Critiques pour l'événement Perdues dans Stockholm
5 juil. 2014
6/10
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Au théâtre, les superstitions sont nombreuses, traces d’un univers anticlérical cependant que porteur d’une très longue tradition. Ainsi la couleur verte est considérée comme maléfique, dans le monde du spectacle (exception faite des clowns). Cette superstition aurait pour origine les dispositifs d’éclairage de scène du XIXe siècle, qui ne mettaient pas en valeur les tons verts. Si des comédiens ont trouvé la mort parce qu’ils portaient un costume vert à même la peau, on peut attribuer cela aux effets toxiques de l’oxyde de cuivre, ou du cyanure présent dans la teinture verte à une certaine époque.
On dit aussi que Molière mourut habillé de vert.
Le vert porte malheur.
Dès l’ouverture de la pièce ‘Perdues dans Stockholm’ un jeune homme se met nu et se travestit en femme enfilant une petite robe verte!
On aura compris.
Et c’est le début d’une suite de malheurs, de manque de chance, de déconvenues.
Le texte, les chansons et la mise en scène de Pierre Notte sont en tension, les comédiens, dynamiques et aiguisés.
C’est un bonheur d’assister à cette farce burlesque où un travesti tente de kidnapper une célébrité avec l’aide de sa tante afin de financer grâce à la rançon son opération de changement de sexe. Sa tante est personne témoin d’un mobilhome témoin, un pion d’une société qui ne la voit presque pas. L’otage se révèle n’être qu’une comédienne ratée, qui rêve d’être enfin un peu vue. Les aventures de ces pieds nickelés modernes nous rappelle que rien ne doit enterrer l’espoir, que ni l’absence de malice ou d’instruction empêchent l’âme humaine de fomenter des aspirations, des envies, du désir.
Leur épopée est un conte burlesque et n’est pas neutre de quelques unes de nos grandes questions de société. Entre autre : Un changement de sexe ne se résume pas à une chirurgie facturée. Un produit de consommation est aussi une créance pour son utilisateur qui passe parfois, esclave d’une ampoule ou d’un four, à son service. La formation des peuples sans être couplée à une morale n’est qu’un leurre.
Silvie Laguna emporte ses partenaires dans une pièce dynamique, joyeuse et optimiste, une comédie de comédiens.
On rit beaucoup, on ne s’ennuie jamais. Le texte et la langue s’amusent avec nous jusqu’au dernier mot de Notte.

Le thé, devient du gin car il enivre, car on ne remplace pas les plaisirs et les penchants des hommes et car aussi, peut être, il s’agissait de thé vert.