Ses critiques
119 critiques
6,5/10
Plutôt pêchu, souvent hilarant, ce cas Martin Piche sera la jolie petite surprise du mois de mai.
N’attendons aucune révolution du genre ni dimension cachée derrière les répliques, mais une spontanéité sincère et désopilante. Avec d’un coté un homme non pas désabusé ni blasé, mais tout simplement vidé de tout sel, toute curiosité ou toute énergie, et de l’autre un autre homme qui est l’exact opposé en psychiatre passionné par ce cas hors normes et dévoré de curiosité, Le cas Martin Piche n’est assurément jamais ennuyeux : d’une part parce que la mise en scène est dynamique et la pièce jouée avec force conviction et énergie par Jacques Mougenot (Martin Piche) et Hervé Devolder (le psychiatre) (les deux sont également metteur en scène et auteur de la pièce). D’autre part, l’écriture de Jacques Mougenot a quelque chose de Dubillard dans ses dia(b)logues qui en finissent par être parfois absurdes tant l’un écoute et l’autre pas, compensant par là même l’absence de réelle profondeur de l’ensemble. On ne s’y ennuie pas, donc et, malgré une histoire qui finit quelque peu par patiner faute de réel enjeu dramaturgique, ce Cas Martin Piche a la sagesse de se terminer au bout d’une petite heure quinze, laissant les spectateurs quitter la salle un grand sourire aux lèvres.
Au final, une heure quinze de rires francs et sincères en fin de journée, ça fait parfois, tout simplement, du bien. A voir et applaudir pour se détendre.
N’attendons aucune révolution du genre ni dimension cachée derrière les répliques, mais une spontanéité sincère et désopilante. Avec d’un coté un homme non pas désabusé ni blasé, mais tout simplement vidé de tout sel, toute curiosité ou toute énergie, et de l’autre un autre homme qui est l’exact opposé en psychiatre passionné par ce cas hors normes et dévoré de curiosité, Le cas Martin Piche n’est assurément jamais ennuyeux : d’une part parce que la mise en scène est dynamique et la pièce jouée avec force conviction et énergie par Jacques Mougenot (Martin Piche) et Hervé Devolder (le psychiatre) (les deux sont également metteur en scène et auteur de la pièce). D’autre part, l’écriture de Jacques Mougenot a quelque chose de Dubillard dans ses dia(b)logues qui en finissent par être parfois absurdes tant l’un écoute et l’autre pas, compensant par là même l’absence de réelle profondeur de l’ensemble. On ne s’y ennuie pas, donc et, malgré une histoire qui finit quelque peu par patiner faute de réel enjeu dramaturgique, ce Cas Martin Piche a la sagesse de se terminer au bout d’une petite heure quinze, laissant les spectateurs quitter la salle un grand sourire aux lèvres.
Au final, une heure quinze de rires francs et sincères en fin de journée, ça fait parfois, tout simplement, du bien. A voir et applaudir pour se détendre.
9,5/10
Rions, chantons, dansons, aimons, pourrait-être le sous-titre du concert que donnent Les funambules tous les lundis soir au Studio Hébertot. Créé en 2013 sous la houlette du compositeur Stéphane CORBIN après les manifestations contre le mariage pour tous, le collectif rassemble 200 artistes : auteurs, musiciens, compositeurs, chanteurs, tous ont unis leurs talents pour donner naissance à un album au titre éponyme. Le thème de cet album ? L’amour, en quelque sorte, sous toutes ses formes, mais aussi et surtout l’amour entre un homme et un homme ou une femme et une femme. Un plaidoyer pour le libre amour ou le droit d’aimer qui on veut, comme on veut. Les chansons se suivent et ne se ressemblent pas, on y parle d’amour et de tendresse, mais aussi de l’opprobre, de la haine trop souvent déversée, on y parle aussi de confidences et de révélations faites («coming out», franchement, c’est vilain), de courage et de faiblesses, de rejet et de honte, d’espoir, d’enfants, de transmission, de mariage, et d’amour, encore, surtout, d’amour.
Sur scène, cinq musiciens (pianiste, violoniste, guitariste, bassiste et batteur), deux chanteuses et un chanteur alternent duos et solos, chansons gaies et chansons tristes, chansons d’espoir, de désespoir, rythmes entrainants ou doux. Les textes de Alexis Michalik, Pierre Notte, Julian Paris, Pierre Corbin, entre autres, sont remplis d’humour et d’amour, d’émotions, de rires, et sont interprétés avec une joie et une sincérité évidentes. Qu’ils ou elles soient sincères, pleins de fougue, de jeunesse, mutine, drôles, touchants, les trois chanteurs (Doryan Ben, Vanessa Cailhol et Amélie Manet, ou Stéphane Corbin, rejoints sur l’album par quelques invités (Camille Cottin, Jean-Claude Dreyfus, Dave, Virginie Lemoine, Julie Ferrier, etc), réussissent à nous faire rire, sourire, pleurer. Grâce à leurs récits, leurs joies, le tout est émouvant mais aussi plein de vie, de gaité, d’espoir et de bonheur : c’est communicatif et on s’y amuse autant qu’on s’y émeut, on y frémit autant qu’on y rêve, on se laisse porter par toutes ces mélodies qui nous habitent encore longtemps après (merci pour le Rosalie aime Rosalie qui ne me quitte pas depuis, hein…).
On pourrait en parler encore pendant des heures, tant il y a à dire et à transmettre après avoir applaudi Les funambules. On pourrait y retourner, on pourrait écouter et réécouter en boucle toutes ces chansons douces et vives. On pourrait, et on le fait, d’ailleurs. Mais on peut aussi et surtout porter et transmettre à notre tour ce message essentiel d’amour et de tolérance, de respect, de partage, de don et de cadeau loin des relents nauséabonds que tentent encore de répandre certaines personnes aux coeurs moisis.
Contentons-nous alors de dire et de crier que si l’amour est une chose singulière aux ressorts impénétrables, l’amour est aussi pluriel. Quelles qu’elles ou qu’ils soient, deux personnes qui s’aiment sont toujours avant tout deux cœurs qui battent. Rien d’autre que cela ne doit compter.
Sur scène, cinq musiciens (pianiste, violoniste, guitariste, bassiste et batteur), deux chanteuses et un chanteur alternent duos et solos, chansons gaies et chansons tristes, chansons d’espoir, de désespoir, rythmes entrainants ou doux. Les textes de Alexis Michalik, Pierre Notte, Julian Paris, Pierre Corbin, entre autres, sont remplis d’humour et d’amour, d’émotions, de rires, et sont interprétés avec une joie et une sincérité évidentes. Qu’ils ou elles soient sincères, pleins de fougue, de jeunesse, mutine, drôles, touchants, les trois chanteurs (Doryan Ben, Vanessa Cailhol et Amélie Manet, ou Stéphane Corbin, rejoints sur l’album par quelques invités (Camille Cottin, Jean-Claude Dreyfus, Dave, Virginie Lemoine, Julie Ferrier, etc), réussissent à nous faire rire, sourire, pleurer. Grâce à leurs récits, leurs joies, le tout est émouvant mais aussi plein de vie, de gaité, d’espoir et de bonheur : c’est communicatif et on s’y amuse autant qu’on s’y émeut, on y frémit autant qu’on y rêve, on se laisse porter par toutes ces mélodies qui nous habitent encore longtemps après (merci pour le Rosalie aime Rosalie qui ne me quitte pas depuis, hein…).
On pourrait en parler encore pendant des heures, tant il y a à dire et à transmettre après avoir applaudi Les funambules. On pourrait y retourner, on pourrait écouter et réécouter en boucle toutes ces chansons douces et vives. On pourrait, et on le fait, d’ailleurs. Mais on peut aussi et surtout porter et transmettre à notre tour ce message essentiel d’amour et de tolérance, de respect, de partage, de don et de cadeau loin des relents nauséabonds que tentent encore de répandre certaines personnes aux coeurs moisis.
Contentons-nous alors de dire et de crier que si l’amour est une chose singulière aux ressorts impénétrables, l’amour est aussi pluriel. Quelles qu’elles ou qu’ils soient, deux personnes qui s’aiment sont toujours avant tout deux cœurs qui battent. Rien d’autre que cela ne doit compter.
8,5/10
L’atmosphère est sombre dans le petit théâtre de la Huchette. Sur scène, deux personnages tournent le dos aux spectateurs. Un troisième entre et commence à parler. Soudain, il s’arrête, et se rebelle. Lui, personnage d’une pièce qu’il n’a pas écrite, ne veut plus subir le sort que l’auteur lui a réservé. Lui, le personnage soumis, décide qu’il ne peut pas mourir ainsi, tous les soirs, et n’être rien d’autre qu’une marionnette désarticulée entre les mains de son maître. L’auteur apparait alors par une porte de la salle : il affirme, exige, assène : il est le maître, le créateur, il écrit, il décide. Le jeune homme doit se plier au texte, accepter son destin de personnage, et donc se suicider, comme l’a écrit l’auteur. S’ensuivra alors une longue confrontation entre les deux personnages : le jeune homme refuse son sort, l’auteur veut le convaincre de se tuer.
Avec le Personnage désincarné, Arnaud Denis dépasse la thématique pirandellienne et entraîne le spectateur vers une destination plus méandreuse et sinueuse que la pure mise en abyme du théâtre dans le théâtre. Au fil des phrases, la confrontation devient affrontement et les deux hommes entament une partie obscure où chaque adversaire analyse, feinte, attaque, esquive, jusqu’à la mort subite.
Glaçant, implacable, Marcel Philippot excelle dans le rôle de l’auteur-créateur tortionnaire. Le jeune Audran Cattin bascule toujours avec justesse entre fougue adolescente, rébellion, soumission et résignation : un comédien à suivre. Grégoire Bourbier intervient toujours à propos en troisième homme qui tente d’infléchir le cours des choses.
Le décor est très sobre : deux mannequins de dos représentent les autres personnages de la pièce : poupées de cire soumises, dociles, silencieuses alors qu’un judicieux effet de perspective pour la porte de fond de scène accentue l’effet miroir de la mise en scène, souligné par un éclairage tout en ombres et lueurs.
Le tout sert impeccablement une mécanique du trouble jeu où s’entremêlent un écheveau de thèmes comme le processus de création, l’influence du subconscient dans l’écriture, la fatalité et son acceptation ou son refus, le rapport filial et l’émancipation. Faut-il tuer le père, faut-il se soumettre à son destin ? A-t-on tous un créateur ? Une écriture toute en trompe-l’œil qui happe le spectateur, impeccablement servie par les comédiens. A voir.
Avec le Personnage désincarné, Arnaud Denis dépasse la thématique pirandellienne et entraîne le spectateur vers une destination plus méandreuse et sinueuse que la pure mise en abyme du théâtre dans le théâtre. Au fil des phrases, la confrontation devient affrontement et les deux hommes entament une partie obscure où chaque adversaire analyse, feinte, attaque, esquive, jusqu’à la mort subite.
Glaçant, implacable, Marcel Philippot excelle dans le rôle de l’auteur-créateur tortionnaire. Le jeune Audran Cattin bascule toujours avec justesse entre fougue adolescente, rébellion, soumission et résignation : un comédien à suivre. Grégoire Bourbier intervient toujours à propos en troisième homme qui tente d’infléchir le cours des choses.
Le décor est très sobre : deux mannequins de dos représentent les autres personnages de la pièce : poupées de cire soumises, dociles, silencieuses alors qu’un judicieux effet de perspective pour la porte de fond de scène accentue l’effet miroir de la mise en scène, souligné par un éclairage tout en ombres et lueurs.
Le tout sert impeccablement une mécanique du trouble jeu où s’entremêlent un écheveau de thèmes comme le processus de création, l’influence du subconscient dans l’écriture, la fatalité et son acceptation ou son refus, le rapport filial et l’émancipation. Faut-il tuer le père, faut-il se soumettre à son destin ? A-t-on tous un créateur ? Une écriture toute en trompe-l’œil qui happe le spectateur, impeccablement servie par les comédiens. A voir.
7,5/10
Point d’ors russes dans cette adaptation de Gaétan Vassart du roman de Tolstoï. Point d’ors ni de faste mais une mise en scène toute en sobriété, qui fait la part belle aux héroïnes tolstoïennes. En premier lieu Golshiftey Farahani, ensorcelante Anna Karenine. L’iranienne au charme oriental incarne sublimement la russe tourmentée et propose une interprétation saisissante. L’actrice incarne à merveille, est, cette riche aristocrate épouse d’un homme influent, qui va quitter mari et fils pour vivre une passion tumultueuse avec le comte Vronski, qu’elle a rencontré lors d’un bal. Dans cette aristocratie d’avant révolution russe, Anne K. fait scandale et doit vivre sous le regard hostile et réprobateur de la haute société qui ne pardonne pas.
Premiers et indiscutables crédits de cette mise en scène, les interprétations féminines : Sabrina Kouroughli campe une jeune Kitty touchante de candeur, mais aussi de fronde insolente : la comédienne insuffle à son personnage un mélange savamment dosé de sagesse et d’exaltation. Emeline Bayart (dont le Vagabondage en tango m’avait transportée, tout comme son Tango stupéfiant) est une Daria absolument délicieuse : femme trompée trahie, mère en série, condamnée à supporter les grossesses annuelles que lui inflige son mari mais pourtant portant en elle en mélange implosif d’amertume et de rébellion. On devine beaucoup de Sophie Tolstoï dans cette Daria, et Emeline Bayart réussit à la rendre terriblement touchante et drôle. On adore, tout simplement.
Vient ensuite la sublime Golshiftey Farahani, sur qui Gaétan Vassart pose toute son adaptation : troublante, magnifique, incarnée et passionnée, la comédienne irradie de force, d’abandon, de désespoir, de feu. Peu de mots sauraient qualifier son interprétation, notamment dans la scène finale, pendant laquelle la comédienne et son personnage fusionnent tant qu’on ne sait plus qui pleure : Golshiftey Farahani ou Anna K. Incroyable et bouleversante.
Des femmes, donc, qui incarnent et magnifient, transcendent : à leurs cotés les hommes paraissent parfois plus ternes. Si Stanislas Stanic et Igor Skreblin tirent leur épingle du jeu en propriétaire terrien socialement inquiet ou écrivain tuberculeux lucide face à la société russe et son inéluctable révolution, les autres peinent à exister dans l’ombre des personnages féminins.
Une aura qui est voulue par le metteur en scène, sans doute, et magnifiée par certains passages, comme le bal où résonnera Jacques Brel et commencera une jolie chorégraphie d’ensemble qui peu à peu laisse la place à Golshiftey Farahani qui entame une danse des sept voiles troublante quand son regard croise celui de Vronski. D’autres moments resteront dans nos esprits : les flammes des bougies qui courent et illuminent le magnifique lustre illuminé et évidemment la scène finale où les coeurs frémissent et battent au rythme de celui de Anna K, jusqu’à s’arrêter avec le sien, avant de repartir à tout rompre quand la salle se rallume.
Un beau moment, donc, porté essentiellement par l’interprétation féminine et magnifié par quelques scènes d’une grande beauté.
Premiers et indiscutables crédits de cette mise en scène, les interprétations féminines : Sabrina Kouroughli campe une jeune Kitty touchante de candeur, mais aussi de fronde insolente : la comédienne insuffle à son personnage un mélange savamment dosé de sagesse et d’exaltation. Emeline Bayart (dont le Vagabondage en tango m’avait transportée, tout comme son Tango stupéfiant) est une Daria absolument délicieuse : femme trompée trahie, mère en série, condamnée à supporter les grossesses annuelles que lui inflige son mari mais pourtant portant en elle en mélange implosif d’amertume et de rébellion. On devine beaucoup de Sophie Tolstoï dans cette Daria, et Emeline Bayart réussit à la rendre terriblement touchante et drôle. On adore, tout simplement.
Vient ensuite la sublime Golshiftey Farahani, sur qui Gaétan Vassart pose toute son adaptation : troublante, magnifique, incarnée et passionnée, la comédienne irradie de force, d’abandon, de désespoir, de feu. Peu de mots sauraient qualifier son interprétation, notamment dans la scène finale, pendant laquelle la comédienne et son personnage fusionnent tant qu’on ne sait plus qui pleure : Golshiftey Farahani ou Anna K. Incroyable et bouleversante.
Des femmes, donc, qui incarnent et magnifient, transcendent : à leurs cotés les hommes paraissent parfois plus ternes. Si Stanislas Stanic et Igor Skreblin tirent leur épingle du jeu en propriétaire terrien socialement inquiet ou écrivain tuberculeux lucide face à la société russe et son inéluctable révolution, les autres peinent à exister dans l’ombre des personnages féminins.
Une aura qui est voulue par le metteur en scène, sans doute, et magnifiée par certains passages, comme le bal où résonnera Jacques Brel et commencera une jolie chorégraphie d’ensemble qui peu à peu laisse la place à Golshiftey Farahani qui entame une danse des sept voiles troublante quand son regard croise celui de Vronski. D’autres moments resteront dans nos esprits : les flammes des bougies qui courent et illuminent le magnifique lustre illuminé et évidemment la scène finale où les coeurs frémissent et battent au rythme de celui de Anna K, jusqu’à s’arrêter avec le sien, avant de repartir à tout rompre quand la salle se rallume.
Un beau moment, donc, porté essentiellement par l’interprétation féminine et magnifié par quelques scènes d’une grande beauté.
10/10
On peut être surpris quand on pénètre dans la salle du Vieux Colombier : les rangées de fauteuils ont été déplacées et la scène est maintenant au centre d’un dispositif bi-frontal. Les spectateurs s’asseyent de part et d’autre d’une grande table où quelque vaisselle est installée.
A cour (ou jardin, c’est selon) un fauteuil, un grand buffet, un piano. Un homme est là, il attend pendant que les spectateurs prennent place. Il observe la salle, les gens. Vêtu d’une veste de cuir, il est attentif et absent. Là, et ailleurs. On s’installe, on se place, et soudain un autre homme arrive et parle. Un peu comme si on avait plongé de façon urgente et inattendue dans la pièce. Les feux sont d’ailleurs encore allumés dans la salle. Les autres personnages arrivent par les allées. On est DANS la datcha, on est avec eux, on est immergés sans même l’avoir senti, pressenti, dans la famille de Vania, de Alexandre Petrovitch Voinitski, de Maria Voinitskaia et de leurs proches. Ce sera là une des premières magies de la mise en scène de la jeune Julie Deliquet : immédiateté, proximité, immersion, le public est entièrement absorbé par la scène et cette famille.
Cette famille, donc, c’est la famille de Vania. Il a longtemps et beaucoup sacrifié pour que son beau-frère, le professeur Alexandre Petrovitch Voinitski puisse se consacrer à ses recherches et ses publications. Il vit dans la datcha que sa soeur défunte, et première femme de Alexandre Petrovitch Voinitski a légué à leur fille Sonia. Le professeur vit dans la datcha avec sa deuxième femme, la jeune et belle Elena. Vivent aussi ici Maria, la mère de Vania, et Tielegine, ancien propriétaire des lieux. Le médecin Mikhaïl Lvovitch Astrov vient régulièrement leur rendre visite.
On les écoute parler, converser, sentant parfois une pointe de regret percer légèrement sous un regard ou un mot. A peine les doutes effleurent qu’ils sont balayés par la gaité russe : un verre de vodka ? La conversation oscille entre gaité non feinte et non-dits balayés. Un subtil équilibre qui jamais ne vacille, toujours parfaitement tendu entre ardeur et silences. Julie Deliquet réussit l’exercice difficile de résumer dans son adaptation tout le bouillonnement russe, toute l’ardeur, toutes les souffrances, en seulement quelques mots, regards, attitudes. Elle est évidemment aidée par la perfection du jeu des comédiens français : Laurent Stocker est un Vania bouillonnant et bouleversant de regrets et d’aigreurs contenues. Florence Viala est Elena : on distingue sous chacune de ses phrases, chacun de ses silences, la passion censurée et sagement occultée. Tous les autres sont au diapason, de Hervé Pierre, magnifique Professeur, à Stéphane Varupenne, tout en tension retenue, à Dominique Blanc, dont le jeu semble miraculeusement osciller sur un fil microscopique, à Ana Cervinka, parfaite en Sonia à fleur de peau, bouleversante dans sa façon presque désespérée d’espérer. Evidemment la nuit sera propice aux explosions trop longtemps retenues et on assiste, pantois, le coeur en apnée, aux débordements les plus violents et latents, respiration en apnée et souffle aux lèvres.
Si Tchekov peint toujours une humanité triste et bouleversante, Julie Deliquet et les comédiens français réussissent ici un tableau d’une finesse et d’une subtilité rares, nous plongeant en quelques tableaux dans les tréfonds de l’âme, ses ressorts, ses sursauts, ses souffrances et ses désirs. Un travail d’une précision chirurgicale où les implosions nous transportent autant que les explosions, où chaque émotion est dessinée avec un pointillisme exacerbé, où les coeurs chavirent autant qu’ils halètent.
Une pure merveille donc, que l’on voudrait pouvoir revoir, chérir, revoir encore, pour savourer chaque seconde, minute, parcelle, moment, d’un moment de théâtre rare et cher : un jeu pour et au service du texte, en toute humilité et toute générosité. Brillant. Rare.
A cour (ou jardin, c’est selon) un fauteuil, un grand buffet, un piano. Un homme est là, il attend pendant que les spectateurs prennent place. Il observe la salle, les gens. Vêtu d’une veste de cuir, il est attentif et absent. Là, et ailleurs. On s’installe, on se place, et soudain un autre homme arrive et parle. Un peu comme si on avait plongé de façon urgente et inattendue dans la pièce. Les feux sont d’ailleurs encore allumés dans la salle. Les autres personnages arrivent par les allées. On est DANS la datcha, on est avec eux, on est immergés sans même l’avoir senti, pressenti, dans la famille de Vania, de Alexandre Petrovitch Voinitski, de Maria Voinitskaia et de leurs proches. Ce sera là une des premières magies de la mise en scène de la jeune Julie Deliquet : immédiateté, proximité, immersion, le public est entièrement absorbé par la scène et cette famille.
Cette famille, donc, c’est la famille de Vania. Il a longtemps et beaucoup sacrifié pour que son beau-frère, le professeur Alexandre Petrovitch Voinitski puisse se consacrer à ses recherches et ses publications. Il vit dans la datcha que sa soeur défunte, et première femme de Alexandre Petrovitch Voinitski a légué à leur fille Sonia. Le professeur vit dans la datcha avec sa deuxième femme, la jeune et belle Elena. Vivent aussi ici Maria, la mère de Vania, et Tielegine, ancien propriétaire des lieux. Le médecin Mikhaïl Lvovitch Astrov vient régulièrement leur rendre visite.
On les écoute parler, converser, sentant parfois une pointe de regret percer légèrement sous un regard ou un mot. A peine les doutes effleurent qu’ils sont balayés par la gaité russe : un verre de vodka ? La conversation oscille entre gaité non feinte et non-dits balayés. Un subtil équilibre qui jamais ne vacille, toujours parfaitement tendu entre ardeur et silences. Julie Deliquet réussit l’exercice difficile de résumer dans son adaptation tout le bouillonnement russe, toute l’ardeur, toutes les souffrances, en seulement quelques mots, regards, attitudes. Elle est évidemment aidée par la perfection du jeu des comédiens français : Laurent Stocker est un Vania bouillonnant et bouleversant de regrets et d’aigreurs contenues. Florence Viala est Elena : on distingue sous chacune de ses phrases, chacun de ses silences, la passion censurée et sagement occultée. Tous les autres sont au diapason, de Hervé Pierre, magnifique Professeur, à Stéphane Varupenne, tout en tension retenue, à Dominique Blanc, dont le jeu semble miraculeusement osciller sur un fil microscopique, à Ana Cervinka, parfaite en Sonia à fleur de peau, bouleversante dans sa façon presque désespérée d’espérer. Evidemment la nuit sera propice aux explosions trop longtemps retenues et on assiste, pantois, le coeur en apnée, aux débordements les plus violents et latents, respiration en apnée et souffle aux lèvres.
Si Tchekov peint toujours une humanité triste et bouleversante, Julie Deliquet et les comédiens français réussissent ici un tableau d’une finesse et d’une subtilité rares, nous plongeant en quelques tableaux dans les tréfonds de l’âme, ses ressorts, ses sursauts, ses souffrances et ses désirs. Un travail d’une précision chirurgicale où les implosions nous transportent autant que les explosions, où chaque émotion est dessinée avec un pointillisme exacerbé, où les coeurs chavirent autant qu’ils halètent.
Une pure merveille donc, que l’on voudrait pouvoir revoir, chérir, revoir encore, pour savourer chaque seconde, minute, parcelle, moment, d’un moment de théâtre rare et cher : un jeu pour et au service du texte, en toute humilité et toute générosité. Brillant. Rare.