- Comédie Contemporaine
- La Scala
- Paris 10ème
Le moment psychologique

- La Scala
- 13, boulevard de Strasbourg
- 75010 Paris
- Strasbourg Saint-Denis (l.4, l.8, l.9)
Paul a rendez-vous chez lui avec son ami d’enfance Pierre quand So, adjointe de Matt, arrive.
Paul ne connaît ni So ni Matt, mais elles ont pris leurs renseignements : le comportement de Paul a retenu leur attention.
Matt, une femme politique, tient à le rencontrer pour son projet qui consiste à réformer la portée et l’endroit du politique dans le monde. Paul n’a à sa connaissance pas plus à voir avec la politique que n’importe qui, et il n’est pas bien sûr de comprendre ce dont il s’agit. Ce soudain intérêt mondial n’est pas forcément déplaisant, mais il va quand même lui falloir faire une petite présentation.
« Le moment psychologique est une pièce qui, sous des airs de comédie, aborde la question du politique. Il ne s’y agit pas de l’aborder sur le mode de la satire, mais plutôt de dessiner un rêve de politique, une utopie.
Le rire est ainsi placé à un endroit singulier : les décalages comiques ne reposent pas sur la moquerie, ou le jugement – c’est un comique sans cible (sensible). L’ensemble est fondé sur une « dramaturgie de la paix », ce qui fait que les rapports entre les personnages de la pièce eux-mêmes deviennent comme la maquette de l’utopie que porte le personnage de Matt.
Les deux semaines de répétition et les deux mises en espace en public à Théâtre Ouvert nous ont renseignés sur l’orientation du travail à venir. On a ainsi pu expérimenter avec les acteurs que le texte requérait un jeu au plus proche du présent et d’un sensible non « composé » – sans quoi l’écart comique tendait à se figer, et à faire basculer la pièce du côté d’un « absurde » qui ne construit pas grand-chose, et ne permet pas d’entendre l’utopie et son caractère affirmatif. » – Alain Françon
« Paul a rendez-vous chez lui avec son ami d’enfance Pierre quand So, adjointe de Matt, arrive. Paul ne connait ni So ni Matt, mais elles ont pris leurs renseignements : le comportement de Paul a retenu leur attention. Matt, une femme politique, tient à le rencontrer pour un projet qui consiste à réformer la portée et l’endroit du politique dans le monde. Paul n’a à sa connaissance pas plus à voir avec la politique que n’importe qui, et il n’est pas bien sûr de comprendre ce dont il s’agit… »
Un spectacle comme une poursuite circulaire, infernale et drôle, du mot, de la situation et du message. Sorte de triumvirat implacable qui structure la dramaturgie de la pièce.
Les mots pris au pied de la lettre jonglent avec le sens, le contre-sens et le non-sens. Ils semblent plongés dans un puits étrange d’où jaillissent tirades loufoques, interjections habiles et traits à l’autodérision signifiante et limpide.
Les situations sont de courte portée, centrées essentiellement sur les mots dits et donnant corps aux passages entre les idées et les personnages, servant de liants aux désirs de dire et aux besoins de comprendre.
Les messages piquent le public de leurs paradoxes. Entre l’individualité des évocations du quotidien, leurs insignifiances probables et leurs importances probantes pour les personnages, et les invitations à raisonner ce qui fonde la vie collective, ce qui façonne l’Idéal Politique.
Il y a là une poétique de l’énonciation élaborée et simple à la fois, complexe et accessible avant tout, et délibérément drôle.
La mise en scène de Alain Françon sert le texte avec précision, sans appui, le laissant agir et donnant aux comédiennes et aux comédiens le soin de l’habiter et de le rendre au plus près, proche de nous, de notre sensibilité et de notre appétence à l’appropriation de ce qui est dit pour le penser.
Louis Albertosi, Pauline Belle, Rodolphe Congé, Pierre-Félix Gravière, Dominique Valadié et Claire Wauthion incarnent le texte avec une aisance habile teintée de courtoisie car chez Doutey, il semble que les personnages ne s’opposent pas, ils s’allient. Les artistes le vivent avec évidence et montrent une maitrise du corps et de la parole exemplaire pour cette partition qui repose essentiellement sur le langage. Elles et ils nous captivent par les liens qu’ils arrivent à tisser entre les personnages, d’une bienveillance sereine et intrusive. Chaque temps devient un instant essentiel, léger ou profond, souvent les deux.
Un spectacle comme une expérience théâtrale faite d’un imaginaire confronté à l’exposition d’un texte charnu, d’actions simples et congrues, et dotée d’une incarnation édifiante et toujours significative. Un très beau moment de théâtre à la singularité prégnante.