Orestie

Orestie
De Romeo Castellucci, Eschyle
  • En tournée dans toute la France
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Ramener sur scène l’animal.

Hérauts d’un théâtre «émotionnel avant d’être culturel», Romeo Castellucci et sa compagnie retrouvent la scène de l’Odéon, qui avait accueilli avec le Festival d’Automne six de leurs travaux entre 2000 et 2006. Cette fois-ci, ce sera pour revenir à l’une des recherches fondatrices de la Socìetas Raffaello Sanzio : vingt ans après la création d’une Orestie qu’il avait sous-titrée «une comédie organique ?», Castellucci reprend son dialogue avec Eschyle afin d’explorer, à travers l’œuvre du premier des Tragiques, les fondements occidentaux de la représentation.

Depuis 1981, la Socìetas Raffaello Sanzio poursuit un travail d’une originalité sans équivalent, éprouvant, interrogeant, ébranlant la plupart des distinctions établies sur lesquelles reposent traditionnellement la production et la réception d’œuvres théâtrales.

 

Certaines scènes de ce spectacle peuvent heurter la sensibilité des plus jeunes, il est déconseillé aux moins de 16 ans

La critique de la rédaction : 5/10. Orestie s'adresse aux initiés un peu fous. On ne va pas voir une pièce du plasticien Roméo Castellucci par hasard. Son style est si peu accessible qu'il pourrait en traumatiser plus d'un. Il nous noie dans l'hermétisme et donne souvent l'impression de se moquer de nous.

Ce n'est pas une pièce de théâtre mais plutôt une performance artistique sans dialogues, un enchaînement d'actions dont il est ardu de comprendre le sens.

La première partie du spectacle est morbide, désagréable, met mal à l'aise à cause de l'obscurité, du sang, des cris, de la nudité. Elle nous dégoûte par les images marquantes qu'elle nous fait subir, par le son très fort à nous rendre sourd. Nous nous demandons si Castellucci n'a pas souhaité nous envoyer tout droit en enfer... La scène que nous avons trouvé la plus éprouvante est celle où une obèse nue est enfermée dans une cage en verre et gueule à n'en plus finir.

L'entracte est salvateur car nous sommes à bout au moment où les lumières se rallument. Alors qu'est-ce qui nous pousse à ne pas sécher la deuxième partie ? Notre curiosité. Car nous voulons connaître le destin de ces monstres qui se torturent entre eux, découvrir quelles seront les autres idées farfelues, les prochains animaux sur scène. La deuxième partie se passe dans un univers plus clair mais n'en demeure pas moins gênante, violente et d'une lenteur mortelle.

Nous sortons contents d'avoir assisté à un spectacle si hors norme, moqueurs de tant d'absurdité et déçus de ne pas avoir mieux compris la pièce, ses messages et ses nombreuses références... Tout en ayant subi de plein fouet les sensations négatives recherchées.

Note rapide
4,7/10
pour 10 notes et 6 critiques
4 critiques
Note de 1 à 3
40%
2 critiques
Note de 4 à 7
60%
0 critique
Note de 8 à 10
0%
Meilleures critiques
Meilleure critique positive
9 déc. 2015
7,5/10
234
L’adaptation de la trilogie d’Eschyle par Roméo Castellucci vient de souffler sa vingtième bougie.

S’il est vrai que le plasticien, adulé par certains et décrié par d’autres, a beaucoup évolué par son travail de recherche, il mettait déjà mal à l’aise...
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Meilleure critique négative
15 déc. 2015
3/10
270
Orestie a été une souffrance pour moi.

Il faut le dire, j'ai une culture parcellaire en littérature et mythes antiques. Je ne connais que vaguement Agamemnon, mais de là à remonter les fils d'une histoire, identifier des personnages et les remettre...
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Toutes les critiques
2 juil. 2016
5/10
69
La force de ce spectacle tient à l’agrafage de transgressions qui ne laissent guère en repos le spectateur.

Leur cumul produit cet effet de sidération typique de l’esprit empêtré dans une contradiction (car la transgression nie et affirme en même temps). Opter, de manière réactionnelle, défensive, pour l’adhésion extatique (« C’est génial ! Quel grand artiste ! ») ou pour le rejet (« Quelle honte ! Quel scandale ! »), c’est, dans les deux cas, tenter de briser l’emprise de la contradiction.

Mais c’est aussi un indice de réussite : la division du public entre pour et contre l’œuvre, pourvu qu’elle soit assez passionnelle, est l’assurance que les spectateurs sont impressionnés et vont contribuer à sa notoriété.

Ces transgressions fonctionnent comme signes de distinction. La production du « grand artiste » par le culot, l’audace, mais dans l’obéissance à l’impératif de distinction. Si les signes du « contemporain » sont nombreux, chaque transgression est mise au compte de l’art comme élévation absolument libre au-dessus du banal. Castellucci navigue dans un champ concurrentiel et dans une pratique structurée par la volonté de paraître exceptionnel.
28 mai 2016
0,5/10
82
Les acteurs font le job !

J'ai détesté l'utilisation des animaux. Aucun intérêt et ça a été pour moi une torture de voir ce bouc pendu... horrible !

La plupart des animaux n'apportent aucune plus value à la pièce.

Je ne recommande pas. :(
16 déc. 2015
0,5/10
184
Il n'y a aucun sens à trouver ! La pièce ne s'adresse pas à des "initiés un peu fous"... Elle ne s'adresse à personne, c'est une imposture : Castellucci se fait plaisir et prend le public en otage — qui, soit dit en passant, ne se laisse heureusement pas toujours faire et n'hésite pas à déserter la salle pendant la performance et surtout à l'entracte.

Même la plus naïve et maladroite des troupes amateur nous proposerait un spectacle plus digne de ce nom.
L'Orestie de Castellucci est non seulement laide, inesthétique, bruyante, choquante 'ad nauseam' et dépourvue de sens, mais surtout, elle est d'une bêtise et d'une prétention inouïes ! Il faut lire le texte du metteur en scène reproduit dans le livret remis aux spectateurs à l'entrée du spectacle.
Pour commencer, Monsieur C. aspire de créer rien moins qu'une "Théorie du Tragique" (avec majuscules s'il vous plaît !) qu'il explicite pompeusement de la sorte : "le mythe (...) comme une machine sortie de l'esprit, met en scène les dysfonctionnements de l’être dans un cadre humain de ruine artificielle"... Vous comprenez quelque chose ? Le mythe, une "machine" ? "Un cadre humain de ruine artificielle" ? Monsieur C. ne comprend même pas ce qu'il dit en encore moins ce qu'il fait. Et ce serait au valeureux spectateur d'en décrypter le sens ? Non, il n'y a aucun sens à trouver.
Continuons : "Le théâtre grec met en place la scène de l'erreur". Soit. Et il poursuit aussitôt en ces termes : "C'est toujours une question d'erreur de lieu". Ah bon ? Alors, là, je ne suis plus. Les tragédies d'Oedipe, d'Antigone, d'Electre, d'Oreste, etc. ne sont, au final, qu'un problème de "lieu" ? Grotesque ! A moins qu'il ne parle ici du pauvre spectateur ahuri qui, en venant à l'Odéon ce soir-là, s'est bien trompé de "lieu", de "scène", et a fait une grossière "erreur" en se déplaçant ! Car avec Monsieur C., nous n'assistons pas à "la scène de l'erreur", mais plutôt à "la scène de l'horreur".
D'autres phrases incongrues parsèment son petit laïus : il nous parle de "douleurs (...) prises aux deux extrémités de la même chaîne morale de l'être". De quoi s'agit-il ? Peut-il expliquer ce qu'il entend par "chaîne morale" ? Ah, le cuistre ! Bien sûr que non, il en est incapable !
Il balance des mots sans en peser le sens, pour juste faire du sensationnel. De même que sur scène, il balance des objets, des corps, des animaux, des effets de lumière et des bruitages sans liens entre eux : c'est bien cette discontinuité, cette absence de vision d'ensemble qui crée une rupture du sens. C'est juste insensé. Les scènes choquantes pouvant heurter la sensibilité des moins de 16 ans (nous sommes avertis d'entrée) n'ont aucune profondeur éthique ou esthétique : elles sont gratuites, non motivées et lourdingues (les pauvres acteurs pataugent dans des litres de faux sang qui ne rendent dupe personne). Or, comme chez beaucoup d'artistes contemporains, l'insolence gratuite fait perdre toute force à l'oeuvre. N'avoir d'autre but que de vouloir déplaire, scandaliser ou commotionner le spectateur ne mène pas très loin. En plus de manquer d'ambition, ce type de provocation autotélique annihile l'oeuvre, la détruit dans l'oeuf. C'est une mécanique qui s'épuise toute seule et qui lasse très vite.
Mais le Cuistre s'obstine : scène après scène, il en rajoute. Plus c'est insoutenable, mieux c'est, croit-il !

C'est une sorte de surenchère massive, dépourvue de subtilité et de second degré. Et le rythme manque. Les scènes sont longues, trop longues et usent le spectateur. Ce Monsieur C. n'a pas le sens du rythme, pas plus qu'il ne sait diriger des acteurs. Du reste, les pauvres baladins ne semblent guère l'intéresser : ils n'ont pas de visage -- la plupart sont masqués ou dans l'ombre --, ils n'ont pas d'expression, ni même de voix (ils parlent à travers un micro, de sorte qu'on les confondrait avec une voix off), ils sont réduits à leurs corps. Monsieur C. l'avoue d'ailleurs : "le théâtre antique et moderne que je respecte est inhumain". L'acteur n'est plus un acteur, pas même un mime ou un histrion, pas même un humain, il n'est plus qu'un corps en mouvement, un amas de chair. Mais l'exposition brute de la chair et de la nudité ne suffit pas créer de l'"organique". Ce parti pris est bien naïf. En effet, il est bien des pièces ou des films où beaucoup de vêtements, de voiles, et très peu de chair découverte sont déployés et s'avèrent être bien plus efficaces pour faire naître un certain érotisme ou un sentiment de crudité organique chez le spectateur. Ici, cela ne fonctionne pas. C'est juste de l'exhibitionnisme ; c'est le zoo. Car de toute évidence, Monsieur C. ne manie pas la délicatesse et l'art de la nuance.

De même dans ses idées ; ce n'est rien moins que discours pédant et confus : avez-vous déjà vu une "lumière amniotique" ? Éprouvez-vous la "puissance d'engendrer qui se développe de façon atomique" ? Connaissez-vous la "Gleichgewicht" d'Hölderlin à la sauce Castellucci, à savoir cette "perte de différence, dont la mise en scène est le vrai motif de la tragédie, donc chaque droit semble contrebalancer celui de l'autre d'une façon parfaitement égale" ? Alors, là, vous pouvez pouffer de rire… la phrase ne veut rien dire, même grammaticalement. Et celle-ci n'est pas mieux : "Êtres humains et animaux portent, littéralement, ce qu'il veulent dire avant d'ouvrir la bouche, de telle sorte que le corps soit un passage de sortie et de résolution de l'écriture organique". Ha ha ha !
J'aime bien aussi cet étalage de pathos benêt : "chaque homme qui souffre est viande 'de boucherie'". De l'esbroufe, rien que de l'esbroufe.
Sans compter certaines absurdités : mélanger "Alice aux pays des merveilles" et "Iphigénie"... Cela donne : "Iphigénie rencontra un lapin qui avait une montre a gousset et elle le suivit et tomba dans un puits..."
Ce détournement stupide d'Eschyle et de Lewis Carol ne signifie rien ! C'est juste pesant et idiot.
Et qu'on ne nous dise pas que c'est stimulant intellectuellement : c'est d'une bêtise crasse. A propos de bêtes, justement, on se demande quel est l'intérêt de faire monter sur scène deux chevaux, qui ne restent pas plus d'une minute en scène et qu'on voit à peine dans l'obscurité, puis qui repartent ? Juste pour faire du spectaculaire ? Sans parler des autres animaux qui viennent ensuite, chèvre, singes... la ménagerie à l'Odéon. Le spectateur a de l'imagination, pourtant, et M. Cuistre semble l'oublier : il est non seulement inutile de faire venir de vrais animaux sur scène mais surtout contre-productif. Ils transforment la scène en zoo et les comédiens en bêtes de foire. Ridicule.
C'est la même logique gratuite du petit garçon qui veut jouer avec ses joujoux, les exhibe et les mélange n'importe comment : quel rapport entre l'univers sado-masochiste et "Alice au pays des merveilles" ? Entre Agamemnon et un lapin narrateur ? Entre une femme obèse enfermée dans une cage en verre et un acteur trisomique couronné ? Entre la vengeance de Clytemnestre à la voix d'homme et un décor industriel gris et froid rehaussé d'une épouvantable bande-son à faire exploser les tympans ? ... Aucun, bien sûr ! Et je n'ose même pas parler du texte d'Eschyle qu'on peine à retrouver, qui a été tronçonné, déchiqueté, massacré et mélangé à ses citations de Bacon, de Carol ou de Picasso, et même parfois ponctué de "Va fa enculo"... (très élégant!). Ma liste des absurdités pourrait s'allonger tant et plus et démontre la prétention affichée d'un metteur en scène idiot qui ne comprend rien aux symboles qu'il manipule en faisant étalage d'un immense foutoir...

Je n'ose même pas dire "joyeux bordel", car il n'y a rien de "joyeux". On aimerait rire devant tant de stupidités, mais on n'y arrive même pas. Même le spectateur le plus curieux, le plus ouvert d'esprit, le plus averti ne trouverait aucun nectar à tirer de cette infâme performance : ni plaisir scénographique, ni plaisir du texte, ni plaisir dramatique.
Pourtant, je suis d'avis que les grandes oeuvres, qu'elles soient musicales, littéraires, théâtrales, picturales ou autres, ont pour dessein d'élever le spectateur, l'auditeur ou le regardeur. L'élever esthétiquement, intellectuellement ou émotionnellement. Point de tout cela ici : j'en ressors avec de la merde dans les yeux et dans les oreilles ; je ne connaissais rien à la trilogie de l'Orestie et j'espérais que cette pièce allait m'éclairer et me rendre plus intelligente, plus cultivée ; j'espérais qu'elle allait me "plaire" et m"instruire" comme l'auraient voulu un Horace ou un Boileau... mais il n'en fut rien. Je n'ai rien compris, rien appris de la tragédie d'Eschyle. L'émotion, quant à elle, fut absente : je suis restée de marbre, je n'ai ni ri, ni pleuré, je n'ai ressenti ni "crainte" ni "pitié" comme l'auraient sans doute souhaité un Aristote ou un Racine.

Les outrances de M. Cuistre ne m'ont même pas outragée : j'ai seulement éprouvé un ennui profond et le sentiment d'avoir perdu mon temps.
J'ai aussi ressenti un profond mépris pour tous ces soi-disant artistes qui se croient malins mais qui, dans le fond, manquent absolument de culture, de générosité et de bienséance ; qui n'ont rien à donner mais juste à exhiber leurs enfantillages narcissiques devant un public trop compréhensif, patient et pourtant malmené. Je n'ai que du dédain pour ces "artistoïdes" irrévérencieux qui usurpent leur titre et ne font que dégrader la condition humaine au lieu de l'élever. Monsieur C. se targue de ne s'intéresser qu'à la tradition théâtrale qui le lie au "pessimisme anthropologique" et il ne croit pas si bien dire : c'est en voyant une pièce de Monsieur C. que je deviens pessimiste quant au sort de notre humanité !
On pardonnerait pourtant à Monsieur C. s'il avait l'humilité de l'artiste vrai et le sens du repentir : cette oeuvre serait une erreur de jeunesse, réalisée en 1995, encore tâtonnante, bourrée de maladresses et d'inepties. Soit. Mais Monsieur C. s'entête : 20 ans après il est fier de la remonter et de la remontrer à nouveau, telle quelle, sans le moindre souci de s'amender ! Et là, on ne pardonne plus.
15 déc. 2015
3/10
270
Orestie a été une souffrance pour moi.

Il faut le dire, j'ai une culture parcellaire en littérature et mythes antiques. Je ne connais que vaguement Agamemnon, mais de là à remonter les fils d'une histoire, identifier des personnages et les remettre dans un contexte. C'était bien trop ambitieux de ma part.

En sachant cela, je n'ai pu reconnaître les personnages et même s'ils étaient nommés, savoir l'enjeu de leur venue. En somme je n'ai pas compris grand chose.

Je n'ai pas non plus compris la mise en scène brutale et excessive. La première partie est clairement noire et rouge par ses vices, par son sang, par cette musique qui arrive à vous faire pleurer, à vous tordre de douleur et qui touche votre âme. Gênant d'être dans cette position de voyeur malsain.

La seconde partie était blanche, faisant l'éloge de la lenteur. Cette pièce ne donne aucun répit de la brutalité des sons aux mornes silences on est face à ce qu'il y a de pire en nous. La chèvre morte, les animaux vivants mais effrayés. Tout cela induit un énorme malaise.

Quand on y assiste, on a juste envie de fuir.
12 déc. 2015
3/10
198
Le Théâtre de l’Odéon se métamorphose en zoo à l’occasion de la L’Orestie revisitée par Castellucci. Dresseur d’animaux en tout genre, le plasticien italien conclut avec cette pièce de jeunesse le portrait que lui consacre le Festival d’Automne.

Certains voient dans cette démarche de retour à l’origine une forme d’« humilité », d’autres de la paresse tout simplement. Force est de constater qu’en vingt ans, l’art de la mise en scène a eu le temps d’évoluer et que cette « comédie organique » a mal vieilli. Entre un kitsch sanguinolent et un goût pour la provocation morbide, on assiste peinés à une représentation trop hermétique pour susciter un réel engouement, malgré quelques images édifiantes.

Dans L’Orestie, tout tourne autour de la famille et du sang : aidée de son amant Égisthe, Clytemnestre fomente un assassinat contre son mari Agamemnon suite au sacrifice de sa fille Iphigénie. Mais ses autres enfants, Électre et Oreste ne l’entendent pas de cette oreille et tuent à leur tour leur mère en guise de représailles. Ces meurtres en poupées russes dessinent le portrait d’une micro-cellule minée par la vengeance et la mésentente familiale. Une histoire d’horreur glaçante qui a hanté le jeune Romeo Castellucci à sa création en 1995…

Avec L’Orestie, Castellucci convoque un galerie de monstres effrayants : Clytemnestre est une obèse informe à la voix caverneuse tout droit sortie de L’Exorciste ; Agamemnon un trisomique joueur et touchant et le Sphinx se retrouve incarné par un manchot. Dans cette fête foraine macabre où les marginaux trônent comme des rois hallucinés, le dramaturge laisse libre cours à ses fantasmes les plus débridés. À commencer par un imaginaire SM où plaisir et souffrance fusionnent dans cette famille de tarés. Coups de fouets voluptueux, cage de verre, jockstrap en cuir… Bref, si vous aimez la cravache, vous en aurez pour votre argent. Tout respire ici le sexe malsain et le public se retrouve à la fois dans la position du voyeur gêné mais aussi dans celui du spectateur fasciné par cette débauche de bondage.

L’autre obsession de Castellucci pourrait se résumer par le « vieux bestiaire cérébral ». Cette expression du poète Bonnefoy s’applique à merveille au plateau transformé en arche de Romeo. En berger convaincu, le metteur en scène installe sa ménagerie, mêlant chevaux, ânes voire singes. L’utilisation de ces pauvres bêtes parait un peu accessoire dans la mesure où il s’agirait d’une pure illustration. Pourtant, comment ne pas dresser un parallèle entre les instincts bestiaux des personnages mythologiques, régis par leurs pulsions sexuelles et leur soif de vengeance et ces animaux ? Cependant, on ne peut pas dire qu’ils soient vraiment réputés pour leur méchanceté… Une façon de signifier que la bête est plus intelligente que l’homme ? La carcasse de chèvre exhibée complaisamment lors de l’acte II renvoie elle au double souffle de mort et vie qui irrigue le spectacle. Cet épisode démesurément étiré pointe du doigt la grande faiblesse de L’Orestie : un univers de signes à l’interprétation tellement ouverte qu’il en devient paradoxalement hermétique.

Cette sensation se révèle confirmée par l’animal-totem de la pièce, à savoir le lapin : il désigne à la fois le Coryphée (sous des traits très inquiétants) et renvoie aussi au lapin de Lewis Carroll. Castellucci n’hésite d’ailleurs pas à insérer des extraits d’Alice au pays des merveilles juste avant l’entracte. Et bouquet final, de petits lapins en plâtre se font allègrement exploser sur scène. Quel sens donner à cet animal et quel pont établir entre la tragédie et le lapin ? Animal de la folie, de la libido ? On se creuse en vain les méninges à tenter de trouver des fils de sens dans une énigme tirée par les cheveux.

En mêlant l’organique du sang et la mécanique de métal de l’industrie ; en fondant grotesque (ce pauvre Oreste en Pierrot lunaire apparaît bien inoffensif) et tragique, fantastique et sado-masochisme, Castellucci orchestre un pot-pourri sensitif bien difficile à appréhender. Cette effusion d’hémoglobine, ces cris de porc qu’on égorge ou cette méditation autour de cadavres laissent perplexes, une fois passé le choc initial.
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Notes détaillées (pour les plus courageux)
Texte
Jeu des acteurs
Rire
Intérêt intellectuel
Mise en scène et décor