Critiques pour l'événement Le Jeu de l'Amour et du Hasard (Calvario)
22 août 2016
8/10
88
Ce n’est pas toujours chose aisée de se distinguer théâtralement parlant lorsque l’on s’empare d’un texte tant de fois monté tel que Le jeu de l’amour et du hasard de Marivaux et pourtant, Philippe Calvario y parvient sans peine. La comédie en trois actes et en prose de Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux, représentée pour la première fois en 1730, n’a rien perdu de sa superbe et trouve ici une nouvelle vivacité.

L’histoire est assez connue mais résumons-là brièvement : Orgon espère marier sa fille Silvia à Dorante, le fils d’un de ses vieux amis. Mais la jeune fille, peu disposée au mariage, propose à son père d’observer et d’apprécier son prétendant sous le déguisement de sa servante Lisette, ignorant que Dorante a eu la même idée. Respectant les règles de la bienséance, Marivaux concocte une comédie savoureuse qui questionne l’ordre établi à grand renfort de quiproquos

Dans Le jeu de l’amour et du hasard, les codes amoureux sont bouleversés et certaines questions surgissent et remontent à la surface : l’amour est-il dicté par des lois sociales ? Quelles puissances régissent la condition amoureuse ? Philippe Calvario s’empare et s’amuse du propos de Marivaux sans pour autant dénaturer le texte. Il lui applique un petit masque de beauté, le rendant plus frais et plus jeune, bien que la modernité de la pièce n’ait jamais été remise en cause. Dans une mise en scène fantaisiste pleinement au service du texte pour le mettre en valeur et nous le faire entendre comme une nouvelle découverte, il peut s’appuyer sur une distribution vive et énergique qui rend l’ensemble particulièrement plaisant.

Anne Bouvier est étonnante en soubrette survoltée. Elle est une Lisette pleine de vitalité et espiègle à souhait dont l’entrée avec une traîne sur la tête restera mémorable, au son de Je t’aime… moi non plus. Elle provoque une vague de bonne humeur à chacune de ses apparitions tandis que Nicolas Chapin fait des étincelles en valet grossier dès la fracassante entrée d’Arlequin, un rôle haut en couleurs dont les répliques se dégustent comme une friandise. Son parler trivial ne cesse de nous faire rire. Certes, ces valets sont caricaturaux et souvent dans l’excès mais totalement à propos. Marie-Pierre Nouveau est une Silvia bien sous tout rapport. Elle parvient à trouver les justes émotions et à nous toucher. Elle est extrêmement convaincante et force l’empathie, notamment dans les scènes qu’elle partage avec Philippe Calvario qui campe un majestueux Dorante dont le bouleversement des sentiments nous atteint avec sincérité. A cela, ajoutons Régis Laroche, très juste en Orgon, et Jérémie Bédrune qui interprète Mario, légèrement en retrait mais qui parvient néanmoins à tirer son épingle du jeu. L’énergie, la fougue, et l’enthousiasme de chacun apportent un vent de fraîcheur sur le plateau et nous réjouissent pleinement. Quel plaisir de voir Anne Bouvier se déplacer avec peine dans sa robe de comtesse feinte avec son derrière de grande envergure. Car si l’habit ne fait pas le moine et que se déguiser ne change ni un visage ni un cœur, il n’en demeure que la théâtralité est poussée à son paroxysme pour notre plus grand plaisir.

De jeux de dupes en jeux de séduction, Philippe Calvario s’amuse à faire jouer à ses acteurs des rôles qui ne sont pas les leurs et à accentuer les reliefs de tous les ressorts comiques des mots de l’auteur. Le philosophe Socrate, dont la formule « Connais-toi toi-même » s’impose à notre esprit, aurait eu matière à débattre. Tandis que Gainsbourg savait parler d’amour en chansons et que Marivaux savait le faire en prose, Philippe Calvario réussit le mariage idéal entre les genres en affrontant l’amour et la raison. Ce classique est monté avec pertinence et audace. Le texte est toujours aussi limpide et nous offre du théâtre dans toute sa splendeur. Modernité, humour, burlesque, quiproquos… rien ne manque à l’appel dans cette pièce dont le grand sens de la théâtralité a su être parfaitement mis en valeur.
26 juil. 2015
6/10
213
Ce spectacle est indéniablement très réjouissant !

La langue est belle et les comédiens ont tous beaucoup de talent : Lisette et Arlequin sont drôles, impertinents et fripouilles à souhait alors que Silvia et Dorante font preuve d'une bien jolie sensibilité.

Le décor et la musique m'ont également beaucoup plu.

Dommage qu'à certains moments le spectacle tombe un peu dans la vulgarité.
5 juil. 2015
8/10
249
Une belle adaptation très moderne !

La mise en scène, la musique, le jeu des acteurs donnent de l'énergie à cette comédie de Marivaux tout en conservant son esprit.

Un dépoussiérage réussi, à ne pas manquer.
27 juin 2015
8/10
301
Une très belle mise en scène qui dépoussière complètement Marivaux !

Les comédiens sont parfaits et la bande son accompagne brillamment le texte.

Un petit bémol pour les scènes un peu trop grivoises entre les valets, mais le reste est vraiment de qualité.
25 juin 2015
8/10
267
Un pièce moderne et dynamique, fidèle au style de Philippe Calvario qui excelle encore une fois dans un rôle d'amoureux transit :-) (comme on avait pu le voir dans Marie Tudor).

La pièce de Marivaux n'a pas vieilli (contrairement à d'autres critiques, je ne trouve pas que ce soient des pièces qui vieillissent mal même quand elles restent jouées dans la simplicité), et Calvario en a fait un joli bijou de divertissement. Sur une bande-son de Gainsbourg, les personnages de Marivaux ne prennent pas une ride et le comique de situation, typique, reflète bien les moeurs de l'époque. En gardant les codes de la bourgeoisie, mais tout en adaptant une partie du texte (enfin je pense, en fait je ne l'ai pas lu...), la pièce a des airs de XVIII et de XXIème siècle.

Certains diront que mettre du Gainsbourg dans un Marivaux, c'est un peu comme mettre du Murakami à Versailles. Mais je fais partie des gens qui aiment ces adaptations pleines d'originalité, alors go à la Pépinière !
7 juin 2015
6/10
176
Les pièces de Marivaux vieillissent mal, en général.
Celle-ci n'aurait pas échappé à la règle si elle n'avait pas été redynamisée !

Les costumes d'époque sont extravagants, le choix des chansons contemporaines donne du punch à la pièce et une bonne mise en scène rendent cette pièce agréable à voir.

Les acteurs jouent bien et on remercie la clairvoyance du metteur en scène d'avoir donné autant de fantaisies et d'humour aux deux valets devenus maitres. Car c'est bien eux qui portent la pièce, par leur humour et leurs singularités. Les autres acteurs sont un petit peu plus fades, voire ennuyants.

Une pièce agréable mais dans laquelle nous n'entrons pas complétement. C'est un peu difficile de rendre compte du scandale que donnait lieu à l'époque de Marivaux, un échange de ce type (maitre-valet) et nous rend donc cette pièce anachronique.
Une pièce sympathique mais les textes de Marivaux sont bien trop loin des pensées et problèmes de notre époque. A voir pour découvrir ou redécouvrir un classique redynamisé !
29 mai 2015
7/10
119
Une comédie du 18ème siècle ne vieillit pas toujours bien mais en la dynamisant avec une mise en scène et en musique moderne, on arrive à un résultat tout à fait plaisant.

C’est donc une comédie sur l’amour et même si on connait le sujet, on ne s’ennuie pas car dès la première scène, on comprend que les domestiques vont ébouriffer leurs maitres et dynamiter la farce prévue.

Les deux comédiens incarnant les domestiques font exploser les convenances en surjouant un peu mais c’est pour le bonheur des spectateurs. Les deux comédiens qui incarnent le couple de futurs promis jouent, par contre, tout en retenue et délicatesse, offrant ainsi un contraste saisissant et rafraichissant dans la farce qui se déroule sous nos yeux.

Une soirée agréable donc.