- Exposition
- Musée du Louvre
- Paris 1er
Expo Hubert Robert
Hubert Robert, ce peintre visionnaire, trop méconnu du grand public.
Le musée du Louvre rend hommage à l’un des plus brillants artisans de sa création, artiste de premier plan au talent visionnaire. Bien plus que le peintre de ruines et de paysages dont la postérité a gardé l’image, Hubert Robert fut l’un des plus grands créateurs d’imaginaire poétique du 18e siècle.
Véritable homme des Lumières, il entreprit un remarquable itinéraire d’artiste qui le conduisit de Rome jusqu’à la cour de France dont il réalisa certains des plus spectaculaires décors. Mémorialiste de Paris et de l’histoire tumultueuse de la Révolution française, Hubert Robert acheva sa brillante carrière en conservateur attentif et engagé du tout récent Muséum central des arts, le futur musée du Louvre. Cet artiste à l’oeuvre tout à la fois éclectique et profondément cohérente embrassa les genres distincts du paysage poétique, des caprices urbains et architecturaux, des études archéologiques, et il entreprit des réalisations, remarquables et novatrices, dans le domaine des jardins paysagers ou des décors palatiaux.
Cette dimension est au coeur de l’exposition monographique – la première depuis 1933 – que le musée du Louvre en association avec la National Gallery of Art de Washington a décidé de lui consacrer. Est ainsi réuni un ensemble exceptionnel et varié de 140 oeuvres (dessins, peintures, gravures, peintures monumentales), issues des plus grands fonds patrimoniaux français et étrangers.
Je retrouve dans ses peintures une émotion comparable à celle que j'éprouve face aux vraies vieilles pierres. Il sait rendre avec talent la couleur, la texture, la photo que l'on perçoit avec la campagne ou l'étendue d'eau en arrière plan. Car Hubert Robert adore les ruines, les antiques, les arcades (des ponts détruits, pas détruits, vrais ou idéalisés).
Il ajoute une lumière, une idéalisation et une mélancolie qui enchantent. On aimerait être en compagnie de Mary Poppins qui d'un coup de talon nous fait entrer dans les tableaux. Mais lequel choisir ?!
La salle des grandes toiles (la première du moins) est une merveilleuse surprise, avec une interprétation, d'après le philosophe Edmund Burke, du beau et de sublime, sortant des critères classiques. On peut trouver de la beauté dans des montagnes dangereuses, et même dans un incendie. "L'incendie de Rome" est à cet égard fantastique, dans ses couleurs flamboyantes et ses dimensions impressionnantes.
L'exposition nous montre également Hubert Robert et Paris / et la Révolution / et le Louvre / et les jardins (car il a aidé à en aménager certains notamment à Versailles) / et le mobilier (il a dessiné celui de la laiterie de Rambouillet), etc.
Et le personnage est sympathique : connu pour être spirituel, bienveillant, bon vivant, décontracté avec sa chemise ouverte. Emprisonné sous la Révolution, il n'en finira pas moins conservateur au Louvre. Belle carrière.
Belle expo. Plus que ce week-end !
Hubert Robert doit sa renommée principalement à une seule toile, reproduite dans tous les manuels d'histoire : "La Bastille dans les premiers jours de sa démolition".
C'est en effet cette oeuvre, représentant très en contre plongée le symbole de l'Ancien Régime, qui symbolise bien souvent ce peintre.
Et pourtant....
Dès que vous pénétrerez sous le Hall Napoléon du Louvre, comme moi, vous serez saisis dans un premier temps par la puissance des oeuvres graphiques de Robert : dessins à la plume, sanguines, gravures, lavis d'encre brune, eaux-fortes, etc...
Un geste sûr, un talent à placer ses personnages au sein de ruines romaines ou de paysages alentours (il a séjourné plusieurs années dans la capitale romaine, en compagnie d'une certain Fragonard), un sens affirmé de la perspective architecturale, une capacité à saisir l'instant présent, avec ses mille et une anecdotes de la vie courante, tous ces talents émeuvent : ce sont des petites scènes de genre pittoresques de la vie quotidienne qui nous sont présentées et qui nous ravissent par leur apparente simplicité et fraîcheur.
Puis, viennent les grandes toiles.
Hubert Robert sait représenter comme personne les monuments, les ruines, qu'il magnifie grâce à sa capacité à les draper d'une lumière souvent issue d'un crépuscule, ou bien d'une aube naissante.
Bien souvent, la source de cette lumière est située au "fond" du tableau : elle vient vous frapper en pleine figure, magnifiant ainsi le sujet. Votre oeil est attiré par cette source lumineuse, et vous êtes invités à vous engouffrer dans la toile, en suivant les lignes de fuite du sujet.
L'effet est saisissant, notamment dans la série consacrée à l'anticomanie, sujet à la mode : on représentait alors des découvreurs d'antiquités à l'oeuvre, au sein de gigantesques monuments magnifiés.
Robert a également peint de somptueux paysages, des montagnes tourmentées, des forêts profondes...
On a véritablement l'impression que cet artiste aimait se laisser submerger par le caractère massif des sujets qu'il peignait.
Selon moi, d'ailleurs, pas besoin d'aller chercher bien loin où les créateurs de Game of Thrones et de certains films d'Héroïc Fantasy ont été puiser leurs idées pour leurs décors en extérieur : le caractère tourmenté et lourd des paysages exposés au Louvre vous rappelleront certainement des scènes connues.
La toile qui a été choisie pour l'affiche de l'expo est également très célèbre : il s'agit du "Projet pour la transformation de la Grande Galerie du Louvre".
Hubert Robert a en effet bénéficié dans cet édifice, de 1799 à 1806, d'un appartement et d'un atelier donnant sur la Cour Carrée.
Nul autre peintre n'aura sans doute eu de rapports aussi intime avec un grand musée.
Enfin, il me reste à vous proposer un petit jeu. (Ce week-end, emmenez vos enfants, neveux, que sais-je encore, pour le tester...)
Apparemment, Robert était un amoureux fou des chiens.
Dans l'immense majorité de ses oeuvres, il a en effet représenté l'un de ces animaux.
Souvent, d'une façon évidente.
Mais parfois, il faut vraiment chercher, laisser l'oeil vagabonder au sein de la toile pour le trouver.
C'est une lecture comme une autre des oeuvres de ce grand peintre, qu'il était grand temps de célébrer au Louvre.
Encore quatre jours, plus que quatre jours, pour découvrir notamment les toiles qui ne sont pas habituellement exposées dans le plus grand musée du monde.
