Critiques pour l'événement La Maison de Bernarda Alba
Magnifique! Quelle mise en scène! Quelles actrices! Un texte magnifique et rude. Un décor sublime.
C'est dur, c'est triste, c'est beau. Un drame pur, fort. Porté par des actrices sublimes: Elsa Lepoivre, Cécile Brune, Florence Viala, Anne Kessler, Coraly Zahonero, Claire de la Rüe du Can (présence inouie), Jennifer Decker, Adeline d’Hermy (encore au top)! Et un Helliot Gennicot sombre et troublant. Très beau.
C'est dur, c'est triste, c'est beau. Un drame pur, fort. Porté par des actrices sublimes: Elsa Lepoivre, Cécile Brune, Florence Viala, Anne Kessler, Coraly Zahonero, Claire de la Rüe du Can (présence inouie), Jennifer Decker, Adeline d’Hermy (encore au top)! Et un Helliot Gennicot sombre et troublant. Très beau.
Le dramaturge Federico Garcia Lorca a écrit "La maison Bernarda Alba" deux mois avant son exécution par les franquistes. C'est dans cet esprit qu'il faut voir le destin tragique de ces femmes en Espagne dans les années 30. Direction la Comédie Française pour découvrir cette tragédie familiale.
Le mari de Bernarda Alba vient de décéder. Elle devient la maîtresse de maison avec ces terres, ces bêtes et ces cinq filles. Selon la tradition andalouse, elle doit tenir une période de deuil. Elle choisit de le porter de façon stricte et décide de se cloîtrer pendant huit ans avec ces cinq filles. Bien entendu, cela les soeurs, elles rêvent d'amour et de liberté.
Seule Angustias, issue d'un premier lit, la plus "moche" mais la plus fortunée, possède un prétendant, Pépé. Tout pourrait bien se passer si ce dernier, le soir ne répondait pas à l'amour de la dernière, Adelia. Lorsque ces moments vont être dénoncé à tous, la famille alors va basculer dans le chaos et le désespoir.
La sublime mise en scène de Lilo Baur nous fait sentir cette tension dans la famille aussi bien dans le déroulé de l'histoire que dans les décors. Les soeurs sont complémentaires et partagent l'espoir de partir en se mariant. Excepté Magdalena qui décide de son destin : elle ne se mariera jamais. Mais la pression dans l'enfermement et dans la culture des apparences, de la réputation est forte et étouffante. Au bout d'un moment, des murs vont s'effondrer. Les grands draps blancs ne vont pas servir uniquement à préparer un trousseau. On voit les soeurs s'exercer sur les grands tissus, couper, coudre, imaginer des vêtements...Elles portent toutes du noir ou presque.
Les décors d’Andrew D. Edwards sont vraiment magnifiques. Les immenses moucharabieh noirs, qui laissent passer la lumière tout en créant une frontière vers l'extérieur. Parfois, il laisse place à des murs de pierres qui changent de texture selon la lumière projetée. Les espaces sont remarquablement bien définis et utilisés. J'ai adoré deux scènes en particuliers. Il y a la scène où Adelia retrouve en cachette Pépé et s'enlacent sous la pluie. J'étais émerveillé par la beauté de ce moment bien trop court. Puis aussi la scène ou Adelia tout de verte vêtue danse sous des nuages de plumes. Des moments de douceur très appréciable dans ce huit-clos très dur, sans espoir et sans bonheur.
Un spectacle étonnant avec une esthétique vraiment travaillée et magnifique. L'espoir n'a pas sa place dans un monde de femme dirigée par les dictats masculins. La Comédie Française affirme son éclectisme pour emmener le spectacle au delà de ces espérances.
Le mari de Bernarda Alba vient de décéder. Elle devient la maîtresse de maison avec ces terres, ces bêtes et ces cinq filles. Selon la tradition andalouse, elle doit tenir une période de deuil. Elle choisit de le porter de façon stricte et décide de se cloîtrer pendant huit ans avec ces cinq filles. Bien entendu, cela les soeurs, elles rêvent d'amour et de liberté.
Seule Angustias, issue d'un premier lit, la plus "moche" mais la plus fortunée, possède un prétendant, Pépé. Tout pourrait bien se passer si ce dernier, le soir ne répondait pas à l'amour de la dernière, Adelia. Lorsque ces moments vont être dénoncé à tous, la famille alors va basculer dans le chaos et le désespoir.
La sublime mise en scène de Lilo Baur nous fait sentir cette tension dans la famille aussi bien dans le déroulé de l'histoire que dans les décors. Les soeurs sont complémentaires et partagent l'espoir de partir en se mariant. Excepté Magdalena qui décide de son destin : elle ne se mariera jamais. Mais la pression dans l'enfermement et dans la culture des apparences, de la réputation est forte et étouffante. Au bout d'un moment, des murs vont s'effondrer. Les grands draps blancs ne vont pas servir uniquement à préparer un trousseau. On voit les soeurs s'exercer sur les grands tissus, couper, coudre, imaginer des vêtements...Elles portent toutes du noir ou presque.
Les décors d’Andrew D. Edwards sont vraiment magnifiques. Les immenses moucharabieh noirs, qui laissent passer la lumière tout en créant une frontière vers l'extérieur. Parfois, il laisse place à des murs de pierres qui changent de texture selon la lumière projetée. Les espaces sont remarquablement bien définis et utilisés. J'ai adoré deux scènes en particuliers. Il y a la scène où Adelia retrouve en cachette Pépé et s'enlacent sous la pluie. J'étais émerveillé par la beauté de ce moment bien trop court. Puis aussi la scène ou Adelia tout de verte vêtue danse sous des nuages de plumes. Des moments de douceur très appréciable dans ce huit-clos très dur, sans espoir et sans bonheur.
Un spectacle étonnant avec une esthétique vraiment travaillée et magnifique. L'espoir n'a pas sa place dans un monde de femme dirigée par les dictats masculins. La Comédie Française affirme son éclectisme pour emmener le spectacle au delà de ces espérances.
Une superbe pièce de la Comédie Française.
La mise en scène et le décor sont d'une grande beauté et viennent renforcer la puissance du texte de Lorca.
Le jeu des comédiennes est impeccable.
Quelques scènes sont particulièrement remarquables, je n'ai ainsi jamais autant aimé la pluie.
La mise en scène et le décor sont d'une grande beauté et viennent renforcer la puissance du texte de Lorca.
Le jeu des comédiennes est impeccable.
Quelques scènes sont particulièrement remarquables, je n'ai ainsi jamais autant aimé la pluie.
La maison de Bernarda Alba est une pièce sombre qui parle avant tout de l’Espagne et des espagnols comme Lorca les sait être. Fiers et prudes, de cette austérité ibérique et ombrageuse.
La pièce raconte le deuil très strict imposé par Bernarda Alba, vieille andalouse attachée aux « qu’en diras-t-on », à ces cinq filles. Dans ce terrible huis-clos, beaucoup d’émotions passent par le silence : aigreur, frustration, désirs contrariés… Un silence assourdissant de souffrance. L’isolement des filles de Bernarda est total. Elle l’a décrétée : il n’y a aura pas d’hommes chez elle. Mais des ombres masculines ne cessent de se promener et l’on entend leurs chants lorsque les moissonneurs reviennent du labeur.
Comme toujours le jeu des acteurs est impeccable. Rares sont les pièces à la Comédie Française où seules les femmes ont un rôle et cela rajoute étrangement au dénuement du décor, une froide tension. Les femmes sont souvent plus cruelles que les hommes dans leurs sanctions. La preuve ici. Un grand coup de chapeau à Florence Viala dans le rôle de la vieille femme qui fait honte à tout le monde. Sa sénilité et ses apparitions spectrales font redescendre la tension : on rit de pitié, on rit pour évacuer.
La Comédie Française nous offre une fois de plus avec cette superbe mise en scène : un moment d’humanité glaçant, et F. Garcia Lorca n’aurait pas pu rêver meilleure entrée au répertoire du Français.
La pièce raconte le deuil très strict imposé par Bernarda Alba, vieille andalouse attachée aux « qu’en diras-t-on », à ces cinq filles. Dans ce terrible huis-clos, beaucoup d’émotions passent par le silence : aigreur, frustration, désirs contrariés… Un silence assourdissant de souffrance. L’isolement des filles de Bernarda est total. Elle l’a décrétée : il n’y a aura pas d’hommes chez elle. Mais des ombres masculines ne cessent de se promener et l’on entend leurs chants lorsque les moissonneurs reviennent du labeur.
Comme toujours le jeu des acteurs est impeccable. Rares sont les pièces à la Comédie Française où seules les femmes ont un rôle et cela rajoute étrangement au dénuement du décor, une froide tension. Les femmes sont souvent plus cruelles que les hommes dans leurs sanctions. La preuve ici. Un grand coup de chapeau à Florence Viala dans le rôle de la vieille femme qui fait honte à tout le monde. Sa sénilité et ses apparitions spectrales font redescendre la tension : on rit de pitié, on rit pour évacuer.
La Comédie Française nous offre une fois de plus avec cette superbe mise en scène : un moment d’humanité glaçant, et F. Garcia Lorca n’aurait pas pu rêver meilleure entrée au répertoire du Français.
Quoi de mieux que le talent de la troupe de la Comédie-Française pour donner vie aux personnages de Lorca dans une distribution 100% féminine ?
En tête, nous retrouvons avec bonheur Cécile Brune qui campe une Bernarda au cœur aussi sec que la fertilité de la pauvre Yerma (personnage central du second opus de la trilogie) et qui règne en marâtre tyrannique sur son foyer. A ses côtés, la Poncia, une domestique incarnée avec brio par Elsa Lepoivre, d’une grande justesse. C’est elle qui s’occupe de la maison, donne des conseils et met en garde Bernarda pour qui elle éprouve une évidente fascination doublée d’une certaine rancœur. Maria Josefa, mère de Bernarda, est interprétée par la surprenante Florence Viala, méconnaissable mais néanmoins impeccable et drôle en vieille femme sénile souhaitant se marier et enfanter, plaidant la douce folie et descendant du ciel dans son fauteuil roulant telle une prophétie qui s’abat sur la maison dans les plus grands mythes grecs. Autour de ce trio féminin, s’agitent les cinq filles de Bernarda, à commencer par Angustias, née du premier mariage, très riche depuis l’héritage de son père et promise à Pepe le Romano. C’est Anne Kessler qui joue l’aînée, reprenant au pied levé le rôle de Véronique Vella. Viennent ensuite la soumise Magdalena (topissime Coraly Zahonero que les sériephiles ont pu admirer dans RIS police scientifique), la timide Amelia qui a foi dans le mariage et ne peut l’envisager pour une autre raison que par amour (la réservée Claire de la Rüe du Can incarne subtilement l’innocence) et la pessimiste Martirio (dynamique Jennifer Decker qui souligne à merveille l’égoïsme, la frustration et la jalousie de son personnage). Enfin, le rôle d’Adela est confié à Adeline d’Hermy, bluffante pour habiter la plus jeune de la fratrie, symbole de rebellion vouant un amour partagé à Pepe le Romano.
Claude Mathieu (la Servante) et Sylvia Bergé (Prudencia) complètent l’équipe dans des rôles très secondaires mais remarqués.
Lilo Baur, metteure en scène suisse, choisit contre toute attente de faire figurer sur scène le personnage de Pepe le Romano qui n’est présent dans la pièce de Lorca qu’en paroles. Elliot Jenicot est cette forme onirique du désir féminin pour un rôle muet et extrêmement chorégraphié. Sa présence n’apporte pas grand-chose à l’intrigue et le choix de le faire intervenir physiquement ne semble pas des plus judicieux. Néanmoins, la mise en scène proposée est esthétiquement très belle, bien qu’un peu trop axée sur le côté droit du plateau.
Deux scènes sublimes se distinguent du reste de la pièce et ont pour point commun l’émergence de la danse bien plus que du théâtre. Il s’agit de deux passages sans paroles : le premier est une scène de liberté pour la folie d’Adela qui danse sous une pluie de plumes blanches, parée d’une courte robe d’un vert pomme flamboyant et le second est lorsqu’elle rejoint Pepe pour un magnifique ballet, sur une musique de Mich Ochowiak, sous un rideau de pluie à couper le souffle. C’est beau, lumineux, intense. La mise en scène éblouissante se glisse parfaitement au service du texte de Lorca. Les éléments du décor sont déplacés à vue entre les tableaux mais ce qui laisse un souvenir intact longtemps après la représentation, c’est cette sorte de mur ajouré en fer forgé, façade de la maison de Bernarda où se déroule le dramatique huis-clos, semblable aux limites d’un couvent andalou et ce fabuleux ciel nuageux nocturne.
En tête, nous retrouvons avec bonheur Cécile Brune qui campe une Bernarda au cœur aussi sec que la fertilité de la pauvre Yerma (personnage central du second opus de la trilogie) et qui règne en marâtre tyrannique sur son foyer. A ses côtés, la Poncia, une domestique incarnée avec brio par Elsa Lepoivre, d’une grande justesse. C’est elle qui s’occupe de la maison, donne des conseils et met en garde Bernarda pour qui elle éprouve une évidente fascination doublée d’une certaine rancœur. Maria Josefa, mère de Bernarda, est interprétée par la surprenante Florence Viala, méconnaissable mais néanmoins impeccable et drôle en vieille femme sénile souhaitant se marier et enfanter, plaidant la douce folie et descendant du ciel dans son fauteuil roulant telle une prophétie qui s’abat sur la maison dans les plus grands mythes grecs. Autour de ce trio féminin, s’agitent les cinq filles de Bernarda, à commencer par Angustias, née du premier mariage, très riche depuis l’héritage de son père et promise à Pepe le Romano. C’est Anne Kessler qui joue l’aînée, reprenant au pied levé le rôle de Véronique Vella. Viennent ensuite la soumise Magdalena (topissime Coraly Zahonero que les sériephiles ont pu admirer dans RIS police scientifique), la timide Amelia qui a foi dans le mariage et ne peut l’envisager pour une autre raison que par amour (la réservée Claire de la Rüe du Can incarne subtilement l’innocence) et la pessimiste Martirio (dynamique Jennifer Decker qui souligne à merveille l’égoïsme, la frustration et la jalousie de son personnage). Enfin, le rôle d’Adela est confié à Adeline d’Hermy, bluffante pour habiter la plus jeune de la fratrie, symbole de rebellion vouant un amour partagé à Pepe le Romano.
Claude Mathieu (la Servante) et Sylvia Bergé (Prudencia) complètent l’équipe dans des rôles très secondaires mais remarqués.
Lilo Baur, metteure en scène suisse, choisit contre toute attente de faire figurer sur scène le personnage de Pepe le Romano qui n’est présent dans la pièce de Lorca qu’en paroles. Elliot Jenicot est cette forme onirique du désir féminin pour un rôle muet et extrêmement chorégraphié. Sa présence n’apporte pas grand-chose à l’intrigue et le choix de le faire intervenir physiquement ne semble pas des plus judicieux. Néanmoins, la mise en scène proposée est esthétiquement très belle, bien qu’un peu trop axée sur le côté droit du plateau.
Deux scènes sublimes se distinguent du reste de la pièce et ont pour point commun l’émergence de la danse bien plus que du théâtre. Il s’agit de deux passages sans paroles : le premier est une scène de liberté pour la folie d’Adela qui danse sous une pluie de plumes blanches, parée d’une courte robe d’un vert pomme flamboyant et le second est lorsqu’elle rejoint Pepe pour un magnifique ballet, sur une musique de Mich Ochowiak, sous un rideau de pluie à couper le souffle. C’est beau, lumineux, intense. La mise en scène éblouissante se glisse parfaitement au service du texte de Lorca. Les éléments du décor sont déplacés à vue entre les tableaux mais ce qui laisse un souvenir intact longtemps après la représentation, c’est cette sorte de mur ajouré en fer forgé, façade de la maison de Bernarda où se déroule le dramatique huis-clos, semblable aux limites d’un couvent andalou et ce fabuleux ciel nuageux nocturne.
Une très belle pièce !
Les tableaux imaginés par la Comédie Française pour mettre en scène ce drame de Federico Garcia Loca sont sublimes. Même s'il y a quelques longueurs, le jeu des acteurs tous aussi brillants les uns que les autres, associé à cette magnifique mise en scène, nous plonge dans l'Espagne des années 30. En observant le quotidien de la maison de Bernarda Alba en pleine période de deuil, on comprend la difficulté du combat des femmes pour leur liberté dans l'Espagne franquiste.
Une très belle fin de saison pour la Comédie Française.
Les tableaux imaginés par la Comédie Française pour mettre en scène ce drame de Federico Garcia Loca sont sublimes. Même s'il y a quelques longueurs, le jeu des acteurs tous aussi brillants les uns que les autres, associé à cette magnifique mise en scène, nous plonge dans l'Espagne des années 30. En observant le quotidien de la maison de Bernarda Alba en pleine période de deuil, on comprend la difficulté du combat des femmes pour leur liberté dans l'Espagne franquiste.
Une très belle fin de saison pour la Comédie Française.
Une belle pièce sur la condition de la femme en Espagne dans les années 30.
Elle remet en question les coutumes d'antan qui nous paraissent idiotes aujourd’hui. Lesquelles de nos traditions seront absurdes aux yeux de nos petits enfants le siècle prochain ?
La mise en scène et la mise en lumière sont d'un esthétisme qui nous aide à supporter les longueurs et les quelques scènes aux dialogues difficilement compréhensibles ou moins percutants.
Car j'ai trouvé l'ensemble assez inégal, avec des moments très forts et d'autres fades.
Une soirée agréable donc, mais pas inoubliable.
Elle remet en question les coutumes d'antan qui nous paraissent idiotes aujourd’hui. Lesquelles de nos traditions seront absurdes aux yeux de nos petits enfants le siècle prochain ?
La mise en scène et la mise en lumière sont d'un esthétisme qui nous aide à supporter les longueurs et les quelques scènes aux dialogues difficilement compréhensibles ou moins percutants.
Car j'ai trouvé l'ensemble assez inégal, avec des moments très forts et d'autres fades.
Une soirée agréable donc, mais pas inoubliable.
Cette pièce de Federico Garcia Lorca (entrée au répertoire) se révèle politiquement une cinglante satire de l’Espagne franquiste, de ses traditions castratrices où l’Amour est tabou, où « il faut » vaut mieux qu’ « on pourrait ».
Les situations et les dialogues sont ciselés, justes, ce qu’il faut pour comprendre, et cruels.
Lilo Baur et son équipe nous offrent une mise en espace majestueuse, digne, précise et un rien véritable pour y croire tout à fait.
La distribution, comme d’habitude au Français, est brillante.
A noter les rôles de composition. Si les comédiens n’y répugnent pas, bien au contraire, cela relève d’un exercice qui peut devenir périlleux. Là, tout passe, tout glisse, tout se place… Un regard particulier à l’admirable travail d’Elsa Lepoivre, une fois de plus époustouflante de justesse. De toutes façons, c’est dit, cette femme est extraordinaire.
Un spectacle exceptionnel de la Comédie Française. Superbe temps de théâtre à ne pas oublier.
Les situations et les dialogues sont ciselés, justes, ce qu’il faut pour comprendre, et cruels.
Lilo Baur et son équipe nous offrent une mise en espace majestueuse, digne, précise et un rien véritable pour y croire tout à fait.
La distribution, comme d’habitude au Français, est brillante.
A noter les rôles de composition. Si les comédiens n’y répugnent pas, bien au contraire, cela relève d’un exercice qui peut devenir périlleux. Là, tout passe, tout glisse, tout se place… Un regard particulier à l’admirable travail d’Elsa Lepoivre, une fois de plus époustouflante de justesse. De toutes façons, c’est dit, cette femme est extraordinaire.
Un spectacle exceptionnel de la Comédie Française. Superbe temps de théâtre à ne pas oublier.
La Comédie Française clôture sa saison en beauté en faisant rentrer dans son répertoire La Maison de Bernarda Alba, le drame féminin de Federico García Lorca.
Lilo Baur assure avec doigté un travail remarque de direction d’actrices dans une fascinante optique duelle de canalisation et d’explosion. Conte gothique au carrefour de frustration et du désir, la pièce de l’Espagnol éclate de mille feux modernes et questionne l’émancipation de la femme avec une onde de déflagration toujours palpable.
Lilo Baur assure avec doigté un travail remarque de direction d’actrices dans une fascinante optique duelle de canalisation et d’explosion. Conte gothique au carrefour de frustration et du désir, la pièce de l’Espagnol éclate de mille feux modernes et questionne l’émancipation de la femme avec une onde de déflagration toujours palpable.
Parfois, une constatation s'impose à vous, amateur de théâtre que vous êtes : vous venez de vivre des moments qui resteront dans l'histoire de la mise en scène.
Je pense qu'hier, j'ai vécu de ces moments-là : des moments de bonheur, de beauté, d'émotion. Car ici, la beauté formelle s'accorde pleinement avec la beauté du texte de Garcia Lorca. Cette danse au clair de lune, sous les fenêtres de la maison, cette danse-là restera longtemps dans les esprits. Ce que propose Lilo Baur, la metteure en scène, vous prend aux tripes et vous propulse dans une dimension d'universalité des caractères. Elle a su, non pas s'enfermer dans un "manichéisme des sentiments", mais au contraire faire ressortir l'ambivalence de la situation : la plupart des femmes semblent subir, certes, le poids de la tradition, mais l'accepter avec résignation.
A part une. A part la jeune Adela, à qui la comédienne Adeline D'Hermy impulse une troublante vérité. A part cette Adela qui choisira le jusqu'au-boutisme. Mais toutes les comédiennes sont véritablement incroyables de justesse et d'intensité, du plus petit rôle à celui, principal, interprété par Cécile Brune, qui m'a vraiment ému, à la toute fin, lorsque qu'elle révèle les faiblesses de son personnage, alors que tout au long de la pièce, elle s'impose en mégère pas du tout apprivoisée.
Une mention toute particulière pour Florence Viala qui incarne la mère folle (si folle que ça ?) de Bernarda : elle est à la fois méconnaissable et prodigieuse. Enfin, pour conclure, je me répète : c'est tout simplement beau ! Et par les temps qui courent, une heure de pure beauté, c'est toujours bon à prendre !
Je pense qu'hier, j'ai vécu de ces moments-là : des moments de bonheur, de beauté, d'émotion. Car ici, la beauté formelle s'accorde pleinement avec la beauté du texte de Garcia Lorca. Cette danse au clair de lune, sous les fenêtres de la maison, cette danse-là restera longtemps dans les esprits. Ce que propose Lilo Baur, la metteure en scène, vous prend aux tripes et vous propulse dans une dimension d'universalité des caractères. Elle a su, non pas s'enfermer dans un "manichéisme des sentiments", mais au contraire faire ressortir l'ambivalence de la situation : la plupart des femmes semblent subir, certes, le poids de la tradition, mais l'accepter avec résignation.
A part une. A part la jeune Adela, à qui la comédienne Adeline D'Hermy impulse une troublante vérité. A part cette Adela qui choisira le jusqu'au-boutisme. Mais toutes les comédiennes sont véritablement incroyables de justesse et d'intensité, du plus petit rôle à celui, principal, interprété par Cécile Brune, qui m'a vraiment ému, à la toute fin, lorsque qu'elle révèle les faiblesses de son personnage, alors que tout au long de la pièce, elle s'impose en mégère pas du tout apprivoisée.
Une mention toute particulière pour Florence Viala qui incarne la mère folle (si folle que ça ?) de Bernarda : elle est à la fois méconnaissable et prodigieuse. Enfin, pour conclure, je me répète : c'est tout simplement beau ! Et par les temps qui courent, une heure de pure beauté, c'est toujours bon à prendre !
La pièce est magnifique et la performance de la troupe garantit un grand moment de théâtre. Il y a quantité de bonnes raisons de voir cette pièce, comme la mise en scène à mi-chemin entre l’Espagne et le Français, le talent immense des comédiennes, le décor féerique, ou plusieurs scènes déjà d’anthologie.
La force de la pièce dans son montage est de nous donner à sentir la tension, la pression qui s’exerce de façon continue sur ces femmes laissées sans hommes et pourtant aliénées à leur loi. Le décor en moucharabieh et une scène de lapidation signent ce qui dans la description des années 30 en Espagne parle de l’actuel d’autres femmes. Nous vivons de l’intérieur cette raideur imposée aux femmes, au nom de la réputation, au nom des pères et des grands pères, de la religion, au nom du père mort. Il nous est donné à voir pourquoi, si brutale et cruelle, et même après sa mort, la loi du père s’applique entre acceptation et résignation, entre instrumentalisation et déchéance, comme un élément de pouvoir pour la mère, comme un bouclier moral pour ses filles, comme une digue aux passions, une digue qui cédera à la fin de la pièce.
La puissance de la pièce, son insight, est de répondre à la question du pourquoi de la soumission. Aujourd’hui il nous est étrange de croiser ces jeunes filles, citoyennes d’un pays libre, se voiler, soumises par leur propre volonté. Chaque personnage, à sa façon, nous montre où se joue la soumission, sans toutefois qu’on y comprenne le mouvement. Le personnage de Magdalena déplie la réponse la plus contributive. Au sein d’une tribu imprégnée de la loi anti femmes, Magdalena décide de son destin dés la mort du père : elle ne se mariera jamais, clame-t-elle; elle n’échappera jamais à sa mauvaise fortune de soumise. Soumise au collectif, sa décision revendiquée devant tous, l’attache à une intentionnalité individuelle. Par ce truchement sa vie s’ouvre sur une autre chose dans la petitesse mais dans une certaine bonne humeur, dans une authentique joie de vivre. Le tour de force de Coraly Zahonero est d’interpréter cela, cette difficulté à comprendre en ambiguïté et en grâce, le double ligotage de soumise et de souveraine, d’un coté le renoncement, de l’autre le gout pour la vie, pour sa propre vie. Dans une scène importante et au milieu du drame qui s’avance, elle se lève grognon et s’éloigne en lançant : on peut jamais dormir dans cette maison ! Pas facile de dormir effectivement dans cette maison, et Magdalena le crie : elle veut dormir. Tout en finesse, Coraly Zahonero dépeint par son jeu une Magdalena, perso, égoïste, non-dupe, au ton et à la pensée libre et pourtant captive. Magdalena parvient à vivre sa vie en tant que Magdalena, tandis qu’autour d’elle chaque sœur rêve de vivre la vie d’une autre de la fratrie, tandis que la grand-mère sénile cherche un homme qui l’épousera et qui l’a rendra heureuse. La jalousie circule; la mère veille à ce qu’elle ne déborde pas. Magdalena ne jalouse personne, elle ne négocie pas avec la réalité, elle la regarde droit dans les yeux et s’en accommode. Seul l’immense talent de Coraly Zahonero répond de cette proposition : la confrontation directe et lucide avec la vérité.
La force de la pièce dans son montage est de nous donner à sentir la tension, la pression qui s’exerce de façon continue sur ces femmes laissées sans hommes et pourtant aliénées à leur loi. Le décor en moucharabieh et une scène de lapidation signent ce qui dans la description des années 30 en Espagne parle de l’actuel d’autres femmes. Nous vivons de l’intérieur cette raideur imposée aux femmes, au nom de la réputation, au nom des pères et des grands pères, de la religion, au nom du père mort. Il nous est donné à voir pourquoi, si brutale et cruelle, et même après sa mort, la loi du père s’applique entre acceptation et résignation, entre instrumentalisation et déchéance, comme un élément de pouvoir pour la mère, comme un bouclier moral pour ses filles, comme une digue aux passions, une digue qui cédera à la fin de la pièce.
La puissance de la pièce, son insight, est de répondre à la question du pourquoi de la soumission. Aujourd’hui il nous est étrange de croiser ces jeunes filles, citoyennes d’un pays libre, se voiler, soumises par leur propre volonté. Chaque personnage, à sa façon, nous montre où se joue la soumission, sans toutefois qu’on y comprenne le mouvement. Le personnage de Magdalena déplie la réponse la plus contributive. Au sein d’une tribu imprégnée de la loi anti femmes, Magdalena décide de son destin dés la mort du père : elle ne se mariera jamais, clame-t-elle; elle n’échappera jamais à sa mauvaise fortune de soumise. Soumise au collectif, sa décision revendiquée devant tous, l’attache à une intentionnalité individuelle. Par ce truchement sa vie s’ouvre sur une autre chose dans la petitesse mais dans une certaine bonne humeur, dans une authentique joie de vivre. Le tour de force de Coraly Zahonero est d’interpréter cela, cette difficulté à comprendre en ambiguïté et en grâce, le double ligotage de soumise et de souveraine, d’un coté le renoncement, de l’autre le gout pour la vie, pour sa propre vie. Dans une scène importante et au milieu du drame qui s’avance, elle se lève grognon et s’éloigne en lançant : on peut jamais dormir dans cette maison ! Pas facile de dormir effectivement dans cette maison, et Magdalena le crie : elle veut dormir. Tout en finesse, Coraly Zahonero dépeint par son jeu une Magdalena, perso, égoïste, non-dupe, au ton et à la pensée libre et pourtant captive. Magdalena parvient à vivre sa vie en tant que Magdalena, tandis qu’autour d’elle chaque sœur rêve de vivre la vie d’une autre de la fratrie, tandis que la grand-mère sénile cherche un homme qui l’épousera et qui l’a rendra heureuse. La jalousie circule; la mère veille à ce qu’elle ne déborde pas. Magdalena ne jalouse personne, elle ne négocie pas avec la réalité, elle la regarde droit dans les yeux et s’en accommode. Seul l’immense talent de Coraly Zahonero répond de cette proposition : la confrontation directe et lucide avec la vérité.
Cette production de La Maison de Bernarda Alba que nous propose la Comédie Française est tout simplement sublime.
Que ce soit pour sa mise en scène, qui multiplie les images époustouflantes (j'en ai encore des frissons rien que d'y repenser), que pour les comédiens qui sont tous excellents (saluons la qualité du travail d'Anne Kessler qui a du remplacer une partenaire au pied levé), ou tout simplement pour son texte dont la beauté fait frissonner par moments, cette pièce est un vrai moment de bonheur. Sans parler de ce moment dansé sous la fenêtre, en pleine nuit, qui est d'un onirisme à couper le souffle.
Le drame de ces femmes enfermées à l'intérieur de la maison, tenues d'une main de fer par Bernarda Alba dans l'Espagne des années 30 est cruel, cynique et monte crescendo jusqu'à un sublime dénouement. Les mots me manquent pour décrire la force de l'ouvrage et la qualité d'exécution !
Un grand moment de théâtre !
Que ce soit pour sa mise en scène, qui multiplie les images époustouflantes (j'en ai encore des frissons rien que d'y repenser), que pour les comédiens qui sont tous excellents (saluons la qualité du travail d'Anne Kessler qui a du remplacer une partenaire au pied levé), ou tout simplement pour son texte dont la beauté fait frissonner par moments, cette pièce est un vrai moment de bonheur. Sans parler de ce moment dansé sous la fenêtre, en pleine nuit, qui est d'un onirisme à couper le souffle.
Le drame de ces femmes enfermées à l'intérieur de la maison, tenues d'une main de fer par Bernarda Alba dans l'Espagne des années 30 est cruel, cynique et monte crescendo jusqu'à un sublime dénouement. Les mots me manquent pour décrire la force de l'ouvrage et la qualité d'exécution !
Un grand moment de théâtre !
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