- Comédie Musicale / Musique
- Théâtre Montansier
- Versailles
Un soir avec Montand

- Pierre Cassignard
- Théâtre Montansier
- 13, rue des Réservoirs
- 78000 Versailles
Parmi toutes les chansons qu’Yves Montand a pu interpréter en scène, il a été extrêmement difficile de faire un choix pour s’en tenir aux 22 qui composent ce tour de chant.
J’ai privilégié les chansons « d’acteur », drôles pour la plupart, celles qui racontent une histoire, celles qui posent de vrais personnages – un champion de boxe aveugle, un Lord Anglais pas très catholique, une vieille prostituée plutôt sympathique – des chansons « comme un petit film » et dans lesquelles Yves Montand lui-même introduisait beaucoup de comédie, beaucoup de fantaisie.
Dans un souci de « variété », j’ai construit le programme en alternance avec d’autres chansons qui sont restées dans nos mémoires pour des raisons différentes : pour leurs mélodies « incontournables », pour leur joie de vivre débordante, pour leur grande tendresse car, comme il le disait : « Les gens, on leur fout de la terreur, de la violence, du rock… mais dès que tu as deux violons et un bon texte, ça marche… parce que la tendresse, tu as beau rouler des mécaniques, tu en as besoin ».
Alors, sans doute, serez-vous tristes de ne pas en entendre certaines, mais je sais que vous serez heureux d’en redécouvrir d’autres… »
Touchant d’abord parce que même s’il ne nous prévenait pas, au cours du spectacle, que chanter Montand est un rêve de gosse, on le saurait rien qu’à le regarder. Il respire l’émotion de toucher à un monument qu’il admire, et il reprend ses chansons avec un respect, une bienveillance et un amour qui ne peuvent qu’ajouter une dimension supplémentaire à l’interprétation de ses textes. Ce n’est plus seulement un comédien qui s’est mis à chanter ; c’est un gamin qui prend son pied, c’est un admirateur qui remercie son idole, c’est un copain venu partager ce moment avec nous. Alors oui, on pardonne quelques notes perdues, parce qu’il nous embarque dans cet univers de music-hall dont on ne revient pas. Il faut dire qu’il en jette devant son micro sur pied, alliant aux chansons son art de comédien pour nous les faire vivre pleinement. Je ne l’attendais pas dans ce registre, et pourtant je m’interroge : pourquoi ne porte-t-il pas de réelles chaussures de claquettes, lui qui n’hésite pas à esquisser quelques pas très réussis entre deux tours de chants ? On sent encore quelques problèmes de rythme, peut-être un comédien encore en doute sur la pertinence de jouer ce spectacle là, maintenant, mais il n’est plus l’heure de douter. La matière, la nécessité, l’amour et le brin de folie sont là. Ne manque plus que la confiance. Pierre Cassignard dit qu’il vivait lui-même les interprétations de Montand « comme des petits films » – la référence me manque pour approuver ou non cette assertion, mais il est clair que c’est ce que lui nous propose. Il ne chante pas ses morceaux, il les incarne. On voit ainsi se succéder sur scène un certain monsieur Ducon, une Marie-Vison qui roule sa bosse, un cowboy du far west ou encore un Sir Godfrey d’un style des plus anglais. Et dans la salle, quelque chose se passe.
Car soudain, pour la dernière chanson, sans que personne ne se soit concerté, sans appel de la scène, toute la salle murmure Les feuilles mortes pour accompagner le comédien. Une connexion s’est établie.