Ses critiques
384 critiques
9/10
Permettez-moi de clamer haut et fort un enthousiasme sans limite Pour Lorsque l’enfant parait. Il y a du Molière dans l’air, c’est une évidence.
Le texte d’Eric Bu est un parfait mix d’éléments biographiques, d’anecdotes et de pensées pertinemment choisies pour illustrer l’immense apport de Dolto à la psychanalyse. Les trois comédiens (Sophie Forte, Christine Gagnepain et Stéphane Giletta) jouent une partition sans défaut et équilibrée comme rarement. Le décor évoque un confessionnal qui se cache dans un porte-manteaux du siècle dernier.
J’ai ri, beaucoup. J’ai pleuré, beaucoup aussi. C’est un spectacle accessible (évidemment !) aux petits comme aux grands, disons à partir de 10 ans. (Spectacle vu au festival d’Avignon 2021).
Le texte d’Eric Bu est un parfait mix d’éléments biographiques, d’anecdotes et de pensées pertinemment choisies pour illustrer l’immense apport de Dolto à la psychanalyse. Les trois comédiens (Sophie Forte, Christine Gagnepain et Stéphane Giletta) jouent une partition sans défaut et équilibrée comme rarement. Le décor évoque un confessionnal qui se cache dans un porte-manteaux du siècle dernier.
J’ai ri, beaucoup. J’ai pleuré, beaucoup aussi. C’est un spectacle accessible (évidemment !) aux petits comme aux grands, disons à partir de 10 ans. (Spectacle vu au festival d’Avignon 2021).
10/10
La promesse de l'aube est un spectacle qui m'a bouleversée. (…)
La pièce traverse le XX° siècle dont on revit les principaux épisodes historiques. Franck Desmedt connaît parfaitement le texte. Il l’avait mis en scène en 2009. Pour cette édition avignonnaise, il en signe lui-même l’adaptation et assure l’interprétation, en vertu de l’adage qu’on n’est jamais si bien servi que par soi-même. Il assure tous les rôles sans avoir recours à aucun artifice.
Il est l’enfant, puis l’homme qui restera toujours un fils, à la fois porté et encombré par l’amour inconditionnel que sa mère lui inflige. Il se met facilement à la place de celle-ci, une ancienne actrice russe, juive, pauvre, divorcée, reconvertie dans la restauration pour prendre sa revanche sur un passé douloureux. Il est tout aussi aisément Mariette, la femme de ménage initiatrice aux plaisirs charnels, le professeur de mathématiques déconcerté par l’échec scolaire d’un gamin à l’intelligence exceptionnelle, le roi de Suède rencontré par hasard dans un club de tennis, … jusqu’à De Gaulle. Franck Desmedt joue tous les personnages et toutes leurs émotions. Son interprétation est absolument éblouissante de justesse.
Avec l’amour maternel, la vie vous fait à l’aube une promesse. On ne s’en remet jamais. Romain Gary exprime là combien on peut souffrir d’un trop-plein d’amour. Le comédien s’empare du texte avec tendresse, en toute complicité avec un public sous le charme pour chaque épreuve traversée, qu’il s’agisse de la défaillance du miracle sur un cours de tennis, de la découverte de la puissance de l’humour en tant que déclaration de dignité … Qui ne rêve jamais comme cette mère et son fils de plier le monde à son inspiration, en croyant à la beauté et à la justice ?
(…) La mécanique du processus d’écriture est au coeur de La promesse de l’aube. On comprend pourquoi Romain Gary est le seul écrivain à ce jour ayant obtenu deux fois le prix Goncourt et on se dit que Franck Desmedt pourrait bien tout aussi légitimement obtenir deux fois le Molière du Meilleur comédien avec ce spectacle.
(Spectacle vu au festival d’Avignon 2021).
La pièce traverse le XX° siècle dont on revit les principaux épisodes historiques. Franck Desmedt connaît parfaitement le texte. Il l’avait mis en scène en 2009. Pour cette édition avignonnaise, il en signe lui-même l’adaptation et assure l’interprétation, en vertu de l’adage qu’on n’est jamais si bien servi que par soi-même. Il assure tous les rôles sans avoir recours à aucun artifice.
Il est l’enfant, puis l’homme qui restera toujours un fils, à la fois porté et encombré par l’amour inconditionnel que sa mère lui inflige. Il se met facilement à la place de celle-ci, une ancienne actrice russe, juive, pauvre, divorcée, reconvertie dans la restauration pour prendre sa revanche sur un passé douloureux. Il est tout aussi aisément Mariette, la femme de ménage initiatrice aux plaisirs charnels, le professeur de mathématiques déconcerté par l’échec scolaire d’un gamin à l’intelligence exceptionnelle, le roi de Suède rencontré par hasard dans un club de tennis, … jusqu’à De Gaulle. Franck Desmedt joue tous les personnages et toutes leurs émotions. Son interprétation est absolument éblouissante de justesse.
Avec l’amour maternel, la vie vous fait à l’aube une promesse. On ne s’en remet jamais. Romain Gary exprime là combien on peut souffrir d’un trop-plein d’amour. Le comédien s’empare du texte avec tendresse, en toute complicité avec un public sous le charme pour chaque épreuve traversée, qu’il s’agisse de la défaillance du miracle sur un cours de tennis, de la découverte de la puissance de l’humour en tant que déclaration de dignité … Qui ne rêve jamais comme cette mère et son fils de plier le monde à son inspiration, en croyant à la beauté et à la justice ?
(…) La mécanique du processus d’écriture est au coeur de La promesse de l’aube. On comprend pourquoi Romain Gary est le seul écrivain à ce jour ayant obtenu deux fois le prix Goncourt et on se dit que Franck Desmedt pourrait bien tout aussi légitimement obtenir deux fois le Molière du Meilleur comédien avec ce spectacle.
(Spectacle vu au festival d’Avignon 2021).
7/10
Juste une embellie est un texte de David Hare, le dramaturge, scénariste et réalisateur britannique, encensé par Hollywood et qui a écrit plus de trente pièces de théâtre.
On assiste, en quatre actes qui entretiennent une tension psychologique, à la rencontre entre Frances (Corinne Touzet) et Madeleine (Raphaéline Goupilleau) dans une maison reculée, implantée sur l’île de Wight.
La blonde comme la brune ont aimé le même homme, lequel les a aimées toutes les deux. Le spectateur décidera qui, de la charmante mère de famille coincée en banlieue avec ses gamins ou de la passionaria libre (voire libertaire) et militante aurait peut-être eu la préférence, en confrontant les paroles que le séducteur laissait échapper auprès de l’une à propos de l’autre, et réciproquement.
Elles sont aujourd’hui deux femmes abandonnées au profit d’une troisième, beaucoup plus jeune. Elles ont alors le choix de s’affronter, de s’allier, ou de se libérer d’une relation qui pourrait être le sujet d’une autofiction qu’écrirait l’une d’elles. La pièce est aussi une réflexion sur les combats politiques poursuivis par le Flower Power qui ne fut que juste une embellie avant un grand pas de coté.
Les deux comédiennes expriment avec talent tous les sentiments contradictoires que la situation peut générer. Il faut donc profiter de cette embellie et comprendre que courage et confiance en soi ne vont pas systématiquement de pair.
(Spectacle vu au festival d’Avignon 2021).
On assiste, en quatre actes qui entretiennent une tension psychologique, à la rencontre entre Frances (Corinne Touzet) et Madeleine (Raphaéline Goupilleau) dans une maison reculée, implantée sur l’île de Wight.
La blonde comme la brune ont aimé le même homme, lequel les a aimées toutes les deux. Le spectateur décidera qui, de la charmante mère de famille coincée en banlieue avec ses gamins ou de la passionaria libre (voire libertaire) et militante aurait peut-être eu la préférence, en confrontant les paroles que le séducteur laissait échapper auprès de l’une à propos de l’autre, et réciproquement.
Elles sont aujourd’hui deux femmes abandonnées au profit d’une troisième, beaucoup plus jeune. Elles ont alors le choix de s’affronter, de s’allier, ou de se libérer d’une relation qui pourrait être le sujet d’une autofiction qu’écrirait l’une d’elles. La pièce est aussi une réflexion sur les combats politiques poursuivis par le Flower Power qui ne fut que juste une embellie avant un grand pas de coté.
Les deux comédiennes expriment avec talent tous les sentiments contradictoires que la situation peut générer. Il faut donc profiter de cette embellie et comprendre que courage et confiance en soi ne vont pas systématiquement de pair.
(Spectacle vu au festival d’Avignon 2021).
7,5/10
Des étagères encombrées, des rideaux qui masquent plusieurs pans de mur, un bureau et une méridienne composent l’essentiel du décor 1930 aux tonalités bleu de Prusse imaginé par Camille Duchemin et que nous découvrons en nous installant.
On entend des bruits de bottes et des cris de fureur qui se superposent à des violons. L'action se passe à Vienne en 1938 alors que les nazis ont envahi l'Autriche. Anna (Freud, Katia Ganthy) s’est écroulée sur le canapé. Son père (Sam Karmann), l’illustre psychanalyste, est vieux et déjà très malade. La mort est proche, symbolisée par une cabeza mexicaine discrètement placée sur une étagère, mais il reste optimiste. Anna voudrait qu’il signe la demande pour quitter l’Autriche et être ailleurs en sécurité. Mais Freud tergiverse, se sentant coupable d’abandonner à Vienne les juifs qui n’ont pas les moyens de fuir. Il est encore dans le déni : il n’y a pas de nazis viennois.
Pourtant celui qui vient le menacer (Maxime de Toledo) n’est pas complaisant et il y a de quoi s’inquiéter même si Anna lui tient tête. Elle sera emmenée pour être interrogée par la Gestapo et risque de payer son audace très cher. Elle laisse son père à sa solitude inquiète pendant laquelle, est-ce la réalité ou une hallucination … il va recevoir une étrange visite.
Les dialogues font habilement référence à l’essentiel de la pensée freudienne à propos des rêves dont nous n’avons souvent aucun souvenir, par suite du verrouillage opéré par notre propre censure, du recours à l’hypnose pour accéder à l’inconscient de l’analysé, et d’épisodes de l’enfance du savant.
Ce visiteur (Franck Desmedt) apparait en frac, dandy léger, cynique. Il est entré par effraction par la fenêtre et tient un discours incroyable. Qui est-il ? Un fou ? Un magicien ? Un rêve de Freud ? Une projection de son inconscient ?
Eric Emanuel Schmitt a écrit une pièce avec l’art qu’on lui connaît en interrogeant l’histoire sous l’angle religieux. Il va plus loin que raconter un épisode, au demeurant fantasmé puisque la rencontre entre Freud et son visiteur ne peut être qu’imaginaire. Elle lui permet d'interroger la religion, et la croyance en dieu, en faisant se rencontrer et dialoguer Dieu et Freud alors qu'aucun des deux ne croit en l'autre. La joute verbale est savoureuse : Ne serait-il pas ridicule de vouloir soigner un homme quand le monde devient fou ? raille l’un tandis que l’autre réplique : J’accuserais dieu de fausses promesses s’il était en face de moi. (…)
L’auteur explore des questions de morale, comme la puissance de l’argent, et sa fonction libératrice, et surtout celle de la prise de décision, allant jusqu’à égratigner la mémoire du peuple juif en laissant dire au SS : ce qui me dégoûte chez vous les juifs, c’est que vous ne résistez même pas.
Par deux fois la feuille que Freud met du temps à signer s’envole et lui échappe. C’est beau et magique. La mise en scène est de Johanna Boyé, qui présentait aussi pendant le festival d’Avignon Les filles aux mains jaunes et Je ne cours pas je vole.
On entend des bruits de bottes et des cris de fureur qui se superposent à des violons. L'action se passe à Vienne en 1938 alors que les nazis ont envahi l'Autriche. Anna (Freud, Katia Ganthy) s’est écroulée sur le canapé. Son père (Sam Karmann), l’illustre psychanalyste, est vieux et déjà très malade. La mort est proche, symbolisée par une cabeza mexicaine discrètement placée sur une étagère, mais il reste optimiste. Anna voudrait qu’il signe la demande pour quitter l’Autriche et être ailleurs en sécurité. Mais Freud tergiverse, se sentant coupable d’abandonner à Vienne les juifs qui n’ont pas les moyens de fuir. Il est encore dans le déni : il n’y a pas de nazis viennois.
Pourtant celui qui vient le menacer (Maxime de Toledo) n’est pas complaisant et il y a de quoi s’inquiéter même si Anna lui tient tête. Elle sera emmenée pour être interrogée par la Gestapo et risque de payer son audace très cher. Elle laisse son père à sa solitude inquiète pendant laquelle, est-ce la réalité ou une hallucination … il va recevoir une étrange visite.
Les dialogues font habilement référence à l’essentiel de la pensée freudienne à propos des rêves dont nous n’avons souvent aucun souvenir, par suite du verrouillage opéré par notre propre censure, du recours à l’hypnose pour accéder à l’inconscient de l’analysé, et d’épisodes de l’enfance du savant.
Ce visiteur (Franck Desmedt) apparait en frac, dandy léger, cynique. Il est entré par effraction par la fenêtre et tient un discours incroyable. Qui est-il ? Un fou ? Un magicien ? Un rêve de Freud ? Une projection de son inconscient ?
Eric Emanuel Schmitt a écrit une pièce avec l’art qu’on lui connaît en interrogeant l’histoire sous l’angle religieux. Il va plus loin que raconter un épisode, au demeurant fantasmé puisque la rencontre entre Freud et son visiteur ne peut être qu’imaginaire. Elle lui permet d'interroger la religion, et la croyance en dieu, en faisant se rencontrer et dialoguer Dieu et Freud alors qu'aucun des deux ne croit en l'autre. La joute verbale est savoureuse : Ne serait-il pas ridicule de vouloir soigner un homme quand le monde devient fou ? raille l’un tandis que l’autre réplique : J’accuserais dieu de fausses promesses s’il était en face de moi. (…)
L’auteur explore des questions de morale, comme la puissance de l’argent, et sa fonction libératrice, et surtout celle de la prise de décision, allant jusqu’à égratigner la mémoire du peuple juif en laissant dire au SS : ce qui me dégoûte chez vous les juifs, c’est que vous ne résistez même pas.
Par deux fois la feuille que Freud met du temps à signer s’envole et lui échappe. C’est beau et magique. La mise en scène est de Johanna Boyé, qui présentait aussi pendant le festival d’Avignon Les filles aux mains jaunes et Je ne cours pas je vole.
8/10
… C’est Alexis Michalik qui l’a écrite et comme tout ce qu’il entreprend depuis déjà un bon moment le succès fut immédiat. On l’adore parce qu’il se renouvelle à chaque nouvelle aventure sans répéter les ingrédients qui ont fait mouche la fois précédente. (…)
On pourrait le qualifier de magicien et estimer qu’il y a un truc. Evidemment le talent et le travail. Et puis sans doute un art de la troupe car il n’y a pas de star sur la scène. Même s’il joue lui-même dans une de ses pièces il n’est qu’un interprète au service du texte, lequel peut fort bien être servi par un autre acteur. Les comédiens sont totalement investis, manipulant les éléments de décor entre les scènes, et à vue, interprétant les rôles secondaires en plus du leur. Cela donne une cohésion incroyable renforcé par le rythme d’un scénario dont les scènes s’enchaînent vite. (…)
Il n’est pas vraiment nécessaire de donner l’essentiel du résumé. On va voir un Michalik comme on irait voir un Molière, un Feydeau ou un Tchekhov, quoique la capacité de renouvellement de l’auteur soit assez exceptionnelle. J’ai remarqué l’importance de la littérature et de l’écriture dans la construction de la jeune Jeanne. C’est peut-être un des traits communs entre toutes les pièces de cet auteur qui, à première vue, semblent très différentes les unes des autres.
Et il y a fort à parier que la prochaine, en janvier 2021, sera surprenante. Il a déjà annoncé qu’il allait mettre en scène le mythique show de Broadway, "Les producteurs", d’après Mel Brooks, jusqu’à maintenant jamais monté en France et dont il travaille déjà à l’adaptation. Il devrait être créé au Théâtre de Paris, ce qui confirme qu’Alexis Michalik peut investir tous les lieux parisiens, sans être attaché à l’un d’entre eux en particulier.
Je n’ai pas envie de spoiler cette histoire d’amour qui est largement plurielle car le thème est traité sous de multiples facettes, l’amour passion, l’amour fraternel, l’amour maternel et qui interroge aussi sur la paternité quand elle n’est pas biologique.
Qui mieux que Charles Aznavour aura chanté les sentiments sous toutes leurs formes ? Voilà pourquoi chaque personnage reconnaît face au public que quoi qu’il soit arrivé elle/il n’aura aimé que toi, en le chantant a capella, au centre du rectangle définissant l’aire de jeu. Et pourtant résonne comme un avertissement du désamour à venir avec une infinie tendresse.
L’histoire peut commencer et il est intéressant de savoir qu’elle démarre il y a quinze ans quand l’homosexualité était loin d’être acceptée et que deux femmes n’avaient pas le droit d’avoir un enfant reconnu d’elles deux. On est dans le mélodrame (au sens noble du terme) contemporain. C’est sans doute le plus intime des spectacles d’Alexis Michalik. Préparez vos mouchoirs. Vous allez pleurer. Rire aussi.
L’amour aurait un début, parfois flamboyant, inattendu, exaltant, et puis une fin, qu’elle soit le fait de l’un des deux ou imposé par le destin. Le spectateur est surpris souvent car il ne s’attend pas aux multiples rebondissements et à de jolies trouvailles scéniques, extrêmement poétiques (voilà pourquoi je ne veux pas raconter l’essentiel du scénario). Je dirais juste que l’art de l’auteur est d’écrire des dialogues honnêtes qui ne condamnent aucun des comportements. Comme le dira Justine : On fait tous des promesses qu’on peut pas tenir. (…)
Tout en signant un théâtre populaire, Alexis Michalik assume qu’amour ne rime pas avec toujours, et que les sentiments ne vont pas de soi. On se reconnaît tous dans un morceau de cette histoire. Et c’est très fort d’avoir réussi à instiller autant d’humour et de rire dans ce qui aurait été un pur drame sous d’autres plumes.
On pourrait le qualifier de magicien et estimer qu’il y a un truc. Evidemment le talent et le travail. Et puis sans doute un art de la troupe car il n’y a pas de star sur la scène. Même s’il joue lui-même dans une de ses pièces il n’est qu’un interprète au service du texte, lequel peut fort bien être servi par un autre acteur. Les comédiens sont totalement investis, manipulant les éléments de décor entre les scènes, et à vue, interprétant les rôles secondaires en plus du leur. Cela donne une cohésion incroyable renforcé par le rythme d’un scénario dont les scènes s’enchaînent vite. (…)
Il n’est pas vraiment nécessaire de donner l’essentiel du résumé. On va voir un Michalik comme on irait voir un Molière, un Feydeau ou un Tchekhov, quoique la capacité de renouvellement de l’auteur soit assez exceptionnelle. J’ai remarqué l’importance de la littérature et de l’écriture dans la construction de la jeune Jeanne. C’est peut-être un des traits communs entre toutes les pièces de cet auteur qui, à première vue, semblent très différentes les unes des autres.
Et il y a fort à parier que la prochaine, en janvier 2021, sera surprenante. Il a déjà annoncé qu’il allait mettre en scène le mythique show de Broadway, "Les producteurs", d’après Mel Brooks, jusqu’à maintenant jamais monté en France et dont il travaille déjà à l’adaptation. Il devrait être créé au Théâtre de Paris, ce qui confirme qu’Alexis Michalik peut investir tous les lieux parisiens, sans être attaché à l’un d’entre eux en particulier.
Je n’ai pas envie de spoiler cette histoire d’amour qui est largement plurielle car le thème est traité sous de multiples facettes, l’amour passion, l’amour fraternel, l’amour maternel et qui interroge aussi sur la paternité quand elle n’est pas biologique.
Qui mieux que Charles Aznavour aura chanté les sentiments sous toutes leurs formes ? Voilà pourquoi chaque personnage reconnaît face au public que quoi qu’il soit arrivé elle/il n’aura aimé que toi, en le chantant a capella, au centre du rectangle définissant l’aire de jeu. Et pourtant résonne comme un avertissement du désamour à venir avec une infinie tendresse.
L’histoire peut commencer et il est intéressant de savoir qu’elle démarre il y a quinze ans quand l’homosexualité était loin d’être acceptée et que deux femmes n’avaient pas le droit d’avoir un enfant reconnu d’elles deux. On est dans le mélodrame (au sens noble du terme) contemporain. C’est sans doute le plus intime des spectacles d’Alexis Michalik. Préparez vos mouchoirs. Vous allez pleurer. Rire aussi.
L’amour aurait un début, parfois flamboyant, inattendu, exaltant, et puis une fin, qu’elle soit le fait de l’un des deux ou imposé par le destin. Le spectateur est surpris souvent car il ne s’attend pas aux multiples rebondissements et à de jolies trouvailles scéniques, extrêmement poétiques (voilà pourquoi je ne veux pas raconter l’essentiel du scénario). Je dirais juste que l’art de l’auteur est d’écrire des dialogues honnêtes qui ne condamnent aucun des comportements. Comme le dira Justine : On fait tous des promesses qu’on peut pas tenir. (…)
Tout en signant un théâtre populaire, Alexis Michalik assume qu’amour ne rime pas avec toujours, et que les sentiments ne vont pas de soi. On se reconnaît tous dans un morceau de cette histoire. Et c’est très fort d’avoir réussi à instiller autant d’humour et de rire dans ce qui aurait été un pur drame sous d’autres plumes.