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Phane
Phane
Critique compétente
20 ans
4 espions
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Chroniqueuse AuBalcon, je vais voir beaucoup de pièces du théâtre public pour la rédaction !
Son blog : http://www.aubalcon.fr
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Son balcon

SAISON 2021-2022
Aucun challenge culturel pour le moment
Mini Molières
25 134reçus
Note moyenne
6,6/10
La meilleure Comme vider la mer avec une cuiller
9/10
La pire You are my Destiny
2/10
Critique compétente
Son classement : 72 / 5655
Avant elle
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Al Zaz
39 critiques
Après elle
Audrey H
Audrey H
36 critiques
Niveau
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38
critiques
3 avant le prochain niveau
filatures
4
4
Espions
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Actualités de ses filatures

SCUM Rodéo

SCUM Rodéo
Yves Poey
Mini-Molière du Critique
120 ans , 62 espions
espionner
Yves Poey
20 mai 2022
9/10
0
Et… Coupez !

Du manifesto au rodéo.
De Manhattan à la Reine Blanche.
De la rue à l’arène.

1967.

Valérie Solanas publie à compte d’auteur un véritable brûlot féministe intitulé SCUM Manifesto, qu'elle vend dans la rue.

Manifesto, on voit peu près, mais SCUM ?

SCUM : le rebut, la lie, la crasse.
SCUM : "Society fur Cutting Up Men", une société pour châtrer les mâles.



En quelques mots comme en cent, Valérie Solanas est finalement assez simple : « Renverser le gouvernement, éliminer le système monétaire, mettre en place l’automatisation et détruire le sexe masculin. »
Rien que ça.

Dans ce petit opuscule qui est à la radicalité féministe ce que la kalachnikov AK-47 est au lance-pierre, celle qui sera condamnée à trois ans de prison pour avoir truffé un certain Andy Warhol de trois balles, celle-là échafaude toute une théorie.

Dans une démonstration certes on ne peut plus extrémiste, qui certes parfois relève du plus ignoble fascisme, Miss Solanas analyse finalement assez lucidement la domination exercée par la gent masculine sur les femmes, domination relevant du plus ancestral patriarcat.

Pour elle, tous les moyens les plus extrêmes seront bons pour éradiquer purement et simplement tous les mâles de la planète.


Dans un premier temps relevant du registre scientifique, voire universitaire, le texte va se politiser à outrance pour théoriser ce féminisme absolutiste, et va même s’orienter vers un côté science-fiction, au futur assez simple, un côté qui va engendrer une certaine forme d’humour.

C’est ce pamphlet étonnant et détonant que la metteure en scène Mirabelle Rousseau et la comédienne Sarah Chaumette ont eu la bonne idée de porter sur un plateau de théâtre.

Bonne idée, excellente idée même, car elles sont parfaitement parvenues à mettre en avant la fulgurance, la radicalité sans concession, la vision absolutiste et jusqu’au boutiste de Valérie Solanas.
Portées par la très actuelle traduction du livre par Blandine Pélissier, qui appelle une chatte une chatte, les deux complices vont nous asséner une véritable claque.
Au public, en général, mais surtout aux spectateurs masculins dont votre serviteur en particulier.



Nous allons assister à une conférence.
Le pupitre surmonté d’un micro nous donne déjà un indice sur la forme que va prendre le spectacle, et quand la conférencière pénètre par le fond de la salle, plus aucun doute ne plane : allure sévère, chignon retenu par un crayon, petites lunettes sur le bout du nez, Sarah Chaumette commence à dire le texte.

Elle annonce immédiatement la couleur : tel un spécialiste médico-légal qui relève d’un coup d’un seul le linceul d’un cadavre pour sa reconnaissance par les proches, dans le but d’infliger le moins de douleur possible, la comédienne nous définit le SCUM.

Je vous assure qu’à ce moment précis du spectacle, lorsque vous croisez son regard, vous n’en menez pas large !

Elle parvient à nous édifier. Dans les deux sens du terme.


Edifier, c’est à dire nous expliquer clairement ce qui a amené Miss Solanas à écrire son texte. La comédienne est très convaincante, et nous ne pouvons qu’acquiescer.

Oui, la domination masculine et le patriarcat sont bien réels.
En ce sens, c’est un spectacle indispensable, en ces temps troubles où ici et là, clairement ou insidieusement, les droits fondamentaux des femmes sont de plus en plus menacés.

Edifier, c’est faire peur.

Parce que pour l’auteure, la fin justifie les moyens. Tous les moyens.


Elle ne ménage pas sa peine, Sarah Chaumette, à arpenter le plateau, à porter haut et fort le texte.

Et puis, elle va chercher en coulisse une espèce de parallélépipède métallique bleu, qui va se révéler être une machine qu’elle va brancher.

De conférencière, grâce à cette machine, elle va devenir militante, respectant la structure littéraire du bouquin.

De pupitre, le meuble en bois devient un piédestal phallique, sur lequel elle s’élèvera de plus en plus.

Et la machine, me direz-vous ?
Cette machine va nous procurer une étonnante surprise, dont bien entendu je ne vous révèlerai pas la teneur.
A vous de venir découvrir ce phénomène à la Reine blanche.

Sarah Chaumette nous livre de façon hallucinée et drôle les vitupérations de Valérie Solanas.
Nous sommes sidérés par tant de radicalité, après avoir opiné du chef durant le constat.
La comédienne est alors magnifique d’outrance, incarnant cette redoutable pythie, cette prophétesse extrémiste, cette théoricienne de l’éradication masculine.

On comprend alors pourquoi le manifesto est devenu un rodéo : la comédienne parvient à dompter cet animal sauvage complètement affolé qu’est le texte.

Ce spectacle agit donc comme un électro-choc salutaire : grâce aux judicieux partis pris dramaturgiques, et en passant bien entendu outre la solution révolutionnaire évoquée, on ne peut qu’être totalement en phase avec la démonstration de l’auteure et comprendre la nécessité de la porter haut et fort de nos jours.


Un spectacle électrisant des plus réussis !
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La périchole

La périchole
Yves Poey
Mini-Molière du Critique
120 ans , 62 espions
espionner
Yves Poey
18 mai 2022
10/10
0
Cette Périchole féérique, grandiose et magnifique, c’est vraiment le Pérou !

De la même façon qu’elle co-signe en ce moment un Bourgeois gentilhomme qui restera dans l’histoire de la Comédie française, seule cette fois-ci aux manettes, Valérie Lesort nous propose sa vision enchanteresse de l’un des chefs d’œuvre d’Offenbach, une vision qui restera sans nul doute dans les annales de l’Opéra-comique.

Ou comment laisser une marque indélébile dans la longue liste des mises en scène de cet opéra bouffe créé le 6 octobre 1868 au Théâtre des Variétés.

Jacques et le temple du soleil, ou Offenbach chez les Picaros.
Je dirai même plus : Jacques et le temple du soleil, ou Offenbach chez les Picaros !

C’est en effet du côté de Messieurs Hergé et Tintin que Mademoiselle Lesort semble bien avoir cherché et trouvé les références culturelles de son travail salle Favart.
D’ailleurs, un petit détail savoureux ne nous échappera pas : deux personnages tout droits sortis de Moulinsart feront leur apparition sur le plateau.

Cette mise en scène, ce sera une magnifique bande dessinée colorée, animée, une succession de tableaux époustouflants, tous plus réussis les uns que les autres, générant un humour ravageur et une douce folie maîtrisée de bout en bout, et faisant appel à notre capacité à nous rappeler notre enfance.



Le monde de l’enfance.
Une nouvelle fois, c’est à ce monde-là que fait appel Valérie Lesort.

Un monde où l’on en finit pas de dire « On dirait qu’on ferait ci, on aurait qu’à dire qu’on serait ça... »

En témoigne encore et toujours le style « lesortien », qui fait appel à une foultitude de délicieux petits procédés dramaturgiques qui nous renvoient à nos plus jeunes années.

Des pains au raisin qui évoquent les macarons capillaires de la princesse Leïa, des chevaux qui forcément laissent du crottin, des chiens qui évidemment conduisent des petites autos à pédales, un prisonnier amoureux qui dessine comme de bien entendu deux initiales dans un grand cœur, et tant d’autres...

Et puis les marionnettes, sans qui un spectacle de Valérie Lesort ne serait pas un spectacle de Valérie Lesort.

Les marionnettes épatantes de Carole Allemand, qui nous touchent profondément, parce qu’elles nous font remonter à l’époque plus ou moins lointaine de nos propres doudous et autres nin-nins…

Les magnifiques et toujours aussi inventifs costumes de Vanessa Sannino, la scénographie de Audrey Vuong, à base de deux grandes structures verticales qui pivotent sur elles-même (avec également un cachot très réussi), les tableaux dansés chorégraphiés par Yohann Têté (avec un french cancan à la fois endiablé et décalé), tout ceci concourt également à notre émerveillement de tous les instants.



Et la distribution !
Une distribution trois étoiles et bien plus, qui va elle aussi provoquer l’enthousiasme des spectateurs.

Valérie Lesort a énormément demandé aux chanteurs, avec une direction d’acteurs à la fois très précise et exigeante au possible.
Ces chanteurs, dont elle a su utiliser au mieux les talents lyriques, certes, mais également leur capacité à jouer la comédie, ces chanteurs vont être amenés à s’exprimer dans des positions étonnantes et parfois stupéfiantes, ce qui aura pour effet là encore de nous faire beaucoup rire.
Le clin d’œil chorégraphique de Piquillo à Michaël Jackson est formidable ! Ou comment chanter penché à 45° )

Stéphanie d’Oustrac est une grande, très grande Périchole, dont on se souviendra longtemps.
La mezzo-soprano nous emmène loin, très loin, avec à la fois une délicatesse et une puissance vocales qui conviennent tout à fait au personnage. Quel engagement, quelle fougue !
Elle nous captive en permanence, et nous attendons avec impatience les airs très connus du personnage.

Le ténor Philippe Talbot interprète de façon irréprochable Piquillo, formant avec Mademoiselle d’Oustrac un couple particulièrement cohérent, réaliste, aux passionnantes péripéties.

Ces deux-là vont nous faire beaucoup rire. Leurs scènes de comédie sont en effet drôlissimes.

Le talentueux baryton Tassis Christoyannis est un vice-roi facétieux, libidineux à souhait, finalement magnanime.
Ses airs, son allure épatante très Henri IV, son léger accent grec, tout ceci nous ravit !

Eric Huchet (qui m’a fait penser dans la première partie au sociétaire honoraire du Français Bruno Raffaëlli), ainsi Lionel Peintre incarnent pour notre plus grand plaisir les deux hauts dignitaires péruviens, nous faisant eux aussi beaucoup rire.

Quant à l’habituée de la maison, la toujours délicieuse mezzo Marie Lenormand, elle chante de la plus brillante façon qui soit le double-rôle de Berginella et Frasquinella.

Julie Goussot et Julia Wiscniewski, elle aussi irréprochables, sont les deux autres cousines !

Julien Leroy, à la baguette, contribue pleinement avec l’orchestre de chambre de Paris et le chœur Les éléments, à nous plonger dans le tourbillon de cette musique d’Offenbach.
Les musiciens et les choristes nous rappellent parfaitement qu’il ne faut pas se fier à l’impression première de légèreté de cette musique.

En les écoutant tous, on est certes emporté dans un premier temps par une grâce de tous les instants, mais on est aussi frappé par l’exigence que requiert la partition du grand Jacques.

Comment pourrait-il en être autrement, une longue et on ne peut plus sonore ovation conclura cette mémorable soirée durant un très long moment.
Les applaudissement en rythme témoignent du grand plaisir pris par les spectateurs, complètement captivés, émerveillés et conquis par ces presque trois heures de pure beauté.

Des spectateurs qui pourront dire en se souvenant pendant longtemps de cette Périchole d’anthologie : « Nous y étions ! »

Et l’on est prié de ne pas oublier : « Quand lama fâché, lui toujours faire ainsi ! »
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Les femmes à la maison

Les femmes à la maison
Yves Poey
Mini-Molière du Critique
120 ans , 62 espions
espionner
Yves Poey
17 mai 2022
9,5/10
0
Femmes des années 50, 70, 22…

La pièce de Pauline Sales a au moins un point commun avec l’ensemble des personnels enseignants français : on y compte trois femmes pour un homme.

Si à l’Education Nationale, on est habitué depuis longtemps à cet état de fait, sur un plateau de théâtre, c’est suffisamment assez rare pour être relevé.

Cet homme, c’est Joris.
Un homme à femmes ? Certes oui, mais pas au sens habituel de cette expression.


Les femmes de Joris, ce sont ces plasticiennes, peintres, dessinatrices, sculpteures, photographes, auteures, à qui il va prêter une maison, à partir des années 50, afin qu’elles puissent entrer en résidence et qu’elles puissent se réaliser en tant qu’artistes-femmes.

Cette fameuse maison, à l’instar de la Cerisaie tchekhovienne, sera un personnage à part entière.
Nous en verrons d’ailleurs bien des facettes.

Je vous laisse découvrir par vous-mêmes la très jolie et astucieuse scénographie de Damien Caille-Perret.

Une nouvelle fois, Pauline Sales va partir de l’intime pour déboucher très finement sur un propos politique et sociologique.
Ici, il sera question d’évoquer, à travers trois époques successives, l’évolution du féminisme en posant un regard sur des femmes artistes.

Il va donc s’agir de proposer au spectateur un miroir de la société des années 50, 70, et celle de nos jours.
Bien des thèmes seront abordés : le rapport à la gent masculine, au patriarcat, la capacité ou non à envisager l’indépendance, mais également les rapports entre les femmes elles-mêmes ou encore les implications des origines sociales sur cette question.

Les trois époques correspondront à trois phases très précises de l’évolution moderne de la condition féminine et artistique.
Années 50, le temps où dans le groupe nominal "les femmes de la maison", la préposition "de" était remplacée par "à".
Ce sera alors la volonté de se libérer du carcan et de la domination masculine, le besoin de trouver enfin une indépendance et une identité artistique.

Les années 70 verront arriver en droite ligne des USA le désir de liberté, d’émancipation.

De nos jours, il sera question du refus de l’instrumentalisation sous différents formes du concept d’artiste-femme.


On s’en doute, évoquer ce sujet comporte un risque : celui de tomber dans des clichés éculés et poussif.
Ici, il n’en est absolument rien.


Melle Sales, par la double entrée femme / artiste est parvenue très subtilement à dépasser le propos « purement » féministe et féminin.


Et puis, il y a un autre élément qui contourne ce piège : à côté de ces artistes, elle a eu l’excellente idée d’introduire d’autres personnages, à savoir les femmes de ménage qui vont côtoyer les invitées.

Ces employées de maison auront elles aussi leur mot à dire !

De plus, comment passer sous silence l’humour qui émaille les deux heures que dure la pièce ?
On connaît bien la belle écriture de Pauline Sales, une écriture à la fois intense et ciselée, avec des formules épatantes qui déclenchent des rires très sains.
(Le texte est publié aux Solitaires intempestifs.)

Joris, c’est Vincent Garanger, co-directeur avec Pauline Sales de la compagnie A l’envi.
C’est lui qui va interpréter ce philanthrope qui, en souvenir d’un amour perdu, entreprend pendant de nombreuses années d’offrir pour quelques semaines un havre de paix à ces filles-artistes.

Le comédien excelle dans le rôle pas si évident que cela de ce personnage en apparence jovial, patelin, bon enfant, édictant pourtant des règles assez strictes quant à l’occupation de son habitation.
Pas si évident que cela car ici, il s’agit d’exprimer une image masculine très éloignée du macho et du misogyne de base, sans tomber pour autant et là encore dans des clichés ou des stéréotypes.

M. Garanger jouera également un autre rôle, celui de la dernière employée de maison.

Une autre excellente idée de la dramaturge-metteure en scène.

Tous les autres personnages seront interprétés par trois comédiennes, Olivia Chatain, Anne Cressent et Hélène Viviès, qui interpréteront chacune plusieurs rôles.
Ces comédiennes connaissent bien la metteure en scène, pour avoir de nombreuses fois déjà travaillé avec elle.
Une belle énergie émane de ce trio-là, une vraie cohérence est immédiatement palpable.

Elles nous réservent de très beaux moments, comme ces scènes avec les coussins-vulves (là encore, je ne développe pas plus avant) ou ces passages consacrés à la libération des corps.

Une interrogation émane de la troisième partie de la pièce, l’époque contemporaine.
Ce personnage d’auteure, confrontée à deux plus jeunes consœurs plus radicales qu’elle, ce personnage-là ne serait-il pas le double de Pauline Sales ?
Allez donc savoir…


Cette entreprise artistique, où le fond se dispute à la forme en terme de réussite, fait d’ores et déjà partie des grands moments de théâtre de cette saison 21/22.


Au fait, vous reprendrez bien un doigt de kir ?
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Fred Hersch invite Avishai Cohen

Fred Hersch invite Avishai Cohen
Yves Poey
Mini-Molière du Critique
120 ans , 62 espions
espionner
Yves Poey
15 mai 2022
10/10
0
« Let me introduce the band : Avishai Cohen ! »

Ou quand l’un des plus grands pianistes actuels présente d’emblée avec un pointe d'humour l’un des plus talentueux trompettistes.

Deux Jazzmen de la plus grande importance, deux immenses musiciens, trop rares en France.

Quatrième et dernier concert de Fred Hersch au Bal Blomet, le plus passionnant, le plus intense à mon sens.

Et pourtant, je peux vous assurer que les trois précédents ont marqué les esprits parisiens !



Mais ce que ces deux-là vont nous donner est phénoménal de cohésion, d’entente musicale, de complémentarité au travers de deux singularités.

Dans un répertoire composé de grands standards et de compositions personnelles de Mister Hersch, les deux grands artistes vont nous plonger dans un véritable enchantement.



C’est bien simple, je me demande si je n’ai pas assisté hier au plus beau duo jazz de toute ma carrière de critique et de spectateur.

Les deux vont nous emmener aux confins du jazz, dans ses coins les plus sublimes, là où l’inspiration, la virtuosité, la délicatesse, la puissance et la grâce règnent en maîtresses absolues.



Immédiatement le ton est donné.

Bemsha Swing. Thelonius Monk

Nous comprenons tout de suite l’osmose musicale qui lie Messieurs Hersch et Cohen.
Ici, pas d’accompagnateur, pas d’accompagné.
Le discours musical, s’il est virtuose, s’il délivre beaucoup de notes (les aigus du trompettistes sont admirables), ce discours est pourtant empreint d’un lyrisme, d’une sensibilité de tous les instants.

Telle une suite de Bach, les deux se lancent dans de vertigineux contrepoints. L’architecture générale de ce premier morceau évoque immanquablement une fugue magnifique, avec ses chassés-croisés instrumentaux subtils et délicats.


Le style du pianiste est aisément reconnaissable, avec ces notes aériennes, éthérées, et ces improvisations à base d’accords sophistiqués base de huit ou neuf de notes plus bleues les unes que les autres, des accords plaqués qui se succèdent sur le tempo swingué.



Quant à Avishai Cohen (qui au passage a laissé sa grande barbe pour une moustache digne de nos gendarmes à cheval du XIXème siècle), lui se lance dans des volutes de notes, très claires et très puissantes dans les aigus, douces, veloutées dans les mediums et les graves.

Quelle technique, quelle sensibilité, quelle virtuosité, n’en finis-je pas de me répéter !

D’autres très grands moments nous attendent, tout au long de cette trop courte heure et vingt minutes qu’a duré le concert.

La version de Blues connotation, d’Ornette Coleman va faire frissonner les spectateurs, l’arrangement est merveilleux et permet aux deux de s’exprimer de la plus belle des manières qui soit.

Voici Mandevilla, une composition de Fred Hersch, dont l’introduction n’est pas sans rappeler la célébrissime Habanera, le premier aria de la Carmencita.

Les nuances délicates, la beauté du thème nous rappellent s’il en était encore besoin quel mélodiste et quel harmoniste est Fred Hersch.



Et puis nous allons être transportés par une hallucinante version du Hurricane de Sonny Rollins.

Je serais curieux de voir la partition résultant de la transcription de ce que ceux deux là jouent alors : il doit y avoir plus de noir que de blanc, tellement les triples, quadruples croches s’enchaînent à une vitesse grand V.
Et pourtant, encore et toujours, quelle grâce envoûtante, quelle subtilité, quelle délicatesse !



Il faudra bien une nouvelle ballade herschienne pour que nous puissions nous remettre de nos émotions.

Voici venir Groovin’ high, de Dizzie Gillespie, avec un épatant chase entre les deux instruments. Pianiste et trompettiste s’amusent beaucoup à faire dialoguer leurs instruments.



Deux pièces profondes et passionnantes de Thelionus Monk (encore et toujours Monk) nous rappellent l’importance musicale de celui qui reste l'un des plus grands improvisateurs ayant jamais existé.


Fred Hersch et Avishai Cohen recevront une véritable ovation lors des saluts.

Quoi de plus normal...

Tous avons compris que nous venions d’assister à un exceptionnel concert, faisant de nous de véritables privilégiés.

En guise d’« Encore », nous aurons droit une nouvelle fois à la merveilleuse composition Valentine, dont les mythiques éditions classiques américaines Peters ont tenu à intégrer dans leur catalogue.
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Breath by breath

Breath by breath
Yves Poey
Mini-Molière du Critique
120 ans , 62 espions
espionner
Yves Poey
13 mai 2022
9,5/10
0
A un, c’est très bien.

A deux, c’est bien mieux,

A sept, c’est plus chouette !


Pour ce deuxième concert exceptionnel au Bal Blomet, Fred Hersch a entrepris de nous présenter son nouvel album, enregistré avec un quatuor à cordes et une section rythmique contrebasse-batterie.
Vous avez recompté ?
Sept musiciens étaient donc sur la scène de cette salle parisienne, que le pianiste apprécie tout particulièrement.


Cet album, Breathe by Breathe a été enregistré durant la pandémie, en août 2021, à l’hôtel Astoria de New-York
Suite à « dix-huit mois d’impermanence collective », nous dit Mister Hersch, au cours desquels il a trouvé refuge dans la pratique de la méditation, un refuge propice à la composition de nouveaux morceaux.
Il sera question de souffle, de respiration...

Huit mouvements constituent la Sati suite, chacun inspiré de sa longue pratique de la méditation Vipassana, dont ils sont le reflet musical.

C’est le quatuor Desguin, qui va jouer aux côtés du grand musicien.
Wolfram Van Mechelen et Ludovic Bataille sont au violon, Rhea Vanhellemont est l’alto et le pupitre de violoncelle est tenue par Pieter-Jan de Smet.

Le contrebassiste Clemens Van der Freen et le batteur Jonas Burwinkel complètent la distribution.

Le quatuor ouvre le bal, pour la première pièce Awakened Heart .

Immédiatement, ils vont installer le climat de cette suite. Un climat où va régner une magnifique sérénité, avec parfois une inspiration issue de la musique française du début du XXième siècle, et notamment Maurice Ravel.

Un dialogue délicat, précis se met en place : ici, le discours musical sera très équilibré, entre les notes éthérées du pianiste, les belles nappes des cordes, et la rythmique.
Le swing ne tarde pas à débuter, notamment grâce à la pulsation générée par le batteur, totalement habité par son rôle.

Un sentiment de plénitude règne, dans ce début de concert. Un sentiment d’une totale communion entre les sept musiciens.
Fred Hersch dirige discrètement ses camarades d’un soir, qui ferment souvent les yeux lorsque le piano prend un solo, comme pour mieux ressentir les notes.


Nous sommes priés de ne pas applaudir entre les huit mouvements, mais il est très difficile de résister à la tentation.


Parfois, une couleur venue d’Amérique latine vient teinter délicieusement le concert, avec un rythme très chaloupé, des cordes parfois très légèrement (et volontairement) dissonantes.

Fred Hersch, outre son talent de pianiste, nous démontre également qu’il sait admirablement composer une partition pour un ensemble à cordes.
On connaît le mélodiste, on connaissait moins ses talents de compositeur pour une petite formation que l’on rencontre habituellement dans le monde de la musique dite « classique ».

Il faut dire que durant son enfance, il a été baigné par l'écoute de nombreux quatuors classiques.

On comprend ceci, en écoutant attentivement toutes les subtilités des beaux contrepoints au dessus de partie du piano, et des figures stylistiques en jeu.

Une magnifique pièce, Mara, sera entièrement interprétée par les cordes, dans une inspiration très musique romantique.

La pièce donnant son titre à l’album est interprétée au moyen de pizzicati, les instruments se passant le relai pour les jouer, dans un très bel effet de latéralisation.
Les spectateurs apprécient pleinement.


Après cette suite, les sept musiciens interpréteront notamment une adaptation de la Pastorale de Schumann et une version orchestrée du célèbre Valentine.

Les six instrumentistes seront très chaleureusement applaudis, laissant « le patron » seul derrière son clavier.

Fred Hersch poursuivra seul son clavier, pour quatre rappels, pas moins.
Le public pourra une nouvelle fois s’émerveiller du toucher, de la sensibilité, de la délicatesse uniques de cet immense artiste, avec notamment une merveilleuse version de Blue Monk.

Une nouvelle fois, celui qui figure parmi les plus grands pianistes de jazz actuels aura envoûté son auditoire.
Une nouvelle soirée sous le signe de la plus grande beauté musicale.

Le troisième et prochain concert sera quant lui consacré au Brésil d’un certain Antonio Carlos Jobim. Retour donc en Amérique du Sud.
A suivre...
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