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Yves Poey
Yves Poey
Mini-Molière du Critique
120 ans
62 espions
espionner Ne plus espionner
Des critiques de théâtre, des interviews webradio, des coups de coeur, des coups de gueule.
Son blog : http://delacouraujardin.over-blog.com/
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Ses critiques

1005 critiques
Singulis / Molière-matériau(x)

Singulis / Molière-matériau(x)

9,5/10
3
Yes, he « canne » !

Cette canne est le tout premier souvenir qui relie Pierre Louis-Calixte à Molière, du côté de Yaoundé, au Cameroun.
Cette canne, c’est celle du grand-père, celle aux deux petites incrustations d’ivoire qui servira d’accessoire au petit Pierre pour interpréter devant ses copains de classe le rôle d’Harpagon.

Cette canne, il l’a toujours. Dans ce spectacle, il va s’en servir.
En mémoire…

Oui, dans ce remarquable spectacle, il sera question de mémoire.
De passerelles mémorielles entre un comédien et notre plus illustre des auteurs.
Ce fut en effet la commande d’Eric Ruf à celui qui paradoxalement a très peu joué Molière, qui n’est pas son auteur fétiche : livrer à nous autres spectateurs les éléments qui relient l’auteur de tant de chefs d’œuvre à l’un des membres de la Troupe.

Grâce à l’écriture et au texte passionnants du comédien, le plateau du Studio-Théâtre va devenir un lieu de mémoire : la mémoire des disparus illustres et ceux des vivants qui sont présents dans la salle.
L’acteur, bien entendu, mais également nous autres spectateurs.
Car les souvenirs d’un permettront à ceux de tous de revenir à la surface. Nous aussi allons nous remémorer.
© Photo Y.P. -


« Je t’appellerai Jean-Baptiste ! », prévient d’emblée dans un tutoiement de bon aloi celui qui s’adresse à M. Poquelin.

Ce faisant, Pierre Louis-Calixte nous propose un double portrait, un chassé-croisé mémoriel.

Le comédien nous pose d’emblée une sacrée question : au fond, qu’est-ce qu’une existence, que sont ces petits romans et ces petites légendes individuels, que restera-t-il de nos vies, finalement, à l’aune des souvenirs et des réminiscences ?

Durant une heure, nous allons découvrir ces passerelles, ces jalons « moliéresques » qui ont balisé sa vie personnelle et professionnelle.

Nous assisterons à un magnifique et émouvant hommage.

Un homme de théâtre, le 524ème Sociétaire rend hommage à son art et à ceux qui ont compté pour lui.


Tout commence par du son.
Celui d’une sorte de micro-trottoir diffusé dans les enceintes acoustiques de la salle, avant le début du spectacle, dans lequel des inconnus parlent spontanément de celui dont on fête cette année le 400ème anniversaire.
Et puis le bruit d’une allumette que l’on craque.


Une façon habile de relier son précédent Singulis à celui-ci : déjà, dans Le bruiteur, écrit par Christine Montalbetti, Pierre Louis-Calixte rendait un vibrant hommage au 6ème art, par l’intermédiaire d’un technicien du son très prolixe.

Le comédien est un conteur, un raconteur.
Il nous captive à nous peindre et dépeindre sa mémoire.


C’est avec des mots, des gestes théâtraux que lui peut dresser le portrait du Patron.

Ce sont ses pinceaux à lui, lui qui a remarqué très juste titre qu’aucun des portraits peints de Molière ne se ressemblaient entre eux.



Il va nous faire rire et sourire, avec la gouaille qu’on lui connaît, mais il va également nous bouleverser.
Avec des moments intenses et émouvants.


Le coup de fil d’Eric Ruf lui proposant ce Singulis, alors qu’il se trouve aux côtés de son père atteint d’un Alzheimer qui progresse inexorablement.


La proposition de Muriel Mayette, l’appelant pour entrer au Français en 2006 pour reprendre le rôle de Cléante dans le Tartuffe mis en scène par Marcel Bozonnet.

Le comédien nous dira les bouleversantes circonstances de ces premiers pas à la Comédie française, avec un hommage très prenant à Daniel Znyk, qu’il dut remplacer pour la raison que l’on sait.
Les costumes, autres accessoires dotés de mémoire...

Sans oublier son rôle de Louis dans Juste la fin du monde, la pièce de Lagarce, qu’il relie de façon très subtile au Malade imaginaire, avec le thème de la maladie, de la Mort.

Car lui aussi, celui qui se trouve devant nous l’a connue, la maladie.



Ce faisant, nous sera mise en abyme une réflexion quant au métier de comédien, cet art qui consiste contrefaire, à faire semblant, à mentir et à tricher, en quelque sorte.

Je n’aurai garde d’oublier de mentionner les belles lumières de Catherine Verheyde, qui éclairent de façon douce et subtile le plateau, avec de bien jolis clair-obscurs.



Avec tous ces matériaux plus ou moins bruts, avec tous ces fragments mémoriels, Pierre Louis-Calixte est parvenu à construire un magnifique édifice dramaturgique, l’un de ceux qui nous parlent de façon juste et passionnante de cet étonnant et étrange art qu’est le théâtre.

Un spectacle à côté duquel il serait vraiment dommage de passer.
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Dean Brown au New Morning

Dean Brown au New Morning

9,5/10
3
​

Du groove, du groove, du groove, chantait naguère Michel Jonasz

Du groove, les heureux aficionados présents hier au New Morning en voulaient, ils ont en eu !

Dean Brown et ses trois compères avaient en effet posé leurs flight-cases dans les coulisses de cette mythique salle parisienne pour dispenser leur message et leur art !

Du groove et du meilleur, croyez-moi !

Dean Brown.
Ou comment faire chanter, crier, hurler, murmurer, comment malmener pour la bonne cause une stratocaster Fender.

Celui qui a joué avec Marcus Miller, Eric Clapton, Billy Cobham, George Duke, Victor Bailey ou encore les frères Brecker et bien d’autres, celui-là va une nouvelle fois démontrer sa virtuosité et son impressionnante propension à tirer de la Fender en question des rythmes en béton à base d’accords complexes, des riffs hallucinants, des improvisations très inspirées.

Dean Brown, celui qui vous démontre tout ce qu’on peut faire avec une guitare électrique.

Armé d’un impressionnant pedal board, il utilise toutes les possibilités techniques, le fuzz, le phasing, la reverb, le wah-wah par moment, pour nous démontrer qu’il est encore et toujours l’un des techniciens les plus doués de cet instrument.


De plus, c’est un vrai bonheur de le regarder jouer, avec ses mimiques, ses grimaces, ses petits pas de danse, ses coups de pieds en l’air.


Bien entendu, cet homme sait s’entourer, avec également trois pointures, trois des plus grands spécialistes de leur instrument dans leur domaine.

C’est l’immense Dennis Chambers en personne qui va ouvrir le feu.

Avec un magistral coup de kick, suivi d’un premier groove incandescent. D’entrée de jeu.
Lui, fait en sorte que dès la première mesure du premier titre, vous soyez pris dune irrésistible envie de bouger, de danser.

Lui aussi a déjà joué avec beaucoup de monde : John Scofield, Tom Coster, George Duke, Carlos Santana, John Mc Laughlin, Mike Stern, Parliament/Funkadelic, j’en passe et non des moindres.

Dennis Chambers, l’un des batteurs les plus doués techniquement parlant, Dennis Chambers est pour moi un mystère.

Comment peut-il, avec la sérénité qui est la sienne, avec cette impression de tranquillité, de délicatesse, comment peut-il délivrer ces rythmes incandescents, monstrueux de groove brûlant.
Dennis Chambers, la force tranquille.

Ce qu’il va une fois de plus nous montrer et nous faire entendre va sidérer le public en général et les nombreux batteurs présents dans la salle en particulier.
Hallucinant de technique, de précision, de feeling, de rigueur métronomique, cet homme serait-il le rythme incarné ?

Coups de grosse caisse au fond du temps, breaks jouissifs, descentes des cinq toms grandioses, roulements et frisés impressionnants, capacité de transcender la mesure, ce homme est lui aussi une bibliothèque de toutes les possibilités de la batterie.
De plus, il est complètement ambidextre, ce qui procure des images stupéfiantes.

C’est un véritable bonheur de le regarder et de l’écouter.
© Photo Y.P. -

Tout comme son camarade bassiste, un certain Victor Wooten, celui qui participa voici quelques années à une tournée mondiale en compagnie de deux de ses collègues, Stanley Clarke et Marcus Miller.

Lui aussi va nous sidérer.
Avec sa basse pourvue d’une manette de vibrato (c’est rarissime), avec ou sans looper, il va nous ravir et nous impressionner durant l’heure et demie que va durer le concert.

Le duo Chambers/Wooten va nous donner bien des fourmis dans les jambes et des frissons dans tout le corps.
Ces deux-là s’entendent comme larrons en foire pour délivrer ce groove infernal et si jubilatoire.

Aux saxophones ténor et alto, Bob Franceschini n’est pas non plus un manchot.

Ses soli, ses lignes mélodiques s’inscrivent parfaitement dans le discours musical du groupe.

C’est lui qui se charge des mélodies harmoniques des différents titres, arc-bouté comme un boxeur prêt à en découdre à chaque instant.
Lui aussi a « électrifié » ses instruments grâce à tout un panel de pédales d’effets.


Le quatuor nous propose donc une dizaine de titres, tous plus inspirés les uns que les autres.

Les tempi sont variés.
Lors du rappel, Denis Brown nous demandera de choisir : « slow or fast ? »
La réponse unanime permettra de conclure le show avec le titre Hail à la furieuse vélocité.

Tout le public ressort du New Morning complètement sonné et dans un état de félicité avancé.

Ce quatuor est de ceux pour lesquels nous ne pouvez vous empêcher de penser : «mais comment font-ils donc, comment peut-on jouer de cette façon, ces quatre types-là sont-ils humains ? »

Un immense moment musical !
​
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Histoire(s) de France

Histoire(s) de France

9/10
4
Ils sont fous, ces Rom... Profs !



Ne voilà-t-il pas que l’une d’entre elles s’est mise en tête d’enseigner l’Histoire de façon différente à une classe de 6ème !
Les collégiens devront choisir des scènes de l’histoire de France et les jouer devant leurs camarades.



(Je ne suis pas certain que M. Blanquer priserait l’exercice. Un Inspecteur Pédagogique Régional serait dépêché sur place séance tenante ! )


En tout cas, tel est le défi qui attend un trio de potes, Camille, Arthur et Ibrahim.

Oui, un véritable défi ! Et ce, à plusieurs titres.
Il faudra débord choisir quelles périodes montrer, et surtout, comment les montrer.

Bien d’autres interrogations vont se poser à elle et à eux...

Qu’évoquent « nos ancêtres les Gaulois » pour ces enfants en général et pour Ibrahim en particulier, lui dont les deux parents sont algériens ?
Comment représenter César, Vercingétorix, Louis XVI, Marie-Antoinette ? Quelles images ont en têtes ces trois collégiens ?

Qui doit jouer qui ? Camille, la collégienne peut-elle interpréter le rôle du chef des Gaulois ?

Ibrahim peut-il jouer la reine ?

Amine Adjina a écrit un spectacle pour les jeunes qu’il serait vraiment dommage de laisser aux seules têtes plus ou moins blondes.

Durant une heure et quart, il va être question de mettre en perspective notre Histoire de France.
Nos histoires de France.
Ici, pas de place pour ce qu’il est convenu d’appeler le Roman national.

A l’inverse de certaines pratiques de certains candidate et candidat d’extrême-droite à la présidentielle, il n’y aura aucune récupération de figures historiques fantasmées, idéalisées, mises à des sauces plus ou moins nauséabondes.
Ici, le seul Z qui comptera et aura du poids sera celui de Zidane.

A ce titre l’entreprise d’Amine Adjina est des plus salutaires.
Tout comme beaucoup de jeunes historiens de plus en plus nombreux, il se penche véritablement les représentations que nous pouvons avoir de ces personnages du passé.


Ces trois collégiens vont questionner nos rapports aux récits, et vont le déconstruire, ce Roman national, avec leurs moyens, avec leur vécu et leur imaginaire.
Pour eux, l’important sera de faire, de réinvestir à leur façon les connaissances déjà acquises.

C’est ainsi qu’une succulente scène mettre aux prises le druide Abdallah et une Vercingétorix à forte poitrine, sous les yeux d’un Jules César en veste de costume et jupette plissée.
La scène est très drôle et fonctionne admirablement.
Bien d’autres du même registre nous feront également bien rire.

Quand j’étais gamin, feux Roger Pierre et Jean-Marc Thibault proposaient un feuilleton intitulé « Les maudits rois fainéants ». J’ai retrouvé sur le plateau ces décalages, ces anachronismes hilarants, ces costumes faits de bric et de broc.

Sauf qu’en ce qui concerne ce spectacle, un vrai propos « politique », au sens premier et noble du terme règne en permanence.


En se focalisant sur trois périodes historiques, et pas des moindres (la conquête de la Gaule, la révolution française et la victoire des Bleus lors de la coupe du monde de 1998), l’auteur questionne notre vivre-ensemble, notre conception d’appartenance à une même communauté humaine.

Sans oublier d’autres thèmes très forts, destinés à faire réfléchir petits et grands.
La question du genre, celle des rapports filles-garçons ou des rapports amoureux, mais aussi l’engagement, la volonté de changer ou de faire évoluer le monde seront également abordés de bien subtile façon.

Et surtout d’une façon très vraie, très saine.
Grâce à une écriture ultra-contemporaine qui fait mouche et qui touche profondément les plus jeunes spectateurs, (les réactions à la sortie de la salle sont unanimes et très éloquentes), ces questions essentielles sont abordées avec une grande intelligence et une très fine pertinence.

Sur le plateau, une comédienne et deux comédiens seront ces trois gamins.
Oui, nous allons complètement y croire.

La co-directrice artistique de la compagnie Le double, Emilie Prévosteau, Mathias Bentahar et Romain Dutheil nous embarquent sans problème dans cette fresque, avec un engagement et une vis comica de tous les instants.

Le trio nous tire bien des rires, mais nous procure également beaucoup d’émotion. A un certain moment, les larmes ne sont pas loin…

Par les temps qui courent, ce spectacle fait partie de ceux qui font beaucoup de bien.
Une grande humanité, un sentiment de vraie fraternité se dégagent de cette entreprise artistique.
Tout ce dont nous avons tellement besoin actuellement.

Allez donc au Théâtre 13-Bibliothèque, même si vous n’avez sous la main ni enfants, ni neveux ou filleuls.

Histoire(s) d’assister à un spectacle des plus réussis.
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On ne sera jamais Alceste

On ne sera jamais Alceste

9,5/10
4
Le professeur est un acteur, il ne faut pas le déranger…

Vous avez dit Jouvet ? Comme c’est Jouvet !

Bienvenue dans la classe de M. Louis, celui qui fut en 1934 le premier professeur du Conservatoire supérieur d’art dramatique à ne pas avoir été Sociétaire de la Comédie Française.
Une classe qui compte quelque 136 élèves ce jour, puisque ces élèves, ce sont nous autres, les spectateurs, assis dans les fauteuils rouges du Studio-Théâtre.



Deux d’entre nous sont quant à eux entrés par la petite porte côté jardin et sont déjà sur le plateau, prêts à passer devant l’illustre Maître la première scène du Misanthrope.

Et puis soudain, une voix retentit derrière nous : le prof en question nous souhaite le bonjour, et montre sa grande satisfaction de nous compter aussi nombreux parmi ses ouailles du jour.
La répétition peut donc commencer.

Lisa Guez a eu une merveilleuse idée, elle qui en plus d’être la dramaturge que l’on sait, est également enseignante universitaire, chercheuse, responsable d’une chaire d’esthétique et de pratique théâtrale à l’Universitaire Lille III.


Cette idée, c’est de mettre en parallèle deux arts : ceux du théâtre et de la pédagogie.
Quelles sont les imbrications de ces deux disciplines, comment articuler l’art d’enseigner et celui de jouer ?



Et pour ce faire, elle a entrepris avec des parti-pris épatants de porter sur le plateau une partie des cours que dispensait donc Louis Jouvet.
Elle a donc choisi de nous faire vivre la retranscription de ce cours mettant aux prises deux apprentis-comédiens et l’immense Alceste.

Pourquoi ce choix ? Au moins deux raisons.

Alceste est sans aucun doute l’un des personnages les plus purs, les plus aboutis, les plus intéressants, les plus difficiles à cerner chez Molière.


De plus, Jouvet n’a jamais joué ce personnage. Lisa Guez pense d’ailleurs assez justement qu’il « partageait une sorte de mélancolie avec Alceste. »



« On ne sera jamais Alceste ! », martèlera-t-il à ses deux élèves ! Le titre du spectacle était tout trouvé.

Ce faisant, nous allons assister à un cours jubilatoire, mettant en perspective la manière de jouer, d’exister sur une scène, nous détaillant les relations entre deux comédiens, dans une une perspective datant de presque un siècle.



Pour Jouvet, seul le texte compte. Il ne faut surtout pas « raisonner », affirmera-il également !
En gros, le comédien doit manifester le plus grand respect pour ce texte, qui seul doit permettre de trouver l’inspiration et les marques. Le comédien ne doit pas réfléchir.
A l’époque, le rôle du metteur en scène, quand il existe, s’il existe, est complètement différent et bien moindre qu’aujourd’hui.

Nous allons beaucoup rire, avec cette démonstration qui sera tout à fait convaincante, nous faisant parfaitement comprendre le point de vue esthétique des années 30.

Tout d’abord parce qu’il sera purement et simplement jouissif de voir trois des sociétaires les plus « capés » jouer les apprentis-comédiens tâtonnant, essayant, se trompant, essayant d’exister face au texte.

Les trois nous rappellent avec beaucoup d’humour tous les codes des jeunes apprentis, leurs aspirations, leurs ambitions, leur façon d’aborder avec innocence et candeur leur conception de la mise en scène.

Ensuite parce que la leçon de Jouvet comporte ici des dialogues ajoutés, des dialogues savoureux, ceux qu’auraient pu dire les deux élèves, commentant les remarques du prof.

Sans oublier les irrésistibles réactions des élèves en question face à ce monstre sacré, des réactions oscillant entre admiration, fascination et terreur, aussi, il faut appeler un chat un chat.



Michel Vuillermoz, Gilles David et Didier Sandre seront ces trois personnages.

L’un des parti-pris épatants évoqués plus haut consistera à faire tourner les rôles. Chacun son tour incarnera Jouvet ou l’un des étudiants.

Le procédé fonctionne à merveille ! Nous ne sommes jamais perdus, nous savons en permanence qui est qui, avec une fluidité remarquable dans les changements de rôle.



Quel bonheur de les voir jouer à essayer de jouer, ces trois immenses comédiens !

Bonheur de les voir nous rappeler les années d’apprentissages, les difficultés rencontrées, les essais, les erreurs.

Bonheur de constater comment ils parviennent apparemment sans efforts à incarner les deux « philosophies » de jeu, comment ils nous montrent de quelle façon la jeunesse est en quelque sorte bridée par le professeur.



Voici venir la dernière partie de cette heure formidable : à eux trois, Messieurs Vuillermoz, David et Sandre vont nous la passer intégralement, cette fameuse première scène, se partageant là encore subtilement les deux rôles.

Ils vont nous la dire à leur façon, très contemporaine, celle-ci. Eux, ils ont raisonné. Eux, ils ont suivi les indications de Lisa Guez.

Impossible alors de ne pas se poser la question suivante :

Dans un siècle, cette manière de jouer qui nous semble la plus évidente et la seule envisageable, cette manière sera-t-elle complètement datée et obsolète ?
Comme nous paraît datée celle préconisée naguère par Jouvet ?

Je vous laisse à votre réflexion.



Ne manquez surtout pas ce petit bijou, ce cours magistral qui devient une merveilleuse leçon de théâtre !
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L'Avare

L'Avare

6/10
3
Bienvenue en Suiiiiiiiisse.

On va r’mettre l’église au milieu du villaaaaaaaage !

Ou Harpagon chez les Helvètes.

« Bon d’accord, on a l’impression d’avoir Christian Clavier en face de soi, mais on a besoin de légèreté en ce moment... », me confiait une spectatrice, hier soir, à la sortie du spectacle.

Totalement d’accord avec elle. Seulement voilà, va-t-on chez Molière pour trouver de la légèreté ?



Pour sa première incursion dans le répertoire du grand Jean-Baptiste, la metteure en scène helvète nous propose donc un Harpagon qui a tout des derniers personnages interprétés par Christian Clavier : les mimiques, les tics, les tocs, la démarche furieuse, sans oublier le costume pantalon clair , veste et gilet sombres de la même couleur…
Qui a eu cette idée : elle ou le comédien Laurent Stocker ? Nous ne le saurons probablement jamais

Bon. Va pour Clavier, donc.



Melle Baur a choisi de traiter cette comédie par le prisme du comique de situation.

Ici, ce qui semble importer le plus, ce sont les à-côtés du texte, c’est rire avec ce qui n’est ni écrit, ni dit, c'est rire avec des petits moments autres que ceux voulus par l'auteur.

Une illustration de mon propos : le personnage de Mariane (l’épatante Anna Cervinka) qui se retrouve complètement ivre à la fin de la pièce. Oui, le public rit.

Autre exemple : le toujours formidable Nicolas Lormeau, qui incarne les rôles de Maître Simon, mais surtout celui de Dame Claude et celui du Commissaire.

Ce qu’il fait est hilarant. Perché sur son escabeau, notamment, c’est lui qui attire toute l’attention, alors que nous sommes censés suivre surtout l’action principale. Oui, nous rions.



Un autre ? Une pelle ensanglantée que brandit notre avare tout à coup. C’est sans doute drôle.

Mais pourquoi ? A-t-il tué quelqu’un en coulisse, a-t-il assommé un voleur ? Pourquoi cette ellipse ?


Certes, Lilo Baur est une experte en matière de déclenchement de rires, mais était-il bien nécessaire d’en rajouter, alors que Molière se suffit largement à lui-même ?

J’ai trouvé que le texte, avec les fameuses tirades que l’on sait, passait un peu au second plan, après une multitude de petites scènes certes drôles, au devant ou au lointain du plateau, monopolisant l’attention et les rires.


C’est son choix.

Comme celui de changer quelques passages du texte original. Pourquoi pas, après tout, les grands auteurs sont fait pour être bousculés…


Seulement, j’ai trouvé que son Harpagon manquait d’épaisseur.
Il ne sert évidemment à rien de comparer, mais le personnage que nous montrait très dernièrement Michel Boujenah dans la mise en scène de Daniel Benoin au Théâtre des Variétés était autrement plus consistant, avec une fine analyse du conflit de générations (c’est avant tout le propos de la pièce, outre la dénonciation du défaut du héros), avec de plus une très belle fin qui nous faisait véritablement comprendre comment cet homme-là devenait l’archétype, le mythe de « l’avaricieux », comment le nom propre Harpagon devenait un nom commun.


Ici, le parti-pris de départ d’en faire un banquier suisse des années 50 était une riche idée, (c’est en tout cas ce qu’indique le dossier de presse…) mais curieusement, cette idée ne trouve pas d’aboutissements ou d’autres rebonds sur notre contemporanéité.

On reste aussi sur notre faim de ce point de vue là…


Deux personnages semblent avoir eu l’heur d’être vraiment travaillés finement : le Maître Jacques épatant de Serge Bagdassarian, et la troublante Frosine de Françoise Gillard.

Bien entendu, tous les comédiens français sont irréprochables, et font ce que leur a demandé de faire Lilo Baur.



La scénographie est dépouillée, avec une alternance bien connue de champs-contrechamps jardin/salon.
Une piscine, un green de golf avec sa voiturette électrique, de jolies guirlandes qui descendent à la fin du spectacle, sans trop qu’on sache finalement pourquoi…

Fallait-il traiter ce chef d’œuvre sur le mode de la farce burlesque et pocharde, fallait-il appliquer les mêmes recettes que la précédente mise en scène, réussie celle-ci, à savoir La puce à l'oreille, quitte à vider cet Avare de sa saveur et de son propos ?

Je ne le pense pas.
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