- En tournée
- En tournée dans toute la France
Le joueur d'échecs (avec F. Huster)

- Francis Huster
- En tournée dans toute la France
Cette nouvelle poignante, qui nous emmène jusqu'aux frontières de la folie, est considérée comme le chef d'oeuvre de Stefan Zweig. En 1942, après l'avoir achevé, sa femme et lui se donnèrent la mort en s'empoisonnant.
Fuyant la seconde guerre, Stefan Zweig embarque dans un paquebot à destination de l'Amérique du Sud. Pendant la traversée, un combat s'engage qui le passionne, ainsi que tous les voyageurs : au dessus d'un jeu d'échecs s'affrontent le champion du monde Csentovic, une brute lente d'origine modeste, cupide, inculte, antipathique, qui n'a jamais perdu une partie, et le mystérieux Monsieur B, un aristocrate viennois, sensible, raffiné, qui vient d'échapper aux griffes de la Gestapo.
Qui gagnera ? L'intelligence et la culture ont-elles encore une chance dans ce monde qui sombre dans la barbarie ?
Dans cette version théâtrale, Eric-Emmanuel Schmitt montre comment cette fable sur les échecs est une confession de Zweig, son oeuvre sans doute la plus autobiographique. Lui qui s'est battu pendant toute sa vie pour la culture et une conception européenne de la civilisation, est bien obligé, face à Hitler, de conclure qu'il a perdu.
La critique de la rédaction : De plaisantes parties d’échecs se jouent chaque soir au théâtre Rive-Gauche.
Dans cette adaptation de la nouvelle de Stefan Zweig, Éric Emmanuel Schmitt prend le parti de confondre le narrateur du joueur d’échecs avec son auteur. Il insiste sur les passages dans lesquels Zweig parle de son vécu entre les lignes et va même jusqu’à agrémenter le récit pour l’en approcher de la biographie.
Dès les premières secondes, nous hissons les voiles et nous laissons porter par l’histoire pourtant toute simple, quasiment linéaire, sans rebondissement. L’enjeu est faible mais le suspense est à son comble. Comment Monsieur B peut-il être si doué aux échecs ? Qui va gagner la partie ? Comment va réagir le champion du monde Csentovic face à l’adversité ?
Le texte de Stefan Zweig nous berce comme une balade en mer par temps calme avec ses descriptions justes et touchantes. Ses personnages très contrastés suscitent l’empathie. Ils traversent difficilement la seconde guerre mondiale, mettent le cap vers un monde meilleur. Notre narrateur a honte de ce qu’est devenu son peuple. Il en a perdu ses repères.
Nous avons apprécié que Francis Huster, seul sur scène, navigue de rôle en rôle, change de ton, se donne lui-même la réplique, cela donne du rythme et de la saveur à la pièce. Sa voix particulière, un peu pincée avec de l’écho, nous fait nous demander s’il porte un micro. Parmi les spectateurs, son style divise en deux bords, les éternels admirateurs et ceux qui le trouvent fermé, manquant de chaleur.
En tous cas, très à l’aise dans ses rôles, il donne vie aux mots de Zweig, grimace, hausse le ton, tient le regard du public. Même si nous aurions aimé qu’il soit moins souvent assis sur scène, nous avons joint le clan de ses admirateurs le temps d’une soirée.
Adapter une œuvre littéraire sur les planches est un vrai défi. Il a été relevé avec brio par les sociétaires du théâtre Rive Gauche, Éric Emmanuel Schmitt, Steve Suissa et Francis Huster.
Texte superbe et émouvant, qui nous replonge dans la seconde guerre mondiale...
Si l'adaptation d'Eric Emmanuel-Schmitt du roman de Stefan Zweig est plutôt réussie, et le jeu de Francis Huster relativement juste...
On y est, on voyage, on se laisse embarquer.
Il y a cette diction particulière d'Huster. On aime, ou pas. Mais il sait faire pour nous raconter des histoires.
Mise en scène et décors contribuent à nous faire voyager sans être spectaculaires.
Et pourtant une déception. Pour avoir vu ce texte joué par un autre comédien je n'ai pas été autant touchée par la performance de ce grand comédien qu'est Francis Huster.
Étonnant peut-être. Malgré la beauté du décor et la qualité de la mise en scène il m'a manqué une certain souffle, notamment dans la progression de la folie du personnage.
Reste un très beau texte porté par un acteur remarquable.
Si dans le roman de Zweig le narrateur est anonyme, ici Eric Emmanuel Schmitt a choisi dans son adaptation de faire parler Zweig lui-même, et sa femme Lotte, dont nous entendrons seulement la voix lors de ses conversations avec Zweig : le narrateur Zweig décide de se donner la mort à la fin du récit, tout comme l'a fait l'auteur Zweig après avoir écrit le roman, en 1943 : le roman, la pièce et l'histoire se rejoignent dans une judicieuse adaptation.
Le récit est captivant, le monologue presque envoûtant. Au fil du récit, grâce à des retours arrière et des apartés, on apprendra qui est ce mystérieux Monsieur B, l'enfermement subi pendant l'occupation nazie, la torture psychologique et la folie qui en a découlé. Francis Huster incarne seul plusieurs personnages (Stefan Zweig, Monsieur B. d'autres passagers comme Mr. Connor, Szentovic...) et réussit à donner à chacun d'entre eux un ton, un regard, une force et une intensité différentes, sans jamais tomber dans l'excès, grâce à cette distance qu'il conserve sans cesse, distance bienvenue ici.
Il passe d'un personnage à l'autre, oscille entre la brutalité primaire d'un champion suffisant, la folie insidieuse d'un ancien prisonnier devenu lui-même prisonnier de parties intérieures incessamment rejouées, la douleur résignée d'un Stefan Zweig décidé à quitter ce monde devenu fou... Si le micro et le retour son m'ont au début perturbée, je me suis vite habituée (et la représentation en plein air le nécessitait de toute façon) (j'ai vu la pièce lors du festival In Situ de Carqueiranne en plein air) et ai rapidement été subjuguée par la pièce et le texte.
La mise en scène mériterait peut-être davantage de déplacements : Francis Huster reste souvent immobile, assis tantôt à cour, tantôt à jardin sur une pile de valises, rendant presque inutile le très beau décor de paquebot. J'aurais aimé un peu plus de vitalité, un peu plus d'engagement corporel, notamment lors des parties d'échecs, mais c'est peut-être volontairement pour ne pas empiéter sur le texte et la force du récit.
Au final, une très belle pièce, d'abord et avant tout grâce aux mots fascinant de Stefan Zweig (il faut absolument lire ce si court et si beau roman), la bande son (clapotis, vent, musiques et conversations de paquebot jamais envahissante mais agréable bruits de fond) et surtout grâce à l'interprétation toute en justesse d'un Francis Huster qui m'a joliment surprise.
Tour à tour, il incarne avec brio les différents protagonistes et il nous emmène dans son voyage sans retour avec une facilité déconcertante.
Le public en redemande.
Une magnifique prestation de ce grand homme de théâtre, qui met la bonne mesure à ses interprétations !
Un joli moment de théâtre...