Critiques pour l'événement Age of Rage
Six !
Ni plus ni moins !
C’est le nombre de tragédies d’Euripide et Eschyle qu’Ivo Van Hove a mixé pour continuer son incursion dans les terres grecques antiques…
Une incursion démarrée par un tonitruant et passionnant diptyque, Electre/Oreste, donné en mai 2019 à la Comédie Française.
Comme une version 6.0...
Ici, le dramaturge belge, à la tête de l’Internationaal Theater Amsterdam, continue de nous montrer la violence, l’ultra-violence même, du monde.
Le monde antique certes, mais surtout ce monde qui est le nôtre, où rien ne change véritablement. Bien au contraire.
La violence que l’on déchaîne autour de soi, mais également la violence qui nous est faite.
Ces descendants d’Atrée, ces fameux Atrides, au fond, c’est avant tout une histoire d’hommes et de femmes, qui poussent les passions humaines jusqu’à leur plus terrible extrémité.
Comme pour mieux montrer ce dont cet être humain est capable, y compris le crime le plus abject pour ces grecs : le matricide. Assassiner celle qui vous a donné la vie…
Durant ces presque quatre heures de spectacle, nous allons assister à une succession de meurtres surtout intra-familiaux.
Heureusement, un arbre généalogique est présent à tous les instants, grâce à un gigantesque écran vidéo, afin de permettre de nous y retrouver, nous qui n’avons pas assez étudié les lettres classiques.
Ivo van Hove continue de nous fasciner par sa manière bien à lui de nous montrer ces êtres humains-là, grâce à son savoir faire et son art de la mise en scène on ne peut plus précise, « évidente » en matière de fluidité.
La direction d’acteurs est à nouveau exemplaire. La troupe, survoltée et on ne peut plus engagée, est composée de comédiens qui portent vraiment à bout de bras ces grecs et ces troyens maudits.
Amateurs de décibels, vous allez vous régaler.
Le spectacle de trois heures quarante cinq minutes débute par un vrombissant morceau de métal le plus saturé qui soit, à la Rammstein ou à la System of a Down.
Très sonores également, les timbales, les percussions électroniques, les grosses caisses et les gongs, ou encore les boucles de sons étranges amplifiés à fort volume.
(Des bouchons acoustiques sont distribués sur demande à l’entrée.)
Ici, au contraire de son travail au Français, Ivo van Hove rend les personnages très contemporains, très éloignés des figures hiératiques que l’on connaît bien souvent.
Ses Agamemnon, Ménélas, Iphigénie et les autres sont très humains, sans artifices.
Un miroir de notre condition très réussi et très pertinent.
Et puis s’ajoute à cela des problématiques et des thèmes qui ne figuraient pas dans le diptyque évoqué ci-dessus, avec notamment le poids de la démagogie exercé sur les peuples.
« Quand un idiot persuade les foules, c’est un désastre pour le pays », prononce l’un des personnages. Quelle belle définition du populisme, non ?
(A ce propos, je précise que les dialogues en flamand sont heureusement sous-titrés.)
« Qui mérite de vivre ? », également, pourrait-être une question qu’ont dû être amenés à se poser certains médecins lors du début de la pandémie actuelle que l’on sait...
A son habitude également, le metteur en scène montre la violence la plus crue.
Parce qu’à un moment ou un autre, assassiner sa mère engendre quoi qu’on en dise de terribles images.
Il sait mettre en scène cette ultra-violence.
Sans ce savoir-faire, émasculer un comédien serait ridicule ou pire encore, prétexte à des fou-rires...
Ici, ce réalisme le plus intense sert parfaitement le propos général.
La deuxième partie du spectacle retrouve comme au Français un plateau recouvert de boue arrosée de fines gouttes d’eau.
La dimension organique, viscérale de ce revêtement de scène est également saisissante.
Quand la terre se mêle au sang ! De boue, les morts !
Lorsque les dieux sont pris à témoins ou à partie, Zeus en tête, une grosse quantité de projecteurs délivrent un éclat lumineux d’une intensité incroyable. A se fermer les yeux.
L’effet est saisissant.
Le dramaturge se sert également de l’écran vidéo au lointain pour montrer un chaos fait d’explosions, de champignons atomiques, d’incendies ou encore de villes en ruine.
Des cartes géographiques nous aident également à situer les différentes actions.
Après l’entracte sont diffusées des images de terre colorisées en rouge vif, grâce à des plans en imperceptible mouvement. Là encore, ceci confère une dimension vraiment oppressante.
Wim Vandekeybus signe des chorégraphies très tribales, où les comédiens (pas toujours ensemble...) semblent pris de transes les plus mystiques qui soient.
On sort de ce spectacle très intense et maîtrisé de bout en bout, comportant de très nombreuses technologies de pointe, avec des images terribles en tête, mais ô combien nécessaires.
Des images cathartiques.
Le tout au service d’une histoire et d’un propos universels.
Ni plus ni moins !
C’est le nombre de tragédies d’Euripide et Eschyle qu’Ivo Van Hove a mixé pour continuer son incursion dans les terres grecques antiques…
Une incursion démarrée par un tonitruant et passionnant diptyque, Electre/Oreste, donné en mai 2019 à la Comédie Française.
Comme une version 6.0...
Ici, le dramaturge belge, à la tête de l’Internationaal Theater Amsterdam, continue de nous montrer la violence, l’ultra-violence même, du monde.
Le monde antique certes, mais surtout ce monde qui est le nôtre, où rien ne change véritablement. Bien au contraire.
La violence que l’on déchaîne autour de soi, mais également la violence qui nous est faite.
Ces descendants d’Atrée, ces fameux Atrides, au fond, c’est avant tout une histoire d’hommes et de femmes, qui poussent les passions humaines jusqu’à leur plus terrible extrémité.
Comme pour mieux montrer ce dont cet être humain est capable, y compris le crime le plus abject pour ces grecs : le matricide. Assassiner celle qui vous a donné la vie…
Durant ces presque quatre heures de spectacle, nous allons assister à une succession de meurtres surtout intra-familiaux.
Heureusement, un arbre généalogique est présent à tous les instants, grâce à un gigantesque écran vidéo, afin de permettre de nous y retrouver, nous qui n’avons pas assez étudié les lettres classiques.
Ivo van Hove continue de nous fasciner par sa manière bien à lui de nous montrer ces êtres humains-là, grâce à son savoir faire et son art de la mise en scène on ne peut plus précise, « évidente » en matière de fluidité.
La direction d’acteurs est à nouveau exemplaire. La troupe, survoltée et on ne peut plus engagée, est composée de comédiens qui portent vraiment à bout de bras ces grecs et ces troyens maudits.
Amateurs de décibels, vous allez vous régaler.
Le spectacle de trois heures quarante cinq minutes débute par un vrombissant morceau de métal le plus saturé qui soit, à la Rammstein ou à la System of a Down.
Très sonores également, les timbales, les percussions électroniques, les grosses caisses et les gongs, ou encore les boucles de sons étranges amplifiés à fort volume.
(Des bouchons acoustiques sont distribués sur demande à l’entrée.)
Ici, au contraire de son travail au Français, Ivo van Hove rend les personnages très contemporains, très éloignés des figures hiératiques que l’on connaît bien souvent.
Ses Agamemnon, Ménélas, Iphigénie et les autres sont très humains, sans artifices.
Un miroir de notre condition très réussi et très pertinent.
Et puis s’ajoute à cela des problématiques et des thèmes qui ne figuraient pas dans le diptyque évoqué ci-dessus, avec notamment le poids de la démagogie exercé sur les peuples.
« Quand un idiot persuade les foules, c’est un désastre pour le pays », prononce l’un des personnages. Quelle belle définition du populisme, non ?
(A ce propos, je précise que les dialogues en flamand sont heureusement sous-titrés.)
« Qui mérite de vivre ? », également, pourrait-être une question qu’ont dû être amenés à se poser certains médecins lors du début de la pandémie actuelle que l’on sait...
A son habitude également, le metteur en scène montre la violence la plus crue.
Parce qu’à un moment ou un autre, assassiner sa mère engendre quoi qu’on en dise de terribles images.
Il sait mettre en scène cette ultra-violence.
Sans ce savoir-faire, émasculer un comédien serait ridicule ou pire encore, prétexte à des fou-rires...
Ici, ce réalisme le plus intense sert parfaitement le propos général.
La deuxième partie du spectacle retrouve comme au Français un plateau recouvert de boue arrosée de fines gouttes d’eau.
La dimension organique, viscérale de ce revêtement de scène est également saisissante.
Quand la terre se mêle au sang ! De boue, les morts !
Lorsque les dieux sont pris à témoins ou à partie, Zeus en tête, une grosse quantité de projecteurs délivrent un éclat lumineux d’une intensité incroyable. A se fermer les yeux.
L’effet est saisissant.
Le dramaturge se sert également de l’écran vidéo au lointain pour montrer un chaos fait d’explosions, de champignons atomiques, d’incendies ou encore de villes en ruine.
Des cartes géographiques nous aident également à situer les différentes actions.
Après l’entracte sont diffusées des images de terre colorisées en rouge vif, grâce à des plans en imperceptible mouvement. Là encore, ceci confère une dimension vraiment oppressante.
Wim Vandekeybus signe des chorégraphies très tribales, où les comédiens (pas toujours ensemble...) semblent pris de transes les plus mystiques qui soient.
On sort de ce spectacle très intense et maîtrisé de bout en bout, comportant de très nombreuses technologies de pointe, avec des images terribles en tête, mais ô combien nécessaires.
Des images cathartiques.
Le tout au service d’une histoire et d’un propos universels.
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