- Comédie Contemporaine
- Théâtre de Poche Montparnasse
- Paris 6ème
L'Autre

- Benjamin Jungers
- Jeoffrey Bourdenet
- Carolina Jurczak
- Théâtre de Poche Montparnasse
- 75, boulevard du Montparnasse
- 75006 Paris
- Montparnasse (l.4, l.6, l.12, l.13, Trans N)
Elle et Lui doivent se rendre à l’évidence : du fait des règles draconiennes qu’ils s’étaient imposés, leur amour n’a pas survécu à la vie de couple. Les voici confrontés à l’échec, à leur solitude respectives et à cet Autre qui rôde autour d’eux.
Oscar Wilde disait : « être un couple, ce n’est faire qu’un. Oui, mais lequel ? » Et si c’était l’autre ?
Dans une oscillation permanente entre le rire et le drame, L’Autre raconte comment l’amour se brise sur la vie quotidienne.
Faut-il, pour vivre ensemble à jamais, ne jamais vivre ensemble ?
Florian Zeller est un écrivain de 35 ans, auteur des pièces Le Père (Molière de la meilleure pièce de théâtre privé), La Vérité (avec Pierre Arditi en 2011), Une Heure de Tranquillité (avec Fabrice Luchini en 2013), L'Envers du décor (avec Daniel Auteuil, en ce moment au Théâtre de Paris) et Le Mensonge au Théâtre Edouard VII, dont le succès est plus limité.
La critique de la rédaction : 7/10. Intrigante pièce sur un couple qui ne communique plus, n’a plus rien en commun, se laisse courir à sa perte.
Une troisième personne s’invite dans leur intimité et brise le dernier fil qui les liait.
L’Autre montre à quel point la frontière peut être faible entre l’amour et la haine, que le quotidien est un ennemi qu’il faut affronter sans relâche pour ne pas être aveuglé par la part sombre de son partenaire.
Difficile de comprendre le sens de chacune des scènes, d’en établir la chronologie, la part de réel et de rêve. L’auteur Florian Zeller se plait à faire se questionner le spectateur, le perdre entre le réalisme du quotidien et les bizarreries de certaines situations.
Pendant cette pièce, nous avons éprouvé de nouvelles sensations, avons été déboussolés. Sans vraiment savoir si nous avons apprécié cela ou pas.
Ces trois jeunes acteurs jouent très bien, souvent de manière grave, en accentuant l’ambiguïté du texte. Nous avons tout particulièrement apprécié le jeu du fiancé, tout en sensibilité.
Le décor et la mise en scène restent assez sobres, avec de belles transitions musicales entre les scènes.
Une pièce étrange et atypique dont chacun aura son interprétation de ce qu’a voulu montrer l’auteur.
Florian Zeller excelle à travers plusieurs scénettes fragmentées à nous faire poser un regard sombre sur notre envie de vivre en tandem, nous interroge sur la fragilité de la passion. Ce texte, certes cynique, est la raison de pourquoi j'ai eu envie de revoir cette pièce (première fois en 2007 au Studio des Champs-Élysées). J'étais par conséquent déjà charmée par l'écriture !
J'ai été cependant surprise positivement par la performance de Carolina Jurczak, qui pour moi dépasse largement le talent de Sara Forestier (en 2007) : une présence et un charisme se dégagent de cette jeune actrice emplissant facilement la scène au décor épuré.
Peut-être cette ambiance froide qui rôde pendant ce spectacle au décor minimaliste. Peut-être cette manière d'aborder un sujet d'apparence simple, le couple, avec une approche tranchante.
J'ai eu l'impression de voir une pièce de théâtre et un spectacle de langage corporel à la fois. La pièce est composée d'une dizaine de scènes décousues et liées à la fois, parfois on y retrouve des allusions à la scène précédente, et parfois elle s'en détache totalement. Adultère, crime passionnel, la rupture : toutes les dérives du couple y sont décrites. Ni décor ni costume, il faut s'attacher aux rôles successifs des personnages, qui n'ont d'ailleurs pas non plus de nom, et à leurs états d'âmes liés à la quête de l'amour.
En bref, je suis sortie perplexe : une pièce dérangeante mais profonde à la fois.
Il a écrit plusieurs pièces à succès qui ont disons-le un petit goût aigre doux. La critique est souvent partagée sur lui entre les aficionados et ceux qui le rejettent en bloc.
Pour ma part, j'avais aimé Le Père, un peu moins La Mère et c'était les deux seules pièces que j'avais vu de lui. Je voulais donc avec L'Autre prendre une grande décision : et elle est positive !
J'ai aimé le texte qui, malgré son apparente simplicité sous-entendait beaucoup de questions sur le couple et la peur d'être seul.
Ces questions se révèlent d'autant plus puissantes par le jeu de mise en scène et par des situations quelques fois absurdes. La première scène est assez caractéristique de cela où l'on voit les deux amants discuter et le mari arrive d'un coup mais ne les surprend pas. Il parle à sa femme plutôt normalement, comme si l'amant présent n'était qu'une pensée de la part de sa femme.
Le jeu de présence / absence est donc particulièrement bien mis en scène dans cette pièce.
Les pistes sont brouillées dans ce triangle amoureux. La mise en scène signée Thibault Ameline s'inscrit parfaitement dans ce jeu de cache-cache entre chaque scène. Sans se suivre de manière linéaire, elles s'imbriquent à merveille et constituent progressivement le puzzle sentimental de cette pièce de Florian Zeller. Un décor épuré où seul un praticable noir symbolise le lit de la rupture, de l'adultère puis de la mort.
Si les conditions de la petite salle du Théâtre de Poche rendent parfois difficile l'écoute, ou du moins le confort des spectateurs, on apprécie dans l'ensemble ce texte ingénieux, étrange et parfois absurde. Le jeu des comédiens est assez inégal, pas en termes de qualité d'interprétation mais plutôt sur le plan du ton. Benjamin Jungers (pensionnaire de la Comédie française) se renferme dans une interprétation anxiogène qui jure un peu face à la simplicité qu'affichent Jeoffrey Bourdenet et Carolina Jurczak. Résultat, on décroche de temps à autre.
Le spectacle légèrement nébuleux, soulève toutefois des questionnements intéressant sur la jalousie et la lassitude au sein du couple, cette union bizarre de deux autres.
Pas une année sans un succès avec une grosse tête d'affiche (Arditi, Hirsch, Luchini et bientôt Auteuil...). Bref, Zeller est partout. Au Théâtre de Poche, on assiste à un phénomène de retour vers le passé avec L'Autre, une pièce de jeunesse intimiste. Sous forme de saynètes, le tout jeune dramaturge d'alors s'exerce à passer au peigne fin la difficulté d'aimer, les faux-fuyants et les trahisons. Fidèle comparse de Zeller, Thibault Ameline parvient plutôt habilement à capter le mystère et l'indétermination d'une partition à trois voix malgré une écriture bien fluctuante.
Plutôt que de s’atteler à une construction classique en bonne et due forme, Zeller opte pour une fragmentation de son discours amoureux. Passé, présent et futur se confondent et la Carte du Tendre se révèle brouillée. Les attentes sont déjouées et le déroulement non-linéaire de l’intrigue séduit autant qu’il agace. Gare à ne pas se prendre les pieds dans le tapis. Pour compliquer l’affaire, le dramaturge superpose fantasme et réalité dans un entre-deux assez bien dosé.
Là où le bât blesse, c’est que l’écriture ne tient parfois pas la route. Dans leur ensemble, les neuf petites scènes pataugent dans une langue du quotidien qui aplatit les enjeux dramatiques de la pièce. Les dialogues virent parfois au café-théâtre et donc cela ne vole pas très haut… Pourtant, à la toute fin, Zeller se ressaisit et livre deux épisodes très réussis. Le premier orchestre un ping-pong verbal virtuose entre Elle et L’Autre sous forme de déclaration d’amour contradictoire jubilatoire. Les répliques s’enchaînent avec bonheur dans un Je t’aime, moi non plus brillant. L’ultime séquence s’inscrit dans les sillages du surréalisme le plus fou avec cet ange de la mort-metteur en scène qui organise le dernier tableau de cette valse funèbre.
Thibault Ameline ne s’embarrasse pas d’un décor bourgeois réaliste : l’espace exigu de la petite salle du Poche ne le lui permet pas de toute façon. Un simple cube noir évoque tout à la fois un lit ou un banc. Efficace mais un peu abrupt. Tout repose surtout sur la direction d’acteurs. Encore une fois, tous ne sont pas logés à la même enseigne. Carolina Jurczak reste très verte dans son jeu malgré une belle fraîcheur : elle paraît passer à côté de son texte et ne pas le comprendre. Les garçons s’en sortent bien mieux. Benjamin Jungers, ex-pensionnaire du Français, se démène en chien fou, jaloux et perturbé en diable. Mais c’est Jeoffrey Bourdenet qui remporte la palme : le beau brun à la diction envoûtante charme dans son rôle d’intrus. Sa virilité à vif combinée à son élégance folle et à sa stature assurée restituent toutes les ambiguïtés de la pièce.