- Théâtre contemporain
- Théâtre de l'Odéon
- Paris 6ème
The Encounter, la rencontre

- Théâtre de l'Odéon
- place de l'Odéon
- 75006 Paris
- Odéon (l.4, l.10)
Les Mayoruna, hommes-félins, vivent non loin des sources de l’Amazone, dans la vallée du Javari.
En 1969, le photographe-reporter Loren McIntyre s’enfonça dans la jungle, aux confins du Brésil et du Pérou, à la recherche de leur tribu isolée et semi-nomade. L’expérience transforma sa vie.
Seize ans plus tard, à Manaus, il raconta son histoire à Petru Popescu. L’écrivain roumain en tira un roman de cinq cents pages, Amazon Beaming. Simon McBurney y a puisé la matière d’un spectacle solo étrange et envoûtant, pour nous faire partager ce voyage hors du temps par les voies du théâtre le plus inventif et le plus contemporain. Muni d’un casque audio, chaque spectateur est immergé dans un univers sonore où le récit se fait parcours initiatique à travers les échos d’une autre nature, aux frontières immémoriales de la conscience.
McBurney et sa compagnie Complicité ont longuement mis au point ce projet en s’entourant d’une équipe de techniciens de pointe et en prenant conseil auprès de spécialistes des sciences cognitives. Les créations de Complicité ont été applaudies dans plus d’une quarantaine de pays. Invité en France par Peter Brook dès 1995, Simon McBurney y est revenu à plusieurs reprises, notamment avec Mnemonic (1999). Il n’avait jamais encore eu l’occasion de se produire à l’Odéon.
Ici, Simon McBurney nous demande de mettre sur nos oreilles un casque, nous explique le dispositif, ce qui me fait dire que les écouteurs avec lesquels j’écoute ma musique dans le métro sont vraiment de mauvaise qualité, tellement avec ce système, on se sent immergé dans l’univers de l’artiste britannique, enveloppé. Plusieurs fois on en vient à enlever son casque pour écouter, alors qu’en fait on entend à peine la voix de Simon McBurney ou bien on se retourne, persuadé que quelqu’un vient d’ouvrir une porte derrière nous, souffle dans notre oreille droite, qu’un moustique nous tourne autour. On ne sait plus si c’est dans la salle, dans sa tête ou seulement l’enregistrement. Et là, où la 3D au cinéma, dans 95% des cas, n’est qu’un gadget, ici le dispositif est à 100% pertinent, parce qu’en plus, il ne s’agit pas d’une pièce radiophonique qu’on pourrait écouter tranquillement dans son fauteuil club avec un verre de whisky japonais en fermant les yeux (ça c’est mon rêve).
Il faut voir Simon McBurney progressivement prendre les corps et les voix du narrateur (lui-même) et du photographe Loren McIntyre, utiliser des bouteilles d’eau ou des bandes magnétiques de cassettes vhs pour les différents bruitages. Car c’est une réelle performance de deux heures à laquelle se livre ce McBurney, conteur hors pair, aidé par un travail lumière et son incroyable. Avec une histoire qui a un propos politique : l’Amazonie, une tribu, les Mayoruna… 1969… 2018, même combat ! Malheureusement toujours le même combat…
Rien n'est superflu, ni gadget, tout est parfaitement travaillé, maitrisé à la perfection et la technologie est (enfin !) au service de la narration.
Nous sommes transportés pendant deux heures au bout du monde à la rencontre de la tribu des Mayoruna, suspendus aux lèvres de notre héros.
C'est simplement prodigieux.
En bref, Simon MCBURNEY raconte un conte écologique, tiré d'une vraie histoire : celle de l'explorateur Loren McIntyre, qui dans les années 50 part en Amazonie pour le National Geography, à la rencontre de tribus amazoniennes. Il est témoin du Commencement : un rite Mayoruna, au cours duquel des indigènes brûlent tous les objets matériels qu'ils ont construit (ils se donnent même de nouveaux noms). Le matériel fige l'homme dans le temps et le coupe de son environnement naturel. Sans objet, Barnacle est ainsi intemporel.
Ce qui est incroyable dans le spectacle : la technologie au théâtre. Le décalage entre la simplicité de ce qu'on voit sur scène (bouteille d'eau, froufrou, chips, livre et mannequin qui spatialise le son), et la complexité de tous les sons qu'en entend. Le spectateur a un casque audio, et Simon MCBURNEY, seul en scène, parle dans nos têtes, et crée des sons, et ça nous hypnotise. On perçoit uniquement les sons de l'histoire que raconte Simon MCBURNEY, mais on imagine tout un spectacle. Le son permet à chacun d'imaginer un spectacle visuel, d'être créatif et imaginatif, juste avec ce qu'on entend. Ce procédé n'est pas nouveau, mais il est quand même paradoxal au théâtre, art basé sur la représentation visuelle.
Les thèmes abordés sont intéressants : les sociétés matérielles de consommation, puis l'imaginaire, la création, le virtuel qui sont les bases du spectacle.
Des passages auxquels j'ai ri :
- le portable c'est juste une chose, c'est pas la réalité
- certains d'entre nous sont des amis
- soit je suis dans la merde, soit je vis une expérience incroyable
Je recommande vivement !