Critiques pour l'événement Racine ou la leçon de Phèdre
Anne Delbée avait promis de redonner la Leçon de Phèdre ... pour ceux qui voulaient la revoir, pour ceux qui souhaitaient la découvrir, pour les sceptiques s'interrogeant sur l'opportunité d'inclure le spectacle dans leur future programmation, pour les dubitatifs votants aux Molières, en avant-première des festivals de Sarlat et de Figeac, mais aussi et surtout ... pour le plaisir ... et c'est pour cette raison supérieure que je suis venue ce soir au Poche Montparnasse qui avait coproduit la performance l'hiver dernier.
Il y eut Sarah Bernhardt. Il y a Anne Delbée, tragédienne majuscule qui ne s'interdit pas de faire rire. Ayant le sens du drame comme peuvent l'incarner aussi les grandes rockeuses.
La veste est jetée. Elle s'empare du micro pour chanter en alexandrins. Et la ressemblance est frappante avec Catherine Ringer, qui était bouleversante dans son interprétation de Malhler à la mémoire de Fred Chichin.
La comédienne démontre la modernité de Racine, sans doute parce que la tragédie est intimement liée au théâtre. La fulgurance du texte s'empare de nous. Chacun a conscience que si elle s'est tenue éloignée pendant quelques années elle a rudement bien fait de revenir nous donner cette leçon que l'on reçoit comme une passe de rugby qui arriverait en uppercut dans l'estomac.
L'idée de ce spectacle est née un soir de 2007 où Anne Delbée s'est retrouvée comme une gitane à déclamer sur une table la déclaration d'amour de Phèdre à Hippolyte (Acte II, scène 5). C'est devenu un spectacle pensé, épuré avec un vrai décor, quelques accessoires, et une projection vidéo conçue par sa fille Emilie que l'on reconnait sur les images, à coté de son petit neveu, dans un plan séquence prémonitoire puisqu'il tient entre les mains le brigadier dont elle a reçu le Prix le 17 février dernier.
Anne Delbée est fascinante dans un phrasé grave, et pourtant léger. Pas de soierie chatoyantes ni de perruque comme pour le Phèdre qu'elle avait monté à la Comédie française en 1995. Christian Lacroix ne signe pas le costume d'homme, noir, chemise blanche un peu bouffante qu'elle porte ce soir, le bras levé à la manière d'un toréador, prêt à planter la première banderille.
Le spectacle est ultra vivant, nous faisant vivre une large palette d'émotions, débordant sur la comédie et le rire. Aucun tabou ne caviarde la biographie du grand auteur dont Anne Delbée retrace le parcours, dans ce qu'il eut d'heureux et de malheureux.
Elle enfile une robe de velours noir, dénoue ses cheveux, soudain dorés sous l'éclat des projecteurs.
Phèdre c'est quoi finalement ? Une belle-mère qui drague son beau-fils, pas de quoi en faire un fromage, une cougar qui s'excite sur un petit jeune homme. Ah,vu comme ça ..., mais alors que fait-on de la langue de Racine, de la grande langue du XVII° siècle, de cette putain de langue, comme le disait récemment -et avec admiration- un chanteur des Eagles ? Phèdre est une partition dont il faut suivre pas à pas les notes.
Le ton est donné. Rien ne sera occulté.
Plus tard Anne Delbée, danseuse, en position cinquième, mimera Molière dansant le Lac des cygnes, nous prévenant : attention il va s'envoler !
On apprend beaucoup de choses. Nous sommes des éponges infusées de cette p... de langue que l'on se surprend à grandement aimer. On reçoit une belle leçon, de théâtre, de lettres (classiques) et même de danse (classique, elle aussi) ... mais surtout une leçon de vie ... magnifique de démesure !
On peut légitimement espérer le Molière du Seul(e) en scène qui sera un argument de plus pour convaincre les programmateurs d'inscrire cette leçon dans leurs futures saisons. Deux festivals l'ont déjà retenu cet été, celui de Sarlat le 25 juillet à 21h et celui de Figeac les 26 et 29 juillet, lui aussi à 21 h.
Il y eut Sarah Bernhardt. Il y a Anne Delbée, tragédienne majuscule qui ne s'interdit pas de faire rire. Ayant le sens du drame comme peuvent l'incarner aussi les grandes rockeuses.
La veste est jetée. Elle s'empare du micro pour chanter en alexandrins. Et la ressemblance est frappante avec Catherine Ringer, qui était bouleversante dans son interprétation de Malhler à la mémoire de Fred Chichin.
La comédienne démontre la modernité de Racine, sans doute parce que la tragédie est intimement liée au théâtre. La fulgurance du texte s'empare de nous. Chacun a conscience que si elle s'est tenue éloignée pendant quelques années elle a rudement bien fait de revenir nous donner cette leçon que l'on reçoit comme une passe de rugby qui arriverait en uppercut dans l'estomac.
L'idée de ce spectacle est née un soir de 2007 où Anne Delbée s'est retrouvée comme une gitane à déclamer sur une table la déclaration d'amour de Phèdre à Hippolyte (Acte II, scène 5). C'est devenu un spectacle pensé, épuré avec un vrai décor, quelques accessoires, et une projection vidéo conçue par sa fille Emilie que l'on reconnait sur les images, à coté de son petit neveu, dans un plan séquence prémonitoire puisqu'il tient entre les mains le brigadier dont elle a reçu le Prix le 17 février dernier.
Anne Delbée est fascinante dans un phrasé grave, et pourtant léger. Pas de soierie chatoyantes ni de perruque comme pour le Phèdre qu'elle avait monté à la Comédie française en 1995. Christian Lacroix ne signe pas le costume d'homme, noir, chemise blanche un peu bouffante qu'elle porte ce soir, le bras levé à la manière d'un toréador, prêt à planter la première banderille.
Le spectacle est ultra vivant, nous faisant vivre une large palette d'émotions, débordant sur la comédie et le rire. Aucun tabou ne caviarde la biographie du grand auteur dont Anne Delbée retrace le parcours, dans ce qu'il eut d'heureux et de malheureux.
Elle enfile une robe de velours noir, dénoue ses cheveux, soudain dorés sous l'éclat des projecteurs.
Phèdre c'est quoi finalement ? Une belle-mère qui drague son beau-fils, pas de quoi en faire un fromage, une cougar qui s'excite sur un petit jeune homme. Ah,vu comme ça ..., mais alors que fait-on de la langue de Racine, de la grande langue du XVII° siècle, de cette putain de langue, comme le disait récemment -et avec admiration- un chanteur des Eagles ? Phèdre est une partition dont il faut suivre pas à pas les notes.
Le ton est donné. Rien ne sera occulté.
Plus tard Anne Delbée, danseuse, en position cinquième, mimera Molière dansant le Lac des cygnes, nous prévenant : attention il va s'envoler !
On apprend beaucoup de choses. Nous sommes des éponges infusées de cette p... de langue que l'on se surprend à grandement aimer. On reçoit une belle leçon, de théâtre, de lettres (classiques) et même de danse (classique, elle aussi) ... mais surtout une leçon de vie ... magnifique de démesure !
On peut légitimement espérer le Molière du Seul(e) en scène qui sera un argument de plus pour convaincre les programmateurs d'inscrire cette leçon dans leurs futures saisons. Deux festivals l'ont déjà retenu cet été, celui de Sarlat le 25 juillet à 21h et celui de Figeac les 26 et 29 juillet, lui aussi à 21 h.
Elle avait disparu de l’affiche, sans crier gare. Et à dire vrai, confusément, elle nous manquait, Anne Delbée. Car elles sont peu nombreuses les interprètes de sa trempe qui se vouent à leur art, avec une telle force, une telle vérité, une telle intelligence et une telle fièvre.
Chic ! Revoici sur les planches, Anne la Magnifique, dans un texte, dont elle est l’auteur, aussi puissant que poétique, et qu’elle a tressé autour de la vie et de l’œuvre d’un dramaturge qui l’a toujours taraudée et qu’elle n’a jamais cessé de monter et de jouer sur scène durant toute sa vie, Jean Racine.
Portée par sa passion, la comédienne avait fini par tout connaitre, de celui qui a composé parmi les plus belles tragédies françaises, tout, c’est-à-dire aussi bien ses pièces que sa vie, publique et intime. Un jour, la grande interprète qu’elle est, a eu envie de transmettre, par le biais de la scène, ce que, dans sa vie d’artiste, cet homme, et bien sûr sa poésie, lui avaient apporté, d’ivresse, d’enchantement, de rigueur et de liberté. C’est ainsi qu’est né ce texte, au titre sans doute un peu trop sévère en regard de sa richesse et de sa flamboyance, « Racine, la leçon de Phèdre ».
Pendant une heure trente, dans un décor minimaliste, vêtue, à la garçonne d’un pantalon gris tenu par des bretelles, Anne Delbée va nous faire partager son admiration inconditionnelle pour l’auteur de « Phèdre ». Son audace de jeu va laisser pantois. Car, elle va tout oser dans ce spectacle, tout : rire, pleurer, chuchoter, déclamer, confesser, chanter, slamer, oui, slamer (avec le vers racinien, si pur, si simple, ça marche !) et même danser (sur la musique du Lac des Cygnes !). On la sent possédée par son sujet, entièrement habitée par lui. Ce qu’elle nous apprend de la vie de Racine est passionnant et ce qu’elle nous dit de son écriture et de sa poésie, d’une prodigieuse intelligence. Pas un instant, même dans les passages les plus biographiques (On en apprend beaucoup sur la vie du poète !), elle n’aura le ton professoral d’une donneuse de « leçon ». Elle ne sera que dans l’émotion, et le désir aussi de nous faire entendre et comprendre que Racine compte parmi les plus grands stylistes de tous les temps. A certains moments, notamment, quand, sans effets, presque à plat, la tragédienne interprète quelques alexandrins de « Phèdre », on acquiert soudain la conviction que la langue française est la plus belle langue du monde. Quelle leçon de théâtre, de littérature et de poésie! Quel beau moment de vie !
Le premier qui prétend que Racine est démodé, ou inaudible pour les oreilles d’aujourd’hui… envoyez-le écouter Anne Delbée…
Chic ! Revoici sur les planches, Anne la Magnifique, dans un texte, dont elle est l’auteur, aussi puissant que poétique, et qu’elle a tressé autour de la vie et de l’œuvre d’un dramaturge qui l’a toujours taraudée et qu’elle n’a jamais cessé de monter et de jouer sur scène durant toute sa vie, Jean Racine.
Portée par sa passion, la comédienne avait fini par tout connaitre, de celui qui a composé parmi les plus belles tragédies françaises, tout, c’est-à-dire aussi bien ses pièces que sa vie, publique et intime. Un jour, la grande interprète qu’elle est, a eu envie de transmettre, par le biais de la scène, ce que, dans sa vie d’artiste, cet homme, et bien sûr sa poésie, lui avaient apporté, d’ivresse, d’enchantement, de rigueur et de liberté. C’est ainsi qu’est né ce texte, au titre sans doute un peu trop sévère en regard de sa richesse et de sa flamboyance, « Racine, la leçon de Phèdre ».
Pendant une heure trente, dans un décor minimaliste, vêtue, à la garçonne d’un pantalon gris tenu par des bretelles, Anne Delbée va nous faire partager son admiration inconditionnelle pour l’auteur de « Phèdre ». Son audace de jeu va laisser pantois. Car, elle va tout oser dans ce spectacle, tout : rire, pleurer, chuchoter, déclamer, confesser, chanter, slamer, oui, slamer (avec le vers racinien, si pur, si simple, ça marche !) et même danser (sur la musique du Lac des Cygnes !). On la sent possédée par son sujet, entièrement habitée par lui. Ce qu’elle nous apprend de la vie de Racine est passionnant et ce qu’elle nous dit de son écriture et de sa poésie, d’une prodigieuse intelligence. Pas un instant, même dans les passages les plus biographiques (On en apprend beaucoup sur la vie du poète !), elle n’aura le ton professoral d’une donneuse de « leçon ». Elle ne sera que dans l’émotion, et le désir aussi de nous faire entendre et comprendre que Racine compte parmi les plus grands stylistes de tous les temps. A certains moments, notamment, quand, sans effets, presque à plat, la tragédienne interprète quelques alexandrins de « Phèdre », on acquiert soudain la conviction que la langue française est la plus belle langue du monde. Quelle leçon de théâtre, de littérature et de poésie! Quel beau moment de vie !
Le premier qui prétend que Racine est démodé, ou inaudible pour les oreilles d’aujourd’hui… envoyez-le écouter Anne Delbée…
Un spectacle sur Racine. Une revue sur Phèdre. Une leçon de théâtre. Un voyage au pays de la langue française. Anne Delbée nous offre tout cela.
La petite salle du Poche-Montparnasse est l’écrin idéal à un un tel présent. Tel un amphithéâtre grec miniature, la proximité avec le public y est effrayante et jubilatoire à la fois. Impossible, dans ces conditions, de ne pas être touché, atteint, frappé, remué, troublé, ébranlé par Racine. Car à l’initiative de ce cadeau-surprise, il y a une grande Dame du Théâtre. Une de celles qui côtoya les plus illustres, qui traversa un demi-siècle de théâtre classique et se refusa sans cesse à la médiocrité.
On aime son jeu d’équilibriste sur les vers raciniens, on raffole de son interprétation du Lac des Cygnes, mais surtout surtout : on l’écouterait des heures emprunter la voix d’Hyppolite, de Phèdre ou d’Andromaque. Anne Delbée débute sa leçon sur un mode léger, drôle – car la tragédie ne la rend pas triste, au contraire. La première partie du spectacle nous fait rire et sourire ; on est heureux.
Anne Delbée n’a pas uniquement écrit un texte imposant, touffu, dense, démesuré. Elle a créé une scénographie au service de cette déclaration d’amour enflammée. Sur des plaques métalliques installées en fond de scène, elle projette des images et vidéos qui prolongent le voyage.
Elle redonne à Racine son visage de 17 ans et s’adresse en priorité à la jeunesse d’aujourd’hui, aux futurs poètes. « Il faut transmettre aux gosses de dix ans les plus grands textes, c’est tellement simple la poésie, c’est du cinéma ».
Peu à peu, à mesure que la vie de l’immense auteur défile sous nos yeux, lorsqu’il commence à s’enfoncer dans sa propre tragédie, on se sent nostalgique, mélancolique, romantique. Car la vraie question du spectacle, posée par Racine, nous ramène à notre propre destin : qu’aurai-je fait de ma vie ? aurai-je aimé comme il le fallait ? Leçon de Phèdre, leçon d’amour, leçon de vie : qu’il fait bon s’instruire auprès d’Anne Delbée.
La petite salle du Poche-Montparnasse est l’écrin idéal à un un tel présent. Tel un amphithéâtre grec miniature, la proximité avec le public y est effrayante et jubilatoire à la fois. Impossible, dans ces conditions, de ne pas être touché, atteint, frappé, remué, troublé, ébranlé par Racine. Car à l’initiative de ce cadeau-surprise, il y a une grande Dame du Théâtre. Une de celles qui côtoya les plus illustres, qui traversa un demi-siècle de théâtre classique et se refusa sans cesse à la médiocrité.
On aime son jeu d’équilibriste sur les vers raciniens, on raffole de son interprétation du Lac des Cygnes, mais surtout surtout : on l’écouterait des heures emprunter la voix d’Hyppolite, de Phèdre ou d’Andromaque. Anne Delbée débute sa leçon sur un mode léger, drôle – car la tragédie ne la rend pas triste, au contraire. La première partie du spectacle nous fait rire et sourire ; on est heureux.
Anne Delbée n’a pas uniquement écrit un texte imposant, touffu, dense, démesuré. Elle a créé une scénographie au service de cette déclaration d’amour enflammée. Sur des plaques métalliques installées en fond de scène, elle projette des images et vidéos qui prolongent le voyage.
Elle redonne à Racine son visage de 17 ans et s’adresse en priorité à la jeunesse d’aujourd’hui, aux futurs poètes. « Il faut transmettre aux gosses de dix ans les plus grands textes, c’est tellement simple la poésie, c’est du cinéma ».
Peu à peu, à mesure que la vie de l’immense auteur défile sous nos yeux, lorsqu’il commence à s’enfoncer dans sa propre tragédie, on se sent nostalgique, mélancolique, romantique. Car la vraie question du spectacle, posée par Racine, nous ramène à notre propre destin : qu’aurai-je fait de ma vie ? aurai-je aimé comme il le fallait ? Leçon de Phèdre, leçon d’amour, leçon de vie : qu’il fait bon s’instruire auprès d’Anne Delbée.
Un grand moment de théâtre !
J'aime Racine mais je ne savais pas trop ce que j'allais voir : une pièce sur Racine ? Sur Phèdre ?
Anne Delbée nous entraîne en fait dans un voyage ou s'entremêlent subtilement la vie de Racine, celle de Phèdre et celle de la comédienne et tragédienne. Autour de ces 3 axes la comédienne nous plonge dans l'oeuvre de Racine (et replace astucieusement Racine dans son contexte historique (Louis XIV), social (La Du Parc) et littéraire (Molière) de l'époque); nous fait ressentir la chaleur incandescente de la Grèce de Phèdre, et nous donne une leçon sur cette "belle langue du 17eme siècle" : comment la dire et la faire vivre aujourd'hui.
La comédienne Anne Delbée se donne tout entier à Racine et au théâtre... Impressionnant !
J'aime Racine mais je ne savais pas trop ce que j'allais voir : une pièce sur Racine ? Sur Phèdre ?
Anne Delbée nous entraîne en fait dans un voyage ou s'entremêlent subtilement la vie de Racine, celle de Phèdre et celle de la comédienne et tragédienne. Autour de ces 3 axes la comédienne nous plonge dans l'oeuvre de Racine (et replace astucieusement Racine dans son contexte historique (Louis XIV), social (La Du Parc) et littéraire (Molière) de l'époque); nous fait ressentir la chaleur incandescente de la Grèce de Phèdre, et nous donne une leçon sur cette "belle langue du 17eme siècle" : comment la dire et la faire vivre aujourd'hui.
La comédienne Anne Delbée se donne tout entier à Racine et au théâtre... Impressionnant !
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