Critiques pour l'événement Comtesse de Ségur, née Rostopchine
26 juin 2017
8/10
54
C'est un régal !
Belle performance de Bérangère Dautun. Je n'ai pas vu le temps passé car à la fois captivant et émouvant. J'ai été enchantée par son timbre de voix à la fois gracieux, malicieux. Ce seul en scène est un subtil mélange de narrations et de jeux avec des touches contemporaines qui font sourire.
C'est surtout un bon moment de découvrir ce que fut la vie de la Comtesse de Segur et pourquoi pas de prolonger cette découverte par la lecture ou la relecture de ses livres... Un retour en enfance.
A voir !
7 mai 2017
8/10
62
La Comtesse "marche dans sa tête à la recherche de ses souvenirs". Elle raconte, la joie dans les yeux, son premier bal de l'Ambassade et ses valses adolescentes dans sa Russie natale.

"Je tourne de bonheur comme une toupie" s'esclaffe-t-elle auprès de son père adoré. Elle raconte aussi ses tourments. La réussite littéraire de la Comtesse aux cinquante-cinq ans bien sonnés est une incroyable revanche sur une vie éprouvante. Le texte du spectacle est rond, gorgé d'images réjouissantes. La comédienne Bérengère Dautun incarne avec chaire et jeu la grande dame. Le rôle semble directement drapé sur elle.

"Comtesse de Ségur, née Rostopchine" est une formidable madeleine de Proust créative !!
5 mai 2017
9/10
91
Le rideau rouge finit par s'ouvrir.
Elle nous attendait, devant un grand sofa couvert de livres, à côté duquel est posé sur une petite table un très joli samovar. Un vieux cheval de bois est là pour évoquer le monde de l'enfance.

Elle.
L'ex-sociétaire de la Comédie Française. Trente-trois ans de grande maison.

Bérengère Dautun.
Seule en scène et en costume d'époque.
Elle est vêtue d'une robe longue, très stricte, sans autre dentelles que celles d'un tout petit col.
La Comtesse de Ségur, née Rostopchine, est sur scène, avec les mots de Joëlle Fossier, l'auteure de la pièce.

Cette pièce, elle l'a vraiment écrite pour la comédienne, qui a reçu le texte par la poste.

Tout de suite, c'est une surprise, la Comtesse s'adresse à nous, nous raconte le pourquoi de sa venue sur scène, nous demande d'éteindre nos portables, peste contre ces appareils : à son époque, nous dit-elle, une lettre mettait parfois un mois à parvenir à son destinataire !

Une fois « les présentations » faites, elles vont nous raconter la vie de cette femme de lettres.
Elles ? Oui, elles vont s'y mettre à deux, tellement Bérengère Dautun incarne de façon troublante ce personnage tellement méconnu.

Jusqu'ici enjouée, drôle, primesautière, la comédienne va nous démontrer s'il en était encore besoin l'immense étendue de son registre, de sa palette de jeu.

En effet, elle va nous faire vivre l'enfance épouvantable de la petite Sophie Rostopchine.
Adorée d'un père très souvent absent et maltraitée par une mère beaucoup trop présente.
Sous couvert d'une éducation stricte, nous sommes les témoins impuissants d'une véritable maltraitance.

Une larme coule sur le beau visage de Melle Dautun.
Bien entendu, une question est dans toutes les têtes.

Où la comédienne est-elle allée puiser ces incroyables émotion et vérité qu'elle est en train de nous délivrer ?

En effet, elle est ici bouleversante de justesse. Elle nous glace en racontant ce que subit cette petite fille.
Et l'on comprend bien des choses de l'oeuvre future.

Tour au long de cette heure, ce seul en scène sera une succession de moments soit heureux, soit véritablement sombres.

D'autres tableaux vont ainsi suivre.
Le mariage avec Eugène de Ségur, la désillusion qu'engendre ce mari volage, la naissance de huit enfants.

Et puis la perte du neuvième, le petit Renaud.
Ce décès sera le déclencheur d'une terrible dépression qui durera pas moins de treize ans.
Bérengère Dautun est alors véritablement déchirante à nous raconter cette plongée dans un grand trou noir sans fond.
Des mots terribles et impitoyables.

Ce que réussissent magistralement l'auteure et la comédienne, c'est de mettre en parallèle la célébrité de cette femme de lettres, et la méconnaissance parfaite que nous pouvons avoir de sa vie.

Pour ce faire, le texte perlé, fin, léger ou grave est beaucoup plus que dit ou incarné. J'ai vraiment eu l'étrange et rare impression que la comédienne était en train de vivre l'existence de son personnage.

Faut-il du talent, tout de même, pour par exemple oser parler de la sorte de résilience, de pardon, sans tomber dans le ridicule le plus achevé ou un pathos de mauvais aloi !

C'est une heure de grand théâtre, une leçon de jeu.
Une nouvelle fois, un grand merci, Melle Dautun !
2 mai 2017
6/10
69
Une pièce sur la vie romanesque de La Comtesse de Ségur portée par une Lady du théâtre.

Ce seul en scène est d'abord une belle performance de Bérangère qui, de son air malicieux, nous enchante dans ses monologues joyeux. Le parti pris de la mise en scène et du texte se perd dans des allusions à notre époque en positionnant notre narratrice comme une voix de sagesse omnisciente qui aurait vu sur notre époque. Ce parti pris nous perd et nous ennui de temps en temps. Car le texte est marqué par de réels moments de potentiel grâce et vibrance, mais les émotions se noient dans un texte bien trop dense et trop présent qui ne laisse pas assez de places aux émotions. Nous aurions pu vivre et ressentir cette histoire si singulière d'une jeune demoiselle russe voyant son père brûlé sa propre cité.

Une belle pièce qui mériterait de laisser le temps aux émotions et de s'alléger du superflu.
30 avr. 2017
9/10
59
À nouveau, Bérengère Dautun choisit d’incarner une femme qui toute sa vie a mené combat. Combat pour survivre au manque d’amour et aux cruautés de l’éducation pratiquée dans son enfance. Combat pour vivre dignement et librement, malgré les aléas d’un mariage sans amour durable et une santé qui la lâche suite au décès d’un de ses enfants, lui faisant parcourir un long et douloureux tunnel de 13 années. Puis enfin sortir vainqueure de ce dernier combat et éblouir de son succès l’apothéose de ses efforts.

Bérengère Dautun et Sophie Rostopchine ne font qu’une et même Comtesse de Ségur. Nous passons une fin d’après-midi charmante et instructive chez Madame la Comtesse pour l’écouter nous raconter ce que fut sa vie, dans ce même salon où elle reçoit ses amis. Le récit est captivant et émouvant, doux et coloré. Narration et jeu s’entremêlent avec l’excellence du talent.

Les saveurs du thé semblent se mêler aux odeurs des livres qui jonchent le canapé. La Comtesse se lève parfois, irritée. Elle incline la tête souvent, attendrie. Elle décrit tout avec précision et intransigeance, ne se désemparant pas, souriante, de sa furieuse envie de bonheur et ne laissant rien de côté des six séquences que scandent sa vie. Séquences qui nous permettent de mieux la connaitre et de comprendre d’où viennent les sources de son incroyable inspiration et de sa merveilleuse propension à écrire pour les enfants.

Enfance sans amour maternel, parsemé de maltraitances au vernis éducatif… Courts moments d’une jeunesse heureuse… Mariage d’amour devenu raisonnable, sans émotions profondes, avec un Comte qui ne sera pas toutefois le total goujat que l’on pouvait rencontrer parmi ses contemporains… Huit enfants qu’elle s’attache à aimer autant qu’elle ne l’a pas été… La souffrance incommensurable du décès de l’un d'eux, qui déclenche une dépression qui lui fait marcher pendant 13 années dans un tunnel morbide dont elle se sortira… L’avènement de l’écrivaine qui à plus de cinquante ans, commence à écrire les histoires et les contes qu’elles racontent à ses petits-enfants et qui rencontre l'énorme succès et la notoriété qui ne tarissent pas encore jusqu’aujourd’hui.

L’œuvre comme la vie de la Comtesse de Ségur nous touchent autant pour ce qu’elle témoigne de la condition féminine et de l’éducation des enfants de la bourgeoisie provinciale en cette deuxième moitié de 19ème siècle que pour sa valeur autobiographique et la nouveauté que représentaient alors des premiers écrits sur la pédagogie du quotidien sans velléité didactique. Bien sûr, la dimension cathartique des histoires de Sophie et ses malheurs, tout comme la vraisemblance des autres personnages avec l’entourage de Sophie Rostopchine, Comtesse de Ségur, n’est pas sans donner à l’acte d’écriture une apparence de résilience de son parcours et de dévotion à l’enfance. Son adage le dit bien : « N’écris que ce que tu as vu ».

Joëlle Fossier compose ce monologue théâtral avec la volonté réussie de témoigner du parcours exceptionnel de cette femme de lettres qui avec Jules Verne compte parmi les auteurs de la littérature jeunesse les plus célèbres et les plus lus. Le texte précis et délicat, orné de colères et de tendresses, offre à Bérengère Dautun une partition magnifique.

La mise en scène de Pascal Vitiello accompagne le mouvement des mots et des situations traversées, les mariant aux images projetées et aux lumières, avec une habile et simple efficacité.

Le talent de la comédienne se conjugue avec bonheur au parcours surprenant de cette auteure célèbre, qu’elle fait sien tout à fait. Nous sortons surpris de ce que nous avons découvert et ravis de ce que nous savons vu. Un spectacle que je recommande vivement. À voir sans hésitation.
15 mai 2016
8,5/10
59
Beaucoup de personnes âgées dans la salle. A croire qu'on ne lit plus les Malheurs de Sophie à l'école et que le nom de Ségur ne représente pas autre chose qu'une station de métro pour les jeunes générations.

Une vieille dame s'inquiétait à la caisse qu'il ne s'agit pas tout de même d'un spectacle pour enfants. Tu as été enfant, de toute façon, argumente son mari (à moins qu'il ne se moque).

Je la retrouve navigant d'un fauteuil à l'autre, parlant très fort au téléphone ... branché sur haut-parleur, se levant bruyamment, quittant sa place pour une autre, semant des magazines au passage et mettant de la pagaille dans le système des places numérotées. Les personnages sont parfois dans la salle !

Bérengère Dautun entre en scène. C'est l'heure des bilans, annonce-t-elle. Je serai moi et tous les personnages à la fois.

A peine nous a-t-elle raconté le joyeux Bal des Ambassades sur un air de valse que Sofoletta nous prévient qu'elle n'entend pas idéaliser sa légende : Les fractures émotionnelles se soldent comptant. J'en sais quelque chose. C'est pas une plaisanterie la vie.

En fait, entre un père, parfait honnête homme, mais nous dirons peu efficace, et une mère qui la fit souffrir de mille façons, soit disant "pour son bien", la comtesse va livrer les blessures d'enfance et raconter le drame de sa vie d'adulte, la perte d'un enfant.

J'ignorais quasiment tout de cela, sachant juste qu'elle était d'origine russe. Je connais par coeur des pans entiers des Malheurs de Sophie en n'ayant jamais fait le rapprochement entre son prénom et celui de cette petite fille pleine de vie et désobéissante "par mégarde".

Je voyais dans cette littérature (qui fut la première à être diffusée dans les gares par le réseau Hachette, Eugène de Ségur, son mari étant président de la Compagnie des Chemins de fer de l’Est, mais c'est une autre histoire ...) des leçons de morale et d'éducation, distrayantes au demeurant, fort bien écrites, que j'aimais lire et relire en me situant à mi-chemin entre la turbulente Sophie et ses sages cousines Camille et Madeleine.
Pascal Vitiello, le metteur en scène, souligne combien Bérengère Dautun fait corps avec Sophie de Ségur. Il n'en faut pas plus qu'un sofa, une malle, un châle, un samovar et surtout des livres pour restituer le caractère de cette femme de lettres d'exception au destin incroyable.

Je ne peux pas déterminer la part du vrai et du véritable dans ce portrait vraisemblable qui a été écrit par Joëlle Fossier. Ce qui ne fait aucun doute c'est la qualité de l'incarnation de la comédienne, ex sociétaire de la Comédie française, que j'avais admirée dans une autre femme extraordinaire, Alexandrine Zola dans J'accuse au Petit Hébertot en 2011.

Si elle a connu l'enfance qu'elle raconte sur la scène de la Comédie Bastille je comprends que l'écriture l'ait aidée à vivre. Son existence a été marquée par des horreurs. Avoir connu la faim jusqu'à ne pas résister à voler le pain des chevaux. Avoir été abandonnée en forêt par une mère sadique qui n'hésita pas à jeter sa poupée (un point commun avec Louise de Vilmorin qui même adulte en pleurait encore), avoir perdu un enfant, avoir pour mari un homme qui estimait que donner du jugement à une femme équivalait à lui mettre un couteau entre les mains ... tout cela vous anéantit ou vous rend indestructible.

On comprend qu'après avoir traversé des années à restaurer l'image de soi elle soit parvenue à survivre et à trouver dans l'écriture une forme de résurrection cathartique.

Etait-il nécessaire pour autant de lui mettre dans la bouche des paroles empruntées à Saint Exupéry même s'il est exact qu'on ne voit bien qu'avec le coeur ?
19 févr. 2015
6,5/10
143
Un seul en scène pour raconter pendant près d’une heure et à la première personne la vie de la Comtesse de Ségur, c’est courageux d’autant qu’il y a eu de nombreux intervenants et que sa vie fut riche en rebondissements : c’est une femme cultivée et courageuse à qui rien n’aura été épargné.

Seulement, la prestation nous laisse un peu sur le bord de l’histoire car l’introduction est assez longue et on ne sait pas où on va : on s’égare dans des considérations sur les différences entre le XXI ème siècle et son époque qui sont sans intérêt d’autant qu’elles sont débitées avec un débit de voix très rapide qui heureusement se calme par la suite. Ensuite la mise en scène est assez vieillotte et le mix décor classique + blue screen n’est pas du meilleur effet ensemble.

La comédienne Bérengère Dautun semble habitée par la Comtesse, nous n’avons aucun doute à ce sujet. Cependant, elle joue aussi les rôles de tous les intervenants et c’est un peu confusant.
27 févr. 2014
6,5/10
218
Nostalgique de vos lectures d’enfance ?
Le Théâtre Ranelagh offre une savoureuse madeleine de Proust avec Comtesse de Ségur née Rostopchine, une création de Joëlle Fossier centrée autour de la vie de cette incroyable femme de lettres, aventurière et insatiable curieuse. L’ancienne sociétaire du Français, Bérengère Dautun, se démène sur scène avec un abattage malicieux dans une multitude de rôles. Cependant, le jeu de l’actrice, aussi convaincant soit-il, ne masque pas les partis pris d’écriture parfois artificiels et une mise en scène vieillotte.