Critiques pour l'événement Petite
Les deux sœurs. Presque Tchekhov…
La grande. Et la petite. Ou tout du moins la moins grande.
Mais au fait, combien sont-elles, ces sœurs-là, que l’on découvre au sol, dans un enchevêtrement quasi fusionnel, devant un amoncellement de boîtes en carton ?
Deux corps qui n’en feraient peut-être qu’un, habillés de grande pulls dans lesquels on peut se cacher ou trouver un refuge matriciel.
Deux ? Vraiment ?
Le spectateur en est-il si sûr ?
Ne seraient-elles pas plutôt trois ? Ou un seul et même humain ?
Ou personne, après tout…
Mais au fait, est-on vraiment certains d’avoir des humains devant nous ? Leur démarche et leurs gestes saccadés pourraient bien nous faire douter...
Ariane Louis a écrit un texte passionnant, Le caveau est sourd, dans lequel elle interroge certes le concept de sororité, mais également et peut-être surtout les rapports à l’autre et à soi.
Un voyage dans lequel deux univers vont se retrouver : celui de l’auteur et celui du lecteur ou du spectateur.
L’écriture de Mademoiselle Louis est acérée, puissante, sans concession, une écriture d’urgence.
Le Bureau des Lecteurs de la Comédie-Française, et son directeur littéraire Laurent Mulheisen ne s’y sont pas trompés, qui ont sélectionné ce texte dans le cadre de leur mission de faire émerger de belles écritures contemporaines.
Tout commence un peu comme chez Ionesco. Un théâtre de l’absurde.
Un espace clos. Une pièce hermétique. Un cocon à la fois rassurant et inquiétant.
Une jeune femme range, dérange, déplace, entasse des boîtes, sur lesquelles sa sœur et elle pourront monter. On ne comprend pas trop la logique qui préside à ces mouvements de carton. Il va falloir attendre un peu.
Une autre jeune femme fixe une porte matérialisée par une lumière intense. Désespérément.
On comprend immédiatement que le mythe de la caverne de Platon n’est pas très loin du tout.
Un homme surgit, à la mâchoire carrée très tarantinienne et au look de Jude Law dans A.I. , le film de Spielberg, marcel, bretelles et grand manteau de cuir noir.
L’Autre. L’homme. Qui lui aussi peut rassurer ou faire peur. C’est selon.
Une sorte de narrateur.
Les trois comédiens vont volontairement et salutairement nous déstabiliser.
Nous allons devoir entreprendre un travail de « décohérence ».
C’est à dire, pour reprendre ce concept utilisé dans la physique quantique, nous allons devoir déterminer nous-mêmes l’état d’une chose.
En l’occurrence, l’existence ou non de ces personnages.
D’ailleurs à ce propos, et le parti-pris est très judicieux, nous sera rappelée la fable du chat de Schrödinger, ce félin qui dans une boîte hermétique (tiens tiens…) pouvait être à la fois mort et vivant.
Bien entendu, une autre approche est également possible : celle de la psychanalyse, avec des personnages tentant un travail plus ou moins « sauvage » sur elles-mêmes.
Ici, au lieu d’un matou, nous avons donc deux félines.
L’auteure elle-même, Ariane Louis, et Julia Gratens.
Les deux comédiennes ne vont ménager ni leur peine ni leur énergie.
Mises en scène par Thibaut Besnard, elles vont laisser une place très importante à un travail corporel impressionnant, qui va mêler sensualité,
De véritables moments chorégraphiés nous attendent.
Le corps qui en dit peut-être autant que le texte, le corps qui est utilisé parce que l’intellect ne peut suffire à expliquer cette relation ambigüe à la fois fusionnelle et répulsive, le corps qui définit autant les êtres que leurs dires.
Et puis des corps qui parlent.
Et qui vont souvent crier, voire hurler. Le texte au scalpel est exigent, très exigeant.
Les trois personnages parviennent à nous faire douter, à oublier nos certitudes, et ce, plusieurs fois dans la soirée. Parce que notre imaginaire est mis à rude épreuve.
Et puis, la fin, remarquable, nous laissera tirer nos propres conclusions.
Ici, il sera question de Sysiphe avec son rocher, ou encore de Ptolémée et son aigle.
Le récit se rapproche encore une fois du mythe.
Je n’aurai garde d'oublier de mentionner également la magnifique création sonore et musicale de Jules Doucet, faite de sons souvent inquiétants, dérangeants, de nappes synthétiques étranges, qui accentuent le sentiment de déstabilisation permanente du propos.
C’est une pièce qui s’écoute, également.
Au final, cette heure d’un théâtre passionnant, intense et sur le fil nous procure le sentiment de n’être pas seulement spectateur, mais également « acteur » de la résolution de ce que nous voyons et voulons comprendre.
Petite, un grand spectacle.
La grande. Et la petite. Ou tout du moins la moins grande.
Mais au fait, combien sont-elles, ces sœurs-là, que l’on découvre au sol, dans un enchevêtrement quasi fusionnel, devant un amoncellement de boîtes en carton ?
Deux corps qui n’en feraient peut-être qu’un, habillés de grande pulls dans lesquels on peut se cacher ou trouver un refuge matriciel.
Deux ? Vraiment ?
Le spectateur en est-il si sûr ?
Ne seraient-elles pas plutôt trois ? Ou un seul et même humain ?
Ou personne, après tout…
Mais au fait, est-on vraiment certains d’avoir des humains devant nous ? Leur démarche et leurs gestes saccadés pourraient bien nous faire douter...
Ariane Louis a écrit un texte passionnant, Le caveau est sourd, dans lequel elle interroge certes le concept de sororité, mais également et peut-être surtout les rapports à l’autre et à soi.
Un voyage dans lequel deux univers vont se retrouver : celui de l’auteur et celui du lecteur ou du spectateur.
L’écriture de Mademoiselle Louis est acérée, puissante, sans concession, une écriture d’urgence.
Le Bureau des Lecteurs de la Comédie-Française, et son directeur littéraire Laurent Mulheisen ne s’y sont pas trompés, qui ont sélectionné ce texte dans le cadre de leur mission de faire émerger de belles écritures contemporaines.
Tout commence un peu comme chez Ionesco. Un théâtre de l’absurde.
Un espace clos. Une pièce hermétique. Un cocon à la fois rassurant et inquiétant.
Une jeune femme range, dérange, déplace, entasse des boîtes, sur lesquelles sa sœur et elle pourront monter. On ne comprend pas trop la logique qui préside à ces mouvements de carton. Il va falloir attendre un peu.
Une autre jeune femme fixe une porte matérialisée par une lumière intense. Désespérément.
On comprend immédiatement que le mythe de la caverne de Platon n’est pas très loin du tout.
Un homme surgit, à la mâchoire carrée très tarantinienne et au look de Jude Law dans A.I. , le film de Spielberg, marcel, bretelles et grand manteau de cuir noir.
L’Autre. L’homme. Qui lui aussi peut rassurer ou faire peur. C’est selon.
Une sorte de narrateur.
Les trois comédiens vont volontairement et salutairement nous déstabiliser.
Nous allons devoir entreprendre un travail de « décohérence ».
C’est à dire, pour reprendre ce concept utilisé dans la physique quantique, nous allons devoir déterminer nous-mêmes l’état d’une chose.
En l’occurrence, l’existence ou non de ces personnages.
D’ailleurs à ce propos, et le parti-pris est très judicieux, nous sera rappelée la fable du chat de Schrödinger, ce félin qui dans une boîte hermétique (tiens tiens…) pouvait être à la fois mort et vivant.
Bien entendu, une autre approche est également possible : celle de la psychanalyse, avec des personnages tentant un travail plus ou moins « sauvage » sur elles-mêmes.
Ici, au lieu d’un matou, nous avons donc deux félines.
L’auteure elle-même, Ariane Louis, et Julia Gratens.
Les deux comédiennes ne vont ménager ni leur peine ni leur énergie.
Mises en scène par Thibaut Besnard, elles vont laisser une place très importante à un travail corporel impressionnant, qui va mêler sensualité,
De véritables moments chorégraphiés nous attendent.
Le corps qui en dit peut-être autant que le texte, le corps qui est utilisé parce que l’intellect ne peut suffire à expliquer cette relation ambigüe à la fois fusionnelle et répulsive, le corps qui définit autant les êtres que leurs dires.
Et puis des corps qui parlent.
Et qui vont souvent crier, voire hurler. Le texte au scalpel est exigent, très exigeant.
Les trois personnages parviennent à nous faire douter, à oublier nos certitudes, et ce, plusieurs fois dans la soirée. Parce que notre imaginaire est mis à rude épreuve.
Et puis, la fin, remarquable, nous laissera tirer nos propres conclusions.
Ici, il sera question de Sysiphe avec son rocher, ou encore de Ptolémée et son aigle.
Le récit se rapproche encore une fois du mythe.
Je n’aurai garde d'oublier de mentionner également la magnifique création sonore et musicale de Jules Doucet, faite de sons souvent inquiétants, dérangeants, de nappes synthétiques étranges, qui accentuent le sentiment de déstabilisation permanente du propos.
C’est une pièce qui s’écoute, également.
Au final, cette heure d’un théâtre passionnant, intense et sur le fil nous procure le sentiment de n’être pas seulement spectateur, mais également « acteur » de la résolution de ce que nous voyons et voulons comprendre.
Petite, un grand spectacle.
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