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L'amante anglaise

L'amante anglaise
De Marguerite Duras
Mis en scène par Thierry Harcourt
Avec Judith Magre
  • Judith Magre
  • Lucernaire
  • 53, rue Notre-Dame-des-Champs
  • 75006 Paris
  • Notre-Dame-des-Champs (l.12)
Itinéraire
Billets de 13,00 à 26,00
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« Je cherche qui est cette femme, Claire Lannes. Claire Lannes a commis un crime. Elle ne donne aucune raison à ce crime. Alors je cherche pour elle ».

Marguerite Duras

 

Inspirée d’un fait divers authentique dans lequel une femme simple tue sans pouvoir expliquer pourquoi, Marguerite Duras a écrit L’Amante Anglaise, qui raconte la recherche de la vérité, des circonstances qui ont pu mener à un tel acte.

Ils sont trois, l’interrogateur et le mari s’interrogeant sur les raisons de ce crime puis la femme, la meurtrière s’explique. Mais le fait-elle vraiment ?

 

Dans ce thriller psychologique Judith Magre est Claire Lannes. Avec plus de cent rôles et trois Molières à son actif, c’est la première fois qu’elle interprète un personnage de Marguerite Duras. « Ma route est allée droit vers ce crime »

 

Note rapide
7,5/10
pour 8 notes et 8 critiques
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4 critiques
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Toutes les critiques
21 sept. 2017
6,5/10
9
Si les comédiens jouent bien, la pièce est compliquée d'accès, si (comme moi), vous ne connaissez pas Marguerite DURAS.

En bref : une femme schizophrène, Claire Lannes, tue sa cousine sourde-muette qui vivait chez elle depuis des années, et l'avoue sur-le-champs. Pendant toute la pièce, un enquêteur interroge Claire Lannes, la meurtière, ainsi que son mari pour expliquer le meurtre, sans aucune réponse. La seule explication qu'on ait dans la pièce : le titre. L'amante anglaise est un jeu de mot sur la Menthe Anglaise, que Claire Lannes aime cultiver dans son jardin.

Il s'agit d'un théâtre "d'intellectuel" (comme souvent j'ai l'impression au Lucernaire) : des pièces qui traitent de thèmes philosophiques, en l'espèce : la vérité, la conscience, la schizophrénie, la justice...

Sans être vraiment rentrée dans la pièce, j'ai été marquée par la noirceur des personnages durassiens, le tragique, leur esprit mal tourné et mal intentionné.

La mise en scène est simple : c'est plutôt agréable, étant donné que les salles du Lucernaire sont petites, donc on ne se sent pas étouffer.

Concernant le jeu des acteurs, il y a une vraie gravité dans le ton chez Claire Lannes, qui colle bien à son personnage. Elle est inquiétante !

Bonne pièce à tous !
9 avr. 2017
8/10
21
La pièce de théâtre "l'amante anglaise"de Duras vient se se terminer au Lucernaire.
Mais ce n'est pas pour autant qu'il faut arrêter d'en parler !!! Ni policière, ni psychologique, cette pièce offre un saisissant portrait de femme, emprunt de nuances contradictoires. Scellé d’humour noir. Un malicieux mélange entre une Madame Bovary, qui préfèrerait (plutôt que de prendre des amants) jardiner ses menthes anglaise, et un portrait psychologique digne de l'héroïne intrigante de Sébastien Japrisot, dans son thriller « La Dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil ».
1 mars 2017
7/10
26
Je me souviens parfaitement de l'Amante anglaise jouée en 2010 au Théâtre de la Madeleine, avec André Wilms, Ariel Garcia-Valdès et la grande Ludmilla Mikaël (à qui la profession décerna cette année-là un brigadier pour sa performance). J'ai failli ne pas me risquer à venir voir celle qui est à l'affiche du Lucernaire. La curiosité l'emporta et je ne regrette pas.

Il faut savoir que Marguerite Duras s'était indignée à plusieurs reprises de la façon dont étaient menés les interrogatoires et du manque d'écoute de la machine judiciaire. Ce qui la passionnait n'était pas de savoir qui avait commis le meurtre mais comment on pouvait en arriver à cette extrémité. C'est bien le silence de l'accusée qu'elle cherchait à faire parler.

Les lecteurs se rappellent peut-être du titre de l'éditorial qu'elle avait écrit dans le journal Libération en 1985 à propos de Christine Villemin (on croyait alors que c'était une mère infanticide. Depuis le procès s'est conclu par un non-lieu) où elle s'enflammait à propos de la mère de Grégory qu'elle voyait "Sublime, forcément sublime". Cet article était maladroit, fut très mal compris et fit scandale.

L'Amante anglaise est sans rapport avec l'affaire Grégory puisque la pièce a été écrite en 1968. Marguerite Duras s'était inspirée d’une autre situation -réelle elle aussi- dont elle a modifié quelques paramètres (l'épouse Rabilloux tue son mari en 1949, dépèce le cadavre, s'imagine le dissimuler en en jetant les morceaux la nuit dans des trains de marchandise ... qui passent tous sous le viaduc de son quartier ... à Savigny-sur-Orge) pour explorer à sa manière à qui profite un tel crime. Le présupposé de Marguerite Duras est d'éclairer l'inexplicable, partant du principe que rien n'est gratuit ni fortuit.

Claude Régy avait monté la pièce le premier en 1968, avec Madeleine Renaud, Claude Dauphin et Michaël Lonsdale. En 1999, Patrice Kerbrat l'a reprise avec Suzanne Flon, Jean-Paul Roussillon et Hubert Godon. La voici avec une distribution toujours aussi remarquable et on comprend que Judith Magre ait eu envie de se saisir (pour la première fois de sa grande et belle carrière) d'un texte de Marguerite Duras. Elle s'en amuse autant que possible : je tue d'accord mais on rit quand même, avait-elle promis le soir de la présentation de la pièce. Pari tenu par cette grande comédienne qui compose une Claire Lannes toute en nuances.
Le mari, Pierre Lannes (Jacques Frantz) est questionné le premier. Son innocence, du point de vue de la justice, vacille lorsqu’il avoue que oui vraiment cette mort est une aubaine inespérée, d’où la conclusion : vous avez tué en rêve, elle en vrai. Elle, c’est sa femme, Claire Lannes, la meurtrière de sa cousine, que l’on entendra dans la seconde partie.

L’époux sera libre. Libre, mais pas complètement innocent. L’interrogateur (Jean-Claude Leguay) suppose, réfléchit, relance. Il a parfois une façon de pencher la tête, de secouer son carnet de notes. Sans lumière aveuglante, loin de ce qu'on présuppose d'un interrogatoire, avec empathie, comme un psychologue chercherait à aider son patient à dérouler sa pensée.
Quand la rubrique "faits divers" relate de tels crimes elle les qualifie souvent d’actes gratuits, par raccourci, dans un aveu d’incompréhension ou par déni d’un sens profond. La criminelle elle-même ne saurait expliquer son geste. Alors je cherche pour elle dira l’Interrogateur, patiemment, car à défaut de raison objective il espère débusquer une ébauche de motif, un indice de motivation …

Tout le monde rêve de crime. Elle-même l’a confié à son mari. Elle craint maintenant la sentence. Elle sait que plus les criminels sont clairs plus on les tue (il faut avoir conscience que la peine de mort n’est pas encore abolie) et pourtant faire la lumière l’attire même si elle a d’abord estimé que ce n’était pas la peine d’expliquer. Elle a tout dit à la justice mais ce n’est pas tout à fait vrai. Elle n’a pas révélé où elle a caché la tête.

Sa cousine était grosse, trop grosse, cuisinant systématiquement des viandes en sauce. Quel écœurement ! Chaque dîner était la fin du monde. Claire en a vomi. Dans le jardin, sur le banc où à force de rester immobile lui venaient des pensées intelligentes. Elle pense au bonheur, s’enivrant du parfum mentholé des herbes aromatiques. Au suicide aussi. Elle vacille, sombrant dans l’anorexie mentale jusqu’à la folie.

Le titre de la pièce s'explique brutalement quand on réalise que c'est un simple jeu de mots avec la plante, la menthe.

Ce qui n’est pas pensé ne peut être dit. Avec honnêteté et parfois un regard qu'on pourrait penser malicieux, l’accusée répond, élabore, dit tout ce qu’elle peut, s’efforçant de ne pas perdre la tête. Oui elle a aimé. Oui à la folie. Oui, un jour on lui a menti et le ciel s’est écroulé. Oui sans doute n’était-elle pas assez intelligente pour l’intelligence qu’elle avait.
Elle parait dès lors moins coupable, voire même presque victime d’une sorte de vie étriquée sans occasion de rencontre, ni affective, ni intellectuelle, sans personne à qui parler. Coincée entre un mari massif et distant, une servante sourde et muette, souffrant de l’absence d’un ex-amant, dans ce village enserré dans un nœud ferroviaire. Au fond, seul l’Interrogateur constituera un partenaire intellectuellement de son niveau. Fiévreux, sérieux, tenace mais découragé subitement il cesse d’autopsier un meurtre dont l’essentiel vient d’éclater in extremis aux pupilles des spectateurs. Et c'est vainement que Claire Lannes le supplie de l'écouter.

Thierry Harcourt, le metteur en scène, affirme avoir été séduit par l'aspect policier de la pièce qu'il a vu comme un thriller de l’esprit, une tentative de comprendre ce qui peut pousser quelqu’un à commettre un acte aussi barbare.

L'amante anglaise demeure une énigme, ne révélant aucune circonstance atténuante pour alimenter la défense. Si ce n'est une toute petite phrase : "on ne se parlait pas".
24 févr. 2017
7/10
21
Si Judith Magre a elle seule vaut le déplacement (tant sa prestation est fascinante) je n'en dirais pas autant de la pièce : certes le fait divers est intéressant mais la construction de la pièce est faible le manque de théâtralité se fait cruellement sentir. Le petit jeu des questions-réponses lasse très vite.
11 févr. 2017
6/10
94
Pour ses quatre-vingt-dix printemps, l’incorrigible Judith Magre relève le défi d’interpréter du Duras. Une aventure dans les méandres énigmatiques de la psyché avec L’Amante anglaise. Au Lucernaire, Thierry Harcourt la dirige avec une espièglerie entêtée qui parvient partiellement à gommer les bavardages répétitifs de la pièce.

On ne saura jamais vraiment pourquoi Claire Lannes a décidé de massacrer et de découper en morceaux sa cousine Marie-Thérèse Bousquet. On peut seulement supposer. Un homme (Jean-Claude Leguay, à l’écoute,tendu) l’interroge car il veut comprendre le pourquoi du crime. Duras n’a jamais aimé donner de réponses. Elle préfère laisser planer le doute tout en construisant sa pièce comme une enquête policière dont les fils tisseraient une toile d’araignée menant à la résolution de l’affaire. Les pièces du puzzle s’effleurent dangereusement sans parvenir à établir une connexion satisfaisante. Les explications rationnelles du mari (Jacques Frantz, pathétique et désemparé) retardent l’entrée en scène de la meurtrière. Il faudra attendre la moitié du spectacle pour que la reine Judith Magre fasse son apparition. C’est long.

Judith et Holopherne
Duras joue un peu trop avec les nerfs du spectateur : elle s’écouter parler et le mystère opaque des débuts se dissout en un galimatia : Thierry Harcourt a su respecter le tempo lancinant de la pièce mais le rythme en pâtit. La mise en scène, élégante et intrigante avec ses effets d’ombre et de lumière subtilement dosés, n’en demeure pas moins très classique. Il a su heureusement choisir des partenaires en or. Quand Judith Magre pointe le bout de son nez, le temps s’arrête. Elle colore le personnage de Claire d’une teinte complexe : si accessible et si inatteignable. Harcourt transforme le polar en jeu du chat et de la souris : malicieuse et effrontée, la comédienne sait tenir tête avec panache. Ses gamineries de petite fille opèrent un contraste saisissant avec la monstruosité pas vraiment ordinaire de cette femme qui se confie avec un plaisir non dissimulé. On comprend parfaitement à la fin de la pièce que Claire ne souhaite qu’un peu d’attention, d’écoute et de réconfort, elle qui aura mené une vie léthargique après la mort de l’amour de sa vie…
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Notes détaillées (pour les plus courageux)
Texte
Jeu des acteurs
Emotions
Intérêt intellectuel
Mise en scène et décor