Critiques pour l'événement Mon Ange, Lina el Arabi
14 déc. 2017
8/10
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L'interprétation est parfaite avec un texte poignant.

La mise en scène est toute en poésie, avec un superbe jeu de lumière.
On s'imagine à Kobane entre le YPG et Daesh, entre peur et espoir.

Une très belle pièce à voir.
25 nov. 2017
9/10
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C’est une pièce touchante, qui bouleverse tant le sujet est dur. C’est poignant, prenant et violent comme toute guerre...
Quelques touches d’humour (notamment lorsqu'elle interprète son père) pour respirer, reprendre son souffle.
Pendant 1h15, je vivais l'histoire de cette jeune Kurde à la recherche de son père. Le texte et la mise en scène sont d'une force... auxquels s'ajoute la brillante interprétation de Lina El Arabi. Ce seul en scène nous fait vivre une oscillation d'émotions (du rire, à la peur, à l'angoisse...). Lina El Arabi "habite" totalement Rehana.
Ces larmes à la fin du spectacle résument bien toute l’énergie et la ferveur qu'elle y met.
A voir malgré la dureté du sujet.
1 nov. 2017
7/10
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Que dire de ce seul en scène? J'ai été déroutée par le phrasé de Lina El Arabi (beaucoup de passages hurlés d'autres inaudibles) mais impressionnée par sa performance. La faible luminosité des éclairages et les coups de fusils très sonores permettent d'accentuer cette pesanteur, cette gravité du sujet.

Belle histoire de cette fille qui retourne chercher son père en Syrie alors que Daesh sévit mais pour moi cela manquait d'émotion.

Dommage.
29 oct. 2017
7/10
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Mon ange, c’est l’histoire de Rehana et plus généralement, l’histoire de jeunes femmes de Kobané (Syrie) quand le siège de Daech a commencé en 2014.

Rehana est appelé ‘mon ange’ par son père, un ancien guerrier, qui lui apprend à tirer avec précision. Il restera se battre pour défendre Kobané alors que Rehana part en exil avec sa mère lorsque Daech lance son offensive sur la ville. Mais Rehana veut retrouver son père, elle va revenir sur ses pas et va prendre les armes pour rentrer à Kobané. Bien malgré elle, elle devient un ange de la mort qui fait des dégâts dans les rangs de Daech.

L’adaptation du livre d’Henry Naylor (Angel) est percutante, la mise en scène de Jérémie Lippmann est sombre, bruyante et violente mais sert parfaitement la puissance du texte. La pièce n’est pas à mettre devant tous les yeux, il faut pouvoir supporter les déflagrations d’armes sans se jeter sous son fauteuil. Le volume sonore est assez fort pour contribuer à l’ambiance oppressante et nous faire sentir le danger. La violence est omniprésente.

De même, la diction de Lina El Arabi qui incarne Rehana, est très rapide, essoufflée par moment. Il m’a fallu un petit moment pour m’y habituer et comprendre tout ce qu’elle dit. Mais ensuite, on est happé par son histoire, où il n’y a pas de temps mort, nous sommes nous-même oppressés en suivant le déroulement. J’ai retenu mon souffle à plusieurs reprises.

Et je suis restée sidérée quelques instants lors du final tout à fait particulier, tout comme le reste de la salle, avant d’applaudir la comédienne avec enthousiasme.

Une pièce dure mais nécessaire.
Le destin d'une jeune femme de son temps, qui se destinait à être avocate et que l'histoire de son pays transforme en héroïne de la résistance kurde. Un texte fort porté avec fouge et détermination par une extraordinaire jeune comédienne.

Rehana aime Beyoncé, les livres, l'école, ses amies. Elle sera avocate. Hors de question de reprendre la ferme et de suivre les pas de son père qu'elle adore. Mais la vie en a décidé autrement. Son village est à une trentaine de kilomètres de Kobané. Cette ville deviendra une place forte de Daesh. C'est alors la fuite avec sa mère. Mais elle ne supporte pas l'idée d'abandonner son père. Pour le retrouver elle repasse de l'autre côté de la ligne de front. Elle reviendra à Kobané et malgré elle deviendra une héroïne de la résistance kurde.

La jeune Lina El Arabi (tout juste 21 ans) porte ce récit avec force, hargne, rage, ferveur. Sa voix est puissante, rugueuse et âpre comme l'énergie que met Rehana à lutter, contre les forces ennemies. Ennemies de son pays, ennemies de sa communauté, ennemies des femmes. "Mon ange" comme l'appelle son père va se brûler les ailes dans cette plongée progressive dans le conflit, au cœur de l'horreur. Le ton est grave. L'ambiance est sombre. La mise en lumière, les sons (parfois un peu trop fort), le texte nous plongent au cœur des combats. Combat externe et combat interne de cette jeune vie qui se perd dans les ravages de la guerre. "A chaque fois que je tue je meurs un peu".

La scénographie est un nuage de plume qui se fait arbre rédempteur, camp de réfugiés, bunker, cour d'école, champ de bataille. Sur cette scène en clair-obscur, avec un extraordinaire travail de lumière, le spectateur cherche la jeune femme, la suit dans cette obscurité prenante. Son et lumière nous entourent tandis que Lina El Arabi capture et captive notre attention. Les mains crispées jamais elle ne décolère, jamais elle ne lâche prise, même lorsqu'une rare plaisanterie voudrait donner une respiration. Dans un seule en scène d'une rare intensité la comédienne éblouie. Pas de temps mort. Le rythme est soutenu, les personnages se succèdent, dialoguent, un mouvement du corps, une modulation dans la voix faisant passer Lina El Arabi de l'un à l'autre. Le spectateur est tendu comme la comédienne dans un spectacle intense, grave et magnifique. On sort du théâtre bouleversé, terrassé par notre impuissance collective et individuelle face à cette évocation puissante de la fin d'un monde, rappel de la triste universalité de cette humanité qui se déchire. Dans ce chaos Mon ange devient un symbole universel de résistance qui fait écho dans le coeur des hommes et des femmes bien au-delà de Kobané.

Un seule en scène grave et intense, bouleversant. Lina El Arabi incarne avec énergie, colère et magnificence le destin d'un jeune combattante kurde en Syrie. Un spectacle essentiel.
24 oct. 2017
8,5/10
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Présenté au Théâtre du Chêne Noir lors du Festival OFF 2017, je me souviens encore des affiches de Mon Ange placardées dans Avignon. Déjà, la présence de Lina El Arabi, ce mélange de résignation et de tristesse, m’avaient interloquée. Mais speed d’Avignon oblige, je n’ai évidemment pas pu tout voir, malgré les critiques engageantes qui encourageaient le spectacle. Je n’ai pas voulu manquer sa reprise parisienne.

Peut-être que si j’avais lu attentivement le pitch de la pièce, j’aurais douté. Ce genre de spectacle, je le sais, provoque en moi de désagréables échos d’événements encore trop récents pour être correctement cicatrisés. Pourtant notre traumatisme d’occidentaux privilégiés n’est en rien comparable au destin de Rehana, devenue malgré elle symbole de résistance lors du siège de Kobané, il y a quelques années.

L’horreur de la guerre, la sensation que tout peut prendre fin à n’importe quel instant, la fragilité de la vie et l’absurdité de la violence qui régnait alors sur la région, tout transparaît dans ce spectacle. Lina El Arabi a une présence indéniable et semble voir, devant ses yeux, les paysages ravagés par Daech. Malgré un texte parfois un peu verbeux, elle parvient à nous maintenir en haleine, terrorisés, plaqués au siège. Les choix scéniques de Jérémie Lippmann sont très esthétiques, tant sur ces décors d’arbres qui deviennent, à travers les jeux de lumière, successivement des cadavres puis les ombres des mitraillettes braquées sur la jeune femme, mais également sur son costume : Lina El Arabi est à la fois l’élégance et la grâce féminine, très belle dans cette longue robe noire qu’elle porte avec une certaine distinction, et l’Ange de la mort, terrible, implacable.

Je déteste l’utilisation des armes au théâtre. Dès qu’apparaît le moindre flingue sur la scène, mes doigts viennent boucher mes oreilles et mes yeux se ferment à demi. Je ne cherche pas à réfuter l’horreur, mais elle a tellement d’écho dans notre réalité que j’ai du mal encore à l’affronter en face. Connaissant mon peu d’attrait pour les sons pétaradants, la personne qui m’accompagnait m’a proposé de partir peut-être 10 minutes après le début du spectacle. Mais si le rôle du théâtre est de montrer, mon rôle de spectateur est de voir, d’entendre, de prendre conscience. Affronter une réalité que je m’efforce inconsciemment de nier, me montrer à la hauteur de celle qui, chaque soir, vit une vie de violence.

Une épreuve… nécessaire.