Ses critiques
19 critiques
7,5/10
Un garçon rencontre une fille dans une bibliothèque de Manhattan, elle fait une thèse sur Léon l’Africain né « al-Hassan ibn Mohammad al-Zayyātī al-Fāsī al-Wazzān », il compte les chromosomes. Il s’en suivra une histoire d’amour et une quête d’identité qui virera au tragique en rencontrant la grande histoire.
On retrouve là toutes les obsessions de Wajdi Mouawad l’exil, la guerre, le déchirement identitaire. La première partie confine au miracle : elle est d’une extraordinaire fluidité et vélocités de mise en scène portée par des comédiens merveilleux s’exprimant en anglais, allemand, hébreux et arabe ce qui ne fait qu’accentuer la force des mots. Musique, lumière, rythme tiennent en haleine le spectateur dans un récit addictif.
Une telle perfection flanque le vertige.
Mais la deuxième partie se perd dans un didactisme lourd : Mouawad, peut être trop impliqué dans son sujet, semble vouloir « tout dire » : Sabra et Chatila, la Shoah, la culpabilité, le pardon, le destin, l’enchaînement des causes et des effets : nous sommes alors un peu dépassé par toutes les pistes lancées et sa plume d’habitude si poétique et limpide en perd sa merveilleuse grâce en devenant un peu lourdement démonstrative et en s’égarant dans une histoire parée des facilités d’un feuilleton du 19eme siècle ; ses personnage se transforment en des concepts dépourvus de la chair de la première partie ce qui affecte l’émotion, noyée dans des mécanismes un peu artificiels brisant le récit.
Au final pas le meilleur de Mouawad ; mais reste cette virtuosité d’écriture, cette capacité à humaniser des questions lourdes et ce regard particulier qu’il sait porter sur toutes choses, cette esthétisme sobre, cette inventivité de mise en scène.
La salle était comble, attentive et probablement comblée. J’aurais voulu être plus enthousiaste et suis sans doute un peu injuste mais c’est parce que Wajdi Mouawad est un auteur que j’admire et qui compte tant dans le théâtre contemporain qu’on attend toujours plus de lui.
Mais ces réserves ne remettent nullement en cause la qualité globale du spectacle, ni la richesse du propos et il y a suffisamment de moments exceptionnels dans ces 4h pour s’en trouver heureux.
On retrouve là toutes les obsessions de Wajdi Mouawad l’exil, la guerre, le déchirement identitaire. La première partie confine au miracle : elle est d’une extraordinaire fluidité et vélocités de mise en scène portée par des comédiens merveilleux s’exprimant en anglais, allemand, hébreux et arabe ce qui ne fait qu’accentuer la force des mots. Musique, lumière, rythme tiennent en haleine le spectateur dans un récit addictif.
Une telle perfection flanque le vertige.
Mais la deuxième partie se perd dans un didactisme lourd : Mouawad, peut être trop impliqué dans son sujet, semble vouloir « tout dire » : Sabra et Chatila, la Shoah, la culpabilité, le pardon, le destin, l’enchaînement des causes et des effets : nous sommes alors un peu dépassé par toutes les pistes lancées et sa plume d’habitude si poétique et limpide en perd sa merveilleuse grâce en devenant un peu lourdement démonstrative et en s’égarant dans une histoire parée des facilités d’un feuilleton du 19eme siècle ; ses personnage se transforment en des concepts dépourvus de la chair de la première partie ce qui affecte l’émotion, noyée dans des mécanismes un peu artificiels brisant le récit.
Au final pas le meilleur de Mouawad ; mais reste cette virtuosité d’écriture, cette capacité à humaniser des questions lourdes et ce regard particulier qu’il sait porter sur toutes choses, cette esthétisme sobre, cette inventivité de mise en scène.
La salle était comble, attentive et probablement comblée. J’aurais voulu être plus enthousiaste et suis sans doute un peu injuste mais c’est parce que Wajdi Mouawad est un auteur que j’admire et qui compte tant dans le théâtre contemporain qu’on attend toujours plus de lui.
Mais ces réserves ne remettent nullement en cause la qualité globale du spectacle, ni la richesse du propos et il y a suffisamment de moments exceptionnels dans ces 4h pour s’en trouver heureux.
7,5/10
Un cocktail traditionnel et ensoleillé pour l’automne.
Prenez une fille prude qu’on cherche à marier, deux jumeaux aussi différents que possible, un avocat pas très scrupuleux, un tartuffe dévoré de passion, une amoureuse éperdue, un arlequin et une colombine pleins de bon sens, un meilleur ami un peu traitre, un jeune homme sanguin, un gendarme respectueux, jetez le tout dans une ville italienne, ajouter un zeste d’adaptation textuelle en phase avec l’époque et vous obtenez une comédie aux parfums de boulevard, pleine de couleur, sans prétention et réjouissante.
La mise en scène est simple et efficace, sans d’affèterie ou d’essai d’originalité, Jean Louis BENOIT s’est inscrit dans la tradition avec des costumes d’époque préservant les figures de la comedia dell’ arte. Le décor épuré est d’une esthétique naïve et délicate, ses divers mouvement recréent de façon fluide et intelligemment évocatrice les places et intérieur d’une cité italienne où se déploient à un rythme régulier et très « boulevardiens » entrées, sorties, duels, bataille, scène de ménage et drames divers.
Il y a bien une petite baisse de rythme vers la fin où tous les rebondissements sont expliqués de façon un peu didactique et longuette ; sans doute un peu trop de sagesse aussi, on se prend par intermittence à imaginer ce que cela aurait pu donner avec un peu plus de débridement et moins de politesse, mais c’était un soir de première, il est probable que le spectacle va se roder et que chacun s’y épanouira au fil de représentation, apportant la petite touche de folie qu’on voudrait y voir.
Maxime d’Aboville qu’on avait vu inquiétant et glacial dans' the servant' est ici charmant et solaire ; il nous prouve s’il était besoin qu’il sait tout jouer et nous donne envie de le voir plus encore, il endosse les rôles des jumeaux et s’en donne à cœur joie en interprétant tour à tour le benêt mal dégrossi puis le fanfaron flamboyant, il rayonne et son abattage emporte tout au point tel que la scène parait un peu vide quand il la quitte, jetant le spectateur dans la hâte de le voir reparaitre.
Tous ses partenaires sont pourtant excellents mais il est difficile d’exister à coté du souffle d’un tel talent. Olivier Sitruk avec une belle sobriété joue un Tartuffe amoureux et lui donne une profondeur brisant le cliché, Benjamin Jungers fait un Arlequin juvénile et franc.
Les rôles féminins sont cantonné par le texte à des « faire valoir », pourtant Victoire Belezy en ingénue, Margot Van den Plass en amoureuse blessée et Agnès pontier en colombine pragmatique arrivent à faire exister chaque figure avec leur personnalité et fournissent toute une palette de nuance à des rôles peu développés.
Aucun ne démérite et tous jouent excellemment leur partition même si on n’a que d’yeux pour Zanetto/Tonino qui domine la troupe.
C’est donc un Goldoni dans la tradition mais sans poussière, en phase avec l’époque qui nous est servi pour une soirée de divertissement : on aurait tort de se priver de cet éclat de joie et de soleil en cet automne morose.
Prenez une fille prude qu’on cherche à marier, deux jumeaux aussi différents que possible, un avocat pas très scrupuleux, un tartuffe dévoré de passion, une amoureuse éperdue, un arlequin et une colombine pleins de bon sens, un meilleur ami un peu traitre, un jeune homme sanguin, un gendarme respectueux, jetez le tout dans une ville italienne, ajouter un zeste d’adaptation textuelle en phase avec l’époque et vous obtenez une comédie aux parfums de boulevard, pleine de couleur, sans prétention et réjouissante.
La mise en scène est simple et efficace, sans d’affèterie ou d’essai d’originalité, Jean Louis BENOIT s’est inscrit dans la tradition avec des costumes d’époque préservant les figures de la comedia dell’ arte. Le décor épuré est d’une esthétique naïve et délicate, ses divers mouvement recréent de façon fluide et intelligemment évocatrice les places et intérieur d’une cité italienne où se déploient à un rythme régulier et très « boulevardiens » entrées, sorties, duels, bataille, scène de ménage et drames divers.
Il y a bien une petite baisse de rythme vers la fin où tous les rebondissements sont expliqués de façon un peu didactique et longuette ; sans doute un peu trop de sagesse aussi, on se prend par intermittence à imaginer ce que cela aurait pu donner avec un peu plus de débridement et moins de politesse, mais c’était un soir de première, il est probable que le spectacle va se roder et que chacun s’y épanouira au fil de représentation, apportant la petite touche de folie qu’on voudrait y voir.
Maxime d’Aboville qu’on avait vu inquiétant et glacial dans' the servant' est ici charmant et solaire ; il nous prouve s’il était besoin qu’il sait tout jouer et nous donne envie de le voir plus encore, il endosse les rôles des jumeaux et s’en donne à cœur joie en interprétant tour à tour le benêt mal dégrossi puis le fanfaron flamboyant, il rayonne et son abattage emporte tout au point tel que la scène parait un peu vide quand il la quitte, jetant le spectateur dans la hâte de le voir reparaitre.
Tous ses partenaires sont pourtant excellents mais il est difficile d’exister à coté du souffle d’un tel talent. Olivier Sitruk avec une belle sobriété joue un Tartuffe amoureux et lui donne une profondeur brisant le cliché, Benjamin Jungers fait un Arlequin juvénile et franc.
Les rôles féminins sont cantonné par le texte à des « faire valoir », pourtant Victoire Belezy en ingénue, Margot Van den Plass en amoureuse blessée et Agnès pontier en colombine pragmatique arrivent à faire exister chaque figure avec leur personnalité et fournissent toute une palette de nuance à des rôles peu développés.
Aucun ne démérite et tous jouent excellemment leur partition même si on n’a que d’yeux pour Zanetto/Tonino qui domine la troupe.
C’est donc un Goldoni dans la tradition mais sans poussière, en phase avec l’époque qui nous est servi pour une soirée de divertissement : on aurait tort de se priver de cet éclat de joie et de soleil en cet automne morose.
7/10
« Sa quête est celle de la jouissance (..) Baal a quelque chose de démoniaque et d’envoûtant (…). A l’image de sa société bien pensante et corrompue, BAAL n’a pas d’autre choix que d’être amoral, lui répondant par la provocation et le scandale » (entretien avec Christine Letailleur)
Cela fort bien dit, Christine Letailleur est pourtant restée au bord de l’enjeu par une succession de contre sens et de maldonne dont la première est celle du choix de Stanislas Nordey pour incarner BAAL. Là est le premier problème : Nordey n’incarne pas BAAL.
Pour qui sait que je mangerais tous les jours pendant 10 ans des aubergines et de la rhubarbe (plantations maraîchères que j’exècre toutes deux) pour un seul sourire de cet acteur, cette affirmation peut paraître surprenante mais il est difficile de dire autre chose et douloureux de l’écrire : Stanislas Nordey n’est pas BAAL.
Nordey est un acteur dont l’impressionnante présence physique de jeu a un moteur cérébral ; il est tout sauf primairement instinctif ou animal, lui donner le rôle de Baal, personnage mené avant tout par ses pulsions brutes, est contraire à sa nature d’acteur.
Nordey est un acteur démesuré, mais pas de ce genre de démesure ; il est constamment à coté du personnage de Brecht : sur une gamme monolithique de jeu, injectant ironie et cynisme là ou il devrait y avoir tout un nuancier de révolte et de désespoir.
On ne cesse de ressentir qu’il le réalise lui-même tant il semble se regarder jouer, se répéter dans ses attitudes et postures que l’on aime tant d’habitude mais qui ne collent pas à ce rôle, comme s’il s’accrochait à ses « trucs » d’acteur face à la sensation que la substantifique moelle du personnage lui échappe.
Bien, sur il reste magnifique parce qu’il est un acteur de génie fascinant, quoi qu’il fasse mais il reste loin des influences rimbaldiennes et villonnesques voulues par Brecht pour son personnage.
Éloignée de celle de Stanislas Nordey, Vincent Dissez dont on perçoit toute la sensibilité et complexité, essaye de jouer sa propre partition ; il s’en tire plutôt bien même s’il est un peu écrasé par l’aura géante de son partenaire.
A ce contresens de distribution s’ajoute une mise en scène où tout est propre, ordonné et raffiné. La magnifique scénographie, les éclairages, créent des tableaux aux réminiscences claires obscures ou manquent cependant la brutalité et la crudité esthétique caravagienne ce qui retire ainsi toute forme dramatique ou de malaise aux scènes de beuveries ou de viols et n’ajoute pas de poésie au texte.
Le plateau dépouillé, (trop) immense dilue le rythme : on navigue de droite à gauche en passant par le centre, puis d’avant en arrière et de haut en bas avec une régularité d’essuie glace sans que cela ne prenne sens mais révèle plus d’une impérieuse nécessité géométrique d’occuper tout l’espace.
La mise en scène de Christine Letailleur reste polie et mesurée jusqu’à la désincarnation là où il aurait fallu plus de provocation, de rupture de rythme et de ton, moins de beauté glacée.
Au final, cela reste un spectacle respectable et très beau (quoique un peu ennuyeux) servi par un acteur fabuleux (quoique employé à mauvais escient) mais qui laisse la même sensation qu’une belle histoire d’amour manquée.
Cela fort bien dit, Christine Letailleur est pourtant restée au bord de l’enjeu par une succession de contre sens et de maldonne dont la première est celle du choix de Stanislas Nordey pour incarner BAAL. Là est le premier problème : Nordey n’incarne pas BAAL.
Pour qui sait que je mangerais tous les jours pendant 10 ans des aubergines et de la rhubarbe (plantations maraîchères que j’exècre toutes deux) pour un seul sourire de cet acteur, cette affirmation peut paraître surprenante mais il est difficile de dire autre chose et douloureux de l’écrire : Stanislas Nordey n’est pas BAAL.
Nordey est un acteur dont l’impressionnante présence physique de jeu a un moteur cérébral ; il est tout sauf primairement instinctif ou animal, lui donner le rôle de Baal, personnage mené avant tout par ses pulsions brutes, est contraire à sa nature d’acteur.
Nordey est un acteur démesuré, mais pas de ce genre de démesure ; il est constamment à coté du personnage de Brecht : sur une gamme monolithique de jeu, injectant ironie et cynisme là ou il devrait y avoir tout un nuancier de révolte et de désespoir.
On ne cesse de ressentir qu’il le réalise lui-même tant il semble se regarder jouer, se répéter dans ses attitudes et postures que l’on aime tant d’habitude mais qui ne collent pas à ce rôle, comme s’il s’accrochait à ses « trucs » d’acteur face à la sensation que la substantifique moelle du personnage lui échappe.
Bien, sur il reste magnifique parce qu’il est un acteur de génie fascinant, quoi qu’il fasse mais il reste loin des influences rimbaldiennes et villonnesques voulues par Brecht pour son personnage.
Éloignée de celle de Stanislas Nordey, Vincent Dissez dont on perçoit toute la sensibilité et complexité, essaye de jouer sa propre partition ; il s’en tire plutôt bien même s’il est un peu écrasé par l’aura géante de son partenaire.
A ce contresens de distribution s’ajoute une mise en scène où tout est propre, ordonné et raffiné. La magnifique scénographie, les éclairages, créent des tableaux aux réminiscences claires obscures ou manquent cependant la brutalité et la crudité esthétique caravagienne ce qui retire ainsi toute forme dramatique ou de malaise aux scènes de beuveries ou de viols et n’ajoute pas de poésie au texte.
Le plateau dépouillé, (trop) immense dilue le rythme : on navigue de droite à gauche en passant par le centre, puis d’avant en arrière et de haut en bas avec une régularité d’essuie glace sans que cela ne prenne sens mais révèle plus d’une impérieuse nécessité géométrique d’occuper tout l’espace.
La mise en scène de Christine Letailleur reste polie et mesurée jusqu’à la désincarnation là où il aurait fallu plus de provocation, de rupture de rythme et de ton, moins de beauté glacée.
Au final, cela reste un spectacle respectable et très beau (quoique un peu ennuyeux) servi par un acteur fabuleux (quoique employé à mauvais escient) mais qui laisse la même sensation qu’une belle histoire d’amour manquée.
8/10
Cette pièce est folle.
Au tout début il y a un semblant de cohérence et puis ça part dans le grand n’importe quoi, sur le mode enfantin « on dirait que tu serais Bukowski et moi je serais Judy Garland et on partirait en Norvège » à cela une autre ajoute, « et moi je serais David Bowie mais je serai romancier raté » une troisième entre dans le jeu « moi je serais l’enfant lourdement handicapé de David Bowie mais à la fin je serai le chien ressuscité, seul survivant de l’arche de Noé » et chacune d’ajouter un personnage et une situation un peu plus décalée que la précédente ce qui nous permet d’apercevoir sur le plateau le prince Charles, des acteurs de Tchékhov, un enfant acteur, et bien d’autres choses encore digne d’un inventaire à la Prévert (et un barbecue !).
S’en suit une succession de 5 parties mettant en scène ces multiples personnages dans des situations loufoques poussées à l’excès donnant au tout un faux air de Rocky Horror Picture show.
On est désarçonnés, « pas sur comprendre » la signification de ce texte apparemment incohérent, avec un peu de recul on en saisit pourtant le poison délicieux et cinglé, ces situations absurdes et débridées sont un concentré de vies humaines, poussées à leurs paroxysmes qui fait bien ressortir la folie de l’humanité à laquelle nous appartenons et à laquelle nous apportons notre petite pierre quotidienne : consommation, violence, solitude, rêves avortés, catastrophe écologique…
L’auteure, Celine Champinot, nous montre comment notre humanité pourrait être narrée de façon posthume après sa disparition par un texte drôle, bourrée de références théâtrales (coucou JL Lagarce et A Tchekhov) cynique, grinçante et poétique et met le doigt sur un certain nombre de nos angoisses, à ce sujet et entres autres, toute la tirade de fin déroulant le nom d’espèces disparues est assez vertigineuse.
Lâchez donc toute rationalité ou cohérence au vestiaire et faites vous embarquer par cette épopée à 10 mains totalement déjantée, interprétée avec rythme, une solide énergie et une drôlerie désinhibée par 5 actrices formidablement douées : votre plaisir sera à ce prix.
Louise Belmas, Maeva Husband, Elise Marie, Sabine Moindrot, Adrienne Winling s’en donnent à cœur joie : et on les sent s’entrainer les unes les autres dans cette fable allumée et néanmoins poétique et grave.
On veut les revoir très vite seules ou en groupe.
Au tout début il y a un semblant de cohérence et puis ça part dans le grand n’importe quoi, sur le mode enfantin « on dirait que tu serais Bukowski et moi je serais Judy Garland et on partirait en Norvège » à cela une autre ajoute, « et moi je serais David Bowie mais je serai romancier raté » une troisième entre dans le jeu « moi je serais l’enfant lourdement handicapé de David Bowie mais à la fin je serai le chien ressuscité, seul survivant de l’arche de Noé » et chacune d’ajouter un personnage et une situation un peu plus décalée que la précédente ce qui nous permet d’apercevoir sur le plateau le prince Charles, des acteurs de Tchékhov, un enfant acteur, et bien d’autres choses encore digne d’un inventaire à la Prévert (et un barbecue !).
S’en suit une succession de 5 parties mettant en scène ces multiples personnages dans des situations loufoques poussées à l’excès donnant au tout un faux air de Rocky Horror Picture show.
On est désarçonnés, « pas sur comprendre » la signification de ce texte apparemment incohérent, avec un peu de recul on en saisit pourtant le poison délicieux et cinglé, ces situations absurdes et débridées sont un concentré de vies humaines, poussées à leurs paroxysmes qui fait bien ressortir la folie de l’humanité à laquelle nous appartenons et à laquelle nous apportons notre petite pierre quotidienne : consommation, violence, solitude, rêves avortés, catastrophe écologique…
L’auteure, Celine Champinot, nous montre comment notre humanité pourrait être narrée de façon posthume après sa disparition par un texte drôle, bourrée de références théâtrales (coucou JL Lagarce et A Tchekhov) cynique, grinçante et poétique et met le doigt sur un certain nombre de nos angoisses, à ce sujet et entres autres, toute la tirade de fin déroulant le nom d’espèces disparues est assez vertigineuse.
Lâchez donc toute rationalité ou cohérence au vestiaire et faites vous embarquer par cette épopée à 10 mains totalement déjantée, interprétée avec rythme, une solide énergie et une drôlerie désinhibée par 5 actrices formidablement douées : votre plaisir sera à ce prix.
Louise Belmas, Maeva Husband, Elise Marie, Sabine Moindrot, Adrienne Winling s’en donnent à cœur joie : et on les sent s’entrainer les unes les autres dans cette fable allumée et néanmoins poétique et grave.
On veut les revoir très vite seules ou en groupe.
6/10
Un chameau qui n’éveille guère.
On aimait tout dans cette affiche, d’abord le Théâtre de l’Atelier, celui du quartier, et puis Pascal Elbé, un acteur solide et discret, genre « type bien », enfin Barbara Schulz une belle nature jamais décevante, la « girl next door » qu’on adore.
C’est donc difficile d’écrire ce billet, car la soirée a été décevante et il aurait été tellement plus facile d’écrire dans l’enthousiasme.
Certes, l’intrigue est mince : La rencontre /confrontation entre un séducteur bohême et charismatique, ayant toujours fuit l’engagement excepté ceux guidés par son propre plaisir et une femme mère de famille, épouse aimante, psycho rigide et obstinée qui vient lui apprendre que son fils (qu’il n’a pas reconnu) vient de plaquer sa fille enceinte, mais il y avait cependant matière à de beaux développements portés par de solides acteurs.
Le résultat est cruel.
Le texte de la pièce manque de direction : on part sur une intrigue basée sur la rencontre de deux personnages totalement opposés, grand classique romanesque : la pièce nous laisse entendre que l’intrigue portera sur leur rencontre et plus si affinité, et ce début est réjouissant : bons dialogues, monologue percutants et drôles puis cela s’enlise ; le fil conducteur se perd et se dédouble, le rythme s’avachit, la rencontre improbable devient, sans qu’on en comprenne les raisons ou ressorts, l’histoire de l’évolution de Michael vers la paternité et l’émotion, doublée de la découverte, esquissée à la va vite de la révélation à Maryse de sa propre sensualité …
Tout cela est balancé au fil de scène dialogues /confrontations ou monologue. Au milieu de ce duo surgit le personnage de l’ancienne amante devenue assistante, elle même avec ses propres tourments et frustrations …
Mais on ne peut pas suivre trois personnages et deux histoires en 1h15, et de fait aucun n’est bien servi, tout est saupoudré d’où cette sensation d’absence de fils directeurs, de succession de scènes sans logique sans structure, voir sans but, confirmée par une fin en queue de poisson où on est censé comprendre que le chameau est éveillé (à quoi, on en sait pas très bien ça reste flou).
Bien sur il y a de la drôlerie dans certains dialogues, des traits d’esprit par instant, de bons mots caustiques et dans l’air du temps, quelques scène enlevées mais cela ne suffit pas à ordonner le tout.
Au milieu de tout cela Pascal Elbé, sans surprise, séducteur et bourru, joue sa partition mais sans plus, on regrette qu’il n’explose pas plus sur scène alors qu’il sait être si intense, précis et fin à l’écran, peut être parce qu’il n’a pas un texte à la hauteur de son grand talent.
Celui de Valerie Decobert, cantonnée à jouer les utilités, est un peu gâchée dans un second rôle si peu incarné.
Seule Barbara Schulz domine un peu ce brouillon : impeccable et plus encore comme toujours : drôle, nuancée, émouvante. Elle sauve un peu la pièce.
Intrigues floues, manque de rythme et de liant, texte mince : il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans ce chameau.
Les trois acteurs souffrent du manque de propos du texte, à partir de là ; ils font au mieux mais ne peuvent pallier cet état de fait et on repart le cœur serré, en espérant que le Théâtre de l’Atelier, qui a déjà eu quelques déconvenues la saison passée, ne continue pas dans cette longue série avec ce chameau qui n’éveille guère.
On aimait tout dans cette affiche, d’abord le Théâtre de l’Atelier, celui du quartier, et puis Pascal Elbé, un acteur solide et discret, genre « type bien », enfin Barbara Schulz une belle nature jamais décevante, la « girl next door » qu’on adore.
C’est donc difficile d’écrire ce billet, car la soirée a été décevante et il aurait été tellement plus facile d’écrire dans l’enthousiasme.
Certes, l’intrigue est mince : La rencontre /confrontation entre un séducteur bohême et charismatique, ayant toujours fuit l’engagement excepté ceux guidés par son propre plaisir et une femme mère de famille, épouse aimante, psycho rigide et obstinée qui vient lui apprendre que son fils (qu’il n’a pas reconnu) vient de plaquer sa fille enceinte, mais il y avait cependant matière à de beaux développements portés par de solides acteurs.
Le résultat est cruel.
Le texte de la pièce manque de direction : on part sur une intrigue basée sur la rencontre de deux personnages totalement opposés, grand classique romanesque : la pièce nous laisse entendre que l’intrigue portera sur leur rencontre et plus si affinité, et ce début est réjouissant : bons dialogues, monologue percutants et drôles puis cela s’enlise ; le fil conducteur se perd et se dédouble, le rythme s’avachit, la rencontre improbable devient, sans qu’on en comprenne les raisons ou ressorts, l’histoire de l’évolution de Michael vers la paternité et l’émotion, doublée de la découverte, esquissée à la va vite de la révélation à Maryse de sa propre sensualité …
Tout cela est balancé au fil de scène dialogues /confrontations ou monologue. Au milieu de ce duo surgit le personnage de l’ancienne amante devenue assistante, elle même avec ses propres tourments et frustrations …
Mais on ne peut pas suivre trois personnages et deux histoires en 1h15, et de fait aucun n’est bien servi, tout est saupoudré d’où cette sensation d’absence de fils directeurs, de succession de scènes sans logique sans structure, voir sans but, confirmée par une fin en queue de poisson où on est censé comprendre que le chameau est éveillé (à quoi, on en sait pas très bien ça reste flou).
Bien sur il y a de la drôlerie dans certains dialogues, des traits d’esprit par instant, de bons mots caustiques et dans l’air du temps, quelques scène enlevées mais cela ne suffit pas à ordonner le tout.
Au milieu de tout cela Pascal Elbé, sans surprise, séducteur et bourru, joue sa partition mais sans plus, on regrette qu’il n’explose pas plus sur scène alors qu’il sait être si intense, précis et fin à l’écran, peut être parce qu’il n’a pas un texte à la hauteur de son grand talent.
Celui de Valerie Decobert, cantonnée à jouer les utilités, est un peu gâchée dans un second rôle si peu incarné.
Seule Barbara Schulz domine un peu ce brouillon : impeccable et plus encore comme toujours : drôle, nuancée, émouvante. Elle sauve un peu la pièce.
Intrigues floues, manque de rythme et de liant, texte mince : il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans ce chameau.
Les trois acteurs souffrent du manque de propos du texte, à partir de là ; ils font au mieux mais ne peuvent pallier cet état de fait et on repart le cœur serré, en espérant que le Théâtre de l’Atelier, qui a déjà eu quelques déconvenues la saison passée, ne continue pas dans cette longue série avec ce chameau qui n’éveille guère.