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La Cerisaie, Clément Hervieu-Léger

La Cerisaie, Clément Hervieu-Léger
De Anton Tchekhov
Mis en scène par Clément Hervieu-Léger
  • Comédie Française - Salle Richelieu
  • 2, rue de Richelieu
  • 75001 Paris
  • Palais Royal (l.1, l.7)
Itinéraire
À l'affiche du :
21 février 2025 au 1 juin 2025
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« J’aime le théâtre fait de souvenirs », dit Clément Hervieu-Léger qui met en scène avec « La Cerisaie » l’œuvre ultime de Tchekhov.

Au crépuscule d’un empire féodal qui rebat ses cartes politiques et sociales au tournant du XXe siècle, la Cerisaie est un havre de beauté ; l’auteur russe cristallise en elle les tiraillements de la fin d’une époque. « Il faut que tout change pour que rien ne change » énonce Tancredi dans Le Guépard de Tomasi di Lampedusa, filmé par Visconti.

Clément Hervieu-Léger y reconnaît la sensibilité de la communauté inventée par Tchekhov.

Acculés à la vente, Lioubov – qui vient de rentrer de Paris – et les siens n’ont pas compris l’urgence de la situation. Les habitudes, comme les souvenirs d’enfance, d’une classe aristocratique que tout semblait jusque-là épargner les ont rendus incapables de clairvoyance, et ce malgré les mises en garde du marchand Lopakhine, fils d’un ancien moujik qui rachètera finalement la propriété aux enchères.

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L'AVIS DE LA REDACTION : 9,5/10

La fin d'un monde.
Le crépuscule d'un lieu.

Tout est raconté dans cette pièce symbolique de Tchékhov : une aristocratie inadaptée au tournant du 20e siècle, la prise de pouvoir de l'argent, les prémices de la révolution, la décadence d'une société ....

Il n'y a pourtant aucune violence dans cette mort inéluctable, mais plutôt des personnages qui errent, perdus dans le vide de leur vie, des couleurs indécises, des émotions fluctuantes.
Seul Lopakhine, le marchand, qui représente le nouveau pouvoir de l'argent, sait où il va.

Il faut une immense sensibilité pour mettre en scène ce brouillard dans lequel les personnages flottent, désorientés.

Le pari est réussi haut la main par Clément Hervieu Léger et toute la Troupe !

Sur le plateau, un décor de chambre d'enfants, parfaite symbolique du passé, où seul un tableau de cerisiers évoque le Domaine.
Dans cet espace, les comédiens évoluent, rient et pleurent, dansent et chantent, avec un naturel époustouflant.

Mention spéciale à Eric Génovèse, incomparable en aristocrate complètement à côté de la plaque.

Il est des moments magiques au théâtre qui nous emportent.

Celui là en est un !

 

Sylvie Tuffier

Note rapide
8,5/10
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Toutes les critiques
26 nov. 2021
9,5/10
7
La fin d'un monde.
Le crépuscule d'un lieu.

Tout est raconté dans cette pièce symbolique de Tchékhov : une aristocratie inadaptée au tournant du 20e siècle, la prise de pouvoir de l'argent, les prémices de la révolution, la décadence d'une société ....

Il n'y a pourtant aucune violence dans cette mort inéluctable, mais plutôt des personnages qui errent, perdus dans le vide de leur vie, des couleurs indécises, des émotions fluctuantes.
Seul Lopakhine, le marchand, qui représente le nouveau pouvoir de l'argent, sait où il va.

Il faut une immense sensibilité pour mettre en scène ce brouillard dans lequel les personnages flottent, désorientés.

Le pari est réussi haut la main par Clément Hervieu Léger et toute la Troupe !

Sur le plateau, un décor de chambre d'enfants, parfaite symbolique du passé, où seul un tableau de cerisiers évoque le Domaine.
Dans cet espace, les comédiens évoluent, rient et pleurent, dansent et chantent, avec un naturel époustouflant.

Mention spéciale à Eric Génovèse, incomparable en aristocrate complètement à côté de la plaque.

Il est des moments magiques au théâtre qui nous emportent.

Celui là en est un !
16 nov. 2021
8/10
2
La Cerisaie d’Anton Tchekhov mis en scène par Clément Hervieu-Léger

La Cerisaie créée en 1904 est la dernière pièce de Tchekhov disparue quelques mois plus tard.
C’est la fin d’un monde aristocratique, la disparition de la maison familiale, les souvenirs d’enfances qui reviennent avec nostalgie, les spectres qui viennent hantés les souvenirs, l’incapacité de se remettre en question, les rendez-vous amoureux ratés et l’ouverture vers une nouvelle ère incertaine pour beaucoup d’en eux et engendrant les incertitudes.

Après la noyade de son fils, et la mort de son époux, Lioubov a migré à Paris où elle a mené une vie insouciante. Cinq ans plus tard, désargentée en partie par un amant et désespérée, elle est de retour au milieu des siens ; Varia et Ania ses filles, Gaev son frère….
Lioubov inconsciente et légère ne peut admettre sa ruine et n’écoute point les conseils de Lopakine, fils de de moujik devenu riche marchand.
Lioubov va-t-elle perdre la cerisaie ?
Lopakine qui a toujours rêvé de cette Cerisaie où son père et son grand -père travaillaient en tant que moujik, l’obtiendra-t-il ?

La mise en scène de Clément Hervieu-Léger est orchestrée avec finesse et grande précision.
Les retrouvailles se passent dans une magnifique chambre d’enfant où les souvenirs ne peuvent que s’éveiller au regard des meubles et des jouets.
Le décor évolue pour notre plus grand plaisir en cerisaie, en salle de bal puis peu à peu le plateau sera vide et abandonné comme le domaine…

La musique de Pascal Sangla et la lumière Bertrand Couderc intensifient les émotions.

Les comédiens nous amusent, nous émeuvent et nous réjouissent avec grand brio.
Michel Favory (Firs) nous attendrit et nous émeut, ayant servi ses maitre toute son existence, il sera l’oublié de tous.
Véronique Vella (Charlotta) nous enchante de par sa magnifique voix et sa gestuelle.
Florence Viala interprète avec finesse Lioubov parfois désinvolte puis tourmentée par ses souffrances et ses désillusions.

C’est toujours une joie de retrouver cette troupe talentueuse.
Agréable moment de théatre.
16 nov. 2021
8/10
11
Où sont les serfs ?
Dans la cerisaie...
Qu'est-ce qu'ils y font ?
Ils la rachètent !

Et en avant le moujik !


Voici quarante-deux ans que le servage a été aboli en Russie, lorsque Tchekhov entreprend d'écrire sa Cerisaie.
La Cerisaie, c'est le beau domaine de Lioubov Andréevna. Après cinq ans passés à Paris suite à la mort de son jeune fils, elle revient à la maison.
Elle retrouve ceux qui l'attendent avec impatience, ses filles, le vieux maître d'hôtel, le précepteur, la dévouée servante...


Et Lopakhine, le marchand.
C'est lui qui, fils et petit fils de serfs du domaine, va rappeler à tout le monde que les valeurs s'inversent.

Tchekhov, en véritable sociologue qu'il est, sait bien que pour pouvoir recouvrer leur liberté, les serfs devaient s'endetter lourdement afin de racheter à leurs maîtres leur parcelle de terre.


Aujourd'hui, c'est ce même Lopakhine qui nous informe que la Cerisaie va être vendue aux enchères, les maîtres étant à leur tour fortement endettés.

Et c'est lui seul qui pourra acquérir la propriété.


La dette...

Dette financière, certes, mais évidemment dette morale...

Des années de servage, d'esclavage, ont laissé des traces indélébiles...


Mais ne nous y trompons pas, le personnage principal de la pièce, et c’est ce qu’a bien compris Clément Hervieu-Léger, le personnage principal, c’est évidemment le domaine, la maison.

Il a eu la très bonne idée de situer l’action qui s’étend sur quelques mois dans un lieu presque unique : la chambre.
Et plus précisément la chambre d’enfants.
(Deux dispositifs scénographiques permettront néanmoins d’élargir le lieu intérieur. Je vous laisse découvrir.)

Le choix de cette chambre d’enfants n’est pas anodin.
C’est l’endroit par excellence où les souvenirs vont resurgir. Parce que rien n’a changé, dans cette chambre-là.
Dans la belle scénographie signée Aurélie Maestre, à l’intérieur de cette datcha en bois, nous voyons les petits meubles, un lit de petite taille, une commode miniature. Nous retrouvons les jouets eux aussi en bois qui n’ont toujours pas été remisés au grenier.

On pourrait presque encore sentir le parfum du chocolat brûlant ou des gâteaux à la crème fouettée.

C’est dans cette chambre que tout le monde se retrouve, dès l’arrivée au domaine.
C’est là où le passé peut revivre.

Le passé et ses souvenirs.
Autre thème très présent dans cette ultime pièce du dramaturge russe.

Le metteur en scène, qui, nous dit-il, porte cette pièce en lui depuis très longtemps, affectionne ce théâtre de souvenirs. Ses choix artistiques passés le prouvent amplement.

Une autre réussite scénographique, c’est d’avoir permis au décor d’évoluer imperceptiblement, durant ces deux heures que dure la pièce.
Tout doucement, l’espace scénique va se réduire, tout comme se réduit l’ancien modèle social.

Aux murs, les tableaux vont progressivement disparaître : eux aussi, témoins du passé, seront décrochés pour laisser la place à de nouvelles pages d’écritures sociales et historiques.

La troupe des Comédiens français, à son habitude, est irréprochable.

Clément Hervieu-Léger les dirige de manière précise, peut-être parfois un peu trop sage, même.
Il sait bien en tout cas que l’auteur, habitué du mélange des genres ou plutôt habitué à ne pas afficher clairement un genre en particulier, a précisé que cette pièce était aussi une comédie.

Nous rions, donc, à certains moments.
Les chutes de Sébastien Pouderoux, les interventions de Véronique Vella (qui chantera, une nouvelle fois pour notre plus grand plaisir), les tirades un peu désabusées ou désenchantées de Florence Viala, les ruptures de Loïc Corbery, les envolées de Nicolas Lormeau nous amusent beaucoup.

Les comédiens nous émeuvent également dans cette pièce qui raconte le départ forcé d’une propriété, mais aussi qui nous dit l’irrémédiable fin d’une société.
Un long dialogue entre Jérémy Lopez et Melle Viala relève de cette veine faite de délicatesse et de sensibilité.

Et puis Michel Favory campe admirablement un Firs plein de sollicitude pour ses maîtres.
Il nous montre parfaitement ce personnage de domestique encore attaché à l’ordre ancien.

C'est lui qui restera sur le plateau, serviteur oublié de tous.
Le symbole de la fin d'un monde qui se meurt.

J’ai beaucoup aimé également le travail sur le son de Jean-Luc Ristord.
C’est d’ailleurs lui qui fournit une véritable ouverture à la pièce, à mesure que les lumières de la sallle baissent, avec les sons de la gare, du train qui arrive, les freins qui crissent.
Et puis des bruits extérieurs, plus ou moins perceptibles, avec notamment des sons d’oiseaux, illustrent très précisément le développement de la pièce.

Au final, c’est un beau moment de théâtre qui nous est proposé.
Venez donc passer ces deux heures dans la Cerisaie, avant que Lopakhine ne livre le domaine aux constructeurs de bungalows et aux estivants.
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Notes détaillées (pour les plus courageux)
Texte
Jeu des acteurs
Emotions
Intérêt intellectuel
Mise en scène et décor