C'est un petit bijou de comédie, un bonbon savoureux servi par une troupe qui semble jubiler à jouer cette partition brillamment écrite que la mise en scène de Jean-Luc Moreau vient servir avec une grande justesse. Oui, ceci est une critique dithyrambique et peu nuancée, en même temps j'ai très peu souvent eu l'occasion d'autant éclater de rire au théâtre (La tirade du Chêne et du poulpe devrait devenir culte, tout autant que l’extraordinaire plaidoirie...)

Un des coups de génie de cette comédie réussie, c'est sa distribution originale qui réunit des talents aussi différents que Lionnel Astier (Génial d'énergie, un sens du rythme à toute épreuve, tellement généreux), Frédéric Bouraly (Délicieusement gaffeur, touchant et drôle) et Raphaéline Goupilleau (Décidément superbe dans tous les registres, d'une précision redoutable, quel bonheur de la voir s'amuser autant dans une comédie). On peut citer aussi les 3 autres comédiens Esther Moreau, Julien Kirsche et Philippe Maymat qui, s'ils sont moins bien servis par le texte, n'en sont pas moins efficaces et amusants.
Bref, j'ai adoré rire, il y a sûrement ça et là quelques bémols, mais j'avoue m'être complètement et inconditionnellement laissé embarqué ! Je dis Bravo et merci !

Rentré en France tout récemment, je ne m'attendais pas à être autant dépaysé en remettant les pieds dans un théâtre parisien. Quel bonheur de se plonger au cœur des années soixante américaines avec ce texte original, drôle, percutant, servi par un duo de comédiennes pétillant, tellement juste, piquant et émouvant, accompagnées d'un non moins juste comédien. On se laisse prendre à ces conversations qui semblent futiles et qui ne le sont pas tant que ça, exactement comme on se laisse prendre par un tableau d'Edward Hopper. Et on plisse les yeux de plaisir.

Je conseille très vivement d'aller découvrir si Papa va rentrer.

Unique, à part, enthousiasmant et même déroutant, CATS est tout cela et bien plus encore. C'est un magnifique spectacle complet et exigeant. Pour apprécier la production 2015 de Mogador il vous faut 3 choses :

ACCEPTER. Que des chats chantent et dansent, que l'histoire que l'on vous raconte ne soit "que" celle d'une nuit de sabbat dont l'unique enjeu est d'élire "le chat qui doit renaître encore". L'argument a ses détracteurs, pour ce qui me concerne je le trouve tout aussi acceptable qu'une chanteuse disco devenant bonne soeur, une nurse volant grâce à son parapluie magique ou un fantôme défiguré chantant inlassablement le même air dans des sous sols humides... On ne vient pas voir CATS pour une histoire mais pour sa troupe qui est ici remarquable, chantant et dansant merveilleusement. De ce point de vue, c'est une réussite.

OUVRIR. Vos yeux, vos oreilles et votre esprit. Ce dont ne manque pas CATS c'est d'univers. Visuel, musical et poétique. Absolument créatif, le spectacle fait appel à de vraies belles performances vocales et physiques et nous transporte dans un autre monde, ce qui est finalement ce que l'on demande à un divertissement. Laissons cartésianisme et pragmatisme au vestiaire, ou au fond d'une coupe de champagne, CATS pétille et de ce point de vue aussi c'est une réussite.

OUBLIER. Oui il faut abandonner beaucoup de choses pour apprécier ce show hors du temps, mais, il y aura un travail difficile et supplémentaire pour ceux qui auraient déjà assisté à une production précédente et connaîtraient bien cette oeuvre... Leurs poils risquent fort de se hérisser. Pas sûr que certaines réorchestrations ne vous fassent pas bondir de votre siège (attention ils se referment). Un rap aussi ringard qu'inapproprié, un Aria flingué par un arrangement façon Pizaïolo s'essayant à la mandoline... D'autant plus regrettables que ces aménagements ont été voulus par Loyd Weber... On a le droit de mal vieillir... Et puis... Et surtout... Et malheureusement... N'ayant pas les droits pour exploiter le texte français de 89, Stage a été contraint de le faire réadapter. On se doutait que la tâche serait difficile, on a la confirmation qu'elle est impossible. Cette nouvelle version ruine la poésie de TS Eliot (auteur des poèmes originaux). Si vous avez vu la production de 89 et plus encore si vous en possédez l'enregistrement, la descente d'organe vous guette... Le dictionnaire des synonymes n'a pas chômé, au mépris du sens et des sonorités.

En résumé, CATS est un grand spectacle, donc il survit à ce gros bémol, grâce à son charme unique magnifiquement porté par un cast (il fallait la faire) excellent dans son ensemble. Probablement la meilleure production de Stage depuis CABARET et LE ROI LION, laissez vous tenter et embarquer même si voir une comédie musicale à Mogador c'est un petit peu comme découvrir un tableau sur une boîte de biscuits : ça donne une idée de l'oeuvre mais ce ne sont pas tout à fait les bonnes couleurs...