Son balcon
SAISON 2021-2022
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Mini Molières
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Son classement : 28 / 5657
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Léonard Schulmannn
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Lauriane C
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L’élégance délicate.
La délicatesse élégante.
Stacey Kent.
L’une des plus importantes chanteuses de jazz actuelles a purement et simplement envoûté les spectateurs de la scène nationale de Sénart.
Celle à qui l’on doit une vingtaine d’albums voyage en ce moment même dans toute l’Europe dans le cadre d’une grande tournée, à l’occasion de la sortie de son dernier opus en date, Songs from other places.
Stacey Kent fait partie de ces grandes artistes dont la voix au timbre clair, empreinte de grâce, de douceur et de subtiles nuances est immédiatement reconnaissable.
Elle n’a pas besoin de mettre en avant son irréprochable technique vocale : Melle Kent chante, et vous savez que c’est elle. Point.
Dans un dépouillement paradoxalement très riche, elle parvient à chaque fois à faire en sorte qu’une impression de naturel et d’évidence se dégage de son interprétation des titres qu’elle a choisis.
Ce dépouillement confère alors une force incomparable aux petits moments de vie que sont ces chansons.
La forme musicale qu’elle affectionne tout particulièrement, le trio, sert de parfait écrin à cette voix et à ce style uniques.
Deux complices de longue dates sont à ses côtés.
Ceux-là mêmes qui jouent avec elle sur l’album mentionné ci-dessus.
A jardin, le pianiste Art Hirahara, derrière le clavier de son Steinway ou de sa workstation Kronos Korg, a la lourde mais passionnante tâche d’assurer la partie rythmique des arrangements.
C’est lui qui avec beaucoup de sensibilité pose le cadre, l’univers sonore.
Ses introductions permettent de peindre une atmosphère, un univers, dans lesquels Stacey Kent vient se lover pour chanter.
Et puis Jim Tomlinson.
Le compositeur, l’arrangeur, le producteur, le saxophoniste, le flûtiste, le percussionniste.
Le mari.
Sur scène, lui nous expose de délicieux contrepoints, dialoguant subtilement avec la voix de son épouse.
Les flûtes traversières sont en totale harmonie avec la délicatesse vocale, le saxophone apportant un côté jazz plus ancré, plus profond.
Mister Tomlinson nous prouvera à de nombreuses reprises son grand talent instrumental, notamment dans un remarquable solo très inspiré au sax ténor.
Quatorze titres figureront au programme.
Les dernières nouveautés en date, des chansons françaises (parfois chantées en anglais), le Brésil, et les chansons « madeleine » de la chanteuse, bien souvent tirées du Great americain song book.
La célèbre chanson Sous le ciel de Paris, chantée en anglais, débute en beauté le concert.
Un clin d’œil à sa venue en France, certes, mais également un moyen de nous dire l’amour qu’elle porte à notre pays. Elle parle parfaitement la langue, et s’exprimera d’ailleurs longuement pour présenter le répertoire choisi.
Immédiatement, le charme opère, et nous voici embarqués, captivés que nous sommes par ces notes et ces mots à la fois intenses et délicats.
La complicité des trois artistes est tout de suite évidente.
Le public savoure la magnifique interprétation de ce titre alternant des passages en modes mineur et majeur.
Elle enchaîne avec une autre très belle valse, écrite par Michel Legrand, La valse des lilas.
« Tous les lilas de Mai n'en finiront jamais de faire la fête au coeur des gens qui s’aiment... »
Les premiers applaudissement fusent, l’émotion est palpable.
Tango in Macao, I wish I could go travelling again, les titres du dernier album dans leur version live nous prouvent s’il en était encore besoin le talent de compositeur de Jim Tomlinson.
Une magnifique version de Ne me quitte pas (If you go away) fera que nous n’en mènerons pas large, dans nos fauteuils, tous autant que nous sommes retenant notre souffle, devant tant de profonde et bouleversante beauté musicale.
Il en sera de même pour Avec le temps, de Léo Ferré.
Le brésil, donc.
Le timbre de Stacey Kent prend alors une couleur très saudade, cette mélancolie poétique unique en son genre.
Là encore, nous voyageons en musique grâce au talent des trois artistes, nous nous évadons du théâtre pour nous retrouver portés par la voix veloutée sur les hauteurs du Corcovado.
Une autre grande reprise, Blackbird, signée Lennon-McCartney.
La subtile appropriation par la chanteuse permet de redécouvrir complètement cette grande chanson, et de prendre vraiment compte toute la profondeur sous-jacente.
Les voyages, un poème de Raymond Levesque, notamment chanté par Barbara.
Le thème du voyage sera prépondérant dans ce spectacle, Miss Kent nous rappelant les deux dernières années éprouvantes où il a fallu rester à la maison, mais aussi nous invitant à voyager, que ce soit d’un point de vue géographique ou intérieur.
« Ah ! Jeunes gens, sachez profiter de vos vingt ans. Le monde est là. Ne craignez rien... »
Oui, le temps passe beaucoup trop vite.
Aguas de Março, Les eaux de Mars, d’Antonio Carlos Jobim conclura le spectacle, dans un registre un peu espiègle, jovial et joyeux.
Deux petites notes finales, un intervalle de tierce, sifflées par la chanteuse, et reprises à la flûte nous font sourire.
Devant la standing ovation qui suivra, Stacey Kent n’aura d’autre choix que de revenir par deux fois devant nous.
Pour le dernier rappel, la chanteuse nous dira qu’elle écoutait naguère en boucle Stevie Nicks chanter Landslide. Elle nous bouleverse une dernière fois.
Ce concert est donc de ceux qui se savourent à chaque instant, à la fois intimiste et intense, toujours passionnant, toujours envoûtant.
Une nouvelle fois, Stacey Kent nous aura prouvé s’il en était encore besoin, combien elle est une figure importante et incontournable du jazz contemporain, l’une de ces ensorcelantes ladies qui nous font voir la vie en bleu.
Elle sera en concert au Théâtre Marigny le 8 juin prochain.
Une date à noter sur son agenda !
La délicatesse élégante.
Stacey Kent.
L’une des plus importantes chanteuses de jazz actuelles a purement et simplement envoûté les spectateurs de la scène nationale de Sénart.
Celle à qui l’on doit une vingtaine d’albums voyage en ce moment même dans toute l’Europe dans le cadre d’une grande tournée, à l’occasion de la sortie de son dernier opus en date, Songs from other places.
Stacey Kent fait partie de ces grandes artistes dont la voix au timbre clair, empreinte de grâce, de douceur et de subtiles nuances est immédiatement reconnaissable.
Elle n’a pas besoin de mettre en avant son irréprochable technique vocale : Melle Kent chante, et vous savez que c’est elle. Point.
Dans un dépouillement paradoxalement très riche, elle parvient à chaque fois à faire en sorte qu’une impression de naturel et d’évidence se dégage de son interprétation des titres qu’elle a choisis.
Ce dépouillement confère alors une force incomparable aux petits moments de vie que sont ces chansons.
La forme musicale qu’elle affectionne tout particulièrement, le trio, sert de parfait écrin à cette voix et à ce style uniques.
Deux complices de longue dates sont à ses côtés.
Ceux-là mêmes qui jouent avec elle sur l’album mentionné ci-dessus.
A jardin, le pianiste Art Hirahara, derrière le clavier de son Steinway ou de sa workstation Kronos Korg, a la lourde mais passionnante tâche d’assurer la partie rythmique des arrangements.
C’est lui qui avec beaucoup de sensibilité pose le cadre, l’univers sonore.
Ses introductions permettent de peindre une atmosphère, un univers, dans lesquels Stacey Kent vient se lover pour chanter.
Et puis Jim Tomlinson.
Le compositeur, l’arrangeur, le producteur, le saxophoniste, le flûtiste, le percussionniste.
Le mari.
Sur scène, lui nous expose de délicieux contrepoints, dialoguant subtilement avec la voix de son épouse.
Les flûtes traversières sont en totale harmonie avec la délicatesse vocale, le saxophone apportant un côté jazz plus ancré, plus profond.
Mister Tomlinson nous prouvera à de nombreuses reprises son grand talent instrumental, notamment dans un remarquable solo très inspiré au sax ténor.
Quatorze titres figureront au programme.
Les dernières nouveautés en date, des chansons françaises (parfois chantées en anglais), le Brésil, et les chansons « madeleine » de la chanteuse, bien souvent tirées du Great americain song book.
La célèbre chanson Sous le ciel de Paris, chantée en anglais, débute en beauté le concert.
Un clin d’œil à sa venue en France, certes, mais également un moyen de nous dire l’amour qu’elle porte à notre pays. Elle parle parfaitement la langue, et s’exprimera d’ailleurs longuement pour présenter le répertoire choisi.
Immédiatement, le charme opère, et nous voici embarqués, captivés que nous sommes par ces notes et ces mots à la fois intenses et délicats.
La complicité des trois artistes est tout de suite évidente.
Le public savoure la magnifique interprétation de ce titre alternant des passages en modes mineur et majeur.
Elle enchaîne avec une autre très belle valse, écrite par Michel Legrand, La valse des lilas.
« Tous les lilas de Mai n'en finiront jamais de faire la fête au coeur des gens qui s’aiment... »
Les premiers applaudissement fusent, l’émotion est palpable.
Tango in Macao, I wish I could go travelling again, les titres du dernier album dans leur version live nous prouvent s’il en était encore besoin le talent de compositeur de Jim Tomlinson.
Une magnifique version de Ne me quitte pas (If you go away) fera que nous n’en mènerons pas large, dans nos fauteuils, tous autant que nous sommes retenant notre souffle, devant tant de profonde et bouleversante beauté musicale.
Il en sera de même pour Avec le temps, de Léo Ferré.
Le brésil, donc.
Le timbre de Stacey Kent prend alors une couleur très saudade, cette mélancolie poétique unique en son genre.
Là encore, nous voyageons en musique grâce au talent des trois artistes, nous nous évadons du théâtre pour nous retrouver portés par la voix veloutée sur les hauteurs du Corcovado.
Une autre grande reprise, Blackbird, signée Lennon-McCartney.
La subtile appropriation par la chanteuse permet de redécouvrir complètement cette grande chanson, et de prendre vraiment compte toute la profondeur sous-jacente.
Les voyages, un poème de Raymond Levesque, notamment chanté par Barbara.
Le thème du voyage sera prépondérant dans ce spectacle, Miss Kent nous rappelant les deux dernières années éprouvantes où il a fallu rester à la maison, mais aussi nous invitant à voyager, que ce soit d’un point de vue géographique ou intérieur.
« Ah ! Jeunes gens, sachez profiter de vos vingt ans. Le monde est là. Ne craignez rien... »
Oui, le temps passe beaucoup trop vite.
Aguas de Março, Les eaux de Mars, d’Antonio Carlos Jobim conclura le spectacle, dans un registre un peu espiègle, jovial et joyeux.
Deux petites notes finales, un intervalle de tierce, sifflées par la chanteuse, et reprises à la flûte nous font sourire.
Devant la standing ovation qui suivra, Stacey Kent n’aura d’autre choix que de revenir par deux fois devant nous.
Pour le dernier rappel, la chanteuse nous dira qu’elle écoutait naguère en boucle Stevie Nicks chanter Landslide. Elle nous bouleverse une dernière fois.
Ce concert est donc de ceux qui se savourent à chaque instant, à la fois intimiste et intense, toujours passionnant, toujours envoûtant.
Une nouvelle fois, Stacey Kent nous aura prouvé s’il en était encore besoin, combien elle est une figure importante et incontournable du jazz contemporain, l’une de ces ensorcelantes ladies qui nous font voir la vie en bleu.
Elle sera en concert au Théâtre Marigny le 8 juin prochain.
Une date à noter sur son agenda !
Une légende. Une vraie.
L’un des fondateurs, si ce n’est LE fondateur du jazz-rock et du jazz fusion.
Un des plus grands guitaristes actuels, qui a illuminé les scènes du mode entier avec son instrument au manche « scallopé », ou bien sa Gibson à deux manches.
Un musicien à qui Miles Davis a demandé de jouer avec lui sur onze albums, et qui pour autant ne s’est jamais contenté de cette gloire rare.
Un homme qui a trouvé sa voie propre, musicale et humaine, un homme dont l’apport considérable à la musique contemporaine ne saurait être exhaustivement quantifié.
John McLaughlin était hier à la Seine musicale, lui le jeune homme en pleine forme de quatre-vingts printemps, pour nous présenter sa nouvelle formation, The 4th dimension, et son dernier album en date, Liberation time.
Moi, la toute première rencontre avec Mister McLaughlin eut lieu grâce à deux albums.
Deux chefs d’œuvres alors sortis déjà depuis une dizaine d’années.
1971. The inner mounting Flame, premier album du Mahavishnu Orchestra, toute première version.
Le premier titre, Meeting the spirits.
Neuf accords merveilleux débutant le morceau, au-delà de toute tonalité et pourtant si mélodiques, des accords d’une puissance tellurique incandescente, des accords que je n’avais jamais entendus.
Ou comment comprendre que cet immense instrumentiste était avant tout un compositeur novateur mettant en œuvre de subtiles polytonalités et des mesures impaires totalement inusitées.
1972. Love, dévotion and surrender.
Un album enregistré avec Carlos Devadip Santana. Les deux guitaristes, tous deux disciples du guru Sri Shinmoy vont s’emparer de deux thèmes de John Coltrane, et nous en donner des versions admirables qui m’émeuvent toujours autant : A love supreme, et Naïma.
Beaucoup d’émotion, donc, à retrouver John McLauglin sur la scène de l’auditorium Patrick Devedjian.
Il arrive le micro à la main, saluant d’emblée la salle, nous disant son émotion de se trouver devant nous : « C’est un miracle d’être là ! ». (Il parle un Français remarquable, résidant depuis longtemps à Monaco.)
A ses côtés, trois musiciens qui ne vont pas l’accompagner mais bel et bien jouer avec lui. La nuance est importante.
Aux drums, le batteur d’origine indienne Ranjit Barot, aux claviers et pour un magistral solo de batterie Gary Husbands, et à la basse cinq cordes Etienne Mbappé.
Premier groove infernal.
Mister Barot envoie une formidable pulsation, qu’il accompagne à la voix au micro, les onomatopées devenant autant de motifs rythmiques, au même titre que ses descentes de fûts ou ses envolées de cymbales.
Etienne Mbappé entre en lice et les deux compères déversent alors un rythme fait de lave magmatique brûlante.
Hélas, et ce sera le seul bémol de ce concert, la prise de son n’est pas à la hauteur.
Une grande confusion règne notamment dans le bas registre, une réverbération trop lourde empêche toute précision de restitution, et nous avons beaucoup de peine à distinguer les subtilités des deux musiciens.
Un très léger mieux arrivera vers le dernier quart du concert.
John McLaughlin entre en lice, et immédiatement, le public de fans inconditionnels reconnaît son style et sa sonorité inimitables.
Sans amplificateur sur scène, passant directement après ses effets par une boîte de direct sur la console FOH, le son cristallin de sa guitare Paul Reed Smith à tige de vibrato procure toujours autant de frissons.
Cet homme est toujours et peut-être plus que jamais le virtuose que l’on sait, qui met cette virtuosité au service d’un lyrisme de tous les instants, d’une vision claire et inspirée de thèmes mélodiques complexes mais d’une incomparable beauté.
Le quatrième compère, Gary Husband ne laisse pas sa part au chat. Que ce soit au piano ou au clavier Norlead, lui aussi nous rappelle qu’il est l’un des grands keyboardistes actuel.
Quelle technique, quelle sensibilité !
De très grands moments nous attendent.
Des morceaux d’une impressionnante fulgurance rythmique, avec une pulsation infernale qui permet au guitariste de tirer de son instrument des fulgurances presque inconcevables et pourtant bien réelles.
Ce sera le cas notamment pour ce titre Kiki, qui commence comme un blues, pour aller vers une fusion merveilleuse.
Un titre dans lequel Mr Barot se déchaînera façon beat box vocale.
Des morceaux presque planants, des ballades oniriques, comme Peace and Happiness to all men, avec des envolées de notes tenues à la sustain qui vous font frissonner de bonheur.
La cohésion, la complicité entre les quatre grands musiciens est totale, une véritable osmose règne en permanence.
J’ai été frappé par la place à la fois large et précise que la patron laisse aux trois autres membre du quatuor.
Seule la formidable qualité des compositions permet ces échanges et cette complémentarité de tous les instants.
Ici, règne en permanence une impression de liberté rendue possible par les structures mélodiques et rythmiques, moins complexes que par le passé, certes, mais toujours aussi passionnantes et inspirées.
Les moments de solo de chacun nous laisseront souvent bouche bée, un chase guitare-clavier sera des plus enthousiasmants, une composition dédiée à Paco de Lucia nous bouleversera, et le duo de batteurs (Gary Husband ayant troqué ses touches noires et blanches pour deux baguettes), ce duo aura quelque chose d’hallucinant.
Tous, nous aurons l’impression d’avoir vécu un moment rare.
Il se murmure ici et là que cette tournée de John McLaughlin serait sa toute dernière.
Je ne veux évidemment pas le croire.
Quoi qu’il en soit, tous ceux qui sortaient hier de la Seine musicale semblaient n’avoir comme moi qu’une seule pensée en tête : « moi, j’y étais, à ce concert mémorable ! »
L’un des fondateurs, si ce n’est LE fondateur du jazz-rock et du jazz fusion.
Un des plus grands guitaristes actuels, qui a illuminé les scènes du mode entier avec son instrument au manche « scallopé », ou bien sa Gibson à deux manches.
Un musicien à qui Miles Davis a demandé de jouer avec lui sur onze albums, et qui pour autant ne s’est jamais contenté de cette gloire rare.
Un homme qui a trouvé sa voie propre, musicale et humaine, un homme dont l’apport considérable à la musique contemporaine ne saurait être exhaustivement quantifié.
John McLaughlin était hier à la Seine musicale, lui le jeune homme en pleine forme de quatre-vingts printemps, pour nous présenter sa nouvelle formation, The 4th dimension, et son dernier album en date, Liberation time.
Moi, la toute première rencontre avec Mister McLaughlin eut lieu grâce à deux albums.
Deux chefs d’œuvres alors sortis déjà depuis une dizaine d’années.
1971. The inner mounting Flame, premier album du Mahavishnu Orchestra, toute première version.
Le premier titre, Meeting the spirits.
Neuf accords merveilleux débutant le morceau, au-delà de toute tonalité et pourtant si mélodiques, des accords d’une puissance tellurique incandescente, des accords que je n’avais jamais entendus.
Ou comment comprendre que cet immense instrumentiste était avant tout un compositeur novateur mettant en œuvre de subtiles polytonalités et des mesures impaires totalement inusitées.
1972. Love, dévotion and surrender.
Un album enregistré avec Carlos Devadip Santana. Les deux guitaristes, tous deux disciples du guru Sri Shinmoy vont s’emparer de deux thèmes de John Coltrane, et nous en donner des versions admirables qui m’émeuvent toujours autant : A love supreme, et Naïma.
Beaucoup d’émotion, donc, à retrouver John McLauglin sur la scène de l’auditorium Patrick Devedjian.
Il arrive le micro à la main, saluant d’emblée la salle, nous disant son émotion de se trouver devant nous : « C’est un miracle d’être là ! ». (Il parle un Français remarquable, résidant depuis longtemps à Monaco.)
A ses côtés, trois musiciens qui ne vont pas l’accompagner mais bel et bien jouer avec lui. La nuance est importante.
Aux drums, le batteur d’origine indienne Ranjit Barot, aux claviers et pour un magistral solo de batterie Gary Husbands, et à la basse cinq cordes Etienne Mbappé.
Premier groove infernal.
Mister Barot envoie une formidable pulsation, qu’il accompagne à la voix au micro, les onomatopées devenant autant de motifs rythmiques, au même titre que ses descentes de fûts ou ses envolées de cymbales.
Etienne Mbappé entre en lice et les deux compères déversent alors un rythme fait de lave magmatique brûlante.
Hélas, et ce sera le seul bémol de ce concert, la prise de son n’est pas à la hauteur.
Une grande confusion règne notamment dans le bas registre, une réverbération trop lourde empêche toute précision de restitution, et nous avons beaucoup de peine à distinguer les subtilités des deux musiciens.
Un très léger mieux arrivera vers le dernier quart du concert.
John McLaughlin entre en lice, et immédiatement, le public de fans inconditionnels reconnaît son style et sa sonorité inimitables.
Sans amplificateur sur scène, passant directement après ses effets par une boîte de direct sur la console FOH, le son cristallin de sa guitare Paul Reed Smith à tige de vibrato procure toujours autant de frissons.
Cet homme est toujours et peut-être plus que jamais le virtuose que l’on sait, qui met cette virtuosité au service d’un lyrisme de tous les instants, d’une vision claire et inspirée de thèmes mélodiques complexes mais d’une incomparable beauté.
Le quatrième compère, Gary Husband ne laisse pas sa part au chat. Que ce soit au piano ou au clavier Norlead, lui aussi nous rappelle qu’il est l’un des grands keyboardistes actuel.
Quelle technique, quelle sensibilité !
De très grands moments nous attendent.
Des morceaux d’une impressionnante fulgurance rythmique, avec une pulsation infernale qui permet au guitariste de tirer de son instrument des fulgurances presque inconcevables et pourtant bien réelles.
Ce sera le cas notamment pour ce titre Kiki, qui commence comme un blues, pour aller vers une fusion merveilleuse.
Un titre dans lequel Mr Barot se déchaînera façon beat box vocale.
Des morceaux presque planants, des ballades oniriques, comme Peace and Happiness to all men, avec des envolées de notes tenues à la sustain qui vous font frissonner de bonheur.
La cohésion, la complicité entre les quatre grands musiciens est totale, une véritable osmose règne en permanence.
J’ai été frappé par la place à la fois large et précise que la patron laisse aux trois autres membre du quatuor.
Seule la formidable qualité des compositions permet ces échanges et cette complémentarité de tous les instants.
Ici, règne en permanence une impression de liberté rendue possible par les structures mélodiques et rythmiques, moins complexes que par le passé, certes, mais toujours aussi passionnantes et inspirées.
Les moments de solo de chacun nous laisseront souvent bouche bée, un chase guitare-clavier sera des plus enthousiasmants, une composition dédiée à Paco de Lucia nous bouleversera, et le duo de batteurs (Gary Husband ayant troqué ses touches noires et blanches pour deux baguettes), ce duo aura quelque chose d’hallucinant.
Tous, nous aurons l’impression d’avoir vécu un moment rare.
Il se murmure ici et là que cette tournée de John McLaughlin serait sa toute dernière.
Je ne veux évidemment pas le croire.
Quoi qu’il en soit, tous ceux qui sortaient hier de la Seine musicale semblaient n’avoir comme moi qu’une seule pensée en tête : « moi, j’y étais, à ce concert mémorable ! »
Intérieur de bon goût, pendule à coucou qui se déclenche au mauvais moment, enfin voici Clémence chantonnant, heureuse, elle plie les vêtements de bébé que sa belle-fille Manon vient de lui apporter, bébé Roberto va passer quelques jours chez ses grands-parents. Manon se permet de donner quelques recommandations à sa belle-mère pour s’occuper du bambin, (oui, on a vécu ça !) les jeunes parents ne se souviennent pas que leurs propres géniteurs se sont occupés d’eux !
Gaspard, mari de Clémence, rentre enfin de sa réunion, complétement épuisé, mais heureux de voir son fils Lucas et Manon.
Que se passe-t-il tout d’un coup ? Lucas en pleurs, sa femme gênée et les parents complétement abasourdis, d’entendre Lucas insulter sa femme, (c’est bien parti pour aller à Capri tous les deux en amoureux…) Enfin nous apprenons que Manon part seule, que Lucas reste travailler chez lui, heureusement pas de problèmes pour bébé, il reste chez Papi et Mamie !
Gaspard insiste pour que son fils demande le divorce, Clémence est plus mesurée et pour cause, de fil en aiguille, les mots fusent, les phrases s’échappent, hélas…
Les malheurs des uns et des autres font le bonheur du public, une bien réjouissante comédie, la dernière de Eric Assous, sur le mensonge, les non-dits, Jean-Luc Moreau réussit une mise en scène dynamique et drôle, lui-même tient le rôle de Gaspard, pourfendeur de l’hypocrisie, mais il faut se méfier… Quant à la charmante Anne Jacquemin, elle apporte la touche féminine et drôle de son personnage, en toute innocence. Arthur Fenwick, jeune mari paumé et trop conciliant est irrésistible, Alice Raucoules a le dur privilège d’être la « méchante » mais en fait, ne pas se fier aux apparences !
Avouons-le on s’amuse beaucoup !
Gaspard, mari de Clémence, rentre enfin de sa réunion, complétement épuisé, mais heureux de voir son fils Lucas et Manon.
Que se passe-t-il tout d’un coup ? Lucas en pleurs, sa femme gênée et les parents complétement abasourdis, d’entendre Lucas insulter sa femme, (c’est bien parti pour aller à Capri tous les deux en amoureux…) Enfin nous apprenons que Manon part seule, que Lucas reste travailler chez lui, heureusement pas de problèmes pour bébé, il reste chez Papi et Mamie !
Gaspard insiste pour que son fils demande le divorce, Clémence est plus mesurée et pour cause, de fil en aiguille, les mots fusent, les phrases s’échappent, hélas…
Les malheurs des uns et des autres font le bonheur du public, une bien réjouissante comédie, la dernière de Eric Assous, sur le mensonge, les non-dits, Jean-Luc Moreau réussit une mise en scène dynamique et drôle, lui-même tient le rôle de Gaspard, pourfendeur de l’hypocrisie, mais il faut se méfier… Quant à la charmante Anne Jacquemin, elle apporte la touche féminine et drôle de son personnage, en toute innocence. Arthur Fenwick, jeune mari paumé et trop conciliant est irrésistible, Alice Raucoules a le dur privilège d’être la « méchante » mais en fait, ne pas se fier aux apparences !
Avouons-le on s’amuse beaucoup !
Voici un thriller théâtral impressionnant et habile de Laurent Mauvignier, juxtaposant les narrations et brouillant les pistes linéaires de la compréhension. La mise en scène de Arnaud Meunier, complexe et soignée, prend des allures cinématographiques par le biais de tableaux-séquences entrecoupés de noirs et joue des effets et des situations avec un floutage ou une crudité plongeant le récit dans un trouble permanent.
« Le père et la mère se retrouvent aux prises avec leurs mensonges, leurs silences. Dix ans plus tôt, leur petite fille disparaissait. À l’heure d’un nouveau deuil, dans la maison du grand-père, tout le monde se retrouve et s’affronte lorsqu’un événement inattendu réveille le traumatisme. »
Dès la première scène, dans le silence, dépouillé de tout repère, le père (magnifique Philippe Torreton) est là, immobile face à nous. Les jalons du thriller sont alors posés. Le comédien, par la seule présence de son personnage, donne le ton qui sera celui de la pièce. Une tension traversante, sur le fil, ténue et ininterrompue tout le long du récit, chargée d’émotions rentrées ou débordantes qui envoutera les jeux de chacun des protagonistes.
Et nous voici emportés dans les aléas d’une course folle, course vaine ou impossible peut-être, à la recherche de la vérité qui soulagera le doute. Perdus dans le labyrinthe où l’on cherche quelle issue pourra conduire vers le soulagement. Vers cet avènement enfin réussi de la valse-hésitation des attentes et des renoncements accumulés, de l’étourdissement des espérances vaines. Au risque de se confronter à nouveau à la peur de savoir et de regretter. Au risque de réveiller les hantises fantomatiques de ses refoulements. Au risque de perdre la douleur qui a étayé tout le temps perdu à ne plus attendre et le remords de l’avoir remplacer.
L’interprétation en impose, prégnante et significative, tout en force et fragilité mêlées, remarquablement nuancée, comme une symphonie concertante où les pupitres s’opposent et se répondent selon les mesures, dans les crescendos fabuleux et les diminuendos sensibles de la partition. Anne Brochet, Romain Fauroux, Ambre Febvre, Jean-François Lapalus et Philippe Torreton sont littéralement brillants, convaincants et touchants.
Un spectacle captivant, écrit avec un voluptueuse ingéniosité, mis en vie avec adresse et surtout, interprété avec brio. Je recommande vivement.
« Le père et la mère se retrouvent aux prises avec leurs mensonges, leurs silences. Dix ans plus tôt, leur petite fille disparaissait. À l’heure d’un nouveau deuil, dans la maison du grand-père, tout le monde se retrouve et s’affronte lorsqu’un événement inattendu réveille le traumatisme. »
Dès la première scène, dans le silence, dépouillé de tout repère, le père (magnifique Philippe Torreton) est là, immobile face à nous. Les jalons du thriller sont alors posés. Le comédien, par la seule présence de son personnage, donne le ton qui sera celui de la pièce. Une tension traversante, sur le fil, ténue et ininterrompue tout le long du récit, chargée d’émotions rentrées ou débordantes qui envoutera les jeux de chacun des protagonistes.
Et nous voici emportés dans les aléas d’une course folle, course vaine ou impossible peut-être, à la recherche de la vérité qui soulagera le doute. Perdus dans le labyrinthe où l’on cherche quelle issue pourra conduire vers le soulagement. Vers cet avènement enfin réussi de la valse-hésitation des attentes et des renoncements accumulés, de l’étourdissement des espérances vaines. Au risque de se confronter à nouveau à la peur de savoir et de regretter. Au risque de réveiller les hantises fantomatiques de ses refoulements. Au risque de perdre la douleur qui a étayé tout le temps perdu à ne plus attendre et le remords de l’avoir remplacer.
L’interprétation en impose, prégnante et significative, tout en force et fragilité mêlées, remarquablement nuancée, comme une symphonie concertante où les pupitres s’opposent et se répondent selon les mesures, dans les crescendos fabuleux et les diminuendos sensibles de la partition. Anne Brochet, Romain Fauroux, Ambre Febvre, Jean-François Lapalus et Philippe Torreton sont littéralement brillants, convaincants et touchants.
Un spectacle captivant, écrit avec un voluptueuse ingéniosité, mis en vie avec adresse et surtout, interprété avec brio. Je recommande vivement.
Et… Coupez !
Du manifesto au rodéo.
De Manhattan à la Reine Blanche.
De la rue à l’arène.
1967.
Valérie Solanas publie à compte d’auteur un véritable brûlot féministe intitulé SCUM Manifesto, qu'elle vend dans la rue.
Manifesto, on voit peu près, mais SCUM ?
SCUM : le rebut, la lie, la crasse.
SCUM : "Society fur Cutting Up Men", une société pour châtrer les mâles.
En quelques mots comme en cent, Valérie Solanas est finalement assez simple : « Renverser le gouvernement, éliminer le système monétaire, mettre en place l’automatisation et détruire le sexe masculin. »
Rien que ça.
Dans ce petit opuscule qui est à la radicalité féministe ce que la kalachnikov AK-47 est au lance-pierre, celle qui sera condamnée à trois ans de prison pour avoir truffé un certain Andy Warhol de trois balles, celle-là échafaude toute une théorie.
Dans une démonstration certes on ne peut plus extrémiste, qui certes parfois relève du plus ignoble fascisme, Miss Solanas analyse finalement assez lucidement la domination exercée par la gent masculine sur les femmes, domination relevant du plus ancestral patriarcat.
Pour elle, tous les moyens les plus extrêmes seront bons pour éradiquer purement et simplement tous les mâles de la planète.
Dans un premier temps relevant du registre scientifique, voire universitaire, le texte va se politiser à outrance pour théoriser ce féminisme absolutiste, et va même s’orienter vers un côté science-fiction, au futur assez simple, un côté qui va engendrer une certaine forme d’humour.
C’est ce pamphlet étonnant et détonant que la metteure en scène Mirabelle Rousseau et la comédienne Sarah Chaumette ont eu la bonne idée de porter sur un plateau de théâtre.
Bonne idée, excellente idée même, car elles sont parfaitement parvenues à mettre en avant la fulgurance, la radicalité sans concession, la vision absolutiste et jusqu’au boutiste de Valérie Solanas.
Portées par la très actuelle traduction du livre par Blandine Pélissier, qui appelle une chatte une chatte, les deux complices vont nous asséner une véritable claque.
Au public, en général, mais surtout aux spectateurs masculins dont votre serviteur en particulier.
Nous allons assister à une conférence.
Le pupitre surmonté d’un micro nous donne déjà un indice sur la forme que va prendre le spectacle, et quand la conférencière pénètre par le fond de la salle, plus aucun doute ne plane : allure sévère, chignon retenu par un crayon, petites lunettes sur le bout du nez, Sarah Chaumette commence à dire le texte.
Elle annonce immédiatement la couleur : tel un spécialiste médico-légal qui relève d’un coup d’un seul le linceul d’un cadavre pour sa reconnaissance par les proches, dans le but d’infliger le moins de douleur possible, la comédienne nous définit le SCUM.
Je vous assure qu’à ce moment précis du spectacle, lorsque vous croisez son regard, vous n’en menez pas large !
Elle parvient à nous édifier. Dans les deux sens du terme.
Edifier, c’est à dire nous expliquer clairement ce qui a amené Miss Solanas à écrire son texte. La comédienne est très convaincante, et nous ne pouvons qu’acquiescer.
Oui, la domination masculine et le patriarcat sont bien réels.
En ce sens, c’est un spectacle indispensable, en ces temps troubles où ici et là, clairement ou insidieusement, les droits fondamentaux des femmes sont de plus en plus menacés.
Edifier, c’est faire peur.
Parce que pour l’auteure, la fin justifie les moyens. Tous les moyens.
Elle ne ménage pas sa peine, Sarah Chaumette, à arpenter le plateau, à porter haut et fort le texte.
Et puis, elle va chercher en coulisse une espèce de parallélépipède métallique bleu, qui va se révéler être une machine qu’elle va brancher.
De conférencière, grâce à cette machine, elle va devenir militante, respectant la structure littéraire du bouquin.
De pupitre, le meuble en bois devient un piédestal phallique, sur lequel elle s’élèvera de plus en plus.
Et la machine, me direz-vous ?
Cette machine va nous procurer une étonnante surprise, dont bien entendu je ne vous révèlerai pas la teneur.
A vous de venir découvrir ce phénomène à la Reine blanche.
Sarah Chaumette nous livre de façon hallucinée et drôle les vitupérations de Valérie Solanas.
Nous sommes sidérés par tant de radicalité, après avoir opiné du chef durant le constat.
La comédienne est alors magnifique d’outrance, incarnant cette redoutable pythie, cette prophétesse extrémiste, cette théoricienne de l’éradication masculine.
On comprend alors pourquoi le manifesto est devenu un rodéo : la comédienne parvient à dompter cet animal sauvage complètement affolé qu’est le texte.
Ce spectacle agit donc comme un électro-choc salutaire : grâce aux judicieux partis pris dramaturgiques, et en passant bien entendu outre la solution révolutionnaire évoquée, on ne peut qu’être totalement en phase avec la démonstration de l’auteure et comprendre la nécessité de la porter haut et fort de nos jours.
Un spectacle électrisant des plus réussis !
Du manifesto au rodéo.
De Manhattan à la Reine Blanche.
De la rue à l’arène.
1967.
Valérie Solanas publie à compte d’auteur un véritable brûlot féministe intitulé SCUM Manifesto, qu'elle vend dans la rue.
Manifesto, on voit peu près, mais SCUM ?
SCUM : le rebut, la lie, la crasse.
SCUM : "Society fur Cutting Up Men", une société pour châtrer les mâles.
En quelques mots comme en cent, Valérie Solanas est finalement assez simple : « Renverser le gouvernement, éliminer le système monétaire, mettre en place l’automatisation et détruire le sexe masculin. »
Rien que ça.
Dans ce petit opuscule qui est à la radicalité féministe ce que la kalachnikov AK-47 est au lance-pierre, celle qui sera condamnée à trois ans de prison pour avoir truffé un certain Andy Warhol de trois balles, celle-là échafaude toute une théorie.
Dans une démonstration certes on ne peut plus extrémiste, qui certes parfois relève du plus ignoble fascisme, Miss Solanas analyse finalement assez lucidement la domination exercée par la gent masculine sur les femmes, domination relevant du plus ancestral patriarcat.
Pour elle, tous les moyens les plus extrêmes seront bons pour éradiquer purement et simplement tous les mâles de la planète.
Dans un premier temps relevant du registre scientifique, voire universitaire, le texte va se politiser à outrance pour théoriser ce féminisme absolutiste, et va même s’orienter vers un côté science-fiction, au futur assez simple, un côté qui va engendrer une certaine forme d’humour.
C’est ce pamphlet étonnant et détonant que la metteure en scène Mirabelle Rousseau et la comédienne Sarah Chaumette ont eu la bonne idée de porter sur un plateau de théâtre.
Bonne idée, excellente idée même, car elles sont parfaitement parvenues à mettre en avant la fulgurance, la radicalité sans concession, la vision absolutiste et jusqu’au boutiste de Valérie Solanas.
Portées par la très actuelle traduction du livre par Blandine Pélissier, qui appelle une chatte une chatte, les deux complices vont nous asséner une véritable claque.
Au public, en général, mais surtout aux spectateurs masculins dont votre serviteur en particulier.
Nous allons assister à une conférence.
Le pupitre surmonté d’un micro nous donne déjà un indice sur la forme que va prendre le spectacle, et quand la conférencière pénètre par le fond de la salle, plus aucun doute ne plane : allure sévère, chignon retenu par un crayon, petites lunettes sur le bout du nez, Sarah Chaumette commence à dire le texte.
Elle annonce immédiatement la couleur : tel un spécialiste médico-légal qui relève d’un coup d’un seul le linceul d’un cadavre pour sa reconnaissance par les proches, dans le but d’infliger le moins de douleur possible, la comédienne nous définit le SCUM.
Je vous assure qu’à ce moment précis du spectacle, lorsque vous croisez son regard, vous n’en menez pas large !
Elle parvient à nous édifier. Dans les deux sens du terme.
Edifier, c’est à dire nous expliquer clairement ce qui a amené Miss Solanas à écrire son texte. La comédienne est très convaincante, et nous ne pouvons qu’acquiescer.
Oui, la domination masculine et le patriarcat sont bien réels.
En ce sens, c’est un spectacle indispensable, en ces temps troubles où ici et là, clairement ou insidieusement, les droits fondamentaux des femmes sont de plus en plus menacés.
Edifier, c’est faire peur.
Parce que pour l’auteure, la fin justifie les moyens. Tous les moyens.
Elle ne ménage pas sa peine, Sarah Chaumette, à arpenter le plateau, à porter haut et fort le texte.
Et puis, elle va chercher en coulisse une espèce de parallélépipède métallique bleu, qui va se révéler être une machine qu’elle va brancher.
De conférencière, grâce à cette machine, elle va devenir militante, respectant la structure littéraire du bouquin.
De pupitre, le meuble en bois devient un piédestal phallique, sur lequel elle s’élèvera de plus en plus.
Et la machine, me direz-vous ?
Cette machine va nous procurer une étonnante surprise, dont bien entendu je ne vous révèlerai pas la teneur.
A vous de venir découvrir ce phénomène à la Reine blanche.
Sarah Chaumette nous livre de façon hallucinée et drôle les vitupérations de Valérie Solanas.
Nous sommes sidérés par tant de radicalité, après avoir opiné du chef durant le constat.
La comédienne est alors magnifique d’outrance, incarnant cette redoutable pythie, cette prophétesse extrémiste, cette théoricienne de l’éradication masculine.
On comprend alors pourquoi le manifesto est devenu un rodéo : la comédienne parvient à dompter cet animal sauvage complètement affolé qu’est le texte.
Ce spectacle agit donc comme un électro-choc salutaire : grâce aux judicieux partis pris dramaturgiques, et en passant bien entendu outre la solution révolutionnaire évoquée, on ne peut qu’être totalement en phase avec la démonstration de l’auteure et comprendre la nécessité de la porter haut et fort de nos jours.
Un spectacle électrisant des plus réussis !