Critiques pour l'événement Chanson Douce
D'Euripide et Eschyle à Anouilh et Strindberg, en passant par Shakespeare, Molière, Tchékhov, le personnage de la Nourrice occupe une place prépondérante au théâtre.
Grâce à Pauline Baye, il faudra désormais compter avec Louise, le personnage principal du roman de Leïla Slimani.
La jeune metteure en scène dont j'avais adoré le travail sur la pièce Clouée au sol, et sur sa vision de l'Iliade et l'Odyssée, la jeune metteure en scène nous propose une excellente adaptation dramaturgique du Prix Goncourt 2016.
Louise va devenir un monstre. C'est au départ une femme presque ordinaire que la violence sociétale ambiante va rendre monstrueuse.
Une femme fragile, fragilisée, encore et toujours plus, jusqu'au point de commettre l'irréparable, à savoir l'infanticide.
L'un des grands mérites de Melle Bayle est de nous permettre de visualiser on ne peut plus clairement et dramaturgiquement parlant une situation de départ, dans laquelle la mort est évoquée en permanence, et l'évolution d'une descente aux enfers.
La situation de départ, ce sont ces deux mondes actuels qui se côtoient désormais, deux visages de notre société apparemment égalitaire mais qui en réalité fait en sorte de générer des inégalités de plus en plus criantes.
D'un côté, un couple de la classe moyenne supérieure bourgeoise, (un musicien-ingénieur du son, une avocate), à la recherche d'une nounou, et de l'autre, une femme seule, faisant probablement partie du quart-monde.
Nous allons donc assister au plus près, disséquée au scalpel, une descente aux enfers inéluctable, par le biais d'une violence sociale, institutionnelle, le tout sous une couche de vernis de respectabilité et d'indifférence.
Ce couple semble ne s'apercevoir de rien, de la détresse qui s'empare de leur employée, et de la nasse qui se referme sur elle.
Nous, nous savons d'emblée, puis que comme dans le roman, comme chez Colombo et chez Hitchcock, le récit est construit sous forme d'analepse : oui, nous connaissons la fin, nous savons que Louise est passée à l'acte.
Les partis-pris de Pauline Bayle vont parfaitement fonctionner.
Le plus intéressant à mon sens, est le fait que nous sommes dans un lieu à la fois clos et ouvert, avec trois comédiens qui vont jouer tous les rôles, et notamment les « rôles opposés ».
Les parents seront également les enfants, la nounou meurtrière sera également la fonctionnaire de police en charge de la scène de crime.
Tout ceci fonctionne à la perfection, nous ne sommes jamais perdus, nous savons en permanence à qui nous avons affaire.
Anna Cervinka et Sébastien Pouderoux seront ces parents et ces enfants.
Les deux jouent ces deux bobos avec un confondant réalisme. J'ai été totalement convaincu par l'incarnation scénique des personnages du roman.
Le cri déchirant poussé par Melle Cervinka (la mère en état de choc) nous démontre une nouvelle fois sa capacité à appréhender des émotions extrêmes avec une absolue justesse.
Sébastien Pouderoux sera le père et Mila la fille. Il apportera parfois une touche comique, renforçant le côté « naturel » et peut-être universel de ce couple.
Et puis, il y a Florence Viala.
Louise.
La comédienne est merveilleuse, à la fois Mary Poppins puis Médée.
Elle parvient à jouer cette progression dramatique avec subtilité et une palette de jeu impressionnante.
Je me souviendrai par exemple longtemps de la réaction des lycéens présents, voyant et entendant son personnage décrire cet homme obligé de déféquer dans une rue, entre deux voitures garées. Au début, le rire est de mise, et puis c'est le silence assourdissant lorsqu'ils comprennent que cet homme est un SDF ne pouvant faire autrement !
Appelons un chat un chat : elle est impressionnante, tour à tour froide, glaciale, émouvante, monstrueuse. Elle est également déchirante, franchissant le quatrième mur, en femme acculée, attirée inexorablement par un précipice.
Florence Viala a créé ce rôle en plaçant la barre très très haut !
J'ai beaucoup apprécié cette entreprise dramaturgique.
Pauline Bayle a pleinement atteint son objectif.
Comme elle l'explique elle-même, après avoir traité de grandes épopées homériques, elle a cherché à créer un théâtre de l'infiniment petit.
Elle est parvenue à restituer en une heure et vingt minutes sur scène ce qui faisait la spécificité du roman de Leïla Slimani, à savoir nous interroger sur notre condition humaine plongée dans un monde où règne une sauvagerie de plus en plus féroce.
Grâce à Pauline Baye, il faudra désormais compter avec Louise, le personnage principal du roman de Leïla Slimani.
La jeune metteure en scène dont j'avais adoré le travail sur la pièce Clouée au sol, et sur sa vision de l'Iliade et l'Odyssée, la jeune metteure en scène nous propose une excellente adaptation dramaturgique du Prix Goncourt 2016.
Louise va devenir un monstre. C'est au départ une femme presque ordinaire que la violence sociétale ambiante va rendre monstrueuse.
Une femme fragile, fragilisée, encore et toujours plus, jusqu'au point de commettre l'irréparable, à savoir l'infanticide.
L'un des grands mérites de Melle Bayle est de nous permettre de visualiser on ne peut plus clairement et dramaturgiquement parlant une situation de départ, dans laquelle la mort est évoquée en permanence, et l'évolution d'une descente aux enfers.
La situation de départ, ce sont ces deux mondes actuels qui se côtoient désormais, deux visages de notre société apparemment égalitaire mais qui en réalité fait en sorte de générer des inégalités de plus en plus criantes.
D'un côté, un couple de la classe moyenne supérieure bourgeoise, (un musicien-ingénieur du son, une avocate), à la recherche d'une nounou, et de l'autre, une femme seule, faisant probablement partie du quart-monde.
Nous allons donc assister au plus près, disséquée au scalpel, une descente aux enfers inéluctable, par le biais d'une violence sociale, institutionnelle, le tout sous une couche de vernis de respectabilité et d'indifférence.
Ce couple semble ne s'apercevoir de rien, de la détresse qui s'empare de leur employée, et de la nasse qui se referme sur elle.
Nous, nous savons d'emblée, puis que comme dans le roman, comme chez Colombo et chez Hitchcock, le récit est construit sous forme d'analepse : oui, nous connaissons la fin, nous savons que Louise est passée à l'acte.
Les partis-pris de Pauline Bayle vont parfaitement fonctionner.
Le plus intéressant à mon sens, est le fait que nous sommes dans un lieu à la fois clos et ouvert, avec trois comédiens qui vont jouer tous les rôles, et notamment les « rôles opposés ».
Les parents seront également les enfants, la nounou meurtrière sera également la fonctionnaire de police en charge de la scène de crime.
Tout ceci fonctionne à la perfection, nous ne sommes jamais perdus, nous savons en permanence à qui nous avons affaire.
Anna Cervinka et Sébastien Pouderoux seront ces parents et ces enfants.
Les deux jouent ces deux bobos avec un confondant réalisme. J'ai été totalement convaincu par l'incarnation scénique des personnages du roman.
Le cri déchirant poussé par Melle Cervinka (la mère en état de choc) nous démontre une nouvelle fois sa capacité à appréhender des émotions extrêmes avec une absolue justesse.
Sébastien Pouderoux sera le père et Mila la fille. Il apportera parfois une touche comique, renforçant le côté « naturel » et peut-être universel de ce couple.
Et puis, il y a Florence Viala.
Louise.
La comédienne est merveilleuse, à la fois Mary Poppins puis Médée.
Elle parvient à jouer cette progression dramatique avec subtilité et une palette de jeu impressionnante.
Je me souviendrai par exemple longtemps de la réaction des lycéens présents, voyant et entendant son personnage décrire cet homme obligé de déféquer dans une rue, entre deux voitures garées. Au début, le rire est de mise, et puis c'est le silence assourdissant lorsqu'ils comprennent que cet homme est un SDF ne pouvant faire autrement !
Appelons un chat un chat : elle est impressionnante, tour à tour froide, glaciale, émouvante, monstrueuse. Elle est également déchirante, franchissant le quatrième mur, en femme acculée, attirée inexorablement par un précipice.
Florence Viala a créé ce rôle en plaçant la barre très très haut !
J'ai beaucoup apprécié cette entreprise dramaturgique.
Pauline Bayle a pleinement atteint son objectif.
Comme elle l'explique elle-même, après avoir traité de grandes épopées homériques, elle a cherché à créer un théâtre de l'infiniment petit.
Elle est parvenue à restituer en une heure et vingt minutes sur scène ce qui faisait la spécificité du roman de Leïla Slimani, à savoir nous interroger sur notre condition humaine plongée dans un monde où règne une sauvagerie de plus en plus féroce.
Dans le même genre
Les avis de la rédaction