- Théâtre contemporain
- Théâtre de Montfort
- Paris 15ème
Derrière le hublot se cache parfois du linge
- Théâtre de Montfort
- Parc Georges Brassens 106 Rue Brancion
- 75015 Paris
- T3 Station Brancion-
Si nos conceptions de l’amour ont été façonnées à coup de « l’homme rêve toute sa vie de foutre le camp » ou « la femme est un ennemi » et autres morceaux de ce genre, pourquoi donc continuer à vouloir « se mettre en couple » ? Ou, autrement dit, l’amour peut-il vraiment survivre au patriarcat ? C’est à cette question existentielle que nous invitent à réfléchir les inénarrables Filles de Simone.
Passionnées par ce qui relie l’intime au politique, elles s’offrent (et nous offrent, par la même occasion) avec Derrière le hublot se cache parfois du linge une tentative théâtrale, mixte et collective, pour secouer le cocotier du couple hétéronormé. Qu’il s’agisse de la rencontre amoureuse, de la sexualité ou du quotidien domestique, elles font sortir de leurs boîtes les diables cachés dans les détails, les chaussettes qui traînent et la libido morne plaine, les émotions difficilement partagées et la mauvaise foi bien distribuée. Dans le sillage des réflexions féministes post-#metoo, elles mettent le couple « cul par-dessus tête » et observent comment aujourd’hui tantôt s’y (re)joue, tantôt s’y effondre un traditionnel ordre social.
Tout d’abord, le démarrage de la pièce est réjouissant. A lui seul il pourrait valoir le déplacement. Mais bien sûr on est aussi intéressé quand la pièce « commence » vraiment.
Thérapies, scènes de ménage, discussions, tout est prétexte à décortiquer les relations du couple hétéro. Les scènes se succèdent, certaines plus drôles ou plus intéressantes que d’autres mais chacune présentant un intérêt. Les thèmes abordés sont divers et tournent autour de la responsabilité, l’engagement et l’équilibre dans le couple.
Le point de vue de la femme y est largement développé (on est tout de même chez « les filles de Simone ») mais l’avis de l’homme n’est pour autant ni occulté, ni ignoré. La création de la pièce s’est déroulée au plateau, comédiens et comédiennes intervenant ensemble dans la réflexion et la conception.
La relation homme/femme y est représentée comme elle l’est aujourd’hui, sans exagération mais sans complaisance. Le rapport de domination masculine / soumission féminine est décortiqué : la femme qui considère que la répartition des taches de ménage est équilibrée quand l’homme en prend 30%, la femme qui s’oublie (encore de nos jours) au profit de l’homme en le portant, en s’offrant pour le soutenir, l’homme qui estime devoir recevoir des remerciements quand il participe aux taches ménagères (tout en étant conscient que cela n’est pas logique), la femme qui prend sur elle la charge émotionnelle des hommes jusqu’à se vider elle-même…
Le poids de l’enseignement, des croyances collectives, les penchants masculins hérités du patriarcat tout y est abordé. Le programme étant vaste il a fallu faire des choix, même si la pièce évoque déjà, parfois même rapidement, un nombre incalculable de sujets.
La scénographie est riche et permet une belle diversité d’espace de jeu. La justesse et le naturel d’interprétation d’André Antébi, de Tiphaine Gentilleau et de Chloé Olivères participent grandement à la réussite de la pièce.
L’ensemble est sérieux et drôle à la fois. Le parti pris est clair, on préfère en rire plutôt que d’en pleurer donc tout est abordé de manière plutôt comique et léger tout en préservant un fond sérieux, réfléchi et documenté. On sent bien la richesse de leur travail préparatoire et de leurs références sociologiques, historiques, littéraires et théâtrales. Comme toujours dans leurs pièces, on y retrouve des faits documentés, des pourcentages qui alternent avec des partages d’expériences plus intimes ou des avis plus personnels. C’est cette alternance qui fait la richesse et l’accessibilité de cette pièce. Sans être un manifeste féministe, ils/elles arrivent à faire passer avec humour un message et on l’espère à ouvrir un peu les consciences.
A un moment pendant la pièce, la lumière s’allume dans le public car, comme souvent dans leurs mises en scène, il y a des interactions avec les spectateurs. Comme je suis au 2ème rang je me retourne pour observer les gradins… et je constate que la salle est composée à 80% de femmes. Sans être vraiment surprise je trouve tout de même cela dommage. Comme si la problématique des relations de couple ne devait concerner ou intéresser que les femmes.
A voir donc… en couple ou pourquoi pas, soyons fous, entre hommes