- Théâtre contemporain
- Lucernaire
- Paris 6ème
Les petites rapporteuses
Les Petites Rapporteuses est un spectacle musical loufoque sur trois speakerines de l’ORTF le jour du passage à la couleur.
Ce spectacle est l’occasion de bousculer notre télévision, d’en rire, en rendant hommage à ces jeunes femmes si essentielles de la télévision de la fin des années 60. Époque d’insouciance, d’abondance et de misogynie. Heureusement les speakerines sont là pour combler le vide. Ce vide d’où peut naître l’absurde, les jeux de mots et l’humour noir. Des textes de Pierre Dac se cachent dans les échanges. Dans la bouche des speakerines, leurs mots paraissent encore plus fous.
Dans une époque où tout va si vite, où tout est connecté, que se passerait-il si tout s’arrêtait d’un seul coup ? Et si les speakerines n’étaient pas de simples pantins ?
« C'est la fin des années 60, Suzy, Catherine et Jacqueline prennent l'antenne. Distinguées, elles ont pour habitude de présenter toutes les émissions de la chaîne : de La recette du dimanche au Schmilblick. Chignons choucroute, mi-bas et talons hauts, les trois speakerines s'apprêtent à annoncer les programmes lors d'une journée bien particulière, l'arrivée de la couleur sur le petit écran. Tout bascule lorsqu'un problème technique majeur survient. »
Tournées en dérision et en bourrique, grâce aux textes décapants de Pierre Dac (sublimes !) et aux talents des formidables comédiennes-chanteuses, les postures que ces dames du petit écran se devaient de tenir nous font rire (en noir et blanc puis en couleurs bien sûr mais surtout jaune malgré tout). Le sort des femmes dans la société reflétée alors par la place qui leur était conférée à la télévision est une illustration criarde du pouvoir machiste qui était une norme même si on sait bien qu’aujourd’hui encore, malgré la prise de conscience et la lutte ardente pour l’égalité, cette misogynie qui ne dit pas son nom est toujours d’usage et court encore.
Mais au moins, ici, on en rit, de bon cœur et de plaisir. Une farandole de gags savoureux qui explosent comme des petites bulles de champagne, de chansons qui harponnent (elles chantent fichtrement bien les bougresses !), de bonne musique qui balance et de sketchs drôlissimes au choix bienvenu de textes corrosifs et abracadabrantesques.
Cerises sur le gâteau... Nous avons enfin l'explication scientifique du Schmilblick que je vous recommande d'écouter attentivement, un régal ! Et ne baissez surtout pas la garde au moment des réclames (non, on ne se lève pas pour aller boire un coup ou qu'est-ce), des petits bijoux de drôleries malignes ! Vous en conviendrez, on parie ?
Mesdemoiselles Julie Badoc, Léa Dauvergne, Lisa Garcia et leur pianiste Didier Bailly nous offrent un spectacle loufoque, ficelé façon foldingue, avec l’humour piquant qui convient. L’absurde se répand tout partout, c’est un délice. Si l’ambiance est au dérapage et aux pas de côté, le tout est calé au cordeau. L’ensemble est enjoué, l’enthousiasme communicatif.
Un spectacle musical à l’élégance légère et complice, et au charme désuet des seventies. Un fichu bon moment qui fait un bien fou et qui ne se prive pas de nous interpeller. Bien vu, bien fait et bien joué, à déguster sans modération !