Tête de Lard.

Je suis allé voir, hier soir, la deuxième représentation de "Tête de lard", au café de la gare.
A la question traditionnelle : ai-je aimé cette pièce ?
Franchement, je ne suis pas capable de répondre à cela, et pense que ça n'a en fait pas grande importance.

En tout cas, c'est à coup sur une sorte d'OVNI, pièce étrange à mi-chemin entre plusieurs genres.
Cela est selon moi une première qualité.

Ensuite: Ai-je pris du plaisir à la voir : A cela je peux clairement répondre que non.
Au contraire, on se sent parfois agressé, oppressé et mal à l'aise par cette sombre affaire de famille qui se joue sous nos yeux, sorte de Festen rural à la sauce Strip tease.

Et c'est bien la pour moi une deuxième qualité de la pièce :
Elle ne recherche pas l'effet facile, elle ne prend pas le spectateur par la main, ne lui impose pas une moralité toute faite .

Bref, un véritable objet artistique, si l'on considère qu'un objet uniquement destiné au plaisir et à la détente n'est, en fait qu'un produit de divertissement et de consommation comme un autre.

Je ne rentrerai pas dans les détails de l'histoire proprement dite, préférant laisser les spectateurs la découvrir par eux-mêmes.
Il est à noter malgré tout la très belle performance des acteurs, et notamment les deux personnages féminins.

Un des apports central de la pièce, et qui pour ma part m'a beaucoup intéressé, est cet énorme porc, que l'on distingue qu'à moitié, mais qui, par ses couinements et ses piétinements, ne se fera jamais vraiment oublier de toute la pièce .

Ce cochon, m'a rapidement fait penser aux chœurs dans la tragédie grecque, qui commentaient l'action ou apportaient parfois un éclairage nouveau sur la psychologie des acteurs (ou de l'acteur unique).

A la différence prêt qu'ici, ce spectateur, bien qu'omniprésent, en guise de commentaire ne produira que des grognements, propre à sa nature :
(Ici, pas d'anthropomorphisme facile.
Nous sommes bien à la campagne, et l'animal reste bien à son rang d'animal.)

Cela, ainsi que son exécution à la fin , ajoute au côté nihiliste et extrêmement pessimiste de la pièce.

La fin vient confirmer que le porc est en faite le sujet central de la pièce puisque, non content d'avoir été un des éléments déclencheurs du conflit, la pièce se termine au moment même ou il est abattu, laissant le spectateur, le vrai cette fois-ci, dans ses interrogations et dans sa recherche d'un sens à tout cela. ( Mauvaise manie de l'être humain, s'il en est.)

A voir, pour qui ne recherche pas le plaisir d'un divertissement facile, mais préfère ressortir d'un spectacle avec plus d'interrogations qu'il n'en avait avant de rentrer.