- Comédie Musicale / Musique
- Théâtre de Nesle
- Paris 6ème
Rappelle-toi, Barbara

- Théâtre de Nesle
- 8, rue de Nesle
- 75006 Paris
- Odéon (l.4, l.10)
Il ne s'agit pas d'imiter Barbara, il s'agit de l'évoquer comme on se rappelle de quelqu'un qu'on a aimé. Dans ce spectacle on est dans la mémoire et la suggestion. Dans l'hommage aussi.
Ceci implique une juste distance à l'univers de Barbara, une compréhension de ses choix poétiques et esthétiques. De ses choix de vie. Ce spectacle repose sur un délicat équilibre : S'approcher de Barbara tout en restant soi-même.
A l'origine de la création de ce spectacle, la passion de Blandine Jeannest pour l'univers de Barbara. La volonté de réunir une dizaine de ses très belles chansons, leur univers romantique et racé avec l'oeuvre du si grand mélodiste qu'est Chopin "soleil noir de la mélancolie" et l'élégance d'une photo et d'une video noir et blanc en référence aux photographes humanistes du 20° siècle comme Brassaî ou Cartier Bresson.
Une suite de textes écrits par Blandine Jeannest et s'adressant à Barbara font lien au fil des musiques, évoquant la vie de la dame en noir et son destin exceptionnel.
Barbara hier, aujourd'hui, demain. Un spectacle magique, vivifiant et poétique à découvrir encore sur quelques dates.
Un spectacle que nous proposent Blandine Jeannest de Gyvès, soprano de son état, et Ludovic Selmi, pianiste.
Oui, que de charme, que d'émotion, que de finesse, dans cette évocation de la Dame brune !
Ici, il n'est pas question d'imiter Barbara, ou d'essayer de chanter comme elle.
Ici, c'est une artiste lyrique qui revisite Barbara, s'appropriant de façon magistrale ces chansons.
Avec sa voix (et quelle voix ! ), Blandine Jeannest se montre tout simplement ensorcelante.
Elle nous démontre au passage qu'une artiste lyrique, formée par essence au répertoire classique, peut faire preuve d'éclectisme et de curiosité musicale.
Elle nous envoûte, parce qu'elle est elle-même, et non pas une tentative « barbarienne » plus ou moins réussie …
Avec ou sans micro, de son timbre tour à tour suave, feutré, chaud, rond, puissant, c'est selon, elle ré-interprète les grands titres avec son approche personnelle qui fonctionne parfaitement.
Sur scène, elle n'est pas seule.
Elle est « plus qu'accompagnée » par Ludovic Selmi au piano.
(Je trouve personnellement qu'il mériterait un meilleur piano, mais bon, comme il me le disait après le spectacle « qui peut le plus, peut le moins »...)
Ces deux-là sont complètement en symbiose.
Il n'y a pas d'un côté une artiste et de l'autre son accompagnateur, comme le Rossignol milanais et M. Wagner (les amateurs de Tintin auront saisi...), non, il y a deux vrais musiciens récitalistes qui se complètent pleinement.
Ludovic Selmi a complètement ré-arrangé les chansons.
Mais pour autant, on ne peut pas parler formellement de « récital Barbara », puisque le talentueux pianiste a intercalé des œuvres du répertoire pianistique, et non des moindres, de celles qu'on ne trouve pas dans la Méthode Rose, comme par exemple l'Etude révolutionnaire, l'étude en fa mineur et la valse minute de Chopin, un nocturne de Poulenc, etc, etc...
Quel talent, quel technique, quelle virtuosité !
Ces pièces s'intègrent parfaitement dans le spectacle et permettent d'autres moments de belle musique.
(J'en profite pour rappeler que Chopin et Poulenc ont eux aussi un jour écrit de la musique contemporaine...)
Il faut aussi rendre un hommage appuyé au vidéaste Jean-Pierre Schneider, qui projette de belles images de son cru.
Il a choisi, et comme il a bien fait, de ne pas montrer Barbara, ni les rues de Nantes, ni le jardin de Précy, encore moins d'aigle plus ou moins noir.
Non, ce sont des images magnifiques en noir et blanc, souvent forcées, saturées, qui s'insèrent et créent des ambiances poétiques pendant une chanson ou une pièce classique.
Je n'oublie pas non plus William Orrego Garcia qui a créé de subtiles lumières, permettant à la video de ressortir pleinement sans l'écraser.
Au final, c'est vraiment une soirée délicieuse, une soirée subtile et délicate, de ces soirées qui finissent trop vite.
Même le rappel ne suffit pas à nous faire étancher cette soif du souvenir de Barbara, tel qu'il nous est proposé.
C'est une vraie réussite, une vraie création, ambitieuse et originale.
Un bijou musical dans un écrin élégant et chaleureux que ce spectacle mis en scène par Jean-Pierre Schneider de belle façon, où la poésie des textes comme celle de la musique brille de doux et romantiques éclats.
Barbara est devenue une auteure classique désormais, son œuvre peut être jouée, chantée ou dite, nous retrouvons toujours avec un délice espiègle et savoureux, sa plume, ses thèmes et ses mélodies.
Il y a comme une évidence à l’écouter, une joie impatiente à la retrouver. Ses paroles ne peuvent que nous toucher tant les sensations et les émotions y sont présentes, décrites avec une intense sincérité. Elles ne peuvent que traverser les âges et les époques sans perdre de leur passionnelle puissance.
La conception de ce récital est signée par Blandine Jeannest de Gyvès qui est également l'auteure des textes additionnels. Elle nous surprend par son audacieux double parti-pris réussi. Il y a d'abord ces chansons de Barbara, chantées comme des partitions lyriques qui donnent une dimension magnifiée et vibrante à ses musiques, nous laissant suspendus à leur écoute. Puis il y a ces pièces pour chant et piano ou piano seul qui parsèment le concert d'un répertoire romantique bienvenu, tout à fait opportun dans l'univers de la Grande Dame en noir. Superbe.
Les textes additionnels présentent un morceau de vie de la Grande Fille brune ou le contexte d'une chanson, voire une rêverie imaginée par l'auteure. Ils soulignent magiquement la poésie et le lyrisme de l'ensemble. Envoutant.
La qualité vocale de Blandine Jeannest de Gyvès est remarquable. Elle passe de la voix chantée à la voix parlée et jouée, au murmure confident et à la psalmodie qui vient parfois introduire, conclure ou entrecouper le chant tenu de sa voix douce et claire de soprano.
Le pianiste Ludovic Selmi, compositeur brillant des arrangements apportés aux partitions, se montre un accompagnateur adroit et joue les œuvres en solo avec virtuosité, intensité et délicatesse.
Un spectacle musical rare, accessible, beau et de haute qualité. Nous sortons envahis de plaisirs, laissant revenir à nous des mots ou des phrases, des musiques et des images. À ne surtout pas manquer !