Fred Hersch invite Avishai Cohen

Avishai Cohen. Le dandy New-Yorkais d’adoption s’est formé au prestigieux Berklee College of Music de Boston et a remporté la 3ème place du concours Thelonious Monk.

Également nommé “Musicien étranger de l’année” par Jazz Magazine, Avishai Cohen est sans conteste une étoile montante du jazz.

Le trompettiste a sorti plusieurs albums remarqués à l’instar du méditatif “Into The Silence” (2016) sous le label phare du jazz et du classique contemporains ECM Records.

Note rapide
10/10
pour 1 note et 1 critique
0 critique
Note de 1 à 3
0%
0 critique
Note de 4 à 7
0%
1 critique
Note de 8 à 10
100%
1 critique
15 mai 2022
10/10
5
« Let me introduce the band : Avishai Cohen ! »

Ou quand l’un des plus grands pianistes actuels présente d’emblée avec un pointe d'humour l’un des plus talentueux trompettistes.

Deux Jazzmen de la plus grande importance, deux immenses musiciens, trop rares en France.

Quatrième et dernier concert de Fred Hersch au Bal Blomet, le plus passionnant, le plus intense à mon sens.

Et pourtant, je peux vous assurer que les trois précédents ont marqué les esprits parisiens !



Mais ce que ces deux-là vont nous donner est phénoménal de cohésion, d’entente musicale, de complémentarité au travers de deux singularités.

Dans un répertoire composé de grands standards et de compositions personnelles de Mister Hersch, les deux grands artistes vont nous plonger dans un véritable enchantement.



C’est bien simple, je me demande si je n’ai pas assisté hier au plus beau duo jazz de toute ma carrière de critique et de spectateur.

Les deux vont nous emmener aux confins du jazz, dans ses coins les plus sublimes, là où l’inspiration, la virtuosité, la délicatesse, la puissance et la grâce règnent en maîtresses absolues.



Immédiatement le ton est donné.

Bemsha Swing. Thelonius Monk

Nous comprenons tout de suite l’osmose musicale qui lie Messieurs Hersch et Cohen.
Ici, pas d’accompagnateur, pas d’accompagné.
Le discours musical, s’il est virtuose, s’il délivre beaucoup de notes (les aigus du trompettistes sont admirables), ce discours est pourtant empreint d’un lyrisme, d’une sensibilité de tous les instants.

Telle une suite de Bach, les deux se lancent dans de vertigineux contrepoints. L’architecture générale de ce premier morceau évoque immanquablement une fugue magnifique, avec ses chassés-croisés instrumentaux subtils et délicats.


Le style du pianiste est aisément reconnaissable, avec ces notes aériennes, éthérées, et ces improvisations à base d’accords sophistiqués base de huit ou neuf de notes plus bleues les unes que les autres, des accords plaqués qui se succèdent sur le tempo swingué.



Quant à Avishai Cohen (qui au passage a laissé sa grande barbe pour une moustache digne de nos gendarmes à cheval du XIXème siècle), lui se lance dans des volutes de notes, très claires et très puissantes dans les aigus, douces, veloutées dans les mediums et les graves.

Quelle technique, quelle sensibilité, quelle virtuosité, n’en finis-je pas de me répéter !

D’autres très grands moments nous attendent, tout au long de cette trop courte heure et vingt minutes qu’a duré le concert.

La version de Blues connotation, d’Ornette Coleman va faire frissonner les spectateurs, l’arrangement est merveilleux et permet aux deux de s’exprimer de la plus belle des manières qui soit.

Voici Mandevilla, une composition de Fred Hersch, dont l’introduction n’est pas sans rappeler la célébrissime Habanera, le premier aria de la Carmencita.

Les nuances délicates, la beauté du thème nous rappellent s’il en était encore besoin quel mélodiste et quel harmoniste est Fred Hersch.



Et puis nous allons être transportés par une hallucinante version du Hurricane de Sonny Rollins.

Je serais curieux de voir la partition résultant de la transcription de ce que ceux deux là jouent alors : il doit y avoir plus de noir que de blanc, tellement les triples, quadruples croches s’enchaînent à une vitesse grand V.
Et pourtant, encore et toujours, quelle grâce envoûtante, quelle subtilité, quelle délicatesse !



Il faudra bien une nouvelle ballade herschienne pour que nous puissions nous remettre de nos émotions.

Voici venir Groovin’ high, de Dizzie Gillespie, avec un épatant chase entre les deux instruments. Pianiste et trompettiste s’amusent beaucoup à faire dialoguer leurs instruments.



Deux pièces profondes et passionnantes de Thelionus Monk (encore et toujours Monk) nous rappellent l’importance musicale de celui qui reste l'un des plus grands improvisateurs ayant jamais existé.


Fred Hersch et Avishai Cohen recevront une véritable ovation lors des saluts.

Quoi de plus normal...

Tous avons compris que nous venions d’assister à un exceptionnel concert, faisant de nous de véritables privilégiés.

En guise d’« Encore », nous aurons droit une nouvelle fois à la merveilleuse composition Valentine, dont les mythiques éditions classiques américaines Peters ont tenu à intégrer dans leur catalogue.
Votre critique endiablée
Nos visiteurs sont impatients de vous lire ! Si vous êtes l'auteur, le metteur en scène, un acteur ou un proche de l'équipe de la pièce, écrivez plutôt votre avis sur les sites de vente de billets. Ils seront ravis de le mettre en avant.
Notes détaillées (pour les plus courageux)
Musique
Talent des artistes
Emotions
Intérêt intellectuel
Mise en scène et décor