Ses critiques
98 critiques
7,5/10
Le 15/03 20h30 Paris
Comment transmettre ? Pourquoi transmettre ? Quoi transmettre ?
La question de la transmission est, en effet, au coeur de ce spectacle. Pour cela Yordan Goldwaser décide de mettre sur le plateau deux comédiens de générations différentes, Rafaël Goldwaser, son père, et Thomas Mallen. Le spectacle commence par un entretien filmé de Rafaël Goldwaser dans lequel il pose la question de l’héritage. Comment, lui, le fils de Zishe Goldwaser, comédien yiddish, peut-il perpétuer la tradition du théâtre que son père pratiquait. Puis il apparaît sur le plateau et décline son identité. Il nous raconte des souvenirs de son enfance comme la première fois qu’il est monté sur un plateau de théâtre auprès de son père. C’était à Buenos Aires dans 1 des 5 théâtres yiddish qui existaient à l’époque (dans les années 50).
Comment faire pour perpétuer ce théâtre que son père pratiquait et dans lequel il est né ? La question se pose principalement aujourd’hui puisque peu de personnes parlent encore couramment cette langue. Laquelle a été considérée, même en Israël, après la seconde guerre mondiale, comme une langue de victimes qu’il fallait oublier ! Rafaël Goldwaser quitte Israël en 1976 pour la France où il intègre l’Ecole Jacques Lecoq. C’est celui-ci qui lui permet de retrouver comme il le dit « l’humour du théâtre yiddish » La deuxième partie du spectacle est formée de passages de
L’oncle Arthur de Dani Horowitz, pièce qui parle d’un rescapé de Theresienstadt, Gabriel Dagan, décidant de remettre en scène l’arrivée des nazis devant son oncle Arthur, qui avait fui avant leur arrivée, laissant sa famille derrière lui. Gabriel Dagan a voulu transmettre à son oncle l’horreur de ce qu’il a vécu. Tentative qui échoue laissant donc place à une pièce de théâtre qui raconte son expérience. Pour représenter les amis de Dagan et son oncle Arthur, Yordan Goldwaser utilise des marionnettes réalisées par Tamaïti Torlasco et Lucie Gautrain. Celles-ci permettent utilement de garder une distance avec ce qui est montré. Un spectacle sur la transmission, le témoignage.
Comment faire pour ne pas oublier un passé, lequel nous permet de construire notre présent. C’est certainement le souvenir qui, parfois, permet éviter de refaire les mêmes erreurs !
Comment transmettre ? Pourquoi transmettre ? Quoi transmettre ?
La question de la transmission est, en effet, au coeur de ce spectacle. Pour cela Yordan Goldwaser décide de mettre sur le plateau deux comédiens de générations différentes, Rafaël Goldwaser, son père, et Thomas Mallen. Le spectacle commence par un entretien filmé de Rafaël Goldwaser dans lequel il pose la question de l’héritage. Comment, lui, le fils de Zishe Goldwaser, comédien yiddish, peut-il perpétuer la tradition du théâtre que son père pratiquait. Puis il apparaît sur le plateau et décline son identité. Il nous raconte des souvenirs de son enfance comme la première fois qu’il est monté sur un plateau de théâtre auprès de son père. C’était à Buenos Aires dans 1 des 5 théâtres yiddish qui existaient à l’époque (dans les années 50).
Comment faire pour perpétuer ce théâtre que son père pratiquait et dans lequel il est né ? La question se pose principalement aujourd’hui puisque peu de personnes parlent encore couramment cette langue. Laquelle a été considérée, même en Israël, après la seconde guerre mondiale, comme une langue de victimes qu’il fallait oublier ! Rafaël Goldwaser quitte Israël en 1976 pour la France où il intègre l’Ecole Jacques Lecoq. C’est celui-ci qui lui permet de retrouver comme il le dit « l’humour du théâtre yiddish » La deuxième partie du spectacle est formée de passages de
L’oncle Arthur de Dani Horowitz, pièce qui parle d’un rescapé de Theresienstadt, Gabriel Dagan, décidant de remettre en scène l’arrivée des nazis devant son oncle Arthur, qui avait fui avant leur arrivée, laissant sa famille derrière lui. Gabriel Dagan a voulu transmettre à son oncle l’horreur de ce qu’il a vécu. Tentative qui échoue laissant donc place à une pièce de théâtre qui raconte son expérience. Pour représenter les amis de Dagan et son oncle Arthur, Yordan Goldwaser utilise des marionnettes réalisées par Tamaïti Torlasco et Lucie Gautrain. Celles-ci permettent utilement de garder une distance avec ce qui est montré. Un spectacle sur la transmission, le témoignage.
Comment faire pour ne pas oublier un passé, lequel nous permet de construire notre présent. C’est certainement le souvenir qui, parfois, permet éviter de refaire les mêmes erreurs !
8,5/10
Le 13/03, 20h, Paris
A première vue, un spectacle sur des clowns en milieu hospitalier n’est pas très attrayant. Mais ma curiosité m’a poussée à aller le découvrir. Heureuse idée !
Ce spectacle est une forme de témoignage sur tout ce que les clowns peuvent faire auprès d’enfants hospitalisés. Les comédiens jouent à la fois les patients, les parents des patients, les médecins, leur clowns et eux-mêmes. Ils sont en effet réellement clowns en milieu hospitalier. Ils nous donnent à voir plusieurs courtes scènes de leur vie quotidienne auprès des enfants. On les voit se heurter à d’inévitables difficultés. Par exemple : comment faire avec un enfant qui dit « Non » ? Essayer de nouveau chaque semaine d’entrer dans la chambre de Marion, bien que cette dernière refuse systématiquement… jusqu’au jour où quelque chose se débloque.
Alors elle ne peut plus se passer d’eux. On les voit aussi jouer avec Fanny. Avec elle, ils n’ont rien besoin de faire c’est elle qui leur ordonne et ils exécutent. Comme ils le disent : « Parfois on a besoin de frein faire. On a juste besoin d’être là ». C’est bien un vrai métier. L’un des défis auxquels ils doivent faire face est de garder une distance avec les patients, pour ne pas être (dans la mesure du possible) trop affecté par la mort possible de leur patient. Mais ils doivent aussi rester clowns devant ces enfants. La question « Nez ou pas nez » peut bien entendu se poser régulièrement. Ils ont parfois envie ou même besoin de sortir de ce rôle de clown, de baisser le nez et de parler avec eux.
On traverse donc leur quotidien en 1h30 et on se rend très vite compte que les clowns en milieu hospitalier ne sont pas comme le dit un patient « des bouffon-nes professionnel-les ». Non, loin de là ! Ils sont tous absolument formidables. Un spectacle à vivement recommander !!
A première vue, un spectacle sur des clowns en milieu hospitalier n’est pas très attrayant. Mais ma curiosité m’a poussée à aller le découvrir. Heureuse idée !
Ce spectacle est une forme de témoignage sur tout ce que les clowns peuvent faire auprès d’enfants hospitalisés. Les comédiens jouent à la fois les patients, les parents des patients, les médecins, leur clowns et eux-mêmes. Ils sont en effet réellement clowns en milieu hospitalier. Ils nous donnent à voir plusieurs courtes scènes de leur vie quotidienne auprès des enfants. On les voit se heurter à d’inévitables difficultés. Par exemple : comment faire avec un enfant qui dit « Non » ? Essayer de nouveau chaque semaine d’entrer dans la chambre de Marion, bien que cette dernière refuse systématiquement… jusqu’au jour où quelque chose se débloque.
Alors elle ne peut plus se passer d’eux. On les voit aussi jouer avec Fanny. Avec elle, ils n’ont rien besoin de faire c’est elle qui leur ordonne et ils exécutent. Comme ils le disent : « Parfois on a besoin de frein faire. On a juste besoin d’être là ». C’est bien un vrai métier. L’un des défis auxquels ils doivent faire face est de garder une distance avec les patients, pour ne pas être (dans la mesure du possible) trop affecté par la mort possible de leur patient. Mais ils doivent aussi rester clowns devant ces enfants. La question « Nez ou pas nez » peut bien entendu se poser régulièrement. Ils ont parfois envie ou même besoin de sortir de ce rôle de clown, de baisser le nez et de parler avec eux.
On traverse donc leur quotidien en 1h30 et on se rend très vite compte que les clowns en milieu hospitalier ne sont pas comme le dit un patient « des bouffon-nes professionnel-les ». Non, loin de là ! Ils sont tous absolument formidables. Un spectacle à vivement recommander !!
9/10
Le 8/03, 20h, Vitry-sur-seine
Quand nous entrons dans la salle certain-es comédien-nes sont devant la porte et nous attendent, nous disent « Bonsoir » et nous serrent la main. Ce qui nous prend un peu par surprise mais lorsqu’ on arrive tôt -comme c’était mon cas- il est assez amusant d’observer les réactions de chacun, face a ce geste auquel nous ne sommes pas accoutumés !
Ils sont donc tous déjà sur scène ou dans la salle, tous souriant ! Certains sont un peu plus en retrait, semblent encore répéter leur texte sur le plateau. Nous sommes directement plongés dans une atmosphère de complicité avec ces comédiens professionnels ou amateurs.
Ils nous font sortir dès le début de notre bulle, l’on prend conscience de l’autre, du monde qui nous entoure (et ce pendant toute la durée du spectacle).
Le Nimis Groupe se penche sur la question des migrants. Cette actualité qui nous paraît loin, dont on entend certes parler dans les médias, mais dont nous avons du mal à prendre conscience de la gravité.
Le groupe expose avec finesse et habileté des chiffres concrets. Ainsi on apprend que l’UE a dépensé près de 13 milliards d’eurso pour la protection des frontières dont 11 milliards afin de renvoyer les migrants chez eux.
Mais on entend surtout des histoires personnelles racontées par des migrants. On découvre le parcours de plusieurs d’entre eux, tous nommés Bernard Christophe, désireux de rejoindre l’Europe.
Il s’agit de récits qu’ils ont réellement vécus, tous plus inimaginables les uns que les autres. A-t-on réellement rien de mieux à faire que d’empêcher des hommes et des femmes qui représentent 1% de la population européenne d’entrer en Europe ? Ce 1% peut-il véritablement changer notre quotidien ? Les articles 13 et 14 de la déclaration universelle des droits de l’homme défendent le droit de quitter son pays mais non paradoxalement d’arriver dans un autre.
Article 13 : 1.Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat. 2. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays.
Article 14 : Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile dans d’autres pays.
Si un être humain peut quitter son pays, il devrait donc pouvoir en rejoindre un autre. Non ? Mais cela n’est inscrit nulle part … Cela devait paraitre évident en 1789 …
Pour revenir sur l’appellation commune, Bernard Christophe, j’ai d’abord pensé que c’était dommage car cela risquait de banaliser l’être humain en eux, en retirant la part de personnalité de chacun. Et puis, après réflexion, je me dit qu’en réalité il se nomme TOUS Bernard Christophe, que ce soit les comédiens ou les migrants, que ce soit les hommes ou les femmes. Manière de dire notre essentielle égalité, que l’on soit européen ou non, femme ou homme.
En plus de la part documentaire, le Nimis groupe n’a pas négligé la part visuelle et esthétique. Pour commencer on peut voir plusieurs espaces distincts dont un carré d’herbe qui représente l’endroit du rêve, une salle par laquelle les migrants doivent passer pour répondre à des tas de questions administratives répétitives et sans fin. Ces auditionssont filmées en direct et retransmises sur l’écran derrière eux. Pour une fois, la vidéo est très bien utilisée, elle est tout sauf abusive. En effet, les comédiens jouent ces scènes comme de courtes scènettes cinématographiques en utilisant un clip-clap au début, et nous en connaissons le lieu, la période de la journée (jour ou nuit) comme au début d’un scénario de film : exemple : « Intérieur jour, 5ème heure d’audition CGRA ». On peut également penser à l’insertion d’une scène du Songe d’une nuit d’été de William Shakespeare. Il s’agit de la scène de théâtre devant le roi et sa cour : les amants Pyrame et Thisbé sont obligés de se parler chacun de part et d’autre d’un mur avant la mort brutale de Thisbé en tentant de franchir le mur !
Pour conclure, il s’agit donc d’un spectacle nécessaire pour son message politique mais aussi pour la part artistique d’un cahier des charges théâtral.
Quand nous entrons dans la salle certain-es comédien-nes sont devant la porte et nous attendent, nous disent « Bonsoir » et nous serrent la main. Ce qui nous prend un peu par surprise mais lorsqu’ on arrive tôt -comme c’était mon cas- il est assez amusant d’observer les réactions de chacun, face a ce geste auquel nous ne sommes pas accoutumés !
Ils sont donc tous déjà sur scène ou dans la salle, tous souriant ! Certains sont un peu plus en retrait, semblent encore répéter leur texte sur le plateau. Nous sommes directement plongés dans une atmosphère de complicité avec ces comédiens professionnels ou amateurs.
Ils nous font sortir dès le début de notre bulle, l’on prend conscience de l’autre, du monde qui nous entoure (et ce pendant toute la durée du spectacle).
Le Nimis Groupe se penche sur la question des migrants. Cette actualité qui nous paraît loin, dont on entend certes parler dans les médias, mais dont nous avons du mal à prendre conscience de la gravité.
Le groupe expose avec finesse et habileté des chiffres concrets. Ainsi on apprend que l’UE a dépensé près de 13 milliards d’eurso pour la protection des frontières dont 11 milliards afin de renvoyer les migrants chez eux.
Mais on entend surtout des histoires personnelles racontées par des migrants. On découvre le parcours de plusieurs d’entre eux, tous nommés Bernard Christophe, désireux de rejoindre l’Europe.
Il s’agit de récits qu’ils ont réellement vécus, tous plus inimaginables les uns que les autres. A-t-on réellement rien de mieux à faire que d’empêcher des hommes et des femmes qui représentent 1% de la population européenne d’entrer en Europe ? Ce 1% peut-il véritablement changer notre quotidien ? Les articles 13 et 14 de la déclaration universelle des droits de l’homme défendent le droit de quitter son pays mais non paradoxalement d’arriver dans un autre.
Article 13 : 1.Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat. 2. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays.
Article 14 : Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile dans d’autres pays.
Si un être humain peut quitter son pays, il devrait donc pouvoir en rejoindre un autre. Non ? Mais cela n’est inscrit nulle part … Cela devait paraitre évident en 1789 …
Pour revenir sur l’appellation commune, Bernard Christophe, j’ai d’abord pensé que c’était dommage car cela risquait de banaliser l’être humain en eux, en retirant la part de personnalité de chacun. Et puis, après réflexion, je me dit qu’en réalité il se nomme TOUS Bernard Christophe, que ce soit les comédiens ou les migrants, que ce soit les hommes ou les femmes. Manière de dire notre essentielle égalité, que l’on soit européen ou non, femme ou homme.
En plus de la part documentaire, le Nimis groupe n’a pas négligé la part visuelle et esthétique. Pour commencer on peut voir plusieurs espaces distincts dont un carré d’herbe qui représente l’endroit du rêve, une salle par laquelle les migrants doivent passer pour répondre à des tas de questions administratives répétitives et sans fin. Ces auditionssont filmées en direct et retransmises sur l’écran derrière eux. Pour une fois, la vidéo est très bien utilisée, elle est tout sauf abusive. En effet, les comédiens jouent ces scènes comme de courtes scènettes cinématographiques en utilisant un clip-clap au début, et nous en connaissons le lieu, la période de la journée (jour ou nuit) comme au début d’un scénario de film : exemple : « Intérieur jour, 5ème heure d’audition CGRA ». On peut également penser à l’insertion d’une scène du Songe d’une nuit d’été de William Shakespeare. Il s’agit de la scène de théâtre devant le roi et sa cour : les amants Pyrame et Thisbé sont obligés de se parler chacun de part et d’autre d’un mur avant la mort brutale de Thisbé en tentant de franchir le mur !
Pour conclure, il s’agit donc d’un spectacle nécessaire pour son message politique mais aussi pour la part artistique d’un cahier des charges théâtral.
8/10
Le 25/02, 15h, Paris
Stéphane Braunschweig décide de mettre en scène l’une des pièces les plus complexes de Shakespeare. Une pièce qui nous plonge dans l’esprit d’un meurtrier, ce que la mise en scène exprime très justement.
Le rideau s’ouvre sur les trois sorcières. Ce sont elles qui prendront Macbeth par surprise en lui prédisant tout d’abord qu’il sera duc de Cawdor, le précédent devant être jugé et exécuté pour haute trahison. Et, de fait, il le devient à peine la scène terminée. Elles lui disent ensuite qu’il sera roi, sans lui confier que pour ce faire il lui faudra tuer le roi régnant.
Elles trônent sur leurs seaux retournés et assistent à la scène qui se déroule derrière elles dans le palais royal, légèrement rehaussé comme s’il s’agissait d’une scène de théâtre. Les figures des sorcières ne semblent pas machiavéliques, ni venues d’une autre planète. Ce sont de jeunes femmes enceintes vêtues de vêtements en lambeau. Pour la deuxième série de prophéties, c’est leurs bébéx qui mettront en garde par la voix de leurs mères. Une lecture du rôle des sorcières très stimulante.
Le metteur en scène ne représente pas le couple, connu pour être l’un des plus diaboliques de l’histoire du théâtre, selon les stéréotypes habituels à leur sujet. Mais, en réalité, il s’agit de deux êtres humains qui s’aiment et qui, déboussolés par la prophétie des sorcières et par leurs désirs de grandeurs, deviennent fous et basculent dans le crime. Macbeth a déjà tué puisqu’il est soldat mais c’est bien son épouse qui le pousse au crime royal.
La scénographie, également de Braunschweig, mêle une scène réaliste, onirique, pour terminer sur le vide. En effet, au début le rideau nous laisse découvrir une scénographie blanche et imposante puis s’ouvre une deuxième forme de rideau qui déploie un salon royal (présidentiel ?) riche en ornements : une scène, puisque, rappelons-le, ce salon est surélevé, baroque. Certaines scènes comme celle du meurtre de la famille de Macduff ou encore de la forêt qui marche sont presque symbolistes ou du moins oniriques. Tout cela en passant par celle où Macbeth apprend la mort de sa femme. Il est seul, assis en tailleur sur son trône au milieu d’une étendue blanchâtre. Plus personne n’est là pour le soutenir, puisque sa « partner in crime » vient de se donner la mort. Le dépouillement scénique de cette scène vient contraster avec les autres et accentue la solitude, la prison dans laquelle Macbeth vient de sombrer.
Un spectacle qui nous plonge dans les méandres de l’âme humaine !
Stéphane Braunschweig décide de mettre en scène l’une des pièces les plus complexes de Shakespeare. Une pièce qui nous plonge dans l’esprit d’un meurtrier, ce que la mise en scène exprime très justement.
Le rideau s’ouvre sur les trois sorcières. Ce sont elles qui prendront Macbeth par surprise en lui prédisant tout d’abord qu’il sera duc de Cawdor, le précédent devant être jugé et exécuté pour haute trahison. Et, de fait, il le devient à peine la scène terminée. Elles lui disent ensuite qu’il sera roi, sans lui confier que pour ce faire il lui faudra tuer le roi régnant.
Elles trônent sur leurs seaux retournés et assistent à la scène qui se déroule derrière elles dans le palais royal, légèrement rehaussé comme s’il s’agissait d’une scène de théâtre. Les figures des sorcières ne semblent pas machiavéliques, ni venues d’une autre planète. Ce sont de jeunes femmes enceintes vêtues de vêtements en lambeau. Pour la deuxième série de prophéties, c’est leurs bébéx qui mettront en garde par la voix de leurs mères. Une lecture du rôle des sorcières très stimulante.
Le metteur en scène ne représente pas le couple, connu pour être l’un des plus diaboliques de l’histoire du théâtre, selon les stéréotypes habituels à leur sujet. Mais, en réalité, il s’agit de deux êtres humains qui s’aiment et qui, déboussolés par la prophétie des sorcières et par leurs désirs de grandeurs, deviennent fous et basculent dans le crime. Macbeth a déjà tué puisqu’il est soldat mais c’est bien son épouse qui le pousse au crime royal.
La scénographie, également de Braunschweig, mêle une scène réaliste, onirique, pour terminer sur le vide. En effet, au début le rideau nous laisse découvrir une scénographie blanche et imposante puis s’ouvre une deuxième forme de rideau qui déploie un salon royal (présidentiel ?) riche en ornements : une scène, puisque, rappelons-le, ce salon est surélevé, baroque. Certaines scènes comme celle du meurtre de la famille de Macduff ou encore de la forêt qui marche sont presque symbolistes ou du moins oniriques. Tout cela en passant par celle où Macbeth apprend la mort de sa femme. Il est seul, assis en tailleur sur son trône au milieu d’une étendue blanchâtre. Plus personne n’est là pour le soutenir, puisque sa « partner in crime » vient de se donner la mort. Le dépouillement scénique de cette scène vient contraster avec les autres et accentue la solitude, la prison dans laquelle Macbeth vient de sombrer.
Un spectacle qui nous plonge dans les méandres de l’âme humaine !
9,5/10
Le 24/02, 20h, Paris
Après le très mauvais Marchand de Venise de Jacques Vincey, en début de saison, je ne peux que me réjouir devant cette formidable adaptation de la pièce de Shakespeare. En effet, j’attendais beaucoup de ce spectacle et je n’ai pas été déçue, bien au contraire ! La mise en scène de Ned Grujic avec le Naxos Théâtre apporte tout ce que l’on peut attendre de ce texte fondamental.
D’abord le premier point, essentiel : une mise en scène du Marchand de Venise exige que l'on ressente de la pitié pour Shylock, que l'on puisse s'idenifier à celui-ci. C'est le cas ici.
Notre compassion va en effet vers un homme qui attire la haine autour de lui par le simple fait qu’il est juif. Je pense en particulier à la fameuse tirade de Shylock. Elle est mise en scène de la manière la plus simple et la plus forte à la fois. Shylock, interprété avec brio par Rémy Rutovic, commence à parler face aux autres comédiens qui progressivement se retirent, le laissant seul au milieu du plateau sans personne (si ce n’est bien évidemment le public) pour le soutenir. On ne peut pas, à ce moment, ne pas éprouver de la pitié pour lui. Contrairement à la mise en scène de Vincey, on comprend ici la soif de vengeance de Shylock et son désir de « surpasser ses maitres ». On a envie qu’il honore son contrat et prélève sa livre de chair sur le corps d’Antonio qui ne cesse de l’insulter.
Cette mise en scène centre l’histoire sur la rivalité entre judaïsme et christianisme incarnés respectivement par Shylock et Antonio. Ned Grujic ne se contente pas de mettre en scène : il adapte le texte pour n’en faire ressortir que l’essentiel de la pièce du dramaturge anglais. Aussi l’histoire d’amour entre Nérissa et Gratiano est -elle supprimée et celle entre Lorenzo et Jessica (la fille de Shylock) à peine évoquée. Deuxième point brillament gagné : adapter sans trahir !
Les comédiens jouent devant une Venise miniature qui ressemble à une aire de jeu pour enfants. Ils sont leurs personnages et, dans le même temps, restent comédiens. Le passé se mêle intelligemment au présent. Ainsi, dans le prologue, les spectateurs apprennent que 3000 ducats équivalent aujourd’hui à 50 000 euros.
Ils ne sont que 4 comédiens pour interpréter tous les rôles, bien que, pour chacun, un rôle prédomine. Ils sont habillés tous quatre de la même façon, en pantalon et t-shirt noirs. Pour jouer leur rôle ils se contentent de mettre par dessus un élément de costume propre au personnage et à son l’époque, ce qui nous permet de savoir au premier regard qui est le personnage. Le metteur en scène joue donc avec les codes du théâtre, en ne cherchant à aucun moment le réalisme et l’illusion.
Un magnifique spectacle, que je garderai longtemps en mémoire, porté par 4 comédiens-ne extrêmement talentueux !
Après le très mauvais Marchand de Venise de Jacques Vincey, en début de saison, je ne peux que me réjouir devant cette formidable adaptation de la pièce de Shakespeare. En effet, j’attendais beaucoup de ce spectacle et je n’ai pas été déçue, bien au contraire ! La mise en scène de Ned Grujic avec le Naxos Théâtre apporte tout ce que l’on peut attendre de ce texte fondamental.
D’abord le premier point, essentiel : une mise en scène du Marchand de Venise exige que l'on ressente de la pitié pour Shylock, que l'on puisse s'idenifier à celui-ci. C'est le cas ici.
Notre compassion va en effet vers un homme qui attire la haine autour de lui par le simple fait qu’il est juif. Je pense en particulier à la fameuse tirade de Shylock. Elle est mise en scène de la manière la plus simple et la plus forte à la fois. Shylock, interprété avec brio par Rémy Rutovic, commence à parler face aux autres comédiens qui progressivement se retirent, le laissant seul au milieu du plateau sans personne (si ce n’est bien évidemment le public) pour le soutenir. On ne peut pas, à ce moment, ne pas éprouver de la pitié pour lui. Contrairement à la mise en scène de Vincey, on comprend ici la soif de vengeance de Shylock et son désir de « surpasser ses maitres ». On a envie qu’il honore son contrat et prélève sa livre de chair sur le corps d’Antonio qui ne cesse de l’insulter.
Cette mise en scène centre l’histoire sur la rivalité entre judaïsme et christianisme incarnés respectivement par Shylock et Antonio. Ned Grujic ne se contente pas de mettre en scène : il adapte le texte pour n’en faire ressortir que l’essentiel de la pièce du dramaturge anglais. Aussi l’histoire d’amour entre Nérissa et Gratiano est -elle supprimée et celle entre Lorenzo et Jessica (la fille de Shylock) à peine évoquée. Deuxième point brillament gagné : adapter sans trahir !
Les comédiens jouent devant une Venise miniature qui ressemble à une aire de jeu pour enfants. Ils sont leurs personnages et, dans le même temps, restent comédiens. Le passé se mêle intelligemment au présent. Ainsi, dans le prologue, les spectateurs apprennent que 3000 ducats équivalent aujourd’hui à 50 000 euros.
Ils ne sont que 4 comédiens pour interpréter tous les rôles, bien que, pour chacun, un rôle prédomine. Ils sont habillés tous quatre de la même façon, en pantalon et t-shirt noirs. Pour jouer leur rôle ils se contentent de mettre par dessus un élément de costume propre au personnage et à son l’époque, ce qui nous permet de savoir au premier regard qui est le personnage. Le metteur en scène joue donc avec les codes du théâtre, en ne cherchant à aucun moment le réalisme et l’illusion.
Un magnifique spectacle, que je garderai longtemps en mémoire, porté par 4 comédiens-ne extrêmement talentueux !