Critiques pour l'événement Double jeu
12 juin 2020
9/10
8
En entrant dans la salle du Théâtre du Gymnase j'avais repéré une sculpture posée sur le plateau, représentant trois singes en position totémique, le premier se bouchant les oreilles, le second les yeux et le troisième la bouche. Il s'agissait de toute évidence d'un message codé.

Je comprendrai plus tard que l'objet symbolise la volonté de plusieurs personnages à ne pas voir la réalité.

Mais, pour le moment, la soirée commence quasiment joyeusement dans une ambiance jazzy plutôt décontractée alors que Charly (Charlotte Kady) s’apprête à recevoir dans son appartement parisien ses invités dans le cadre de "juste une soirée amicale entre vieux potes de lycée"… 35 ans plus tard tout de même. On imagine que l'eau a coulé sous les ponts et on sent qu'il y a de la révélation dans l'air, justifiant pleinement le second degré du titre, Double Jeu.

Une maitresse de maison, six invités et un absent dont le souvenir pèse lourd puisqu'il est décédé. On a compris que la soirée ne va pas se dérouler comme de simples retrouvailles dans une atmosphère bon enfant. C'est d'ailleurs pour cela que nous, public, sommes venus, pour assister au jeu de massacre. Nous allons rire mais ce sera un vrai cauchemar sur le plateau pour certains. Comme le pressent une des participantes : On danse sur un volcan et on va tous sauter.

Ils sont pourtant tous venus de leur plein gré et semblent heureux de se revoir. Certes, ils ont différemment "réussi" et les premières tensions apparaissent entre Simon (Bernard Fructus), le flic, Pierre (Philippe Roullier), le psy médiatisé, Caroline (Olivia Dutron) la maman (provinciale) de cinq enfants et son désormais mari Luc (Pierre Deny), Abigail (Juliette Degenne), l'écologiste à l'allure gitane, qui voudrait faire le bien autour d'elle en cherchant à convaincre qu'on ne diminue pas le bonheur en le partageant, et dont la personnalité est si diamétralement opposée à celle de son amie Marjorie (Nathalie Marquay-Pernaut) qui joue la scandaleuse de service.

Charly tire les ficelles mais on s'interroge sur ses motivations. Sont-elles bienveillantes ou aurait-elle une arrière-pensée ? A-t-elle tout manigancé ou aurait-elle un(e) complice ? Personne n'a-t-il vraiment revu aucun de ses camarades (hormis bien entendu le couple formé par Caroline et Luc) ? Chacun de nous a son avis à propos de la finalité du jeu des devinettes. Une chose est sûre et ce proverbe africain se vérifie : Le hasard est le chemin que Dieu prend s’il veut voyager incognito.

Ils ont tous des choses à cacher et les masques vont tomber successivement comme sous l'effet d'une force bousculant une rangée de dominos.

Brigitte Massiot a tissé des dialogues très tendus, et le public le soir de ma venue, le 23 février, était très réactif, ayant du mal à se retenir d'exprimer son opinion, autrement qu'à travers des rires et des applaudissements très nourris. C'est elle qui a choisi les costumes et les tenues achèvent de nous donner des indications sur les tempéraments des personnages.

L'auteure nous interroge subtilement sur le frontière entre le pas responsable, le pas coupable, et le pas complice. Double Jeu est une excellente comédie psychologique, formidablement interprétée et mise en scène avec précision par Olivier Macé.
24 févr. 2020
8/10
3
Aucun doute une pièce à recommander :
- les acteurs jouent parfaitement
- l'histoire est captivante, la chute surprenante
- le suspens nous tient en haleine pendant toute la durée de la pièce sans temps morts grâce à une mise en scène maitrisée
- L’humour est présent sans effet excessif
Ce n’est peut être pas la pièce de l’année, mais la recette garantit une bonne soirée.
Nous sommes sortis ravis de notre choix qui a fait passé très bon moment.
17 févr. 2020
8,5/10
8
“On s’était dit rendez-vous dans dix ans…” la chanson de Bruel pourrait illustrer les retrouvailles chez Charly, elle est très nerveuse, en effet elle s’est décidée à inviter ses copains de fac après 35 ans ! Pourquoi ?
Il y a Luc et Caroline (Pierre Deny et Olivia Dutron) qui se sont mariés, il est avocat, bel homme, quant à elle, on voit bien dans son attitude qu’elle s’inspire des séries américaines des années 80 ! Ils ont cinq enfants qui apparemment s’envolent du nid familial.

Pierre (Philippe Roullier), est un psy reconnu, invité sur les plateaux télés. Marjorie (Nathalie Marquay-Pernaut) “glamour”, provocante, elle agace Caroline qui veille au grain...
Simon (Bernard Fructus), inspecteur de police, il subit avec bonhomie les vannes de ses amis et à bien l’intention de passer une bonne soirée. Quant à Abigail (Juliette Degenne) elle fait dans l’écolo, bio, zenitude et cie.

La soirée de retrouvailles se passe sous “haute tension”, petites agaceries entre amis, remarques désobligeantes avec le sourire… et puis le jeu du chapeau, oui ils vont refaire ce jeu qui les amusait beaucoup, chacun met un papier dans le chapeau et à tour de rôle doivent imiter une personne de leur groupe. Mais la soirée dérape lorsque Abigail tire un papier, pas d’imitation à faire mais découvrir parmi eux, l’assassin de leur copain, mort défenestré à 18 ans, lors de leur dernière party !

Coup de froid sur la soirée, soupçons, mensonges, lâchetés, il n’est pas toujours bon d’organiser des soirées avec les anciens !

Une très bonne pièce, un suspens et une fin inattendue, les comédiens servent parfaitement le texte grâce à la subtile mise en scène d’Olivier Macé, dans le très chic décor de Olivier Prost.

Moralité, surtout n’invitez pas vos anciens copains de classe, on ne sait jamais !

on a démarré nos chroniques par la même référence à Bruel !!!

1
Lundi 17 février 2020
16 févr. 2020
8,5/10
6
... Une pièce à l’intrigue captivante par son histoire savamment construite, sa mise en scène impeccablement efficace et surtout son interprétation excellente. Un spectacle aussi surprenant que divertissant.
15 févr. 2020
10/10
4
« Double jeu » de Brigitte Massiot au théâtre du Gymnase dans une mise en scène d’Olivier Macé ou comment faire tomber les masques de cette farce macabre.

Tout le monde connaît l’image du double masque symbolisant le théâtre, celui de la commedia dell’arte : l’un joyeux, l’autre triste.

Tout débute dans la gaîté des retrouvailles pour ce groupe de quinquas, des anciens camarades de lycée, que va convier l’hôte de la soirée dans son charmant appartement parisien, décoré par Olivier Prost, pour une partie de jeu des plus macabres…
35 années séparent leur dernière rencontre. Depuis l’âge de 18 ans, ils ne se sont jamais revus, et au fil de cette réunion d’anciens élèves, vous comprendrez pourquoi.

Tout commence avec un point d’égalité : ils ont tous 53 ans.

Mais pourquoi réunir après tant d’années tout ce petit monde ? Qu’est-ce qui peut bien pousser tous ces anciens lycéens à avoir accepté cette invitation, tout de même surprenante ? L’envie de renouer contact ? La curiosité ? La peur ?

Qui est qui ? Chacun depuis a eu son propre parcours, fait de hauts et de bas, de mariage, de divorce, d’enfants qui sont venus organiser une vie de famille. L’un est devenu avocat, l’autre inspecteur de police ou même psychiatre…

Ils ont tous plus réussi que moins et leurs vies semblent des plus bourgeoises avec tous ses avantages.

Une réunion où les masques tombent au fil d’un jeu qui fit les beaux jours de leur adolescence : mettre dans un chapeau des billets avec inscrit dessus un souvenir qu’il va falloir mimer pour que les autres le reconnaissent.
Et c’est un jeu de piste fait de naïveté, de ruse, d’ingéniosité, qui va dévoiler la personnalité de chacun avec une mise en relief de leurs parts d’ombre.
Un jeu déstabilisant aux conséquences surprenantes mais libératrices, où l’amour triomphe toujours…

Une sorte de Cluedo des temps modernes, en quatre actes, ponctué par la musique de Frédéric Château et les lumières de Mathieu Le Cuffec, faisant basculer cette réunion des plus festives à son commencement, en une réunion qui va déraper pour notre plus grand plaisir...la mort rôde…
Car soyons honnêtes, nous nous réjouissons des malheurs des autres…cela donne du piquant à l’intrigue et nous tient en haleine jusqu’à la scène finale.

Comme dans un roman d’Agatha Christie, nous jouons le rôle d’Hercule Poirot, essayant de démasquer « le coupable ». D’ailleurs si vous êtes attentifs aux détails, vous devriez pouvoir « trouver » cette personne que l’auteure a bien voulu glisser adroitement dans ce règlement de compte entre amis, tout comme celle que j’avais découverte dans « La souricière ».

Nous découvrons un évènement qui a eu un impact sur leurs vies. Un jeu de piste passionnant, bien construit, aux réparties mordantes, où les cartes distribuées ne font que brouiller les pistes. Que de mensonges, de sous-entendus, se greffent autour d’un sujet d’actualité brûlant joué tout en finesse par une troupe de comédiens aux multiples facettes.

Une troupe cohérente, jouant en équipe, solidaires les uns des autres pour la montée du suspense de cette tragi-comédie du « Double jeu », mise en scène habilement par Olivier Macé assisté de Laurence Guillet et habillée par Brigitte Massiot.
Sans en accentuer les effets, mais avec un rythme soutenu, Olivier Macé contribue à la montée en puissance de l’intensité dramatique de la situation, que nous vivons en direct, dans une unité de temps parfaitement respectée.
Un travail d’équipe aussi, pour la troisième fois, entre l’auteure et le metteur en scène qui se révèle payant.
La liberté des uns commençant où s’arrête celle des autres, ils se sont partagés dans l’écoute, la confiance, la complicité, les tâches pour nous offrir un résultat brillant.

Nathalie Marquay-Pernaut, Olivia Dutron, Juliette Degenne, Charlotte Kady, Pierre Deny, Philippe Rouiller et Bernard Fructus composent ce groupe d’anciens élèves avec chacun sa personnalité bien dessinée que je vous laisse découvrir, pour le suspense, lors de votre venue.
Ils sont tous attachants, drôles, sincères, têtes à claques, dans cette entreprise du double jeu qui porte bien son nom, où le rire côtoie l’émotion, mais n’ayant qu’un seul but : celui de faire éclater la vérité !