Ses critiques
205 critiques
9/10
Dans L’âge libre, les quatre filles s’inspiraient des Fragments d’un discours amoureux pour montrer comme se vit l’amour au féminin. On sentait déjà la part de vécu, l’implication et la nécessité qui émanaient de la troupe. Ici, ils sont trois à aborder les nombreux questionnements de la génération Y, les Millenials comme on les appelle. Ce sont des tableaux plus ou moins longs qui abordent les sujets clés des Millenials, et les références sont effectivement bien trouvées – le discours de Marion Cotillard aux Oscars, la découverte de la vie seule qui se ponctue d’appels désespérés aux parents, les tentatives d’être toujours dans la norme, les débats radiophoniques interminables par ces grands intellectuels qui pensent pouvoir théoriser tout ce qui se passe dans nos têtes…
Deuxième spectacle de la compagnie, et déjà une patte s’impose : les paillettes sur les yeux – et même parfois sur le corps, la créativité, un brin de fantaisie et pourtant toujours cet ancrage brutal dans une réalité qui nous touche. Ils ont su s’approprier le sujet avec non seulement une grande vérité dans le propos mais également, et on les reconnaît bien là, beaucoup d’humour et d’autodérision. Je ne me suis pas retrouvée dans tous les tableaux – mais c’est normal, j’ai 40 ans dans ma tête – mais j’ai bien perçu l’esprit Millenials et ces questions, parfois fondamentales parfois dérisoires, qui les agitent.
Ils ont une manière assez unique de présenter la chose ; peut-être est-ce dû à leur authenticité ? Cette entrée en matière brutale et euphorisante, cette confrontation au public, cette envie de vivre débordante et surtout communicative a quelque chose d’addictif. Le spectacle est trop court, on en voudrait encore, surtout qu’on ne doute pas une seule seconde qu’ils en ont sous la semelle. Des moments de groupe, des tirades plus solitaires, chacun a son moment et le trio semble prendre un réel plaisir sur scène. Comme nous !
Deuxième spectacle de la compagnie, et déjà une patte s’impose : les paillettes sur les yeux – et même parfois sur le corps, la créativité, un brin de fantaisie et pourtant toujours cet ancrage brutal dans une réalité qui nous touche. Ils ont su s’approprier le sujet avec non seulement une grande vérité dans le propos mais également, et on les reconnaît bien là, beaucoup d’humour et d’autodérision. Je ne me suis pas retrouvée dans tous les tableaux – mais c’est normal, j’ai 40 ans dans ma tête – mais j’ai bien perçu l’esprit Millenials et ces questions, parfois fondamentales parfois dérisoires, qui les agitent.
Ils ont une manière assez unique de présenter la chose ; peut-être est-ce dû à leur authenticité ? Cette entrée en matière brutale et euphorisante, cette confrontation au public, cette envie de vivre débordante et surtout communicative a quelque chose d’addictif. Le spectacle est trop court, on en voudrait encore, surtout qu’on ne doute pas une seule seconde qu’ils en ont sous la semelle. Des moments de groupe, des tirades plus solitaires, chacun a son moment et le trio semble prendre un réel plaisir sur scène. Comme nous !
0,5/10
J’aime beaucoup Mathilde Bisson. Je préfère préciser en début d’article puisque vu ce que je vais dire sur ce spectacle, on pourrait presque croire que j’avais de mauvaises intentions. Or j’avais de très bonnes raisons de vouloir le découvrir : découverte il y a quelques années dans L’importance d’être sérieux d’Oscar Wilde, Mathilde Bisson est une actrice que j’adore. C’était même l’une des seules qui avait su me convaincre dans la décevante Fleur de Cactus de Michel Fau l’année dernière, en composant un personnage de manière délicate et lumineuse. Bref, l’imaginer en Brigitte Bardot avait de quoi donner l’eau à la bouche.
D’abord, le titre comme l’intrigue sont mensongers. Là où Moi non plus évoque le célèbre duo Gainsbourg-Bardot et propose donc de découvrir les coulisses de la création de cette oeuvre, la pièce retrace en réalité une presque banale soirée entre les deux amants, la composition de la chanson n’arrivant que très tardivement dans le spectacle. Soirée banale donc, lors de laquelle Brigitte rejoint Serge dans sa suite du Ritz ; lui voudrait sortir, elle non ; elle lui demande d’écrire pour elle une chanson d’amour, il lui propose Bonnie and Clyde avant de composer, dans la nuit, Je t’aime… moi non plus.
D’abord il faut parler de la pièce. Non seulement elle est très mal ficelée, c’est-à-dire que qui ne connaîtrait pas un minimum de la vie des personnages risque de passer à côté de la plupart des références, amenées de manière assez maladroites, mais en plus elle est d’une fadeur incroyable. Dans cette soirée finalement, il ne se passe pas grand chose et les dialogues sont d’une pauvreté sidérante. On ose pourtant espérer que les soirées liant les deux artistes avaient tout de même plus de goût. Sorry groupies. Quelle part est fiction, quelle part réalité ? L’auteur s’est-il seulement renseigné sur l’existence d’une telle nuit ? Mystère.
Ensuite, il faut parler de la mise en scène. J’ai rarement vu une mise en scène aussi faible, c’est-à-dire que rien ne semble réellement pensé. Les comédiens se déplacent vaguement, Serge Gainsbourg faisant approximativement 14 fois le tour de son piano à queue et Mathilde Bisson parcourant quelques kilomètres durant ses allers-retours du piano jusqu’au lit, mais ces va-et-vient semblent sans but réel. Je passerai sous silence les intermèdes musicaux accompagnés d’une création lumineuse style « sphère infernale » à la fois cheap et inutile, véritables projections pour un con, qui jouent une grande part dans mon énervement global.
Enfin, parlons des acteurs. Je vais passer rapidement sur Mathilde Bisson, dont la superbe plastique confère un léger intérêt visuel dans le spectacle. La comédienne a une partition si peu intéressante qu’elle ne parvient pas à briller autant que d’habitude, mais s’en sort du mieux qu’elle peut. C’est moins le cas en revanche pour son partenaire, Jérémie Lippman, qui semble n’avoir trouvé qu’une note pour son Gainsbourg et ne veut plus la lâcher. Il jouera ainsi constamment, dodelinant de la tête, laissant de longs temps entre chaque répliques, baissant systématiquement le ton en fin de phrase. Vous l’aurez compris : l’un est « in » et l’autre est « out ».
Je suis venue vous dire de n’pas y aller.
D’abord, le titre comme l’intrigue sont mensongers. Là où Moi non plus évoque le célèbre duo Gainsbourg-Bardot et propose donc de découvrir les coulisses de la création de cette oeuvre, la pièce retrace en réalité une presque banale soirée entre les deux amants, la composition de la chanson n’arrivant que très tardivement dans le spectacle. Soirée banale donc, lors de laquelle Brigitte rejoint Serge dans sa suite du Ritz ; lui voudrait sortir, elle non ; elle lui demande d’écrire pour elle une chanson d’amour, il lui propose Bonnie and Clyde avant de composer, dans la nuit, Je t’aime… moi non plus.
D’abord il faut parler de la pièce. Non seulement elle est très mal ficelée, c’est-à-dire que qui ne connaîtrait pas un minimum de la vie des personnages risque de passer à côté de la plupart des références, amenées de manière assez maladroites, mais en plus elle est d’une fadeur incroyable. Dans cette soirée finalement, il ne se passe pas grand chose et les dialogues sont d’une pauvreté sidérante. On ose pourtant espérer que les soirées liant les deux artistes avaient tout de même plus de goût. Sorry groupies. Quelle part est fiction, quelle part réalité ? L’auteur s’est-il seulement renseigné sur l’existence d’une telle nuit ? Mystère.
Ensuite, il faut parler de la mise en scène. J’ai rarement vu une mise en scène aussi faible, c’est-à-dire que rien ne semble réellement pensé. Les comédiens se déplacent vaguement, Serge Gainsbourg faisant approximativement 14 fois le tour de son piano à queue et Mathilde Bisson parcourant quelques kilomètres durant ses allers-retours du piano jusqu’au lit, mais ces va-et-vient semblent sans but réel. Je passerai sous silence les intermèdes musicaux accompagnés d’une création lumineuse style « sphère infernale » à la fois cheap et inutile, véritables projections pour un con, qui jouent une grande part dans mon énervement global.
Enfin, parlons des acteurs. Je vais passer rapidement sur Mathilde Bisson, dont la superbe plastique confère un léger intérêt visuel dans le spectacle. La comédienne a une partition si peu intéressante qu’elle ne parvient pas à briller autant que d’habitude, mais s’en sort du mieux qu’elle peut. C’est moins le cas en revanche pour son partenaire, Jérémie Lippman, qui semble n’avoir trouvé qu’une note pour son Gainsbourg et ne veut plus la lâcher. Il jouera ainsi constamment, dodelinant de la tête, laissant de longs temps entre chaque répliques, baissant systématiquement le ton en fin de phrase. Vous l’aurez compris : l’un est « in » et l’autre est « out ».
Je suis venue vous dire de n’pas y aller.
5,5/10
Suis-je la seule à devenir lasse des créations du Français présentées Salle Richelieu cette année ? Après la déception de La Tempête, la trahison des Fourberies de Scapin, voilà de nouvelles heures ennuyeuses passées dans le Premier Théâtre de France. Pourtant le spectacle avait de quoi m’appâter : grande admiratrice des vieux comédiens, enthousiaste à l’idée d’une pièce sur la vieillesse de la mort, seul le nom de Lars Norén me laissait de marbre devant cette affiche. Un nom qui a finalement tout envahi, puisqu’en définitive c’est le spectacle entier qui m’a laissée totalement impassible.
Dans cette pièce crépusculaire, on suit les vacances d’un groupe du troisième âge qui se retrouvent régulièrement dans cet hôtel en bord de mer. Cette semaine au soleil pourrait être la dernière, et on sent que la chose les obsède. De la mort à venir, pas vraiment de tabou. Certains la souhaitent même. Les autres passent leur temps à ressasser le passer, à l’embellir parfois, à essayer de reconstruire ce qui semble être devenu flou et que le temps a déconstruit.
Impossible pour moi de ne pas comparer ce texte à Fin de Partie. Même s’il n’a pas tous les traits de Beckett, ces dialogues décousus, ces personnages sans réel lien, cette atmosphère de décomposition omniprésente ou l’on ne sait pas tout de suite si l’on est dans le monde est morts ou bien chez les vivants m’ont rappelé la pièce de l’auteur irlandais. Mais Lars Norén ne semble pas s’être véritablement arrêté sur une atmosphère précise. Ils semblent intemporels, ces vieillards ; leurs problèmes, universels. Et pourtant, ils sont ancrés dans une réalité bien définie, temporellement, mais aussi localement, et ce besoin de situer casse une atmosphère qui peine déjà à s’installer.
Mais n’est pas Beckett qui veut, et le texte de Norén ne prend pas. Il aborde pourtant son thème avec beaucoup de vérité : l’attachement aux animaux, le retour soudain à l’enfance, le manque soudain de conscience de soi, l’incapacité à faire partir d’un groupe ou de tenir une conversation, et surtout cet éternel retour sur le passé, tout semble provenir d’un vécu véridique. Mais l’aspect décousu des discussions, les tirades des personnages sur leur vie passée, leur quotidien monotone dans cet hôtel manque cruellement d’intérêt. Et que dire de sa représentation de la mort – si elle se veut poétique, elle n’en est pas moins ennuyeuse. Les comédiens qui disparaissent au fil de la pièce se retrouve derrière un voile en fond de scène et si l’on s’accrochait encore jusque-là, c’est le moment où l’on lâche totalement tant l’intérêt du texte frôle le néant.
Heureusement, les Comédiens-Français sont en pleine forme. Il faut dire que Lars Norén s’est entouré de pointures : mis à part Alain Lenglet qui est un peu en-dessous de ses camarades, tous livrent une belle performance et les regarder est finalement un intérêt en soi. Chacun donne à son personnage une touche d’humanité : ainsi, la douceur de Dominique Blanc se confronte à la peur d’Hervé Pierre. Tous abordent un aspect spécifique lié à la vieillesse. Anne Kessler se détache du groupe avec des punchlines déclamées avec toujours beaucoup d’élégance et de finesse. C’est quand même chouette de la retrouver sur scène.
Vous l’aurez donc compris, ce spectacle m’a laissée totalement de glace. Je n’ai été ni dérangée, ni touchée, pas une fois émue, encore moins intéressée, parfois vaguement amusée, jamais prise dans ce spectacle. Je reconnais volontiers que des éléments perturbateurs ont pu m’empêcher d’y entrer : merci au monsieur du premier rang qui voulait apparemment déposer son poumon sur la scène. Je pense également à la souffleuse, hurlant son texte à une Martine Chevallier à l’air perdu, si bien qu’on en vient à se demander si cette participation était réellement inopportune. Peut-être la seule réflexion qui m’effleurera au cours du spectacle.
Dans cette pièce crépusculaire, on suit les vacances d’un groupe du troisième âge qui se retrouvent régulièrement dans cet hôtel en bord de mer. Cette semaine au soleil pourrait être la dernière, et on sent que la chose les obsède. De la mort à venir, pas vraiment de tabou. Certains la souhaitent même. Les autres passent leur temps à ressasser le passer, à l’embellir parfois, à essayer de reconstruire ce qui semble être devenu flou et que le temps a déconstruit.
Impossible pour moi de ne pas comparer ce texte à Fin de Partie. Même s’il n’a pas tous les traits de Beckett, ces dialogues décousus, ces personnages sans réel lien, cette atmosphère de décomposition omniprésente ou l’on ne sait pas tout de suite si l’on est dans le monde est morts ou bien chez les vivants m’ont rappelé la pièce de l’auteur irlandais. Mais Lars Norén ne semble pas s’être véritablement arrêté sur une atmosphère précise. Ils semblent intemporels, ces vieillards ; leurs problèmes, universels. Et pourtant, ils sont ancrés dans une réalité bien définie, temporellement, mais aussi localement, et ce besoin de situer casse une atmosphère qui peine déjà à s’installer.
Mais n’est pas Beckett qui veut, et le texte de Norén ne prend pas. Il aborde pourtant son thème avec beaucoup de vérité : l’attachement aux animaux, le retour soudain à l’enfance, le manque soudain de conscience de soi, l’incapacité à faire partir d’un groupe ou de tenir une conversation, et surtout cet éternel retour sur le passé, tout semble provenir d’un vécu véridique. Mais l’aspect décousu des discussions, les tirades des personnages sur leur vie passée, leur quotidien monotone dans cet hôtel manque cruellement d’intérêt. Et que dire de sa représentation de la mort – si elle se veut poétique, elle n’en est pas moins ennuyeuse. Les comédiens qui disparaissent au fil de la pièce se retrouve derrière un voile en fond de scène et si l’on s’accrochait encore jusque-là, c’est le moment où l’on lâche totalement tant l’intérêt du texte frôle le néant.
Heureusement, les Comédiens-Français sont en pleine forme. Il faut dire que Lars Norén s’est entouré de pointures : mis à part Alain Lenglet qui est un peu en-dessous de ses camarades, tous livrent une belle performance et les regarder est finalement un intérêt en soi. Chacun donne à son personnage une touche d’humanité : ainsi, la douceur de Dominique Blanc se confronte à la peur d’Hervé Pierre. Tous abordent un aspect spécifique lié à la vieillesse. Anne Kessler se détache du groupe avec des punchlines déclamées avec toujours beaucoup d’élégance et de finesse. C’est quand même chouette de la retrouver sur scène.
Vous l’aurez donc compris, ce spectacle m’a laissée totalement de glace. Je n’ai été ni dérangée, ni touchée, pas une fois émue, encore moins intéressée, parfois vaguement amusée, jamais prise dans ce spectacle. Je reconnais volontiers que des éléments perturbateurs ont pu m’empêcher d’y entrer : merci au monsieur du premier rang qui voulait apparemment déposer son poumon sur la scène. Je pense également à la souffleuse, hurlant son texte à une Martine Chevallier à l’air perdu, si bien qu’on en vient à se demander si cette participation était réellement inopportune. Peut-être la seule réflexion qui m’effleurera au cours du spectacle.
4,5/10
Ha ! Michel Fau. J’ai tant encensé cet artiste, tant admiré ce comédien, tant applaudi ce metteur en scène que la chute n’en est aujourd’hui que plus rude. Depuis quelques spectacle, Michel Fau ne se ressemble plus. Il m’a perdue. Je ne retrouve plus ce qui m’a d’abord attirée chez lui – sa folie, son intelligence, son anticonformisme. Malgré ce qu’il peut dire, il rentre de plus en plus dans un moule qui lui convient si peu : grosses productions, grosses têtes d’affiches, grosses vannes sans finesse. Comme je continue d’espérer retrouver cet homme que je considérais proche du génie, je vais encore découvrir ses créations. Et une déception de plus, une !
Elisabeth et Philippe sont ensemble depuis 8 ans. Le temps a terni leur amour et aujourd’hui Elisabeth semble vouloir s’affirmer en tant que femme seule, libre et indépendante. Philippe, s’il semble concevoir le départ prochain de sa femme, n’en reste pas moins très intrusif quant aux hommes qu’elle peut fréquenter et tente même de deviner de lui-même les nouvelles relations de sa femme. Cependant, l’attachement est tel que même lorsqu’il disparaît physiquement de sa vie, laissant à Elisabeth l’espace nécessaire à sa reconstruction, sa présence semble immuable, ancrée dans l’appartement plein de souvenirs, dans les habitudes prises au fil des années. Même absent, Philippe est partout.
On l’a compris depuis longtemps, les thèmes de l’amour, du couple, de la longévité de la passion, sont chers à Michel Fau. Sur ce sujet, il nous avait présenté il y a quelques années Un amour qui ne finit pas d’André Roussin. Étonnée tout d’abord par son choix de ressortir une pièce jamais jouée, j’étais sortie complètement convaincue de sa nécessité. J’aurais aimé retrouver cette surprise ici, d’autant que les thèmes abordés sont très proches. Mais les derniers choix de texte de Michel Fau ne s’avèrent malheureusement pas à la hauteur de ce à quoi il avait pu nous habituer, et cette pièce se montre finalement à la fois bavarde et fade.
Le spectacle se découpe en deux parties distinctes. La première amène le sujet – sujet important et traité de manière à la fois intelligente et rythmée. Moi qui avais entendu beaucoup de commentaires négatifs sur le spectacle, je me suis même surprise à me dire « Roooh quand même, ils exagèrent. Si ce n’est pas du grand Michel Fau, ce n’est pas non plus un spectacle déshonorant ». Je serrais les dents au début mais j’ai vite laisser le rire et l’intérêt gagner du terrain. Michel Fau, qui incarne Philippe, joue habilement de sa double casquette comédien/metteur en scène pour faire du mari le nouvel instigateur des actions de sa femme. Par ailleurs, le duo Doutey-Fau fonctionne très bien, les deux comédiens se renvoyant des balles de couleurs toujours différentes et qui tombent chaque fois à des endroits différents. C’est globalement un bon moment.
Seulement, toute bonne chose a une fin. Lorsque Michel Fau sort de scène au début de la seconde partie, il ne faut pas longtemps pour qu’on se mette à regarder l’heure. Mince, 22h. Il reste donc encore une heure, et si on a un peu appréhendé la forme de la pièce, on comprend rapidement que Michel Fau ne reviendra pas avant la dernière scène. Aucun des trois jeunes comédiens incarnant les amants de Elisabeth n’a l’aura ni la présence de Michel Fau, et soudain le texte s’alourdit considérablement. Même Mélanie Doutey, dont le jeu révèle pourtant une femme complexe et pétillante, ne parvient pas à maintenir notre intérêt. Ne reste plus qu’à subir un texte plat et des scènes sans consistance jusqu’au retour du comédien-metteur en scène. C’est long.
Elisabeth et Philippe sont ensemble depuis 8 ans. Le temps a terni leur amour et aujourd’hui Elisabeth semble vouloir s’affirmer en tant que femme seule, libre et indépendante. Philippe, s’il semble concevoir le départ prochain de sa femme, n’en reste pas moins très intrusif quant aux hommes qu’elle peut fréquenter et tente même de deviner de lui-même les nouvelles relations de sa femme. Cependant, l’attachement est tel que même lorsqu’il disparaît physiquement de sa vie, laissant à Elisabeth l’espace nécessaire à sa reconstruction, sa présence semble immuable, ancrée dans l’appartement plein de souvenirs, dans les habitudes prises au fil des années. Même absent, Philippe est partout.
On l’a compris depuis longtemps, les thèmes de l’amour, du couple, de la longévité de la passion, sont chers à Michel Fau. Sur ce sujet, il nous avait présenté il y a quelques années Un amour qui ne finit pas d’André Roussin. Étonnée tout d’abord par son choix de ressortir une pièce jamais jouée, j’étais sortie complètement convaincue de sa nécessité. J’aurais aimé retrouver cette surprise ici, d’autant que les thèmes abordés sont très proches. Mais les derniers choix de texte de Michel Fau ne s’avèrent malheureusement pas à la hauteur de ce à quoi il avait pu nous habituer, et cette pièce se montre finalement à la fois bavarde et fade.
Le spectacle se découpe en deux parties distinctes. La première amène le sujet – sujet important et traité de manière à la fois intelligente et rythmée. Moi qui avais entendu beaucoup de commentaires négatifs sur le spectacle, je me suis même surprise à me dire « Roooh quand même, ils exagèrent. Si ce n’est pas du grand Michel Fau, ce n’est pas non plus un spectacle déshonorant ». Je serrais les dents au début mais j’ai vite laisser le rire et l’intérêt gagner du terrain. Michel Fau, qui incarne Philippe, joue habilement de sa double casquette comédien/metteur en scène pour faire du mari le nouvel instigateur des actions de sa femme. Par ailleurs, le duo Doutey-Fau fonctionne très bien, les deux comédiens se renvoyant des balles de couleurs toujours différentes et qui tombent chaque fois à des endroits différents. C’est globalement un bon moment.
Seulement, toute bonne chose a une fin. Lorsque Michel Fau sort de scène au début de la seconde partie, il ne faut pas longtemps pour qu’on se mette à regarder l’heure. Mince, 22h. Il reste donc encore une heure, et si on a un peu appréhendé la forme de la pièce, on comprend rapidement que Michel Fau ne reviendra pas avant la dernière scène. Aucun des trois jeunes comédiens incarnant les amants de Elisabeth n’a l’aura ni la présence de Michel Fau, et soudain le texte s’alourdit considérablement. Même Mélanie Doutey, dont le jeu révèle pourtant une femme complexe et pétillante, ne parvient pas à maintenir notre intérêt. Ne reste plus qu’à subir un texte plat et des scènes sans consistance jusqu’au retour du comédien-metteur en scène. C’est long.
7/10
Je n’ai pas un très bon souvenir de la dernière fois qu’on attendait la pluie sur la scène du Vieux-Colombier. Mais je n’aurais pas dû être superstitieuse, puisque le texte de Jean-Luc Lagarce n’a rien à voir avec celui de Sergi Belbel. Au contraire. Poétique, saccadé, parfois abstrait, préférant l’évocation au soulignement, je retrouve dans ce texte tout ce que je peux aimer chez l’auteur. Et je dois dire que, pour mon premier Lagarce sur scène, je suis plutôt satisfaite.
Difficile de résumer cette pièce. Elles sont cinq femmes dans une maison – le père est mort et seules restent La Plus Vieille, La Mère, L’Ainée, La Seconde, et La Plus Jeune – et on comprend que Le Jeune Frère est revenu. La pièce se divise en trois temps : elles évoquent d’abord leur passé, chacune se souvenant de ses relations avec le jeune homme. Puis vient le présent, son retour, les faits tels qu’ils ont été vécu par chaque personnage. Enfin surgit le futur, ses doutes, ses incertitudes, et tout l’imaginaire qui peut se construire dessus.
Globalement, je trouve que c’est un spectacle qui manque d’unité. Si les comédiennes parviennent à convaincre, elles sont quand même toutes sur une diction qui leur est propre, marquant d’autant plus les unités autonomes formées par leurs personnages. En réalité, j’ai eu du mal à comprendre l’apport de la mise en scène ici : les déplacements sont attendus, les comédiennes n’utilisent qu’une partie restreinte de la scène puisque la majeure partie est occupée par un décor inutile car jamais utilisé – décor anti-Lagarce au possible puisqu’il souligne matériellement tout ce qui aurait pu rester de l’ordre de l’imaginaire chez le spectateur. Néanmoins, de temps à autres, quelque chose se passe et soudain on entend le texte. Et c’est beau.
La grande surprise de ce spectacle est Jennifer Decker. Quiconque suit mes divers rendez-vous avec la Comédie-Française connaît mon peu d’estime pour son jeu d’actrice. Mais elle est indéniablement faite pour Lagarce. Elle a su trouver la note juste, avec ce naturel un rien aérien, comme si les mots à la disposition si particulière à Lagarce n’étaient pas un tout, mais venaient compléter une pensée, une âme, une intériorité qui les précède. Elle est belle, lumineuse, on a soudainement envie de rire avec elle, et de l’écouter longtemps encore. Un grand bravo.
Si Suliane Brahim met un peu plus de temps à s’approprier la langue de Lagarce, elle a fini par me convaincre entièrement. La comédienne, qui débute en force, tendant tout d’abord à trop chanter son texte ce qui le dénature un peu, se reprend rapidement et retourne sur ce fil qui lui est propre et d’où elle nous guide à volonté. Cécile Brune trouve tout de suite le ton juste et confère à La Plus Vieille quelque chose d’impalpable, comme hors du temps, préférant au soulignement Daberien, la suggestion Lagarcienne.
En revanche, l’évidence est moindre pour Clotilde de Bayser. La comédienne alourdit sa partition par des cris et des gestes inutiles, comme attirée de façon immuable par un désir de concret. Mais ce n’est rien à côté de la catastrophe Rebecca Marder. Cela fait déjà plusieurs spectacles que la comédienne passe à côté de son rôle, mais c’est d’autant plus criant avec un texte tel que celui-ci. Ses cris incessants déchirent nos oreilles, sa diction pâteuse et ses larmes maladroites ont un air de déjà-vu. La tirade de son personnage est un réel supplice et il faut attendre et prendre sur soi pour surmonter en silence ce moment douloureux.
Un spectacle qui alterne petites longueurs et belles envolées. Lagarce est là, par intermittence, et c’est quand même appréciable.
Difficile de résumer cette pièce. Elles sont cinq femmes dans une maison – le père est mort et seules restent La Plus Vieille, La Mère, L’Ainée, La Seconde, et La Plus Jeune – et on comprend que Le Jeune Frère est revenu. La pièce se divise en trois temps : elles évoquent d’abord leur passé, chacune se souvenant de ses relations avec le jeune homme. Puis vient le présent, son retour, les faits tels qu’ils ont été vécu par chaque personnage. Enfin surgit le futur, ses doutes, ses incertitudes, et tout l’imaginaire qui peut se construire dessus.
Globalement, je trouve que c’est un spectacle qui manque d’unité. Si les comédiennes parviennent à convaincre, elles sont quand même toutes sur une diction qui leur est propre, marquant d’autant plus les unités autonomes formées par leurs personnages. En réalité, j’ai eu du mal à comprendre l’apport de la mise en scène ici : les déplacements sont attendus, les comédiennes n’utilisent qu’une partie restreinte de la scène puisque la majeure partie est occupée par un décor inutile car jamais utilisé – décor anti-Lagarce au possible puisqu’il souligne matériellement tout ce qui aurait pu rester de l’ordre de l’imaginaire chez le spectateur. Néanmoins, de temps à autres, quelque chose se passe et soudain on entend le texte. Et c’est beau.
La grande surprise de ce spectacle est Jennifer Decker. Quiconque suit mes divers rendez-vous avec la Comédie-Française connaît mon peu d’estime pour son jeu d’actrice. Mais elle est indéniablement faite pour Lagarce. Elle a su trouver la note juste, avec ce naturel un rien aérien, comme si les mots à la disposition si particulière à Lagarce n’étaient pas un tout, mais venaient compléter une pensée, une âme, une intériorité qui les précède. Elle est belle, lumineuse, on a soudainement envie de rire avec elle, et de l’écouter longtemps encore. Un grand bravo.
Si Suliane Brahim met un peu plus de temps à s’approprier la langue de Lagarce, elle a fini par me convaincre entièrement. La comédienne, qui débute en force, tendant tout d’abord à trop chanter son texte ce qui le dénature un peu, se reprend rapidement et retourne sur ce fil qui lui est propre et d’où elle nous guide à volonté. Cécile Brune trouve tout de suite le ton juste et confère à La Plus Vieille quelque chose d’impalpable, comme hors du temps, préférant au soulignement Daberien, la suggestion Lagarcienne.
En revanche, l’évidence est moindre pour Clotilde de Bayser. La comédienne alourdit sa partition par des cris et des gestes inutiles, comme attirée de façon immuable par un désir de concret. Mais ce n’est rien à côté de la catastrophe Rebecca Marder. Cela fait déjà plusieurs spectacles que la comédienne passe à côté de son rôle, mais c’est d’autant plus criant avec un texte tel que celui-ci. Ses cris incessants déchirent nos oreilles, sa diction pâteuse et ses larmes maladroites ont un air de déjà-vu. La tirade de son personnage est un réel supplice et il faut attendre et prendre sur soi pour surmonter en silence ce moment douloureux.
Un spectacle qui alterne petites longueurs et belles envolées. Lagarce est là, par intermittence, et c’est quand même appréciable.