- Théâtre contemporain
- Manufacture des Abbesses
- Paris 18ème
Le Captif, l'enfant du placard

- Manufacture des Abbesses
- 7, rue Véron
- 75018 Paris
- Blanche (l.2)
Séquestré par ses parents, depuis son enfance, dans un espace réduit au strict minimum, ce n’est ni la folie ni un besoin de reconnaissance qui anime Le Captif, mais bel et bien le désir d’accéder à la maturité de l’esprit.
Seule voie possible pour sa libération, ainsi que celle d’un certain Cléo-Clara, suscitant le questionnement de son genre. Le processus psychologique de survie est en marche.
Tout élément susceptible d’aider le captif dans sa survie est assimilé, décodé. Le moindre échange avec l’extérieur est décrypté.
Lentement mais sûrement, le captif se prépare à sa sortie…
Au-delà de cette histoire terrible, la pièce traite de l’enfermement, qu’il soit volontaire ou non, et des mécanismes de résilience associés qui se déclenchent ou pas... Ne sommes-nous pas en premier lieux, tous, captif de nous-même…
Cette pièce retrace donc la dernière heure de captivité de cet enfant martyr.
Le comédien Hugo Miard présente toutes les facettes de son personnage avec une incroyable justesse, le rendant crédible et émouvant, inquiétant et attachant. Une interprétation magnifique d’un texte dense et direct.
L’écriture d’Olivier Sourisse se joue de notre imaginaire et joue avec le réalisme du quotidien pour nous raconter cette histoire sombre et captivante qui nous emporte dans les sortilèges de la mémoire, les cachettes de l’inconscient, les fantasmes aux désirs oubliés parmi les peurs.
Cléo-Clara ou Clara-Cléo est un être captif. Un endroit glauque et obscur lui sert de logis, d’abri ou de refuge, on ne sait pas. Il semble être la proie sexuelle de plaisirs offerts à une clientèle d’hommes et de femmes, réduisant à ces rencontres ses relations sociales. Une mère et un père apparaissent par moments, convoqués par leur fils-fille ou leur fille-fils. Une petite sœur qui chante, aussi.
Parents monstrueux, bourelle et bourreau de leur propre enfant ? Appuis fantasmagoriques d’un délire schizophrénique ? Que lui ont-ils fait ou lui font-ils encore ? Qui est ce captif ? Pourquoi nous touche-t-il tant ?
Sans doute l’effet cathartique de la représentation théâtrale nous pénètre jusqu’à sentir de la gêne et de l’intérêt, éprouver de la compassion et du rejet envers celui ou celle qui nous parle là, vivant devant nous des bribes de son histoire, délivrant ses doutes et ses incompréhensions, nous montrant ce qu’il ou elle ne sait pas dire, ce que nous-mêmes serions bien en peine de nommer.
Quel est cet emprisonnement ? De quoi, au-delà de qui, Cléo-Clara ou Clara-Cléo est-il ou est-elle le captif ?
L’immense trouble qui traverse ce personnage et son récit pose les questions de son identité, de son genre, de son état de conscience. On ne sait pas qui est ce captif, on ne sait plus si ce qu’il dit peut-être cru. Démence hallucinatoire d’un malade ou propos déstructurés d’une victime ? On se sait pas, on ne sait plus.
Le combat de Cléo-Clara ou de Clara-Cléo pour exister est-il un combat contre lui-même ? Un combat pour survivre ? Un combat pour nous alerter ?
La mise en scène de Frédéric Fage, à l’esthétique prononcé, accompagne le texte dans un clair-obscur permanent et une direction de jeux précise, centrée sur la palette d’émotions du personnage.
Un texte audacieux et fort. Une interprétation impressionnante et mémorable. Un spectacle déroutant et captivant.
En effet, et sous condition que l’on accepte d’être immergé dans ce monde souterrain en tout point de vue, mental et physique, la pièce aborde, avec délicatesse, parfois triste, souvent souriante, la captivité d’un enfant séquestré depuis sa tendre enfance par ses propres parents et qui, en raison de son rôle d’objet, va être en proie à un trouble d’identité sexuelle, le faisant passer, tel un équilibriste surdoué, de Cléo à Clara, sous l’œil bienveillant du Captif. C’est d’ailleurs d’autant plus troublant que le spectacle offre une note d’espoir extraordinaire à la fin.
En résumé, Le Captif, c’est une plongée saisissante à l’envers, de l’abîme vers le zénith. Une incroyable découverte théâtrale !