Critiques pour l'événement Les Géants de la montagne
L’auteur des Géants de la montagne, prix Nobel de littérature, décrivait son œuvre, dans une lettre à Marta Abba, comme étant « le triomphe de l’imagination » et « la tragédie de la Poésie dans la brutalité de notre monde moderne ». Avec Braunschweig, ils entretiennent la mince frontière entre réel et imaginaire. A force de jongler entre les deux notions, le spectateur se perd peu à peu et ressent un certain malaise.
Cependant, le texte met en lumière une très belle mise en abyme du théâtre dans le théâtre qui trouve son apothéose dans le dernier acte, choix délibéré de Stéphane Braunschweig puisque l’œuvre de Pirandello s’arrêtait à l’acte II avec l’arrivée terrifiante des Géants. Le metteur en scène a choisi de donner un épilogue à la pièce en nous donnant à voir la représentation de la Fable, texte que l’auteur sicilien a terminé en 1934 pour le compositeur Malipiero et devenu alors un livret d’opéra.. Ce matériau, qui a servi de base aux Géants de la montagne, conclu de façon intéressante la pièce. Néanmoins, il nous a manqué de l’envoûtement pour ce texte plutôt obscure que Stéphane Braunschweig n’a pas su placer en pleine lumière, se contentant d’un regard tamisé.
Questionnant le rapport au réel tout en glissant une allégorie du fascisme sous Mussolini, Pirandello fait surgir une pléiade de personnages en plus des Géants invisibles, symbole de ceux qui ne comprennent rien à l’art : la comtesse d’Ilse, personnage névrosé, est interprétée avec beaucoup de talent par Dominique Reymond, dont la voix grave et cassée nous envoûte. Le public ressent tout le paradoxe de sa personnalité, à la fois forte et fragile, qui veut coûte que coûte jouer la Fable de l’enfant échangé. Son époux, incarné par Pierric Plathier est touchant en homme résigné à tout faire pour garder près de lui celle qu’il aime. Claude Duparfait, en magicien Cotrone, fasciné par le rêve et l’imaginaire en étant proche de la folie, est magistral et convaincant tout comme l’est Romain Pierre dans le rôle de Spizzi, l’enfant retrouvé. Laurent Lévy tire également son épingle du jeu avec le nain Quaquèo, excellent « poissard ». Les autres acteurs livrent une prestation assez inégale et peinent à exister face aux deux rôles principaux, puissants et impressionnants. Quant aux géants du titre, ils ne se montrent jamais mais font régner la terreur et le bruit de leurs pas qui se rapprochent suffisent à nous angoisser.
Malgré une scénographie parfois intéressante, l’ennui s’installe et l’onirisme flirte avec le soporifique, bercé par un plateau tournant. L’ensemble est désarticulé, confus et peine à convaincre totalement. Le début est assez long et l’intrigue prend place dans un silence total. Le choix scénique semble peu judicieux mais est contrebalancé par une belle utilisation de la vidéo, notamment avec l’arrivée de l’Ange ou encore avec la sublime animation des pantins. Quelques longueurs se font sentir. Tout comme le texte est resté inachevé, la mise en scène nous apparaît comme non aboutie, trop lisse et souvent trop statique ne parvient pas à dynamiser l’ensemble. Nous attendions peut-être trop de cette rentrée théâtrale et du maître des lieux mais la déception se fait ressentir, bien que des points positifs se distinguent fortement, et l’emporte au final. Et si « les rêves, à notre insu, vivent en dehors de nous », nous rêvions de plus d’audace pour un si beau texte qui donne le plein pouvoir à l’imagination.
Cependant, le texte met en lumière une très belle mise en abyme du théâtre dans le théâtre qui trouve son apothéose dans le dernier acte, choix délibéré de Stéphane Braunschweig puisque l’œuvre de Pirandello s’arrêtait à l’acte II avec l’arrivée terrifiante des Géants. Le metteur en scène a choisi de donner un épilogue à la pièce en nous donnant à voir la représentation de la Fable, texte que l’auteur sicilien a terminé en 1934 pour le compositeur Malipiero et devenu alors un livret d’opéra.. Ce matériau, qui a servi de base aux Géants de la montagne, conclu de façon intéressante la pièce. Néanmoins, il nous a manqué de l’envoûtement pour ce texte plutôt obscure que Stéphane Braunschweig n’a pas su placer en pleine lumière, se contentant d’un regard tamisé.
Questionnant le rapport au réel tout en glissant une allégorie du fascisme sous Mussolini, Pirandello fait surgir une pléiade de personnages en plus des Géants invisibles, symbole de ceux qui ne comprennent rien à l’art : la comtesse d’Ilse, personnage névrosé, est interprétée avec beaucoup de talent par Dominique Reymond, dont la voix grave et cassée nous envoûte. Le public ressent tout le paradoxe de sa personnalité, à la fois forte et fragile, qui veut coûte que coûte jouer la Fable de l’enfant échangé. Son époux, incarné par Pierric Plathier est touchant en homme résigné à tout faire pour garder près de lui celle qu’il aime. Claude Duparfait, en magicien Cotrone, fasciné par le rêve et l’imaginaire en étant proche de la folie, est magistral et convaincant tout comme l’est Romain Pierre dans le rôle de Spizzi, l’enfant retrouvé. Laurent Lévy tire également son épingle du jeu avec le nain Quaquèo, excellent « poissard ». Les autres acteurs livrent une prestation assez inégale et peinent à exister face aux deux rôles principaux, puissants et impressionnants. Quant aux géants du titre, ils ne se montrent jamais mais font régner la terreur et le bruit de leurs pas qui se rapprochent suffisent à nous angoisser.
Malgré une scénographie parfois intéressante, l’ennui s’installe et l’onirisme flirte avec le soporifique, bercé par un plateau tournant. L’ensemble est désarticulé, confus et peine à convaincre totalement. Le début est assez long et l’intrigue prend place dans un silence total. Le choix scénique semble peu judicieux mais est contrebalancé par une belle utilisation de la vidéo, notamment avec l’arrivée de l’Ange ou encore avec la sublime animation des pantins. Quelques longueurs se font sentir. Tout comme le texte est resté inachevé, la mise en scène nous apparaît comme non aboutie, trop lisse et souvent trop statique ne parvient pas à dynamiser l’ensemble. Nous attendions peut-être trop de cette rentrée théâtrale et du maître des lieux mais la déception se fait ressentir, bien que des points positifs se distinguent fortement, et l’emporte au final. Et si « les rêves, à notre insu, vivent en dehors de nous », nous rêvions de plus d’audace pour un si beau texte qui donne le plein pouvoir à l’imagination.
Dans sa note d’intention, Braunschweig explicite son choix de monter Les Géants de la montagne par rapport à une lecture politique de la pièce, selon laquelle la demeure du sorcier dresserait un barrage contre les dérives fascistes de Mussolini. Pourtant, dans sa réalisation scénique, l’accent ne semble pas vraiment avoir été porté sur ce point précis.
Bien plus, la dimension mythique de l’oeuvre s’avère soulignée par la complaisance du metteur en scène à entretenir ce trouble entre réel et imaginaire jusqu’au vertige. Repère des morts-vivants, cette villa hantée ressuscite les âmes autant qu’elle meurtrit les corps. Fantomatiques, les personnages de la maison-prison se coupent du monde pour se projeter dans un hors-soi inédit, lieu de toutes les expérimentations.
Dirigeant tout de même treize comédiens, Braunschweig fait la part belle à l’espièglerie, à la démence et à la douleur. Il navigue comme un loup de mer sur deux terrains d’interprétation délicats à manœuvrer conjointement. Pas de miracle, pour proposer une version digne de ce nom, il ne faut pas se rater dans le choix de l’actrice jouant la Comtesse Isle. En élisant Dominique Reymond, Braunschweig ne pouvait guère se tromper. Névrosée monomaniaque, la protégée d’Antoine Vitez manifeste les fêlures de son personnages avec un intense magnétisme. Elle recentre les propos avec une humanité bouleversante sur le leitmotiv de la maternité contrariée. Un bijou fragile et obstiné. À ses côtés, Pierric Plathier n’a pas à rougir en époux prêt à tous les sacrifices pour rester près de son adorée. Belle présence face à une comédienne qui en impose. Enfin, Claude Duparfait régale en chamane omniscient.
Malgré quelques épanchements bavards, ces Géants de la montagne se plaisent à nous faire tourner en bourrique à travers un voyage infernal plein de charmes mystérieux et vaporeux. Une traversée entre les limbes et le paradis ardue en somme.
Bien plus, la dimension mythique de l’oeuvre s’avère soulignée par la complaisance du metteur en scène à entretenir ce trouble entre réel et imaginaire jusqu’au vertige. Repère des morts-vivants, cette villa hantée ressuscite les âmes autant qu’elle meurtrit les corps. Fantomatiques, les personnages de la maison-prison se coupent du monde pour se projeter dans un hors-soi inédit, lieu de toutes les expérimentations.
Dirigeant tout de même treize comédiens, Braunschweig fait la part belle à l’espièglerie, à la démence et à la douleur. Il navigue comme un loup de mer sur deux terrains d’interprétation délicats à manœuvrer conjointement. Pas de miracle, pour proposer une version digne de ce nom, il ne faut pas se rater dans le choix de l’actrice jouant la Comtesse Isle. En élisant Dominique Reymond, Braunschweig ne pouvait guère se tromper. Névrosée monomaniaque, la protégée d’Antoine Vitez manifeste les fêlures de son personnages avec un intense magnétisme. Elle recentre les propos avec une humanité bouleversante sur le leitmotiv de la maternité contrariée. Un bijou fragile et obstiné. À ses côtés, Pierric Plathier n’a pas à rougir en époux prêt à tous les sacrifices pour rester près de son adorée. Belle présence face à une comédienne qui en impose. Enfin, Claude Duparfait régale en chamane omniscient.
Malgré quelques épanchements bavards, ces Géants de la montagne se plaisent à nous faire tourner en bourrique à travers un voyage infernal plein de charmes mystérieux et vaporeux. Une traversée entre les limbes et le paradis ardue en somme.
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