Critiques pour l'événement Tartuffe
À propos de "Tartuffe" repris à l'Odéon / Ateliers Berthier dans la mise en scène de Luc Bondy, en hommage au metteur en scène récemment disparu.
On ne dit pas de mal des morts, mais ce spectacle est une horreur ! Comment un grand homme de théâtre a-t-il pu commettre une lecture d'une telle médiocrité, où l'inculture le dispute à la bêtise et au mépris du public... ou des comédiens embarqués dans cette vandalisation ? Contre toutes les règles, le texte de Molère est non seulement coupé par vers entiers, par tirades entières, mais pire encore, modifié, oui modifié... probablement parce que trop compliqué pour les imbéciles de spectateurs : "vous irez par le coche en sa petite ville" devient "vous irez en voiture dans sa petite ville", des fois que "le coche" soit pris pour une case à cocher sur une grille de loto, tandis que dans la même infortunée tirade de Dorine, "madame la baillive" se transforme en "madame la préfète" et "le bal et la grand'bande" en "un chanteur de province", sans doute pour les gros nuls pas fichus de deviner -au cas où ils l'ignoreraient- que la baillive est une potiche de la bonne société provinciale et la grand'bande un orchestre à danser. Dans le même acharnement contre l'esprit et la lettre de la pièce, le coup de théâtre final est remplacé par un ersatz monocorde où l'exempt royal vient lire un communiqué du "gouvernement" : exit le palpitant jeu de scène où, au lieu d'arrêter Orgon, comme le lui enjoint Tartuffe, l'exempt se retourne vers celui-ci en lui disant "suivez-moi tout à l'heure dans la prison qu'on doit vous donner pour demeure", et exit par la même occasion le mémorable "nous vivons sous un prince ennemi de la fraude", car voyez-vous, "un prince", alors que nous sommes en république, personne ne saisirait... Sommet d'inintelligence, la dernière scène, étirée en longueur et quasi muette, donne à voir la famille attablée devant un poulet rôti et fredonnant "Plaisir d'amour" : on songe, pourquoi pas "Nini peau de chien", ou "La fille du Bédouin" comme dans "Milou en mai" ? Orgon ne dit plus rien, fait mine de porter un toast mais n'arrive qu'à bredouiller un vers qu'il a sauté dans son texte deux scènes auparavant... moyennant quoi il saute, cette fois, les six que Molière lui avait écrits pour cette ultime scène et qui permettaient de laisser tomber le rideau -l'auteur avait dû le faire exprès- sur un mot au son clair après tant de noirceurs : "et par un doux hymen couronner en Valère la flamme d'un amant généreux et sincère". Mais ce "sincère"-là, que Molière signe comme un Z de Zorro au bas de sa pièce, le public de l'Odéon-Berthier n'y aura pas eu droit.
On ne dit pas de mal des morts, mais ce spectacle est une horreur ! Comment un grand homme de théâtre a-t-il pu commettre une lecture d'une telle médiocrité, où l'inculture le dispute à la bêtise et au mépris du public... ou des comédiens embarqués dans cette vandalisation ? Contre toutes les règles, le texte de Molère est non seulement coupé par vers entiers, par tirades entières, mais pire encore, modifié, oui modifié... probablement parce que trop compliqué pour les imbéciles de spectateurs : "vous irez par le coche en sa petite ville" devient "vous irez en voiture dans sa petite ville", des fois que "le coche" soit pris pour une case à cocher sur une grille de loto, tandis que dans la même infortunée tirade de Dorine, "madame la baillive" se transforme en "madame la préfète" et "le bal et la grand'bande" en "un chanteur de province", sans doute pour les gros nuls pas fichus de deviner -au cas où ils l'ignoreraient- que la baillive est une potiche de la bonne société provinciale et la grand'bande un orchestre à danser. Dans le même acharnement contre l'esprit et la lettre de la pièce, le coup de théâtre final est remplacé par un ersatz monocorde où l'exempt royal vient lire un communiqué du "gouvernement" : exit le palpitant jeu de scène où, au lieu d'arrêter Orgon, comme le lui enjoint Tartuffe, l'exempt se retourne vers celui-ci en lui disant "suivez-moi tout à l'heure dans la prison qu'on doit vous donner pour demeure", et exit par la même occasion le mémorable "nous vivons sous un prince ennemi de la fraude", car voyez-vous, "un prince", alors que nous sommes en république, personne ne saisirait... Sommet d'inintelligence, la dernière scène, étirée en longueur et quasi muette, donne à voir la famille attablée devant un poulet rôti et fredonnant "Plaisir d'amour" : on songe, pourquoi pas "Nini peau de chien", ou "La fille du Bédouin" comme dans "Milou en mai" ? Orgon ne dit plus rien, fait mine de porter un toast mais n'arrive qu'à bredouiller un vers qu'il a sauté dans son texte deux scènes auparavant... moyennant quoi il saute, cette fois, les six que Molière lui avait écrits pour cette ultime scène et qui permettaient de laisser tomber le rideau -l'auteur avait dû le faire exprès- sur un mot au son clair après tant de noirceurs : "et par un doux hymen couronner en Valère la flamme d'un amant généreux et sincère". Mais ce "sincère"-là, que Molière signe comme un Z de Zorro au bas de sa pièce, le public de l'Odéon-Berthier n'y aura pas eu droit.
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