Alexandre Brasseur, le médecin de Feydeau

 

Pour notre plus grand bien, nous avons obtenu une consultation gratuite avec le très sympathique Alexandre Brasseur.

 

Cet acteur français de 43 ans joue actuellement le rôle du médecin hors-norme de Georges Feydeau dans une comédie survoltée sur l'auteur du XIXème siècle. Ça se passe au Théâtre Rive-Gauche dans la pièce Georges et Georges, écrite par Éric-Emmanuel Schmitt.

 

 


 

 

           « J 'en ai parlé avec beaucoup de copains acteurs…

 

              …notre métier est fait de trop de chapelles. On est tous plus ou moins bloqués. Il y a les acteurs de télé, les acteurs de cinéma, ceux de cinéma d’art et d’essai, les acteurs de TF1, les acteurs de Canal+, ceux du théâtre subventionné, ceux du privé, qui ne font que du boulevard, d’autres des créations… Tout ça n’est que chapelles.

 

Moi ça me gonfle profondément !

J’ai choisi ce métier pour la liberté. Je n’ai pas de plan de carrière et ça ne me gêne pas de passer du coq à l’âne, de briser les tabous, de jouer différents personnages, d’aller dans toutes les chapelles. On n’est pas que dans l’artistique tout le temps, il faut arrêter un peu de se branler la nouille. La rencontre humaine, elle, est intéressante. C’est justement l’attrait de ce métier. La rencontre de gens différents pas seulement celle d’un texte. 

Il faudrait créer des passerelles. Pouvoir aller goûter à tous les univers ! Les décideurs en ont voulu autrement, ils vous cantonnent dans le même genre et persistent et signent pour que ça dure… Vous avez joué un toubib alors ils vont vous faire jouer que des toubibs, vous avez joué un boulevard alors vous devez jouer que des boulevards. Hé non ! Je veux rencontrer des metteurs en scène torturés, des metteurs en scène joyeux...

J’ai envie de jouer des drames aussi, j’ai envie de jouer Shakespeare, Molière, des créations d’Eric-Emmanuel Schmitt comme je fais là.

 

 

Justement, pourquoi sortir de son confortable canapé pour aller voir Georges et Georges ?

 

Déjà, ce n’est pas une pièce comme les autres d’Éric-Emmanuel Schmitt. Elle sort un peu du lot… Même si il a toujours cette faculté d’être à l’intérieur de ce qu’il écrit, de s’investir dans ses textes. On y retrouve toujours des choses personnelles, difficiles à déceler.

Malgré tout c’est une pièce légère, avec un texte ciselé, fort bien écrit, avec une dramaturgie forte. C’est assez audacieux en 2014 de réécrire un vaudeville tel que Feydeau aurait pu le faire fin XIXème.

 

 

 

 

Alors pourquoi craquer pour un Feydeau d’Eric-Emmanuel Schmitt et non pas un Feydeau de Feydeau ?

 

Schmitt a réussi à récupérer tous les ingrédients qu’on retrouve dans un Feydeau et à les pousser à l’extrême. Il ne va pas vous coller un ou deux quiproquos, il va vous en coller dix !

Pas deux trois ouvertures de portes, mais 180.  

 

Ça démarre tranquille, un peu comme un drame bourgeois et au fur et à mesure que la pièce avance, le rythme s’accélère de plus en plus.

 

 

 

Quelle est la psychologie de votre personnage, le médecin Galopin ?

 

C’est un cynique décadent. Qui sort beaucoup. Un fétichiste qui vit assez mal avec ça. L’intérêt pour moi chez ce personnage, ce sont ses failles. Il est désabusé de la vie, il a souffert et continue à souffrir énormément.

 

Nous on est arrivés aux répétitions un peu comme des rigolos et Éric Emmanuel Schmitt nous a dit « faites attention, Georges et Georges est un drame inversé, même si c’est un texte léger pour se divertir, il faut travailler sur le côté dramatique du personnage », car ce sont les situations, les rencontres inopportunes, les quiproquos qui font la comédie et pas l’inverse.

 

 

Vous êtes un bon médecin ?

 

Ah non pas du tout ! Il ne dort pas de la nuit. Il se défonce aux médocs, se tape des filles dans tous les sens…

 

 

Ah ! Et vous n’êtes pas un médecin conventionné ?

 

(Rires) Absolument pas, je ne suis pas remboursé par la sécu ! Que par les mutuelles.

 

 

 

 

 

Docteur, quel conseil pourriez-vous donner à tous ceux qui comme dans la pièce ont une inversion des émotions.

Qui rient au lieu de pleurer ou qui pleurent au lieu de rire ?

 

Allez voir Georges et Georges, on va vous filer deux, trois pilules ! 

 

 

Docteur, avez-vous également des conseils pour les couples, qui à l’image des héros de la pièce, ont une relation devenue trop plan-plan ?

 

La relation amoureuse est une lutte de longue haleine. C’est un art difficile, il faut lutter contre soi-même. Je parle en connaissance de cause, ça fait 25 ans que je suis avec la même femme.

 

La clé c’est de ne pas cacher les problèmes sous le tapis mais bien au contraire de communiquer. Aujourd’hui comme on est dans la génération kleenex, dès qu’on a un problème, on se sépare. Non, il faut se parler.

 

C’est ce qui se passe dans la pièce ! Ça ne va pas entre Feydeau et sa femme. Elle voudrait un mari plus aimant, il voudrait une femme plus piquante. S’ils s’étaient parlés un peu plus peut être qu’ils se comporteraient différemment. Feydeau mettrait de l’eau dans son vin…

 

Mais j’aime autant qu’ils ne se soient pas parlé sinon je ne pourrais pas jouer ça tous les jours ! (Rires)

 

 

 

Avez-vous connu des petits ratés en représentation ?

 

Oui, tout le temps ! Dans le décor, il y a des portes qui cassent. Des poignées de portes qui vous restent dans les mains, ou alors celles qui ne s’ouvrent pas. C’est arrivé il y a quinze jours. Une porte qui se ferme et qui ne veut plus s’ouvrir. Puis Thierry Lopez qui se la prend en pleine poire. Comme la pièce est très millimétrée, si une porte ne s’ouvre pas alors ça fait un embouteillage, et résultat c’est mon partenaire qui se la prend en pleine face ! 

 

Une autre fois, Davy Sardou a lancé ma chaussure qui a atterri dans le public. Le spectateur qui l’avait récupérée ne voulait pas me la rendre. Il faisait de la rétention de chaussure !

 

Mais c’est ça qui est drôle.

 

 

 

Sinon, parmi les dernières pièces que vous avez vues, laquelle avez-vous préféré ?

 

Cette saison je n’ai pas eu le temps d’aller au théâtre mais l’année dernière j’ai adoré Nos femmes d’Éric Assous et Le Prénom, de M. Delaporte et A. de la Patellière. Il y en a une qui pour moi reste au-dessus de tout, c’est Le Père de Florian Zeller avec Robert Hirsch.

Cette pièce m’a bouleversé.

 

 

 

Merci Alexandre pour cette consultation, nous allons bientôt rencontrer Jean-Marc Dumontet, président des Molières, avez-vous une idée pour moderniser cette cérémonie ? 

 

Je trouve que ce qu’ils ont fait l’année dernière est sur la bonne voie. Nicolas Bedos a été bien. Le théâtre a besoin qu’on le bouscule, et c’est ce que font les organisateurs des Molières.

 

 

 

Merci à Alexandre Brasseur pour cette super interview, il espère vous voir très bientôt au Théâtre Rive Gauche !

 

 

Retrouvez toutes les infos et réservez des tickets pour la pièce.

 

 

 
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