Critiques pour l'événement Cendrillon, par Joël Pommerat
30 juin 2022
9/10
128
Superbe adaptation de Cendrillon, avec un vrai message sur le deuil et la mémoire des proches, bravo !

En bref, Joel Pommerat adapte le conte Cendrillon à la modernité actuelle : une belle-mère qui martyrise sa belle-fille Sandra (ou Cendrier), les deux belles-soeurs qui la martyrisent également, sous le nez du père de Sandra impuissant. Jusqu'au jour ou une bonne fée, apparait et soutient Sandra, ce qui permet à Sandra de rencontrer un prince, avec qui elle devient amie.

Ce qui m'a beaucoup plu :
- le message de la pièce : toute la pièce porte sur le deuil de Sandra de sa mère. Sandra a cru, que pour honorer sa mère, elle devait penser à elle sans cesse, afin que la mémoire de sa mère subsiste. Sandra s'empêchait de vivre, d'avoir droit au bonheur. D'ailleurs son père lui a offert un montre, qui sonne dès qu'elle ne pense plus à sa mère pendant 5 min d'affilée. La bonne fée lui apprend qu'en fait, une bonne manière de faire le deuil c'est de penser à sa mère avec le sourire, c'est à dire uniquement dans les moments heureux de sa vie. Et de reprendre la vie.
- la pièce porte aussi beaucoup sur l'importance des mots : Sandra avait mal compris les dernières volontés de sa mère, ce qui est fréquent dans la vie, on se trompe de sens, de mot, on n'entend pas. Pommerat désacralise la parole dans son conte.
- le théâtre électronique : les effets spéciaux, micros, la musique. L'expérience sensorielle est multiple : visuelle et sonore. La technologie modernise la pièce
- le personnage de la bonne fée : j'ai trouvé son personnage très drole, son texte est bien écrit, elle joue très bien, j'ai trouvé ce personnage très tendre. Avec de l'humour, notamment le fait qu'elle apprend les tours de magie des humains sans pouvoirs magiques, car "c'est plus drole vu qu'on peut les louper". On veut tous une bonne fée.
- la fin de la pièce : Sandra et le prince deviennent amis, et s'écriront toute leur vie

Ce qui m'a moins plu :
- j'ai trouvé le début du conte anxiogène. J'étais très angoissée par l'oppression des décors (noirs avec des flashs, très violents, orages etc), des personnages (belle-mère / belle-fille), et je trouvais le début difficilement supportable moralement (sur le thème de la violence infantile). Pour moi, la pièce a décolé avec l'arrivée de la bonne fée.
- je n'ai pas compris certains effets de style : la narratrice a un accent étranger lointain, il y a un personnage qui fait des mimes lorsque la narratrice parle, la narratrice parle de "la belle-mère de la plus jeune fille" ou "l'ex belle-mère de la plus jeune fille" ce qui alourdit un peu le texte
- je ne comprends pas la métaphore des pigeons qui s'écrasent contre la maison de la belle-mère, je n'ai pas compris ce détail de la pièce

Un très beau texte, je recommande
15 juin 2022
9,5/10
124
Dis Joël .....racontes nous une histoire !!

Une qu'on connaitrait déjà, mais que tu aurais un peu transformée quand même, avec ton immense talent.

Où ce serait triste et drôle à la fois.

Où y aurait une fée pas très douée mais trop rigolote.
Et une méchante dame qui crierait sur tout le monde, peut être parce qu'elle est malheureuse ?

Et où le Prince, ben y se sentirait pas Prince du tout.

Avec plein de lumières, plein de décors trop beaux, et même de la musique.

Et nous on seraient captivés, émus, entraînés, conquis, envoutés, enchantés, fascinés, séduits.

Oh Joël, c'était trop trop bien !
On n'a pas sommeil ....
On peut en avoir une autre ?
1 avr. 2022
8,5/10
103
C’est touchant, brillant et drôle c’est un véritable enchantement. Pommerat se réapproprie ce conte populaire en gardant les thèmes principaux mais en y introduisant une réelle modernité. C’est une pièce sur le dit et le non-dit, sur l’utilité des mots et le danger du malentendu.

La scénographie est splendide, le jeu des acteurs efficace et parfait et la mise en scène inventive et belle. Ce spectacle nous emporte et nous émeut… A voir !!
6 août 2017
9/10
146
Adaptation libre et très originale du conte de mon enfance.

Emotion et humour sont au rendez-vous. La mise en scène est très épurée. Les comédiens sont excellents notamment Cendrillon, la marâtre et la fée.

Le théâtre de la porte Saint Martin est superbe! J'ai passé une excellente soirée.
6 août 2017
9/10
70
Cendrillon III

Cendrillon, le conte de fée de mon enfance ? Je répondrais oui.

Sur la forme, il y a Cendrillon, la belle-mère, les 2 demi-sœurs, le roi, le prince, le bal, la fée, les oiseaux, l’horloge rabat-joie, le soulier. Personne ne manque au générique. Mais chacun n’a plus tout à fait les qualités attendues. Cendrillon est masochiste, la belle-mère mélange de fatma et cougar, les 2 demi-sœurs addictes du smartphone, le prince pas charmant pour un sou, le bal chanté mais pas enchanté, la fée désabusée qui rate ses tours de magie, les oiseaux morts.

Mais pas de mariage ! Car sur le fond, Joel Pommerat ne souhaite pas nous interpeller sur la moral du conte mais sur son contenu c’est-à-dire ici la vie, la mort et le deuil qui entoure Cendrillon, le tout avec l’humour du conte. Un conte oui, mais pour adulte.

Mise en scène simple et percutante. Comédiens épatants.

Il était une fois au théâtre de la Porte Saint Martin, une pièce, belle, touchante, drôle…
3 août 2017
8/10
72
Une belle revisite de Cendrillon.

La mise en scène est troublante.
On rit beaucoup, on est ému, on est loin du conte de notre enfance mais on découvre un autre aspect beaucoup plus noir mais très bien réalisé.

Un bon moment.
29 juil. 2017
8,5/10
54
Très belle adaptation de Cendrillon, très libre.

C'est audacieux de la part d'un théâtre privé d'accueillir un tel spectacle et de bloquer une partie des sièges pour être sur que le public ait une bonne visibilité.

Après comme tout Pommerat, ça deviendra un futur classique.
1 juil. 2017
8/10
63
Je suis complètement rentrée dans ce spectacle. La mise en scène est géniale avec l'idée de la maison en verre où les oiseaux s'écrasent au début, la montre de Sandra qui sonne toutes les heures pour lui rappeler de penser à sa maman et la fin du spectacle qui donne enfin la clé sur le message adressé à Cendrillon par sa mère avant de mourir au début.

C'est très émouvant, les rapports entre les parents et les enfants y sont bien traduits, en particulier celui entre Cendrillon et son père ou bien encore ceux entre Cendrillon et sa marâtre. Celle-ci d'ailleurs a des intonations et une allure qui nous font immédiatement songer à Marine Le Pen, que l'on peut facilement imaginer comme une marâtre. Ce qui accentue d'ailleurs d'une certaine façon l'effet comique du personnage.

Superbe pièce. Je recommande.
Le rapport à la mort des enfants est également très bien suggéré. Et la façon dont Cendrillon ouvre les yeux du prince sur la situation de sa mère, morte elle aussi, comme celle de Cendrillon, a un effet miroir sur les deux enfants dont les liens se trouvent de fait, immédiatement renforcés. Cela m'a beaucoup ému.
Enfin, l'actrice qui interprète le rôle de Sandra/Cendrillon est magistrale. On croit tout au long de la pièce avoir à faire à une enfant alors que c'est bien une adulte qui joue son rôle. Même remarque pour la fée qui est elle-aussi totalement déjantée.
8 juin 2017
9,5/10
76
Impressionnant spectacle ! Splendide par sa facture et ses tournures, sensationnel par ses éclats et ses décalages, ce conte sans morale revêt une beauté magique, troublant du début à la fin et même après. Drôle de ses piquants doux et émouvant de ses sensations multiples touchant la personne et l'intime.

Nous savions que Joël Pommerat avait réécrit ce conte populaire avec une plume de féetaud mais voir ainsi le grandiose inimaginable qu’il en a fait, avec la réalisation toute en finesse qu’il a signée aussi, se révèle une expérience théâtrale rare et éblouissante.

Tout le temps de la représentation, nous vivons dans un ailleurs particulier où seules les belles histoires savent nous transporter. Nous en prenons plein les yeux, plein le cœur et plein l’enfance. Les mots, les images, les sons et les faits suggérés par ces séquences qui hachent le spectacle sans le détruire, comme autant de flashs oniriques ou de rêves courts, font mouche à chaque fois dans notre imaginaire et dans nos souvenirs. Il n’était pas une fois mais mille fois.

Combien de mots, d’images ou de sons viennent titiller notre imagination et notre inconscient comme des caresses enveloppantes et des flèches subliminales ? Nous ne pouvons pas le savoir mais le compte est bon et la fascination est grande.

L’inventivité et le point de vue de Joël Pommerat renversent les habitus et les stéréotypes véhiculés d'ordinaire par les contes de fées dont la transmission orale permet toutes les transpositions ou les actualisations des conteurs.

À la mort de sa mère morte, l’enfant Sandra entame un deuil iconoclaste et surprenant grâce auquel elle traverse les étapes progressives de son grandissement, de sa conquête de la vie malgré la mort. Sandra chemine entre les arbres qui ne cachent pas la forêt. Pommerat nous montre en effet que ce qui est dit ou compris peut ne pas être véritablement. Il y a dans le pouvoir des mots, de leurs erreurs et de leurs non-dits comme un jeu dans la mécanique du possible, un glissement de terrain dans les certitudes acquises, ancrées en nous par la tradition et la transmission.

Sandra avance farouchement dans sa vie comme nous dans son histoire. Sans savoir ce que nous allons découvrir entre vérité et vraisemblance, erreur et mensonge, caprice et désir, besoin et nécessité ou envie et fantasme. Le travail de deuil parait articulé chez Sandra-Cendrier-Cendrillon avec le travail des mots sur les maux, lui permettant de trouver son identité avec son émancipation.

Les symboles du conte traditionnel de Cendrillon, bousculés avec une nouveauté déconcertante et une caustique complicité, sont souvent retournés ou détournés. La fratrie non fraternelle mais soumise. La mort prématurée de la mère comme la marâtre hystérique mais fragile, avec ce père ni puissant ni protecteur, ne favorisent pas l’« oedipe » conventionnel. Un père pleutre qu’il faut prendre en charge. La sexualité qui s’acquiert avec la féminité, sans lien avec la symbolique de la pantoufle car ici, c’est Sandra qui demande au prince sa chaussure noire vernie !

La mise en scène de Pommerat, audacieuse et brillante, colore chaque instant de magie et de merveilleux. Le travail d’orfèvre effectué joue de la scénographie, des lumières, des musiques et des vidéos sans lourdeur, tout en légèreté. Il fait de ce temps-là un temps suspendu et unique.

La direction d’acteurs permet un joli et remarquable travail des comédiens. Chacune et chacun incarnent leurs personnages avec ardeur et simplicité, leur donnant une truculence plaisante et efficace. Du très beau travail.

Un incontournable spectacle pour un inoubliable bonheur de théâtre.
7 juin 2017
9/10
116
Mon premier Pommerat. C’est toujours un moment spécial lorsqu’on découvre un auteur ou un metteur en scène dont on a entendu parler depuis longtemps. Je ne suis pas particulièrement adepte des spectacles pour enfant mais les critiques de ses adaptations de conte étaient telles que je me suis finalement décidée à prendre des places. Pour tout dire, j’étais quand même curieuse et impatiente face à cet artiste qui a su se faire une place totalement méritée dans le théâtre contemporain.

Cendrillon – j’allais dire : ce n’est pas mon Disney préféré. Je ne crois pas garder un quelconque souvenir du conte de Perrault – alors que par exemple Le Petit Chaperon Rouge ou Barbe Bleue resteront longtemps dans ma mémoire. Ici, l’adaptation reprend bien sûr la trame principale, celle d’une jeune fille qui perd sa mère durant son enfance et dont le père se remarie à une horrible femme qui a déjà deux filles, et qui, toutes ensembles, contribueront au malheur de Cendrillon. Heureusement, la chance finira par tourner puisque la maisonnée se retrouvera invitée à une fête organisée au château, lors duquel Cendrillon se fera repérer…

Mais ici, on est bien loin du cliché que Disney nous sert habituellement. Comme je l’attendais, Pommerat va plus loin, mettant plus en valeur l’orphelinité de Cendrillon et son combat à travers sa vie que la gloire simple (et finalement totalement injustifiée) du bien sur le mal. L’écriture de Pommerat est tout à fait particulière : parfois très cruelle, elle prend aux tripes et aborde frontalement les différents thèmes du conte. Sa mise en scène enrobe ses écrits de manière tout aussi étonnante : à travers des décors projetés sur les murs à grand renfort d’illusions d’optiques, et d’une musique jazzy, dans une ambiance toujours très sombre, Pommerat nous entraîne dans le flou artistique brumeux mais jamais confus de notre conscience de la vie, du rêve et de la réalité, où les contours ne sont jamais parfaitement définis. La touche Pommerat, c’est cette espèce d’âme hybride, indéfinissable, cette touche de poésie mêlée de réalisme qui fait de ce spectacle un ovni théâtral d’une perfection absolue.

Ici, pas de mièvrerie : Pommerat reprend le conte de manière plus rationnelle. Non, les jeunes filles ne pensent pas uniquement au prince charmant. En réalité, à l’âge où Cendrillon perd sa mère, on peut très bien supposer que c’est un événement traumatisant qui lui occupera l’esprit bien plus que la recherche de l’homme idéal, accentué par le fait qu’elle pense que sa mère lui a demandé de penser à elle le plus régulièrement possible pour l’éviter de « mourir vraiment ». Mourir vraiment. C’est empli de la naïveté et de l’imaginaire d’un enfant que de penser qu’on peut mourir « pas vraiment ». Et pourtant, c’est tellement vrai. Seules les grandes personnes penseront de manière rationnelle que les morts sont partis puisque leur cœur ne bat plus. L’idée qu’un proche puisse être encore là par la simple pensée est non seulement poétique, mais magique et pourtant concrète, puisqu’on fait réellement vivre nos morts en nous rappelant ce qu’ils ont été. C’est probablement tous ces moments un peu philosophique, oniriques et pourtant profonds qui font de ce spectacle un étonnement continu, et qui permettent au conte de nous donner à réfléchir profondément sur des questions toujours présentes mais jamais autant mises en valeur dans les histoires pour enfants.

Pour ce spectacle, les comédiens sont tout aussi inattendus – j’entends par-là que ce ne sont pas forcément des physiques que l’on voit couramment sur scène. Certains personnages sont joués par le même comédien – et je suis tellement entrée dans cet imaginaire que je n’y ai vu que du feu. A titre d’exemple, c’est Noémie Carcaud qui interprète l’une des fille de la marâtre et la fée, et ce n’est que lors des saluts que j’ai arrêté de chercher « l’autre comédienne ». La transformation est totale, et sa fille pimbêche se transforme en fée beaucoup trop cool qui se refuse à utiliser les moyens actuels à sa disposition mais préfère vivre dans un passé, certes plus poétique, mais également moins pratique. J’ai adoré ce personnage et notamment le duo qu’il forme avec Cendrillon, cette jeune fille aux accents belges lui donnant un côté un peu bourru et tellement attachant, rompant totalement avec un présent qu’elle fuit à tout prix. Mais il y a également la mère, dont les cris incessants soulignent un malheur évident dans ce corps qu’elle refuse de voir vieillir – Catherine Mestoussis transmet cette crise de la cinquantaine avec force énervements, si bien qu’on se retrouve à se demander qui d’elle ou de Cendrillon est la plus mûre. Il y a également un beau moment d’émotion qu’on doit à Caroline Donnelly, qui porte alors sa casquette de Prince, et qui entonne une chanson pour son père, le roi. La chanson est en anglais – la belle idée de l’avoir sous-titrée ! – l’air est envoûtant, les paroles, touchantes.
9,5/10
63
Oubliez le conte de fée, surtout si vous n'avez en tête que la version de Disney. Le conte entré dans notre culture par la transcription de Perrault nous parle d'une très jeune orpheline perdue dans le monde des adultes, portant le fardeau de la mort de sa mère, subissant les mauvais traitements de sa belle-famille suite au nouveau mariage de son père, et trouvant le salut dans l'amour. Disney en donne une version qui fait rêver les petites filles qui attendent leur Prince Charmant. Joël POMMERAT s'empare de cette histoire pour la ré-écrire et en retenir la confrontation d'une enfant au deuil et à la difficulté de se construire et de grandir. Son héroïne est écarquillée entre le poids du souvenir et de la douleur teintée de culpabilité de la perte de l'être aimé et la nature joyeuse de l'enfance qui n'aspire qu'à jouer et vivre son insouciance. Mais comment laisser libre court à une imagination débordante lorsque l'on grandit brimée, dans un environnement dominé par la mal-traitance et la méchanceté.

Sandra est une jeune enfant lorsque sa mère malade tente de lui livre ses dernière paroles dans un souffle, sur son lit de mort. La jeune fille croit entendre une promesse qu'elle devra tenir : pour que sa mère ne meurt pas "pour de bon" elle devra penser à elle à chaque instant, De cette phrase mal prononcée et mal entendue la fillette fera l'obsession de sa vie, se laissant dépasser par une mission trop lourde pour ses frêles épaules d'enfant. Alors, lorsque sa belle-mère et ses filles frivoles en font leur souffre douleur, avec un père trop faible pour s'opposer à sa nouvelle épouse et protéger sa propre fille, Sandra accepte avec résignation et sans broncher toutes les consignes, toutes les marques de dénigrement, comme autant de séances d'auto-flagellation en punition des moments où elle n'aurait pas tenu sa promesse, comme si elle devait porter la responsabilité de la mort de cette mère aimée.

La première partie installe le "mal-entendu" et ses conséquences. Dans une maison de verre contre laquelle les oiseaux se jettent aveuglément, Le seul lieu fermé à la lumière du jour semble être cette cave où est installé le lit de la fillette. Dans un décor minimaliste dans lequel les espaces prennent naissance grâce au magnifique travail de scénographie et de mise en lumière de Eric SOYER (assisté de Gwendal MALLARD), les personnages s'installent. Tout ne semble que malentendus et communication brouillée.

Et puis Sandra fait connaissance de la fée. Commence alors la deuxième partie qui s'annonce plus lumineuse avec la perspective du bal. La petite fille va alors rencontrer un Prince tout aussi perdu qu'elle dans ce monde d'adulte. Elle vit au rythme de sa montre qui lui rappelle qu'elle ne doit pas oublier sa mère (ah vous dirai-je maman....), lui ne vit que dans l'attente du rendez-vous téléphonique avec sa mère qu'il croit partie en voyage. Autre illustration de la difficulté de dire : son père n'a pas eut le courage de lui avouer qu'elle est morte depuis 10 ans.

Dans ce spectacle qui déstructure les codes du conte de fée il est avant tout question des mots, on l'aura compris, de la parole et de la force de son expression (ou de son absence d'expression). Joël POMMERAT nous donne une écriture plus profonde du récit. Et loin de tomber dans le larmoyant il y a dans cette mise en scène assez sombre au départ beaucoup de poésie et énormément d'humour. L'attitude de la belle-mère lors du bal, le ridicule de sa perception de sa rencontre avec le Prince, le détournement de la chaussure de verre, l'essayage de la robe de Cendrillon, autant de touches d'humour qui allègent le propos.

Deborah ROUACH est une Cendrillon espiègle, facétieuse, parfois résignée mais toujours rebelle, vive, pleine de malice enfantine. Face à elle Catherine MESTOUSSIS est une irrésistible mégère, sûre d'une beauté depuis longtemps fanées, une femme tyrannique pour tout son entourage, suffisante de bêtise. L'ensemble de la troupe est remarquable et nous offre un spectacle d'une grande intensité. Les scènes se succèdent avec fluidité et la mise en scène ne souffre d'aucun temps mort. On rit, on est ému, on espère, on respire. Un grand et très beau moment de théâtre.


En bref : Pommerat revisite l'histoire de Cendrillon pour créer une histoire toute en poésie et profondeur et un univers parfois sombre, souvent lumineux et toujours enchanteur. Un succès largement mérité qui ne se dément pas depuis sa création en 2011 à Bruxelles, porté par des comédiens brillants. Un "must see" indiscutablement.
22 juin 2016
8/10
72
"Cendrillon pour ses 20 ans est la plus jolie des enfants..." et la plus torturée aussi dans cette version du conte.

Cette version moderne, revisitée avec bonheur, à plusieurs niveaux de lecture, qui émerveillera petits et grands car chacun y trouvera son plaisir.

Il y a l'histoire d'abord qui surprend, tout part d'un malentendu inattendu dès le début et finit par nous sortir de l'histoire classique entendue ou vue tant de fois... ça rafraichit, on ne se laissera plus enfermer dans une histoire que l'on connait par cœur.

Ensuite la mise en scène, simple avec un seul objet de décor mais astucieuse et des mises en lumière adaptées aux différentes scènes.

Enfin les comédiens, tous impeccables dans leurs rôles. Mention spéciale pour Cendrillon et la marâtre qui chacune dans leur genre sont superbes !

Voilà, j'ai beaucoup aimé, c'est simple, non?