Ses critiques
119 critiques
7/10
C’est à Vérone que nos deux jumeaux se croiseront. Le vénitien Tonino, éduqué, courtois, courageux, et Zanetto pataud et niais, élevé à Bergame, ont été séparés à la naissance. Ils arrivent tous deux à Vérone pour trouver promise.
La gémellité a longtemps été et continue d’être source d’inspiration pour les auteurs et gros ressort comique : confusions, chassés-croisés, le tout contribue efficacement aux situations drolatiques. Avec Goldoni, le tout se retrouve en Vénétie du XVIIIème siècle, à l’époque où les différends se règlent encore à coup d’épée : quiproquos et combats d’épée, le matériau est solide et concourt efficacement au rythme de la comédie goldonienne en entraînant le public pendant deux heures survoltées.
Une équipe survitaminée
Et l’on s’y régale, dans cet enchaînement de quiproquos, on s’y régale tant les comédiens sont – tous sans exception– impeccables et en osmose parfaite. Que ce soient les rôles féminins (Victoire Bélézy, Margaux Van Den Plas, Agnès Pontier) ou masculins (Luc Tremblais, Thibault Lacroix, Adrien Gamba-Gontard, Philippe Berodot, Benjamin Jungers, Olivier Sitruk, Maxime d’Aboville), l’équipe de choc joue avec une joie évidente et une énergie toujours renouvelée sans s’essouffler. Dans cette fine équipe se démarquent Olivier Sitruk, ambigu Pancrace, amoureux transi et tartuffe machiavélique, et bien évidemment Maxime d’Aboville qui pendant deux heures va interpréter Tonino et Zanetto, passant de l’un à l’autre en souvent un quart de tour. Très jolie performance.
Jean-Louis Benoit, après Les rustres au Français, continue de servir Goldoni avec amour : la mise en scène, hyper rythmée, reste limpide tout en ne laissant rien au hasard dans un décor astucieux sans être envahissant et une scénographie toute en ocres et rouges franchement ravissante.
De la belle ouvrage, donc, et un classique rafraichissant porté un travail d’équipe et une scénographie plus qu’harmonieuse.
La gémellité a longtemps été et continue d’être source d’inspiration pour les auteurs et gros ressort comique : confusions, chassés-croisés, le tout contribue efficacement aux situations drolatiques. Avec Goldoni, le tout se retrouve en Vénétie du XVIIIème siècle, à l’époque où les différends se règlent encore à coup d’épée : quiproquos et combats d’épée, le matériau est solide et concourt efficacement au rythme de la comédie goldonienne en entraînant le public pendant deux heures survoltées.
Une équipe survitaminée
Et l’on s’y régale, dans cet enchaînement de quiproquos, on s’y régale tant les comédiens sont – tous sans exception– impeccables et en osmose parfaite. Que ce soient les rôles féminins (Victoire Bélézy, Margaux Van Den Plas, Agnès Pontier) ou masculins (Luc Tremblais, Thibault Lacroix, Adrien Gamba-Gontard, Philippe Berodot, Benjamin Jungers, Olivier Sitruk, Maxime d’Aboville), l’équipe de choc joue avec une joie évidente et une énergie toujours renouvelée sans s’essouffler. Dans cette fine équipe se démarquent Olivier Sitruk, ambigu Pancrace, amoureux transi et tartuffe machiavélique, et bien évidemment Maxime d’Aboville qui pendant deux heures va interpréter Tonino et Zanetto, passant de l’un à l’autre en souvent un quart de tour. Très jolie performance.
Jean-Louis Benoit, après Les rustres au Français, continue de servir Goldoni avec amour : la mise en scène, hyper rythmée, reste limpide tout en ne laissant rien au hasard dans un décor astucieux sans être envahissant et une scénographie toute en ocres et rouges franchement ravissante.
De la belle ouvrage, donc, et un classique rafraichissant porté un travail d’équipe et une scénographie plus qu’harmonieuse.
8/10
L’un est aussi grand et dégingandé que l’autre est petit et trapu, tous deux portent un costume noir et des chapeaux melon. Aussi différents que possible, ces deux-là se rencontrent sur un banc et deviennent amis avant de partir s’installer à la campagne et tenter de devenir aussi savants qu’instruits, de tout expérimenter, et de rater, souvent, toujours.
Jérôme Deschamps s’empare du roman inachevé de Flaubert et l’adapte dans une sauce plus Deschiens que Flaubertienne, mais peu importe, on suppose que l’auteur se serait délecté de voir ses deux personnages rester toujours aussi picaresques, bêtement drôles et drôlement bêtes. Deschamps sera le petit, Micha Lescot, qui joue formidablement de son immense carcasse, sera le grand, tous deux sont évidemment bons amis et quand l’un y va l’autre le suit, que ce soit dans des expériences frénétiques (et ratées) que dans des élucubrations pathétiquement drôles. Avec Jérôme Pécuchet, les expériences deviennent aussi burlesques que désopilantes, clownesques que méchantes. Lui et Micha Bouvard, donc, forment un duo explosif où tous tout est permis pour briller et démontrer sa formidable intelligence, profondément enfouie sous une bien belle couche de bêtise et de prétention. Ils ne sont pas les seuls dans cette farce déjantée : Pauline Tricot et Lucas Hérault viennent apporter une couche supplémentaire de bêtise campagnarde sacrément hilarante : Pauline Tricot joue admirablement les simplettes, l’œil hagard, en ânonnant des monosyllabes tandis que Lucas Hérault joue les brutes campagnardes avec une placidité réjouissante.
En guise d’écrin à ce concentré de crétinerie, la scénographie toute en bleu et rouge, les costumes de Macha Makeïeff font de ce Bouvard et Pécuchet un savoureux moment d’humour décalé, d’une cocasserie qui frôle parfois le grand-guignolesque mais fait éclater de rire à bien plus d’une reprise.
Une renaissance pour ce roman posthume, agrémentée de quelques clins d’oeil plus actuels et savoureusement caustiques : on sourit, puis on rit, on finit par quasiment exulter tant ces quatre là se démènent avec une énergie et une sens du comique totalement barré, et, bien sûr, parfaitement maîtrisé.
Chapeau ! comme dit Bouvard.
Jérôme Deschamps s’empare du roman inachevé de Flaubert et l’adapte dans une sauce plus Deschiens que Flaubertienne, mais peu importe, on suppose que l’auteur se serait délecté de voir ses deux personnages rester toujours aussi picaresques, bêtement drôles et drôlement bêtes. Deschamps sera le petit, Micha Lescot, qui joue formidablement de son immense carcasse, sera le grand, tous deux sont évidemment bons amis et quand l’un y va l’autre le suit, que ce soit dans des expériences frénétiques (et ratées) que dans des élucubrations pathétiquement drôles. Avec Jérôme Pécuchet, les expériences deviennent aussi burlesques que désopilantes, clownesques que méchantes. Lui et Micha Bouvard, donc, forment un duo explosif où tous tout est permis pour briller et démontrer sa formidable intelligence, profondément enfouie sous une bien belle couche de bêtise et de prétention. Ils ne sont pas les seuls dans cette farce déjantée : Pauline Tricot et Lucas Hérault viennent apporter une couche supplémentaire de bêtise campagnarde sacrément hilarante : Pauline Tricot joue admirablement les simplettes, l’œil hagard, en ânonnant des monosyllabes tandis que Lucas Hérault joue les brutes campagnardes avec une placidité réjouissante.
En guise d’écrin à ce concentré de crétinerie, la scénographie toute en bleu et rouge, les costumes de Macha Makeïeff font de ce Bouvard et Pécuchet un savoureux moment d’humour décalé, d’une cocasserie qui frôle parfois le grand-guignolesque mais fait éclater de rire à bien plus d’une reprise.
Une renaissance pour ce roman posthume, agrémentée de quelques clins d’oeil plus actuels et savoureusement caustiques : on sourit, puis on rit, on finit par quasiment exulter tant ces quatre là se démènent avec une énergie et une sens du comique totalement barré, et, bien sûr, parfaitement maîtrisé.
Chapeau ! comme dit Bouvard.
9,5/10
C’est un bateau perdu sur un océan qu’on appelle la mer de l’oubli. Un bateau sur lequel se sont échoués des personnages. Qui sont ils ? Que sont ils ? Ils semblent errer à la recherche d’une île, qu’ils appellent l’ile de la dernière page, l’ile des fins heureuses.
Ils, ce sont Orphée, Narcisse, Dahut, Ariane, Thélès, Morgane et Achab. Ce sont les personnages oubliés des contes et des légendes, les héros d’une enfance pas si lointaine, qui n’ont pas eu de fin, où que cette fin a abandonnés sur le bord d’une fin de page. Oubliés, ils cherchent une impossible rédemption sur leur bateau, le Bag Noz. Un jour, alors qu’ils cherchent en vain une terre où se poser, ils recueillent Holly, une jeune fille qui leur demande de raconter leurs histoires.
Wilhem Mahtallah a écrit Diluviennes pour « donner la parole aux héros des contes oubliés » et son écriture sous forme de conte nous plonge avec douceur au fil des récits : on accompagne Narcisse dans ce fleuve obscur, on recueille Théles, la petite sirène, après qu’elle ait perdu sa langue en quête d’un amour impossible, on découvre Achab avant qu’il ait embarqué sur le Pequod, on pleure avec Orphée quand Eurydice disparait, on découvre la malédiction de Dahut…
Un univers dans lequel on s’immerge avec bonheur tant la scénographie est à la fois simple et étudiée, d’une beauté envoutante : une voile en fond de scène pour le Bag Noz, des caisses qui s’empilent et l’imagination du spectateur fait le reste. On ne peut que fondre pour ces histoires, interprétées avec une justesse, une poésie, une douceur étonnantes. Impossible d’en identifier un plus qu’une autre, tous jouent dans un ensemble parfait, en osmose et en symbiose. Un pur régal.
Wilhem Mahtallah explique qu’il s’est inspiré du travail d’Alexis Michalik : on sent cette inspiration, cette imbrication de récits, d’histoires qui se mélangent pour devenir, tous ensemble, un conte enchanteur où les comédiens chantent, se transforment en orage à coups de claquements de doigts, de mains, de froissement de tôle. Un conte où le spectateur est embarqué, sans résistance aucune, totalement confiant, abandonné aux mots de Mahtallah.
C’est poétique, donc, très onirique, clairsemé d’éclats d’écriture plus moderne qui viennent apporter des touches d’humour savoureuses, mais jamais ne brouillent l’univers du texte. C’est un conte enchanteur et choral où le spectateur se fera sa propre histoire, imaginera sa propre fin, sa propre suite.
Difficile de trouver les mots justes pour décrire l’enchantement, la grâce de ce spectacle. Alors on se taira, presque religieusement, en espérant retrouver très vite Orphée, Narcisse, Théles, Morgane, Ariane, Holly, Narcisse, et Dahut.
Ils, ce sont Orphée, Narcisse, Dahut, Ariane, Thélès, Morgane et Achab. Ce sont les personnages oubliés des contes et des légendes, les héros d’une enfance pas si lointaine, qui n’ont pas eu de fin, où que cette fin a abandonnés sur le bord d’une fin de page. Oubliés, ils cherchent une impossible rédemption sur leur bateau, le Bag Noz. Un jour, alors qu’ils cherchent en vain une terre où se poser, ils recueillent Holly, une jeune fille qui leur demande de raconter leurs histoires.
Wilhem Mahtallah a écrit Diluviennes pour « donner la parole aux héros des contes oubliés » et son écriture sous forme de conte nous plonge avec douceur au fil des récits : on accompagne Narcisse dans ce fleuve obscur, on recueille Théles, la petite sirène, après qu’elle ait perdu sa langue en quête d’un amour impossible, on découvre Achab avant qu’il ait embarqué sur le Pequod, on pleure avec Orphée quand Eurydice disparait, on découvre la malédiction de Dahut…
Un univers dans lequel on s’immerge avec bonheur tant la scénographie est à la fois simple et étudiée, d’une beauté envoutante : une voile en fond de scène pour le Bag Noz, des caisses qui s’empilent et l’imagination du spectateur fait le reste. On ne peut que fondre pour ces histoires, interprétées avec une justesse, une poésie, une douceur étonnantes. Impossible d’en identifier un plus qu’une autre, tous jouent dans un ensemble parfait, en osmose et en symbiose. Un pur régal.
Wilhem Mahtallah explique qu’il s’est inspiré du travail d’Alexis Michalik : on sent cette inspiration, cette imbrication de récits, d’histoires qui se mélangent pour devenir, tous ensemble, un conte enchanteur où les comédiens chantent, se transforment en orage à coups de claquements de doigts, de mains, de froissement de tôle. Un conte où le spectateur est embarqué, sans résistance aucune, totalement confiant, abandonné aux mots de Mahtallah.
C’est poétique, donc, très onirique, clairsemé d’éclats d’écriture plus moderne qui viennent apporter des touches d’humour savoureuses, mais jamais ne brouillent l’univers du texte. C’est un conte enchanteur et choral où le spectateur se fera sa propre histoire, imaginera sa propre fin, sa propre suite.
Difficile de trouver les mots justes pour décrire l’enchantement, la grâce de ce spectacle. Alors on se taira, presque religieusement, en espérant retrouver très vite Orphée, Narcisse, Théles, Morgane, Ariane, Holly, Narcisse, et Dahut.
9/10
C’est une femme altière qui se tient sur la scène du Poche Montparnasse quand commence Au but, de l’autrichien Thomas Bernhard. Elle se tient droite dans son fauteuil, dans un intérieur cossu. Tandis qu’elle ne se lève quasiment jamais, sa fille tourne autour d’elle, en petite abeille silencieuse et affairée, préparant leurs malles pour un séjour dans la station balnéaire de Katwijk ; elle n’ouvrira la bouche que rarement pour répondre brièvement aux sarcasmes de sa mère. Car sarcasmes il y aura, durant les deux heures que dure la comédie acide de Thomas Bernhard.
Deux heures durant lesquelles cette femme critique, condamne, esquinte, stigmatise, tance tout ce qui passe à portée de ses griffes, déversant son fiel et ses griefs dans une logorrhée verbale qui semble ne jamais se tarir.
Petites rancœurs acariâtres
Tout y passe, dans cette logorrhée vomitive : le théâtre (les deux femmes ont assisté la veille à une représentation de « Sauve qui peut », et ont par ailleurs invité l’auteur à les rejoindre en villégiature), le public, la société en général, et la famille en particulier. Thomas Bernhard s’est régalé à distiller, dans ce presque monologue que constitue Au but, le portrait d’une bourgeoisie décatie qui se regarde disparaître : mariage de convenance ou d’argent, absence d’amour maternel, hypocrisies mondaines et égocentrisme étriqués, mépris mortifère pour les classes inférieures…
Monstre sacré sacrément monstrueuse
Pour incarner cette femme finalement seule, drapée dans son mépris, qui utilise sa fille comme réceptacle de ses aigreurs, Christophe Perton a fait appel à Dominique Valadié : impériale, magistrale, la comédienne, deux heures durant, sans jamais faiblir, distille son venin telle un serpent : du regard, de la voix, du corps, Dominique Valadié devient monstre d’égoïsme, mère-mante et femme aigrie. La comédienne réussit le tour de force d’hypnotiser la salle durant deux heures d’un quasi soliloque qui, loin d’être éprouvant fascine, terrasse parfois et fait rire aussi. Face à elle, Léna Bréban étonne par ses silences et ses légers sourires ambigus, aussi active que Dominique Valadié est presque clouée dans son fauteuil : un rôle difficile qu’elle assume avec calme et assurance. Yannick Morzelle (l’auteur) peine davantage à exister face au monstre Dominique Valadié dans une deuxième partie moins explosive.
Si le texte, souvent bavard, peut faire peur, il faut pourtant surmonter ses craintes : Christophe Perton l’a bien compris : ce rôle, pour ne pas devenir un pensum, ne pouvait qu’être confié à une comédienne comme Dominique Valadié : monstrueuse autant que merveilleuse, elle fascine dans une partition difficile qu’elle transforme en grande, édifiante et sidérante leçon de théâtre.
Deux heures durant lesquelles cette femme critique, condamne, esquinte, stigmatise, tance tout ce qui passe à portée de ses griffes, déversant son fiel et ses griefs dans une logorrhée verbale qui semble ne jamais se tarir.
Petites rancœurs acariâtres
Tout y passe, dans cette logorrhée vomitive : le théâtre (les deux femmes ont assisté la veille à une représentation de « Sauve qui peut », et ont par ailleurs invité l’auteur à les rejoindre en villégiature), le public, la société en général, et la famille en particulier. Thomas Bernhard s’est régalé à distiller, dans ce presque monologue que constitue Au but, le portrait d’une bourgeoisie décatie qui se regarde disparaître : mariage de convenance ou d’argent, absence d’amour maternel, hypocrisies mondaines et égocentrisme étriqués, mépris mortifère pour les classes inférieures…
Monstre sacré sacrément monstrueuse
Pour incarner cette femme finalement seule, drapée dans son mépris, qui utilise sa fille comme réceptacle de ses aigreurs, Christophe Perton a fait appel à Dominique Valadié : impériale, magistrale, la comédienne, deux heures durant, sans jamais faiblir, distille son venin telle un serpent : du regard, de la voix, du corps, Dominique Valadié devient monstre d’égoïsme, mère-mante et femme aigrie. La comédienne réussit le tour de force d’hypnotiser la salle durant deux heures d’un quasi soliloque qui, loin d’être éprouvant fascine, terrasse parfois et fait rire aussi. Face à elle, Léna Bréban étonne par ses silences et ses légers sourires ambigus, aussi active que Dominique Valadié est presque clouée dans son fauteuil : un rôle difficile qu’elle assume avec calme et assurance. Yannick Morzelle (l’auteur) peine davantage à exister face au monstre Dominique Valadié dans une deuxième partie moins explosive.
Si le texte, souvent bavard, peut faire peur, il faut pourtant surmonter ses craintes : Christophe Perton l’a bien compris : ce rôle, pour ne pas devenir un pensum, ne pouvait qu’être confié à une comédienne comme Dominique Valadié : monstrueuse autant que merveilleuse, elle fascine dans une partition difficile qu’elle transforme en grande, édifiante et sidérante leçon de théâtre.
9/10
C’est près des étangs de Cergy et de Torcy que les Tréteaux de France ont posé leurs valises pour la première édition de « L’ile de France fête le théâtre ». Une première édition pour offrir des moments de théâtre populaire aux franciliens par le biais d’ateliers théâtre (initiation clown, danse populaire, ateliers pro-contra / le jeu de la dispute, masque burlesque, lecture à voix haute) et de représentations théâtrales avec entre autres des textes de John Fante (La vocation, Père et fils), des dialogues de Platon (Lakhès – sur le courage), Molière ou bien la comédie grinçante de Balzac, Le faiseur.
Hier, donc, c’est le monde de la finance, de l’emprunt, de la dette, le monde des créanciers et des débiteurs qu’ont fustigé les Tréteaux de France (Robin Renucci qui dirige l’organisation depuis 2011, présente depuis 5 ans son cycle autour de la finance et des dettes (premier volet qui a été suivi par L’avaleur, présenté cette année à la Maison des Métallos)).
En attendant Godeau
Et on s’y régale, encore une fois, autour de Mercadet, le débiteur qui joue avec les dettes, les prêts et la cupidité de chacun. L’homme, auguste bourgeois, vit des chimères qu’il octroie. Une sorte de Madoff avant l’heure, qui, promet les meilleurs rendements et les meilleurs intérêts, séduit, embobine, ment, affabule : un faiseur de d’affaires et de rêves. Mais à force de vivre avec l’argent des autres, on risque de tout perdre quand vos créanciers viennent réclamer leur dû et que Godeau, l’associé disparu, ne vient toujours pas. Mercadet se voit contraint de marier sa fille Julie, qui n’a pour seul attrait que d’être sa fille, et donc potentiellement riche, à défaut de beauté. Et ce n’est pas seulement Mercadet, et à travers lui le monde de la finance, que critique Balzac : les créanciers de Mercadet sont tout autant fustigés. On prête, on avance, on investit, dans le but de gagner plus et plus encore, que ce soit au travers de titres prometteurs ou de promesses de mariage : le gain est tentant et les flèches balzaciennes écorchent autant Mercadet que Virginie, la femme de charge qui rêve de voir ses gages augmenter. L’appât du gain, la cupidité qui prend le pas sur la morale et balaie tous les principes sont décrits ici avec une verve délicieusement cruelle, d’autant plus acerbe qu’elle est toujours d’une actualité cuisante.
Mise en scène classique mais dépoussiérée
Quand Emmanuel Demary-Mota avait proposé en 2015 une mise en scène plutôt moderne, avec ses costumes 3 pièces et ses incursions musicales, Robin Renucci ancre sa mise en scène dans une facture a priori classique avec ses costumes et décors très XIXème. Il apparait cependant très vite que la farce balzacienne est bien là, avec ses perruques et maquillages presque outranciers (Thierry Delettre a conçu les costumes en s’inspirant des dessins de Daumier), le jeu des comédiens (tous excellents) qui oscillent entre caricature et burlesque sans jamais tomber dans l’excès, et la mise en abime qui laisse lesdits comédiens rester à cour et jardin et commenter, applaudir, larmoyer, tandis que leurs compagnons sont sur scène. Le tout forme une farce au rythme effréné, qui met la finance en abime autant que le théâtre, portée par une troupe en parfaite osmose portée par un Bruno Cadillon (Mercadet) excellent au-delà de toute mesure dans ce rôle de bonimenteur aussi cupide qu’attrayant, cyniquement séduisant et farouchement menteur.
Une farce cruelle et délicieuse, donc, dont la cinglante actualité continue de surprendre, de ravir. On souhaite au baladin Robin Renucci et le théâtre des Tréteaux de continuer de porter encore, et de plus en plus loin, la parole du théâtre, des auteurs, et de leurs valeurs. Si l’on en croit les salves d’applaudissements qui ont surgit hier, on peut penser que le but est atteint. Souhaitons donc un beau voyage aux Tréteaux de France, en espérant les revoir très vite, qu’ils viennent à notre rencontre ou que nous y allions, transformés nous aussi en spectateurs itinérants.
Hier, donc, c’est le monde de la finance, de l’emprunt, de la dette, le monde des créanciers et des débiteurs qu’ont fustigé les Tréteaux de France (Robin Renucci qui dirige l’organisation depuis 2011, présente depuis 5 ans son cycle autour de la finance et des dettes (premier volet qui a été suivi par L’avaleur, présenté cette année à la Maison des Métallos)).
En attendant Godeau
Et on s’y régale, encore une fois, autour de Mercadet, le débiteur qui joue avec les dettes, les prêts et la cupidité de chacun. L’homme, auguste bourgeois, vit des chimères qu’il octroie. Une sorte de Madoff avant l’heure, qui, promet les meilleurs rendements et les meilleurs intérêts, séduit, embobine, ment, affabule : un faiseur de d’affaires et de rêves. Mais à force de vivre avec l’argent des autres, on risque de tout perdre quand vos créanciers viennent réclamer leur dû et que Godeau, l’associé disparu, ne vient toujours pas. Mercadet se voit contraint de marier sa fille Julie, qui n’a pour seul attrait que d’être sa fille, et donc potentiellement riche, à défaut de beauté. Et ce n’est pas seulement Mercadet, et à travers lui le monde de la finance, que critique Balzac : les créanciers de Mercadet sont tout autant fustigés. On prête, on avance, on investit, dans le but de gagner plus et plus encore, que ce soit au travers de titres prometteurs ou de promesses de mariage : le gain est tentant et les flèches balzaciennes écorchent autant Mercadet que Virginie, la femme de charge qui rêve de voir ses gages augmenter. L’appât du gain, la cupidité qui prend le pas sur la morale et balaie tous les principes sont décrits ici avec une verve délicieusement cruelle, d’autant plus acerbe qu’elle est toujours d’une actualité cuisante.
Mise en scène classique mais dépoussiérée
Quand Emmanuel Demary-Mota avait proposé en 2015 une mise en scène plutôt moderne, avec ses costumes 3 pièces et ses incursions musicales, Robin Renucci ancre sa mise en scène dans une facture a priori classique avec ses costumes et décors très XIXème. Il apparait cependant très vite que la farce balzacienne est bien là, avec ses perruques et maquillages presque outranciers (Thierry Delettre a conçu les costumes en s’inspirant des dessins de Daumier), le jeu des comédiens (tous excellents) qui oscillent entre caricature et burlesque sans jamais tomber dans l’excès, et la mise en abime qui laisse lesdits comédiens rester à cour et jardin et commenter, applaudir, larmoyer, tandis que leurs compagnons sont sur scène. Le tout forme une farce au rythme effréné, qui met la finance en abime autant que le théâtre, portée par une troupe en parfaite osmose portée par un Bruno Cadillon (Mercadet) excellent au-delà de toute mesure dans ce rôle de bonimenteur aussi cupide qu’attrayant, cyniquement séduisant et farouchement menteur.
Une farce cruelle et délicieuse, donc, dont la cinglante actualité continue de surprendre, de ravir. On souhaite au baladin Robin Renucci et le théâtre des Tréteaux de continuer de porter encore, et de plus en plus loin, la parole du théâtre, des auteurs, et de leurs valeurs. Si l’on en croit les salves d’applaudissements qui ont surgit hier, on peut penser que le but est atteint. Souhaitons donc un beau voyage aux Tréteaux de France, en espérant les revoir très vite, qu’ils viennent à notre rencontre ou que nous y allions, transformés nous aussi en spectateurs itinérants.