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La vie est une fête
Pour la quatrième fois, la joyeuse et sauvage bande viendra à Saint-Herblain. Pas besoin de se rappeler la première et la dernière pour venir à la prochaine. C’est à chaque fois une réinvention totale autour d’un thème cher à l’humanité. Et cette fois encore, la fragilité des êtres en toile de fond sera mariée à l’humour féroce qui leur est propre.
Avec « La vie est une fête », nous voici aux urgences psychiatriques, l’un des rares endroits à recevoir quiconque à toute heure sans exception d’âge, de sexe, de nationalité, avec pour trame de fond la porosité des êtres aux violences, aux incohérences politiques et sociales, aux transformations brutales de notre civilisation. Pourrions-nous tous devenir fous ? Qu’est-ce qui nous empêche de passer à l’acte ? Rien n’est plus humain que la folie. Certes, nous souffrons à cause de papa et maman, nous dit Jean-Christophe Meurisse, mais nous souffrons aussi à cause de l’état du monde. Et la folie ne serait-elle pas l’ultime chemin pour réinventer l’amour, pour réinventer la vie, pour réinventer la beauté ?
Alors, on quitte notre petit village pour atterrir 1h30 plus tard dans une zone hyper-commerciale de la capitale de région. Finalement, pour nous, le spectacle des décalages et des maux de notre société a déjà commencé bien avant de faire la queue… Deux mondes, en pleine gueule. La voiture est toujours garée, oui mais sur deux planètes bien différentes si proches et si lointaines, ce qui a de quoi rendre dingue.
Punaise, et tout ça pour s’asseoir dans la salle transformée en hémicycle de l’Assemblée Nationale. Eh, attends, je rentre chez moi, j’ai LCP aussi ! La législation autour de la possession d’armes ? Faut-il tuer le fou qui sommeille en nous ou celui qui pollue nos oreilles ? Le débat est lancé et la pièce aussi.
Est-on dehors ou dedans ? Pourquoi y-a-il un 5e mur sur scène, parce que la troupe a déjà brisé le 4e? Est-ce qu’on va arrêter de tacler les pauvres provinciaux qui ont payé leurs places ? Mais comment peut-on jouer aussi juste ? Doit-on passer à l’acte ou vont-ils passer à l’acte ? Dans quel État est le peuple ? Mille questionnements nous assaillent très vite.
Des tableaux, petites scénettes hyper bien rodées s’enchaînent sous nos yeux happés par les lueurs bleutées et dans nos oreilles touchées les mots. Qui est fou, qui ne l’est pas ? Sommes-nous dans un Shutter Island ou 1899 sur les planches ?
La caricature du désaxé vociférant, trivial voire scatologique nous rassure finalement, cette folie n’est pas la nôtre. Mais qu’en est-il de celle du dépressif, de l’angoissée, du désarmé, du paumé, du liquidé ? Nous rions, nous sursautons, nous sommes interpelés et nous vivons à travers ces âmes dévoilées, caricatures grinçantes de nos ébats dans ce monde absurde et pourtant bien réel où même la machine à café a ses humeurs.
Une autre question émerge en sortant de la salle : comment fera le prochain spectacle que je verrai pour arriver à la cheville de ces grandes pointures?
