- Comédie Musicale / Musique
- Ateliers Berthier Théâtre de l'Odéon
- Paris 17ème
Pelléas et Mélisande, Julie Duclos

- Ateliers Berthier Théâtre de l'Odéon
- 32, boulevard Berthier
- 75017 Paris
- Porte de Clichy ( l.13, RER C)
Mélisande apparaît un jour au pays d’Allemonde, on ne sait comment. On ne sait pas davantage où ni pourquoi elle a épousé Golaud. Et jamais on ne saura de quand date la passion qui va l’unir à Pelléas, d’un amour interdit, fatal comme certains secrets...
Avant d’être le célèbre opéra de Debussy, Pelléas et Mélisande fut une pièce, et qui fit date. Créée à Paris en 1893, elle fait entrer le théâtre de l’Œuvre dans l’histoire et marque les débuts à la scène du mouvement symboliste.
Allemonde, la terre théâtrale d’une simplicité et d’un dépouillement saisissants où règne Arkël et où surgit Mélisande, se compose d’un sombre château, de parcs et de bois sans limites, de vastes grottes où l’on se perd, de sous-sols toujours menacés par les eaux souterraines. On n’y voit ni le fond ni les frontières des choses : les vaisseaux s’évanouissent dans les brumes au-dessus de la mer, tout comme les anneaux disparaissent dans la profondeur des fontaines.
Même les phrases de Maeterlinck semblent se dissiper dans l’air, dissoutes en points de suspension, sans que leur sens soit fixé tout à fait...
Pour recréer au Festival d’Avignon 2019, puis présenter aux Ateliers Berthier l’énigmatique magie évocatoire de Maeterlinck, Julie Duclos mêlera les ressources du théâtre et du cinéma, ouvrira les espaces sur des lointains entraperçus, bâtira des chambres sur des cryptes aussi obscures que les forêts de l’inconscient.
Je ne le pense évidemment pas.
Julie Ducros a choisi de s'attaquer à la pièce-phare de Maurice Maeterlinck, que Debussy mit en musique avec l'immense succès que l'on sait.
Cette pièce, cette histoire d'amour et de jalousie, n'est que très rarement montée. Je pense avoir compris pourquoi.
La scénographie d'Hélène Jourdan est donc très belle.
Très peu de lumière, plusieurs niveaux de plateaux, un camaïeu de gris, une dernière partie dans une pénombre intense, autant d'éléments qui plongent le spectateur dans un magnifique climat mystérieux et à bien des égards volontairement déstabilisant.
Melle Ducros, a son habitude, mêle judicieusement théâtre et cinéma.
Les petits films de Quentin Vigier, souvent en noir et blanc, disséminés ici et là, sont très beaux.
Seulement voilà : ils sont trop beaux et surtout trop explicites.
Tout comme certains partis pris dramaturgiques.
A-t-on besoin, chez Maeterlinck, chantre du symbolisme, laudateur de l'intime et de son inacessibilité, de voir réellement à l'écran une forêt, la mer, la grève, est-il indispensable de voir Mélisande en culotte, la voir se prendre une vraie raclée par son Golaud de mari, un Golaud qui dormira un peu plus avant en pantalon sous les draps, pourquoi filmer en immense gros plan l'interrogatoire du petit Yniold ?
J'ai assisté bien souvent à des moments visuellement réussis, certes, mais totalement gratuits, sans véritable nécessité.
Pourquoi annihiler ainsi la poésie du grand auteur belge, prix Nobel de littérature en 1911 ?
Et puis surtout, des problèmes de rythme, de jeu et de direction d'acteurs m'ont en permanence perturbé.
Des lenteurs certaines, des phrasés et des dictions étranges, des interprétations de moments poignants sont souvent à la limite de la caricature.
Pourquoi ne pas chercher à interpréter le texte, cette magnifique langue qui se suffit à elle même, de façon naturelle, simple, contemporaine ?
Seul Vincent Dissez tire son épingle du jeu, dans une sauvagerie magnifique. Il est totalement convaincant en mari éperdu et fou de douleur.
Mais hélas, hier soir, le trio amoureux Pelléas-Mélisande-Golaud m'a laissé complètement de marbre. Impossible pour moi de rentrer dans cette histoire-là.
Des applaudissements timides et très polis (c'est un véritable euphémisme) viennent conclure les presque deux heures de ce spectacle.
Le Prince Golaud parti chassé dans l’immensité de la forêt, s’est égaré. Sur son chemin il rencontre Mélisande perdue, mystérieuse et effrayée comme un jeune animal…
Golaud apaise la jeune Mélisande, la prend sous son aile et l’épouse.
Mais Mélisande tombe amoureuse de Pelléas jeune frère de son époux.
Il s’ensuit une tragédie amoureuse, les protagonistes sont détruits au plus profond d’eux-mêmes. Le destin inévitablement les conduit au désespoir, à la souffrance et à la ruine.
Dès les premiers instants nous sommes plongés danse un monde un peu inquiétant. Sur un écran en avant-scène défilent les images en noir et blanc d’un monde tourmenté puis la couleur surgit, nous sommes dans la vaste forêt où Golaud rencontre Pelléas.
Une ambiance onirique et magique règne, nous sommes emportés par ce conte dans cette forêt envahissante, profonde et un peu angoissante.
Le cinéma fait place au théâtre, en fond de plateau, apparaît un appartement sur deux étages, nous sommes au château d’Arkel roi et grand-père de Golaud.
A l’étage, les appartements du roi dans des tons sobres et naturels, au premier niveau dans les appartements de Golaud et Mélisande dans une atmosphère bleutée et un peu surnaturelle.
Les scènes filmées et jouées vont se succéder pour le plus grand plaisir des yeux et nous émouvoir au plus profond de nous-même. C’est troublant et ensorceleur.
Les vidéos de Quentin Vigier sont magnifiques et d’une grande beauté.
Le rythme est lent, les silences grands comme dans un rêve.
Les comédiens : Alix Riemer (Mélisande), Matthieu Semper (Pelléas), Vincent Dissez (Golaud), Philippe Duclos (Arkël), Stéphanie Marc (Geneviève), Émilien Tessier (Le médecin), Clément Baudoin ,Sacha Huyghe ,Eliott Le Mouël (en alternance) (Yniold), nous content avec brio ce drame de l’amour et de la jalousie.
J’avoue avoir eu un coup de cœur pour Vincent Dissez, il nous émeut et nous bouleverse par sa jalousie, sa douleur et la justesse de son jeu.