Ses critiques
84 critiques
8,5/10
Hoc ou le nez, histoire très simple et très improbable d’un major qui perd son nez, un beau texte dans une mise en scène très imaginative de la compagnie Firmin Poivre à la Folie Théâtre
Hoc, en russe, c’est le nez. Enfin…en russe, nez se dit nos’, et se transcrit hoc. En fait, tout l’esprit de cette pièce est dans ce constat, c’est comme ça et pas autrement, il faut l’accepter, on peut se battre, il faudra toujours finir par s’y résigner.
Un matin d’hiver à Saint Petersbourg, le major Platon Kovaliov se réveille sans son nez, juste après que son barbier Ivan Yakolevitch a trouvé un nez dans le pain de son petit déjeuner. L’un va essayer de se débarrasser de ce nez bien encombrant, l’autre va se lancer à sa recherche à travers toute la ville.
Une idée simple et improbable, dont il était improbable qu’elle soit écrite, transcrite pour la scène, montée, jouée, applaudie. Les plaques de Reason, pour une fois logiquement alignées, ont placé Hoc sous une bonne étoile.
J’ai admiré la mise en scène précise de Julien Le Pocher, le jeu des nuances dans les couleurs des costumes et de l’éclairage, de beaux costumes, d’ailleurs, dans des teintes d’hiver.
Foin d’une banale voix off, c’est un choeur qui vient scander, nous placer dans la position d’un observateur distancié. Contrepoint, les masques des personnages, qui renforcent la distanciation, qui nous rapprochent d’eux, un personnage masqué n’est personne, il est tout le monde, il est moi. Mais si le personnage masqué est moi, quand le major Platon Kovaliov retrouve son nez, il retrouve son moi, et moi avec lui… je retrouve mon moi. S’il s’en réjouit, s’il oublie le comment, le pourquoi… ok, ok, j’arrête.
Hoc ou le nez est vraiment un beau spectacle. Il y a la poésie de la Russie, le non sens aussi parfaitement logique qu’implacable de Gogol, le fatalisme de l’âme Russe.
OliveOyl a trouvé la mise en scène intéressante. Fléchette et Baroudeur ont reçu l’histoire à leur niveau, l’ont trouvée passionnante, ont accepté immédiatement l’effet miroir de l’absence de nez. Si vous pensez que Gogol est trop compliqué, ou trop sérieux, ou trop absurde pour un enfant, allez voir Hoc, vous changerez d’avis. De toutes façons, allez voir Hoc, il y a de la sublimation dans ce spectacle.
Hoc, en russe, c’est le nez. Enfin…en russe, nez se dit nos’, et se transcrit hoc. En fait, tout l’esprit de cette pièce est dans ce constat, c’est comme ça et pas autrement, il faut l’accepter, on peut se battre, il faudra toujours finir par s’y résigner.
Un matin d’hiver à Saint Petersbourg, le major Platon Kovaliov se réveille sans son nez, juste après que son barbier Ivan Yakolevitch a trouvé un nez dans le pain de son petit déjeuner. L’un va essayer de se débarrasser de ce nez bien encombrant, l’autre va se lancer à sa recherche à travers toute la ville.
Une idée simple et improbable, dont il était improbable qu’elle soit écrite, transcrite pour la scène, montée, jouée, applaudie. Les plaques de Reason, pour une fois logiquement alignées, ont placé Hoc sous une bonne étoile.
J’ai admiré la mise en scène précise de Julien Le Pocher, le jeu des nuances dans les couleurs des costumes et de l’éclairage, de beaux costumes, d’ailleurs, dans des teintes d’hiver.
Foin d’une banale voix off, c’est un choeur qui vient scander, nous placer dans la position d’un observateur distancié. Contrepoint, les masques des personnages, qui renforcent la distanciation, qui nous rapprochent d’eux, un personnage masqué n’est personne, il est tout le monde, il est moi. Mais si le personnage masqué est moi, quand le major Platon Kovaliov retrouve son nez, il retrouve son moi, et moi avec lui… je retrouve mon moi. S’il s’en réjouit, s’il oublie le comment, le pourquoi… ok, ok, j’arrête.
Hoc ou le nez est vraiment un beau spectacle. Il y a la poésie de la Russie, le non sens aussi parfaitement logique qu’implacable de Gogol, le fatalisme de l’âme Russe.
OliveOyl a trouvé la mise en scène intéressante. Fléchette et Baroudeur ont reçu l’histoire à leur niveau, l’ont trouvée passionnante, ont accepté immédiatement l’effet miroir de l’absence de nez. Si vous pensez que Gogol est trop compliqué, ou trop sérieux, ou trop absurde pour un enfant, allez voir Hoc, vous changerez d’avis. De toutes façons, allez voir Hoc, il y a de la sublimation dans ce spectacle.
7,5/10
Les Soulmates, ce sont Anne, Jess, Linda, Marie, Sandrine, cinq filles, cinq personnalités, cinq voix a capella qui revisitent à leur façon les hits qui surfent sur les hit parade depuis les années 30. Une sélection éprouvée par le temps, des titres auxquels elles apportent de l’harmonie, et la dynamique du jeu.
Elles entrent sur scène, elles y vont. Elles jouent et chantent, c’est entrainant, j’apprécie. Je trouve superbe leur version d’Andy, des Rita Mitsouko, j’admire leur reprise de Chandelier de Sia, celle de Louxor de Philippe Katerine, la transformation de J’ai deux amours. Je me prends à chercher à reconnaître les titres, je les ai presque tous. Je trouve ça beau, bien interprété. A réaliser qu’au fond, je le regrette un peu, que ce soit si beau, c’est presque du champ choral, travaillé jusqu’au dernier détail, et du coup ça manque un peu d’âme. Les voix sont pures, parfaites, il leur manque un peu de crade, celui qu’apporte une pointe de réverb, des années de tabac et d’alcool, la fatigue. Voilà, c’est le récital amélioré d’une chorale, pas un concert, un truc que j’admire avec ma tête, mais qui ne m’emporte pas. C’est un spectacle parfait, trop parfait. Rythmé par un running gag, le jingle pour le producteur. Je sentais la maitrise, le contrôle.
Et puis voilà Où sont les femmes. Patrick Juvet, vraiment ? Elles envoient, vraiment. Les cheveux sortent en bataille. Là, j’ai été pris aux tripes, et elles ne m’ont pas lâché. Leurs voix ont pris de l’ampleur, elles se sont mises à vibrer. Je ne suivais plus, je vivais. C’est simple, je me souviens des titres d’avant ce moment, pas de ceux d’après, sauf Tous les mêmes.
J’avais vécu la même chose au concert de Patti Smith à l’Olympia en 2015, quand elle a rejoué Horses pour une captation, pendant les dix premiers titres, c’était beau, pur, propre, léché, parfait, presque chiant. Et ensuite elle s’est lâché, le son est monté, c’était plus approximatif (tout est relatif, ok), c’était vivant, vécu, magique.
Là, c’était pareil. Quand le spectacle s’est transformé en concert, je n’étais plus en train de déguster une verticale de Ruinart Millésimé dans des coupes Baccarat, j’étais dans un bar, une pinte de blonde servie dans un verre douteux, et soudain cinq copines accoudées au bar envoyaient à leur sauce quelques chansons, elles prenaient l’attention, pour un moment unique.
Voilà, c’est ça. J’ai vécu la première partie comme un récital, un enregistrement, quelque chose de maitrisé qui sera identique à chaque fois. Et la seconde partie comme un moment unique, qui n’existait que ce soir là. C’est vrai pour moi, c’est vrai pour Baroudeur, qui a écouté sagement la première partie, qui se trémoussait sur la seconde.
Vraiment, si j’étais leur producteur (puisqu’elles en cherchent un…) je les ferais chanter (pas chauffer la voix, chanter) pendant une demi heure avant d’entrer sur scène, ou alors je leur ferais boire un verre d’alcool, juste pour qu’elles basculent plus tôt en mode On se lâche et on envoie. Parce que dans ce mode là, leur envie et leur folie donnent juste envie de les entendre encore, et encore.
Elles entrent sur scène, elles y vont. Elles jouent et chantent, c’est entrainant, j’apprécie. Je trouve superbe leur version d’Andy, des Rita Mitsouko, j’admire leur reprise de Chandelier de Sia, celle de Louxor de Philippe Katerine, la transformation de J’ai deux amours. Je me prends à chercher à reconnaître les titres, je les ai presque tous. Je trouve ça beau, bien interprété. A réaliser qu’au fond, je le regrette un peu, que ce soit si beau, c’est presque du champ choral, travaillé jusqu’au dernier détail, et du coup ça manque un peu d’âme. Les voix sont pures, parfaites, il leur manque un peu de crade, celui qu’apporte une pointe de réverb, des années de tabac et d’alcool, la fatigue. Voilà, c’est le récital amélioré d’une chorale, pas un concert, un truc que j’admire avec ma tête, mais qui ne m’emporte pas. C’est un spectacle parfait, trop parfait. Rythmé par un running gag, le jingle pour le producteur. Je sentais la maitrise, le contrôle.
Et puis voilà Où sont les femmes. Patrick Juvet, vraiment ? Elles envoient, vraiment. Les cheveux sortent en bataille. Là, j’ai été pris aux tripes, et elles ne m’ont pas lâché. Leurs voix ont pris de l’ampleur, elles se sont mises à vibrer. Je ne suivais plus, je vivais. C’est simple, je me souviens des titres d’avant ce moment, pas de ceux d’après, sauf Tous les mêmes.
J’avais vécu la même chose au concert de Patti Smith à l’Olympia en 2015, quand elle a rejoué Horses pour une captation, pendant les dix premiers titres, c’était beau, pur, propre, léché, parfait, presque chiant. Et ensuite elle s’est lâché, le son est monté, c’était plus approximatif (tout est relatif, ok), c’était vivant, vécu, magique.
Là, c’était pareil. Quand le spectacle s’est transformé en concert, je n’étais plus en train de déguster une verticale de Ruinart Millésimé dans des coupes Baccarat, j’étais dans un bar, une pinte de blonde servie dans un verre douteux, et soudain cinq copines accoudées au bar envoyaient à leur sauce quelques chansons, elles prenaient l’attention, pour un moment unique.
Voilà, c’est ça. J’ai vécu la première partie comme un récital, un enregistrement, quelque chose de maitrisé qui sera identique à chaque fois. Et la seconde partie comme un moment unique, qui n’existait que ce soir là. C’est vrai pour moi, c’est vrai pour Baroudeur, qui a écouté sagement la première partie, qui se trémoussait sur la seconde.
Vraiment, si j’étais leur producteur (puisqu’elles en cherchent un…) je les ferais chanter (pas chauffer la voix, chanter) pendant une demi heure avant d’entrer sur scène, ou alors je leur ferais boire un verre d’alcool, juste pour qu’elles basculent plus tôt en mode On se lâche et on envoie. Parce que dans ce mode là, leur envie et leur folie donnent juste envie de les entendre encore, et encore.
6/10
Je suis sorti nostalgique et souriant de Persée (la palpitante épopée pipée perpétuelle), à La Folie Théâtre. A voir si vous avez envie l’esprit ouvert et l’envie de rire d’une épopée brouillonne, pas si vous êtes un exégète de la mythologie grecque.
Au premier niveau, c’est une épopée, baroque et brouillonne, la description approximative du destin de Persée. Comme le veut la loi du genre, vingt personnages, six acteurs, un jeu inégal, des jeux de mot faciles, on finit par ne plus trop savoir qui est qui, bref c’est le bordel, mais ce n’est pas grave, on s’amuse et le but est atteint. Baroudeur, et surtout Fléchette, se sont totalement laissés emporter par ce niveau de la pièce. Elle riait à gorge déployée. Un sérieux, derrière, disait « chut »
Au deuxième niveau, l’histoire de Persée est complète, de la fécondation de sa mère à la mort de son grand père. Avec quelques ajouts venus du premier niveau (Cassandre femme de ménage de l’Olympe), de et de ses contraintes de rapidité (non, Baroudeur, ce n’est pas Héra femme de Zeus qui est attachée au rocher, c’est Andromède). Le sérieux, derrière, commentait les écarts, là il s’attribuait le droit de chuchoter.
Au troisième niveau, les jeux de mots étaient moins accessibles, je suis sûr que le sérieux qui ne mouftait pas, ne les comprenait pas, ou qu’il avait un mouvement de retrait, l’air pincé.
J’oublie le sérieux, je reviens à la pièce. Globalement bien faite, elle a un sens, une logique, suit une direction sans se disperser. On y trouve ce qu’on s’attend à y trouver, des jeux de mots, bien sûr, un running gag (Sisyphe), une ponctuation musicale, des anachronismes et des caricatures de personnalités très actuels mais qui restent pleins de bon sens (oui, Nelson, seuls trois continents étaient connus à l’époque), un jeu avec le public. Elle colle à l’histoire de Persée, et c’est ce qui lui donne sa cohérence.
Et ma nostalgie dans tout ça ? Celle du Phèdre de Pierre Dac dans la version de Jean-Baptiste Plait, avec (entre autres) Didier Bourdon, Pascal Legitimus, Bernard Campan… Oui, c’était en 1983, ces noms doivent vous dire quelque chose. Il y avait un peu de cette folle ambiance, de ce joyeux bordel, dans cette représentation de Persée.
Au premier niveau, c’est une épopée, baroque et brouillonne, la description approximative du destin de Persée. Comme le veut la loi du genre, vingt personnages, six acteurs, un jeu inégal, des jeux de mot faciles, on finit par ne plus trop savoir qui est qui, bref c’est le bordel, mais ce n’est pas grave, on s’amuse et le but est atteint. Baroudeur, et surtout Fléchette, se sont totalement laissés emporter par ce niveau de la pièce. Elle riait à gorge déployée. Un sérieux, derrière, disait « chut »
Au deuxième niveau, l’histoire de Persée est complète, de la fécondation de sa mère à la mort de son grand père. Avec quelques ajouts venus du premier niveau (Cassandre femme de ménage de l’Olympe), de et de ses contraintes de rapidité (non, Baroudeur, ce n’est pas Héra femme de Zeus qui est attachée au rocher, c’est Andromède). Le sérieux, derrière, commentait les écarts, là il s’attribuait le droit de chuchoter.
Au troisième niveau, les jeux de mots étaient moins accessibles, je suis sûr que le sérieux qui ne mouftait pas, ne les comprenait pas, ou qu’il avait un mouvement de retrait, l’air pincé.
J’oublie le sérieux, je reviens à la pièce. Globalement bien faite, elle a un sens, une logique, suit une direction sans se disperser. On y trouve ce qu’on s’attend à y trouver, des jeux de mots, bien sûr, un running gag (Sisyphe), une ponctuation musicale, des anachronismes et des caricatures de personnalités très actuels mais qui restent pleins de bon sens (oui, Nelson, seuls trois continents étaient connus à l’époque), un jeu avec le public. Elle colle à l’histoire de Persée, et c’est ce qui lui donne sa cohérence.
Et ma nostalgie dans tout ça ? Celle du Phèdre de Pierre Dac dans la version de Jean-Baptiste Plait, avec (entre autres) Didier Bourdon, Pascal Legitimus, Bernard Campan… Oui, c’était en 1983, ces noms doivent vous dire quelque chose. Il y avait un peu de cette folle ambiance, de ce joyeux bordel, dans cette représentation de Persée.
8/10
Parfois, il faut oser pour faire avancer les choses. Une femme Extraordinaire qui se joue à La Folie Théâtre est une pièce qui ose sacrément, qui défend un point de vue et l’assume. Anna Stern et Daniel Hederich, les acteurs, ont l’impudeur de jouer le texte d’Arthur Vernon, c’est déjà, en soi, une sacrée performance. A réserver aux yeux qui ne se choquent pas facilement.
Lila et Renaud s’aiment, ils forment un couple libre, sexuellement libre, au sein duquel le mensonge, même par omission, est interdit. Lila est mannequin lingerie, elle a un corps parfait, ses partenaires sont célèbres. Elle rêve de devenir chanteuse. Renaud est metteur en scène. Ils s’aiment passionnément. Ils s’aiment au point d’imaginer de se marier.
Âmes sensibles, Pères la Pudeur, ligues de Vertu, décrochez là.
Au début de la pièce, Lila est à Milan, pour un shooting Aubade. Au téléphone, elle lit à Renaud le livre qu’un de ses anciens amants lui a consacré. L’excitation de la séquence les emmène à… bref. Lila rentre plus tôt que prévu. Retrouvailles passionnées, ils sont vite nus, font l’amour. Devant nous.
Vu comme ça, on dirait une séquence du théâtre des Deux Boules (pour les plus jeunes, un ancien théâtre érotique qui était rue des Ecoles à Paris et dont le pitch était « ils font l’amour dans un filet au dessus de vos têtes » ). Alors soyons clair : ce sont deux acteurs qui jouent un texte dans lequel ils font l’amour, ce n’est pas du porno, ni de l’exhibition. Ils osent le jouer, nus, leurs corps en contact, sans zones interdites. Ils le jouent pour porter un propos, exprimer une idée, et pas pour être matés par le loup de Tex Avery (là encore, que les plus jeunes remplacent par une référence actuelle).
Âmes voyeuses, à votre tour de décrocher.
Pour ceux qui restent, ceux qui ont l’esprit ouvert, la pièce continue.
Petit à petit, Lila se découvre, manipulatrice, menteuse, qui n’est pas ce que Renaud croit qu’elle est. Renaud, qui s’en doute, enquête, cherche les indices, trouve, prouve.
Dans leur univers, il y a Fabrice Luchini (un peu ridiculisé par la caricature qui le représente en train de se masturber au pied du lit où Lila et sa femme ont un rapport). Il y a René, à qui Lila dit aussi Je t’aime, et dont Renaud ne connaît pas l’existence. Les parents de Lila, qui jouent son jeu, qu’elle contrôle aussi. La passion charnelle. Le pouvoir de la femme.
Le pouvoir de Lila c’est le désir qu’elle inspire, la passion qu’elle inspire à Renaud, passion sensuelle, sexuelle, dominatrice. Le désir qu’elle inspire à René, collectionneur fétichiste de ses culottes. L’arme de Lila, c’est son corps, son corps parfait, avec lequel elle contrebalance le pouvoir de l’homme, ici essentiellement économique. L’arme de Lila, c’est son sexe, le sexe, qu’elle monnaye. La contrepartie, c’est la solitude sexuelle de certains. La solitude sexuelle que l’argent est un des moyens de combler, oui, René est un Sugar Daddy, il y en a d’autres, plus glauques encore, et que la pièce n’évoque pas.
C’est tout le propos de l’acte III de montrer que l’homme autant que la femme bénéficieraient d’un rééquilibrage de ces pouvoirs. Soit. Dans l’univers propre de la pièce, j’ose croire que le pouvoir est déjà équilibré. Dans cet univers propre.
J’ai apprécié le jeu de Daniel Hederich et d’Anna Stern. Ils osent jouer ce texte, ils osent se mettre en zone de risque. Ils osent jouer des pratiques sexuelles conventionnelles (si vous avez besoin d’une explication… je ne peux rien pour vous) ou moins conventionnelles (le bondage Shibari qui figure sur l’affiche).
J’ai apprécié de voir un zeste de candeur dans le regard d’Anna Stern. Elle (je veux dire son corps) est plus visible, elle n’est pas blasée. Autant Daniel Hederich joue sa passion méfiante sur une gamme de plusieurs octaves, autant Anna Stern joue sur quelques notes qui renforcent l’impression que tout ça est pour Lila une mécanique. Est-ce qu’il reste un peu de naïveté au fond de Lila ? Je ne sais pas.
La mise en scène est astucieuse, elle joue avec les flashbacks du texte de quelques éclairs de stroboscope, sans nous perdre, un ours en peluche géant prenant la place de Renaud quand Renaud vient commenter le moment qu’il a vécu. Quand elle veut montrer la passion et la duplicité, les choses sont claires. Tout autant quand il s’agit de montrer que le pigeon n’est pas dupe.
J’ai adoré la séquence où Renaud s’interroge face à sa psychiatre empathique, pop, Lila vautrée-désincarnée est face à un inspecteur qui cherche à comprendre, pop, la situation tourne à nouveau.
Une Femme Extraordinaire, c’est une pièce qui réussit à oser sans tomber dans l’exagération exacerbée. Je la conseille à ceux qui sont capables d’apprécier un théâtre différent, une démonstration avec des outils différents. Si vous y allez avec des œillères ou des certitudes, vous serez choqués, ou déçus.
Lila et Renaud s’aiment, ils forment un couple libre, sexuellement libre, au sein duquel le mensonge, même par omission, est interdit. Lila est mannequin lingerie, elle a un corps parfait, ses partenaires sont célèbres. Elle rêve de devenir chanteuse. Renaud est metteur en scène. Ils s’aiment passionnément. Ils s’aiment au point d’imaginer de se marier.
Âmes sensibles, Pères la Pudeur, ligues de Vertu, décrochez là.
Au début de la pièce, Lila est à Milan, pour un shooting Aubade. Au téléphone, elle lit à Renaud le livre qu’un de ses anciens amants lui a consacré. L’excitation de la séquence les emmène à… bref. Lila rentre plus tôt que prévu. Retrouvailles passionnées, ils sont vite nus, font l’amour. Devant nous.
Vu comme ça, on dirait une séquence du théâtre des Deux Boules (pour les plus jeunes, un ancien théâtre érotique qui était rue des Ecoles à Paris et dont le pitch était « ils font l’amour dans un filet au dessus de vos têtes » ). Alors soyons clair : ce sont deux acteurs qui jouent un texte dans lequel ils font l’amour, ce n’est pas du porno, ni de l’exhibition. Ils osent le jouer, nus, leurs corps en contact, sans zones interdites. Ils le jouent pour porter un propos, exprimer une idée, et pas pour être matés par le loup de Tex Avery (là encore, que les plus jeunes remplacent par une référence actuelle).
Âmes voyeuses, à votre tour de décrocher.
Pour ceux qui restent, ceux qui ont l’esprit ouvert, la pièce continue.
Petit à petit, Lila se découvre, manipulatrice, menteuse, qui n’est pas ce que Renaud croit qu’elle est. Renaud, qui s’en doute, enquête, cherche les indices, trouve, prouve.
Dans leur univers, il y a Fabrice Luchini (un peu ridiculisé par la caricature qui le représente en train de se masturber au pied du lit où Lila et sa femme ont un rapport). Il y a René, à qui Lila dit aussi Je t’aime, et dont Renaud ne connaît pas l’existence. Les parents de Lila, qui jouent son jeu, qu’elle contrôle aussi. La passion charnelle. Le pouvoir de la femme.
Le pouvoir de Lila c’est le désir qu’elle inspire, la passion qu’elle inspire à Renaud, passion sensuelle, sexuelle, dominatrice. Le désir qu’elle inspire à René, collectionneur fétichiste de ses culottes. L’arme de Lila, c’est son corps, son corps parfait, avec lequel elle contrebalance le pouvoir de l’homme, ici essentiellement économique. L’arme de Lila, c’est son sexe, le sexe, qu’elle monnaye. La contrepartie, c’est la solitude sexuelle de certains. La solitude sexuelle que l’argent est un des moyens de combler, oui, René est un Sugar Daddy, il y en a d’autres, plus glauques encore, et que la pièce n’évoque pas.
C’est tout le propos de l’acte III de montrer que l’homme autant que la femme bénéficieraient d’un rééquilibrage de ces pouvoirs. Soit. Dans l’univers propre de la pièce, j’ose croire que le pouvoir est déjà équilibré. Dans cet univers propre.
J’ai apprécié le jeu de Daniel Hederich et d’Anna Stern. Ils osent jouer ce texte, ils osent se mettre en zone de risque. Ils osent jouer des pratiques sexuelles conventionnelles (si vous avez besoin d’une explication… je ne peux rien pour vous) ou moins conventionnelles (le bondage Shibari qui figure sur l’affiche).
J’ai apprécié de voir un zeste de candeur dans le regard d’Anna Stern. Elle (je veux dire son corps) est plus visible, elle n’est pas blasée. Autant Daniel Hederich joue sa passion méfiante sur une gamme de plusieurs octaves, autant Anna Stern joue sur quelques notes qui renforcent l’impression que tout ça est pour Lila une mécanique. Est-ce qu’il reste un peu de naïveté au fond de Lila ? Je ne sais pas.
La mise en scène est astucieuse, elle joue avec les flashbacks du texte de quelques éclairs de stroboscope, sans nous perdre, un ours en peluche géant prenant la place de Renaud quand Renaud vient commenter le moment qu’il a vécu. Quand elle veut montrer la passion et la duplicité, les choses sont claires. Tout autant quand il s’agit de montrer que le pigeon n’est pas dupe.
J’ai adoré la séquence où Renaud s’interroge face à sa psychiatre empathique, pop, Lila vautrée-désincarnée est face à un inspecteur qui cherche à comprendre, pop, la situation tourne à nouveau.
Une Femme Extraordinaire, c’est une pièce qui réussit à oser sans tomber dans l’exagération exacerbée. Je la conseille à ceux qui sont capables d’apprécier un théâtre différent, une démonstration avec des outils différents. Si vous y allez avec des œillères ou des certitudes, vous serez choqués, ou déçus.
3/10
Belle déception avec cette pièce, je m’attendais pourtant sur la foi de l’affiche et du pitch, à passer un agréable vaudeville sans prétention.
Je me suis calé dans mon fauteuil, et l’interminable séquence de démarrage m’a achevé. Un réveillon, quatre invités dont seuls trois sont là, le quatrième est en retard, un tueur à gages qui ne sait pas qui il doit tuer.
J’ai trouvé l’intrigue faible, la fin évidente, le texte incohérent et poussif, le jeu mal dirigé. En un mot, je me suis ennuyé.
Je me suis calé dans mon fauteuil, et l’interminable séquence de démarrage m’a achevé. Un réveillon, quatre invités dont seuls trois sont là, le quatrième est en retard, un tueur à gages qui ne sait pas qui il doit tuer.
J’ai trouvé l’intrigue faible, la fin évidente, le texte incohérent et poussif, le jeu mal dirigé. En un mot, je me suis ennuyé.