Critiques pour l'événement L'Affaire Courteline
25 avr. 2018
8,5/10
21
Imaginez des vêtements qui pendent à Cour comme à Jardin. Et six comédiens perchés sur six tabourets, en pleine crise de fou rire. Qui commence par conter des blagues finit souvent par mentir dit l'un d'eux.

Amusez-vous, foutez-vous d'tout (...) La vie après tout est si courte... Cette chanson date tout de même de 1934 mais nous sommes nombreux parmi le public à l'avoir déjà entendue. Il faut dire que les paroles sont du grand Sacha Guitry (et de W. Heymans), musique de A. Willemetz, créée par Henri Garat et tirée de l'opérette Florestan 1er, Prince de Monaco.

Le spectacle alterne les saynètes et les chansons, chorégraphiées à la perfection. Le rythme est soutenu. Heureusement que les comédiens ne sont pas tous mobilisés par chaque scène parce que ce serait épuisant pour eux.

C'est une des qualités de cette Affaire Courteline que de permettre les changements de rôle et donc de personnages. Une autre est de nous faire entendre ce texte si savoureux, même après tant d'années, et qui a du inspirer plus d'un humoriste : S'il fallait tolérer aux autres tout ce qu'on se permet à soi-même, la vie ne serait plus tenable.

On est étonné de découvrir qu'il y avait déjà des frotteurs dans les autobus, que l'employé, qui est loin d'être modèle, ose justifier une absence de 15 jours avec une mauvaise foi désarmante, je n'peux pas m'tuer pour 200 francs par mois. Plus tard un autre de ces personnages truculents prononcera une autre de ces répliques qui réjouissent le public : je ne vois nulle honte à être un vieux cochon mais beaucoup de ridicule à être un vieux imbécile. Ce sont tous des phénomènes. On a envie de se souvenir de chaque réplique pour la recaser ultérieurement. Cette dame à la drôle de philosophie est impayable : je ne pense jamais, ça me fatigue, ou si je pense je ne pense à rien.

Ils s'appellent Sigismond, monsieur Badin, les Proute, Bezuche, Eponine, Champignon, Canuche... Leurs dialogues sont, c'est vrai, truffés de mots à double entente (sic). Quand l'un affirme Plus je crois en ce que je ne comprends pas, son voisin répond : je ne crois qu'à l'absurde.

Les chansons sont de très jolis moments. Comme Je n'suis pas bien portant, écrite en 1932 par un comique troupier, Gaston Ouvrard, qui la chanta pendant soixante ans. On entendra aussi la chanson la plus connue de Colette Renard Les Nuits d'une demoiselle, régulièrement reprise par des artistes contemporains comme Victoria Abril, Clothilde Courau, Jeanne Cherhal ou Mathilde pour son premier album après The Voice. Ce pas de quatre aura été très applaudi, ce qui est mérité.

La Compagnie La Boîte aux Lettres nous régale une fois de plus, après son très réjouissant “Le jeu de l’Amour et du Hasard“, de Marivaux, en 2017 et qui m'avait enthousiasmée. La mise en scène de Salomé Villiers était très réussie. Elle est cette fois Chichichette.

C'est un grand plaisir que nous offre une vraie troupe sous la direction de Betrand Mounier (qui interprète aussi le rôle de Sigismond). On remarque Etienne Launay (Champignon) qui est aussi le metteur en scène du Monte-plats, un étage au-dessus, dans ce même théâtre, dans un style très différent. Et bien entendu la pétillante Isabelle De Botton, dans un autre registre que son précédent spectacle, la Parisienne d'Alexandrie.

Offrez-vous cette Affaire Courteline qui éreinte les travers de la bourgeoisie de la fin du XIX° siècle. C'est un joli divertissement. Les comédiens vous donnent l'argument en reprenant pour le final la première chanson :
On n'est pas ici-bas
Pour se faire du tracas.
Amusez-vous, foutez-vous d'tout
La vie passera comme un rêve
Faites les cent coups, dépensez tout
Prenez la vie par le bon bout.
Et zou…
14 avr. 2018
8,5/10
19
L’affaire Courteline mise en scène de Bertrand Mounier.
Quelle bonne idée ce Grand cabaret « Courtelinois », les saynètes défilent sous nos yeux entre coupées de chansonnettes. Les comédiens se travestissent sous notre regard, les décors et les costumes sont esthétiques. C’est gai, dynamique et très séduisant.
On retrouve avec grand plaisir le vieux couple de Mr et Mme Proute à la veille du jour de l’an.
*Mme : A quoi penses-tu, Alexis ?
*Mr : Je pense à ta saleté du Jour de l’An, parbleu !… Encore être obligé de te faire des étrennes ! En voilà une partie de plaisir !
Champignon et Canuche au tribunal pour des histoires de tromperies.
Chichinette, Eponine et la fameuse bouteille de madère.
Mr Badin, ce fonctionnaire bien particulier.
Tous ces personnages un peu crédules, ballots, arrogants mais sympathiques et burlesques nous dépeignent l’univers de la bureaucratie, du couple et la justice au siècle dernier.
Les morceaux choisis sont percutants, pleins d’intelligences et nous plongent au cœur de l’œuvre de Courteline remplie d’humour et de vérités.
Les comédiens sont talentueux, on ressent une belle complicité entre eux. Ils nous font rire et nous amusent avec beaucoup de finesse et d’aisance.
30 mars 2018
9/10
3
Ce spectacle est un grand plaisir de bonne humeur. On y sourit, on y rit ou l’on fou-rit en permanence. C’est frais, intelligent et très bien joué. Petite pépite théâtrale dont il serait dommage de se priver !
23 mars 2018
8/10
4
On découvre tout l’univers de Courteline, et ses personnages, on a de la sympathie pour eux. Il y a la mère abusive, et ses conseils pas très avisés, mais elle a si peur de faire rater les fiançailles de son Sigismond !
Et puis le mari pleutre mais bien décidé à en découdre avec un officier qui aurait courtisé son épouse, c’est un lâche, qui préfère flanquer la bonne et le chat à la porte, pour prouver qu’il est un homme.

Ce cher M. Badin, ses histoires de santé, de famille, essayez seulement de vous adresser comme il le fait à votre directeur, vous m’en direz des nouvelles !
Les méfaits de l’alcool et les relations maître et domestique, Chichinette et sa bonne.
Les affaires judiciaires, avec un mari cocu et pas content, les Champignons deviennent vite vénéneux… et les déboires de Gabrielle venant pleurer chez son amie Caroline, tout se termine en chansons bien entendu.
"Amusez-vous, foutez-vous d'tout" !