Le projet Poutine

J'allais voir cette pièce pour plusieurs raisons. La première, par rapport au souvenir que j'avais de la pièce interprétée par Mireille Perrier à la maison des Métallos sur Anna Politkovskaïa, la seconde pour l'excellente critique du Canard Enchaînée, la troisième pour en apprendre plus sur le personne Poutine.

Je suis rentrée dans la pièce. Mon mari pas, à cause de l'acteur interprétant Poutine et le ton monocorde adopté par les deux protagonistes quelque soit le sujet de conversation abordé. Il a trouvé son interprétation caricaturale et cela l'a beaucoup gêné.

Moi au contraire, je suis rentrée dedans et j'ai appris beaucoup de choses sur Poutine et son accession au pouvoir suprême ainsi que sur la vie quotidienne en Russie et l'oppression dont peuvent être victimes certains et c'est ce que j'attendais. Mention particulière pour l'actrice Nathalie Mann qui est formidable dans son rôle. La construction de la pièce, étayée de nombreux extraits vidéo, la documentation du sujet, on sent que l'acteur principal qui est également l'auteur de la pièce, a voulu apporter le plus d'informations possibles au public.

J'ai beaucoup aimé. Mon mari pas.

Un synopsis simple : Vladimir Vladorovich Poutine reçoit dans son bureau une opposante au régime qu'il a très bien connue 15 ans plus tôt.

La pièce est une fiction réaliste et documentée. Le décor est simple et le dialogue intense qui constitue la pièce est seulement entrecoupé d'images d'archives récentes concernant la Russie. Certaines sont parfois très dures lorsqu'elles mettent en scène les exactions de la police et de l'armée russe.

On l'aura assez vite compris, la pièce est à charge sur ce qu'il convient par force démonstration d'appeler le système ou projet Poutine. Un système dictatorial moderne et implacable, qui nous est rappelé et illustré tout au long de la pièce à travers souvenirs communs, accusations de l'opposante ou encore confessions de Poutine.

J'ai aimé la pièce, son sujet austère et dur est passionnant. Je peux comprendre qu'on ne goûte guère la charge à sens unique, entrecoupée de quelques piques cyniques sur la prétention occidentale à illustrer le bien et à faire de Poutine un méchant absolu. Mais force est de constater que le personnage n'est pas le démocrate dont pourrait rêver un pays qui a tant souffert et fait souffrir.

Au-delà de l'intérêt du sujet, ce dernier est très bien servi par le jeu et la diction des acteurs. J'ai vu la pièce à 19h30 en semaine dans une salle très calme (peu remplie plus exactement) et ce fut un vrai bon moment de théâtre, parfois poignant et parfois drôle, au second degré évidemment.
Bref, je conseille.

Cette pièce aurait pu être extraordinaire mais malheureusement elle n'a pu eu l'effet escompté. Je m'attendais à travers la critique de Poutine, une critique très forte de nos sociétés occidentales. A quoi bon critiquer Poutine en long, en large et en travers, alors que notre société occidentale lui crache dessus la plupart du temps ?

Il n'y a ici qu'une accusation, bien documentée c'est sûr (cependant je n'ai pas appris grand chose par rapport à ce que j'ai lu dans les journaux/internet), mais pas très originale. Alors oui, parfois, quelques remarques par Hugues Leforestier, jouant le rôle de Poutine, condamnent nos démocraties et nos politiques, mais elles sont survolées par rapport 1001 accusations de la procureur générale.

Le seul grand point positif de cette pièce réside selon moi dans l'actrice, Nathalie Mann, dont le charisme est évident.

Que dire ? Déjà, ce n'est pas une comédie mais plutôt un drame de notre histoire contemporaine.

L'ascension au pouvoir d'un homme très bien documenté et les différents scénarii par lesquels il pourrait envisager sa fin de carrière...

Seulement on a du mal à suivre, car ça manque cruellement de rythme et donc ce qui aurait pu être un succès historique ne sera qu'une pièce parmi d'autres.

Nathalie Mann a toujours une voix magnifiquement chaude.