables », ce monument emblématique de la littérature du XIXe siècle. Pour réussir ce tour de force elle s’est entourée de sa troupe la compagnie Chouchenko. Les acteurs interprètent avec justesse chaque personnage passant intelligemment de la misère à la révolte.

Les scènes cultes du roman de Victor Hugo s’enchainent harmonieusement pour en faire une véritable histoire. Le décor minimaliste, les jeux de lumière ainsi que quelques notes d’accordéon sont là pour mieux faire passer l’émotion transmise par les comédiens. Une réussite enthousiasmante à faire partager à la jeunesse d’aujourd’hui.

Quelle meilleure approche pour transmettre l’envie d’apprendre et découvrir l’amour du théâtre, de la littérature, de l’histoire et de la société au XIXe siècle ?
2 nov. 2017
8/10
62
C’est un concentré en 1h20 de l’œuvre de Victor Hugo, forcément il y a quelques raccourcis mais cela est bien ficelé. Ce fut un plaisir de redécouvrir sur les planches cette œuvre.

De bons comédiens avec une belle mise en scène. Les comédiennes qui incarnent Madame Thénardier et Fantine (Gavroche) sont excellentes. Une pièce pleine de sensibilité et d’humour sur un sujet qui reste toujours d’actualité.
À voir.
17 septembre, 17h, Paris

Monter Les Misérables, d’après le roman de Victor Hugo qui compte 1800 pages, en 1h20, représente pour Manon Montel un véritable pari. Mais un pari réussi !!
Tout d’abord, par le choix intéressant, et peu commun, de choisir une narratrice et, de surcroît, arrêter son choix sur Mme Thérnardier, jouée par Claire Faurot. Cette dernière apporte également une touche de gaité, à cette histoire tragique, en offrant, à l'accordéon, des intermèdes musicaux.

Un autre choix intéressant, celui de faire jouer Fantine et Gavroche par la même comédienne, en l'occurrence la metteuse en scène, Manon Montel. Ces deux personnages qui peuvent paraître au premier abord très différents ne le sont en réalité pas tant que ça. Ils se battent tous deux pour survivre dans un monde qui n’est pas fait pour eux. Au fond, Fantine aurait très bien pu se révolter contre cette société oppressive, mais elle devait envoyer de l’argent aux Thénardier pour qu’ils s’occupent bien de sa fille, Cosette. Elle devait donc rester soumise …
Par ailleurs, la mise en scène rend le texte de Victor Hugo accessible à un jeune public, tout en glissant des références que ces jeunes spectateurs ne remarqueront probablement pas. On peut penser en particulier à la scène dans l’usine de Jean Valjean, qui vit sous le nom de M. Madeleine, où Fantine travaille entourée de deux autres ouvriers. Cette scène fait penser aux Temps Modernes de Charlie Chaplin. En effet, nous pouvons voir des projections d’engrenages ainsi que les ouvriers travailler sans relâche à faire le même geste encore et encore. Un travail important a été réalisé sur les éclairages, qui servent pour passer d’une époque à une autre, de la narration à l’action, etc.
Ce texte de Victor Hugo trouve toujours écho aujourd'hui dans notre société, société où trop d’inégalités perdurent encore, et qui reste dominée par une minorité soucieuse de conserver ses privilèges. D’ailleurs d’avoir fait le choix de nous narrer la misère confronte le spectateur à une réalité qui le touche plus aisément. La narratrice, qui nous dit être Mme Thérnardier, peut être considérée comme un fantôme puisqu’elle nous dit à plusieurs reprises qu’elle est morte. Mais même si elle n’est qu’un fantôme, elle nous hante toujours avec son histoire, celle de Fantine, de Jean Valjean et Javert, celle de Cosette et Marius, sans oublier Gavroche …
5 mai 2017
6/10
82
Les comédiens sont bon, les quelques effets de mise en scène très plaisants, le texte tout à fait accrocheur.

Je ressors pourtant quelque peu déçu de cette pièce...
A mon humble avis, c'est la volonté de résumer l'intégralité de l'œuvre de Victor Hugo, Les Misérables (à peu près 8000 pages il me semble) en 1H30, qui fait défaut ici.
Les séquences sont forcément expédiées rapidement, et la multitude de raccourcis empruntés ne nous permettent pas de ressentir la tension dramatique des diverses situations et l'émotion des personnages qui s'en dégage.
On est bien loin de ce que l'on éprouve en lisant le roman.

L'initiative est tout de même à saluer. Et face à l'ampleur de la tâche, l'auteur s'en sort tout de même très bien. Ceci dit, la pièce me semble réservée à ceux qui ont lu et apprécié le roman, et qui souhaiteraient revivre l'aventure...
11 avr. 2017
9/10
116
Peut-on adapter et mettre en scène au théâtre, et ce, en une heure et trente minutes Les Misérables, le roman-épopée de Victor Hugo ?
Peut-on réussir cette gageure ?

J'avoue que j'étais très curieux de pouvoir répondre à cette question, et quelque peu dubitatif, je ne vous le cacherai pas.

Et bien, la réponse est tout à fait positive.
Manon Montel a gagné haut la main son pari. L'esprit du grand Victor est bien là.
Ce fut un véritable plaisir de retrouver les Valjean, Thénardier, Javert, et consorts, et les voir «en chair et en os ».
Un peu comme si l'on retrouvait des vieux amis perdus de vue.

D'ailleurs, on ne devrait jamais trop s'éloigner de cette fresque romanesque, tellement les enjeux sociétaux sont hélas encore actuels.

Manon Montel a su conserver la moelle de cette saga réaliste.
Ici, c'est Mme Thénardier qui sera le fil conducteur de ces quatre-vingt dix minutes. C'est elle qui assurera les liaisons narratives entre les différentes scènes.

Claire Faurot l'interprète de façon très juste. Elle chante également en s'accompagnant de son accordéon. (Avec une très belle version de « Dans ma rue » d'Edith Piaf, qui colle tout à fait au contexte.

La metteure en scène a resserré la pièce sur les personnages de Jean Valjean, bien entendu, mais aussi de Fantine, qu'elle interprète de façon tout à fait convaincante (elle jouera également Gavroche), et sur l'histoire d'amour entre Cosette et Marius.

Pourquoi pas. Le choix est judicieux, l'essentiel étant, je le répète, que l'esprit hugolien soit présent.
Pour tout décor, des bancs et des ballots ficelés qui serviront tour à tour de chaises, de tables et de lits. Pas besoin d'autre chose : le texte, la mise en scène et les comédiens suffiront.

Pour interpréter le bagnard devenu maire (combien sommes-nous, au passage, à souhaiter qu'à notre époque, on puisse connaître parfois des destins inverses...), elle a choisi un comédien que j'avais quitté l'après-midi dans le rôle de Sganarelle-médecin malgré lui, au théâtre Michel.

A ma grande surprise, j'ai retrouvé le soir-même au Lucernaire Stéphane Dauch.
De sa voix de baryton-basse, avec une incroyable présence, il incarne le forçat au grand cœur.
Et de quelle façon !
Il est réellement bouleversant, sans pathos inutile ni afféterie, vraiment touchant, sans trop en faire.
On est complètement pris par son jeu. Il réussit à rendre complètement crédibles la rédemption et la grande bonté de son personnage.

Il faut mentionner également la belle performance de Jean-Christophe Frèche dans le rôle de l'inspecteur Javert.
Lui aussi est parfait en policier inflexible, glacial, bras armé d'une caste sociale.

Je ne voudrais pas non plus passer sous silence les jeunes Léo Paget et Cécile Génovèse en Marius et Cosette eux-aussi totalement convaincants.
Dov Cohen, Anatole de Bodinat, Antoine Guiraud et François Pérache sont aussi de l'aventure, eux aussi nous embarquant dans ce souffle épique.

C'est un très beau moment de théâtre que nous proposent Melle Montel et ses comédiens.

Tous parviennent remarquablement à nous plonger dans l'univers du père Hugo, dans cette gigantesque et vertigineuse fresque mêlant la description d'une impitoyable et implacable société et le destin d'hommes et de femmes qui en subissent les affres.
Une vraie réussite.
31 mars 2017
8/10
40
La pauvreté et la misère ne font pas bon ménage avec la bonté ou l’empathie, l’exemple en est les Thénardier, le couple le plus abject de la littérature.
Les Thénardier n’hésitent pas à prendre « en nourrice » la petite Cosette et à saigner sa mère Fantine. Ils sont parents, aiment leurs enfants, mais pas les autres !

Pendant ce temps Jean Valjean est devenu le maire de Montreuil-sur-Seine sous le nom de M. Madeleine. Il a une usine, il est devenu humain et juste, Fantine trouvera un emploi, mais hélas, elle sera vite dénoncée comme étant sans moralité ! Sa petite Cosette a bien un père mais qui est-il et où se trouve-t-il ? Elle est chassée et pour gagner de l’argent se vend. Javert la conduit en prison, Valjean intervient pour la libérer s’attirant les foudres de son ennemi mortel... Valjean pour ne pas faillir à son serment, reprendra Cosette aux Thénardier trop contents de se débarrasser d’elle contre espèces sonnantes et trébuchantes.

Quelques années plus tard, Gavroche, fils des Thénardier, a grandit dans la rue, a rejoint un groupe révolutionnaire. Marius jeune gandin rêve de Napoléon et de République, il s’oppose violemment à son grand-père, digne mais aveuglément attaché à l’ancien régime. Cosette jeune fille, attachée à Valjean va s’amouracher de Marius. Le bonheur de Marius et Cosette triomphera, mais il y aura aussi des laissés pour compte : Gavroche, Valjean, Javert, la Thénardier...
Tous les personnages sont bien en place, l’histoire rejoint la grande Histoire.
La mise en scène de Manon Montel est vivante, l’épopée hugolienne est parfaitement interprété, on sourit, on pleure, on est ému. Le décor est simple, l’ère industrielle est parfaitement représentée par la projection vidéo.
Une belle réussite.