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  • Théâtre des Bouffes du Nord
  • Paris 10ème

Tempest Project

Tempest Project
De William Shakespeare
Mis en scène par Peter Brook
  • Théâtre des Bouffes du Nord
  • 37 bis, boulevard de la Chapelle
  • 75010 Paris
Itinéraire
Billets de 18,00 à 32,00
Evénement plus programmé pour le moment
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La tempête est une énigme, c’est une fable où rien ne semble pouvoir être pris à la lettre et si on reste à la surface de la pièce sa qualité cachée nous échappe.

Il y a un mot qui revient très souvent dans la pièce, c’est le mot « liberté » - Et comme toujours avec Shakespeare le mot n’est pas employé d’une manière évidente, il vient comme une suggestion, il résonne tout au long de la pièce comme un écho - Caliban veut sa liberté, Ariel la sienne qui n’est pas la même et pour Prospero, il doit se libérer de la tâche qu’il s’est infligé lui-même, la vengeance, et tout ce qui va avec, et qui l’empêche d’être libre.

Le Duc Prospero, plongé dans ses livres, à la quête de l’occulte restait dans ses rêves et fut trahi par son frère.

Arrivé en exilé sur l’île, on pourrait croire qu’il va trouver sa liberté car il possède l’art de la magie et peut transformer les éléments à sa guise.

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27 avr. 2022
10/10
5
Ce travail remarquable de recherche réalisée à partir du texte « La tempête » met parfaitement en valeur les ressorts qui animent les motivations profondes du théâtre de Shakespeare. Le choix de l’épure quasi-totale des situations place avant tout, nu au centre de l'attention, le récit parlé des personnages qui portent toute la dimension narrative, resserrant les jeux scéniques à l’aspect congru de l’indispensable.

Il est mis en exergue alors devant nous ce qui est de plus noble et de plus important dans le théâtre de Shakespeare : la sincérité des êtres, leurs luttes contre ce qui les oppriment et entravent leur liberté. Sincérité du sentiment de soi et des autres, dans les sphères mentales, intimes ou sociales de l’humain, qui se traduit par le principe de liberté. Liberté de penser par soi-même, liberté d’agir en fonction de ses propres valeurs du Bien et de réagir, dans son rapport au réel et aux autres, à l’immixtion du Mal.

Peter Brook et Marie-Hélène Estienne nous proposent une formidable version de « La tempête », raffinée au double sens du terme, comme un aboutissement d’une création à l’innovation audacieuse et réussie.

« La Tempête est une énigme, c’est une fable où rien ne semble pouvoir être pris à la lettre et si on reste à la surface de la pièce sa qualité cachée nous échappe… Il y a un mot qui revient très souvent dans la pièce, c’est le mot « liberté ». Caliban veut sa liberté, Ariel la sienne qui n’est pas la même et pour Prospero, il doit se libérer de la tâche qu’il s’est infligé lui-même, la vengeance… Arrivé en exilé sur l’île, on pourrait croire qu’il va trouver sa liberté car il possède l’art de la magie et peut transformer les éléments à sa guise… Il ne pardonnera que quand il verra l’amour… Il devra alors faire face à lui-même et à son cœur et décider qu’il doit laisser la magie, enterrer son bâton… Pour finalement rester devant nous, humble, demandant le pardon. »

Cette proposition dramaturgique exprime tout son éclat et la limpidité de son message essentialisé grâce à cette scénographie centrée sur les personnages plus que sur les situations, avec quelques accessoires qui s’attachent au symbolique. Et, de facto, fait reposer l’ensemble du dispositif sur le travail d’interprétation.

Sylvain Levitte, Paula Luna, Fabio Maniglio, Luca Maniglio, Marilú Marini et Ery Nzaramba nous étonnent, nous émeuvent, nous font rire. Avec une incroyable finesse d’engagement, tout en fluidité et en évidence, Chacune et chacun nous touchent et font mouche à chaque coup. Toutes et tous contribuent à créer du début à la fin, en solo, en duo ou ensemble, un climat que le surnaturel survole avec aisance, faisant planer en permanence une poésie du fantastique, nous plongeant tout à fait dans un onirisme enchanteur.

Nous avons là, une magnifique illustration du jeu habité, d’incarnation exemplaire, de personnalisation pure des rôles. Des silences vivants aux déplacements en passant par les expressions, tout est travaillé pour et par le personnage ou celle ou celui qui le joue. On ne sait pas qui conduit l’autre, on ne sait pas distinguer ce qui empêcherait le chemin de la coupe aux lèvres. Un sentiment de perfection nous traverse. C’est époustouflant.

Un spectacle envoutant et captivant. Une beauté de jeu manifeste. Un moment rare de théâtre.
25 avr. 2022
10/10
5
Attention : avis de Tempête force Brook sur les Bouffes du Nord !
Ou comment vingt fois fois sur le métier tu remettras l’ouvrage.

Ou comment le grand Peter, avec sa complice depuis 1976 Marie-Hélène Estienne, comment cet immense dramaturge nous donne sa dernière vision en date de la pièce du grand William.
Une vision merveilleuse, onirique, épurée, une vision qui plonge le magnifique théâtre et ses spectateurs dans un véritable état de grâce !

1957 : première confrontation avec le texte, à Stratford. Sir John Gielguld jouait Prospero.
1968 : au Roundhouse, à Londres, Peter Brook en donne une version avec de tout jeunes comédiens.
1990 : Brook déplace le texte vers le continent africain, là où l’on peut encore rencontrer d’authentiques magiciens. Le personnage principal sera interprété par l’acteur malien et burkinabé Sotigui Kouyaté, lui-même griot.

En 2022, le jeune homme de 97 ans va nous proposer un magnifique bouquet de toutes les idées et les parti-pris qu’il a pu avoir au cours de ces différentes mises en scène.

Peter Brook nous le dit lui-même : de Shakespeare, « nous savons finalement très peu de choses ». Ce qui est certain, c’est que La tempête est sa dernière pièce, et que le dernier mot de ce texte de cette œuvre énigmatique (je le cite toujours) est « libre ».

La liberté… Le thème récurrent de cette comédie.
Voici donc de quoi il sera question. Nous allons rire en étant confrontés une nouvelle fois à ces personnages en quête de liberté.

Liberté pour soi-même, liberté à trouver, à revendiquer, à donner aux autres…

Mister Brook et Miss Estienne ont adapté la pièce, d’après la traduction de Jean-Claude Carrière, au cours d’un atelier-recherche ici même en février 2020.
En une heure et quinze minutes, avec un petit groupe de comédiens, ils sont arrivés à en tirer une quintessence.
Comme une vision du noyau cellulaire du texte original. De façon à se focaliser sur l’essentiel, sur le matériau primitif, sur l’essence même de l’œuvre.

Nous pénétrons dans la salle, et immédiatement nous saute aux yeux une évidence : pas besoin de décors ! Les merveilleux murs usés, ocres et rouges de la cage de scène, ces murs qui auraient tant à dire suffisent amplement.

Au sol, seulement quelques accessoires, des blocs de bois, des morceaux de tissus, des bancs.
Une épure, donc.

Peter Brook va une nouvelle nous confronter au fait d’avoir l’impression qu’on ne pourrait pas mettre en scène autrement ce que nous voyons.

Six comédiens épatants vont interpréter les sept personnages.

Une troupe de jeunes et moins jeunes, une sextet issu de pays différents, un petit groupe on ne peut plus cohérent aux différents accents.
Six actrices et acteurs qui vont nous enchanter, par leur jeu, leur fougue, leurs audaces, leur vis comica.

Et leur prise en compte du texte français.
Ce sera pour nous un vrai bonheur d’entendre la somptueuse traduction de Carrière dans la bouche de ces comédiens aux accents italien, allemand, argentin ou à la musicalité rwandaise.



En effet, Ery Nzaramba est originaire de ce pays africain.

Peter Brook et lui se connaissent bien. Il était déjà dans la distribution de la pièce The Prisoner, en 2020.
Son entrée sur le plateau est majestueuse, et glace le public.
En grand manteau noir, écharpe immaculée et long bâton noueux, symboles de sa magie, il va camper un impressionnant ex-duc de Milan, en exil sur cet île.

Ery Nzaramba sera un grand Prospero, nous faisant merveilleusement intégrer le chemin intérieur de cet homme comprenant qu’il va devoir abandonner sa magie et puis surtout renoncer à se venger.
De sa diction parfaite, de sa voix claire et posée, il nous dit les mots.
Je peux vous assurer que les amateurs d’assonances et d’allitérations se régalent lorsqu’il proclame les vers suivants :
« déclencher une hurlante guerre
et à ce terrifiant et crépitant tonnerre
donner le feu, et de sa propre flèche
fendre de Jupiter le chêne vigoureux,

ébranler le massif promontoire... »
Le comédien ne manque pas d’r…

Ses ruptures, ses « OK ! », ses regards, ses adresses au public nous enchantent.
Dans sa dernière scène, il est bouleversant !

Marilu Marini campe Ariel, un esprit au pouvoir de Prospero.
La comédienne native de Buenos-Aires sera absolument épatante en farfadet agile, en lutin espiègle.
Comme elle va nous faire rire, avec ses mimiques, ses grimaces, mais également cette belle capacité à faire ressortir l’humour de son texte !
Son petit geste consistant à attraper le pan de son manteau à chacune de ses apparitions et de ses sorties, ce petit geste est formidable. Nous finissons par l’attendre avec impatience.

Miranda et Ferdinand sont interprétés respectivement par l’actrice allemande Paula Luna et Sylvain Levitte.
Le couple est formidable, nous croyons totalement à leur histoire d’amour, avec une scène de déclaration bouleversante, sur le fil des baguettes de bois.

(Les différents morceaux de bois, que ce soient les bâtons, les baguettes, les souches ou les bûches, ces morceaux de bois auront une grande importance dans la mise en scène.
Tout comme les tissus, d’ailleurs. Tout ceci confèrera une dimension organique à l’entreprise artistique.)

Ferdinand, c’est Sylvain Levitte, qui endossera également le rôle de Caliban.
Lui aussi est irréprochable, nous émouvant ou nous faisant beaucoup rire. L’intensité de son jeu n’est plus à prouver.

Et puis dans le rôle de Trinculo et Stéphano, les deux serviteurs du roi de Naples, les jumeaux Fabio et Luca Maniglio s’en donnent à cœur joie.
Qu’est-ce qu’ils nous amusent, qu’est-ce qu’ils sont drôles ! Quelle bonne idée de leur avoir confié ces deux rôles !
Il n’y aura pas de noir final.
L’ovation se déchaînera directement, après un moment de silence et cet ultime mot, « libre » !

Ne manquez sous aucun prétexte cette merveilleuse vision.

Un pur moment de grâce et de bonheur. Ils sont finalement assez rares, ces moments-là !
Peter Brook nous a sans doute transmis un legs universel : nous faire approcher de très près la vérité shakespearienne.
3 nov. 2021
9/10
4
Captivant, Enchanteur, Éloquent.

La tempête est la dernière œuvre de Shakespeare, le pouvoir, la vengeance, la liberté, le pardon en sont les piliers encrés dans un monde fantastique et surnaturel.

Prospero, duc de Milan conte à sa fille Miranda les causes de leur exil sur cette ile déserte peuplée d’êtres surnaturels.

Dépossédé par son frère Antonio et chassé du pouvoir, il fut rejeté sur cette ile. Gonzallo un conseiller du roi de Naples lui a remis en secret des provisions et surtout ses livres de magie grâce auxquels Prospéro domine les esprits ainsi que les éléments naturels.

Nous sommes dans un monde où se côtoient les esprits et les hommes.

Ariel esprit bienveillant symbolisant le souffle de la vie.

Caliban plus malveillant, symbolisant la violence et la mort.

Prospero grand magicien pour se venger va provoquer le naufrage du vaisseau sur lequel Antonio et le roi de Naples son compère ont embarqué et leur imposer de dures épreuves…


Peter Brook en collaboration avec Marie Hélène Estienne cherche à nouveau le sens profond de cette pièce. Il nous offre une version épurée où le mot liberté est crucial et dominant.

Ariel souhaite se libérer de sa dette envers Prospero qui l’a libéré de Sycorax(sourcière de l’ile)

Caliban esclave et fils bâtard de Sycorax veut retrouver sa liberté.

Prospero voudrait se libérer de sa vengeance et de ses pouvoirs magiques et retrouver sa place.

Le dernier mot de la pièce – sans doute le dernier mot que Shakespeare a écrit – est le mot Libre.

Ery Nzaramba incarne un Prospero fascinant, il nous captive et nous entraine dans son monde peuplé d’êtres prodigieux et fantasmagoriques.

Marilù Marini interprète avec grand brio Areil aérienne et éthérée.

Paula Luna (Miranda), Sylvain Levitte, Fabio Maniglio, Luca Maniglio, nous réjouissent et émeuvent de par la justesse de leur jeu.

Sylvain Lefitte (Caliban) et les frères Fabio et Lucas Maniglio sont remarquables dans cette scène où Caliban rencontrant les deux ivrognes. Ils sont cocasses et drolatiques.

Les chants de Harué Momoyama nous enveloppent dans un univers de poésies intensifiant notre imagination et nous immergeant dans un monde où les êtres réels et les êtres invisibles se rencontrent.
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Notes détaillées (pour les plus courageux)
Texte
Jeu des acteurs
Emotions
Intérêt intellectuel
Mise en scène et décor