- Théâtre contemporain
- Théâtre national de la Colline
- Paris 20ème
Insoutenables longues étreintes

- Théâtre national de la Colline
- 15, rue Malte-Brun
- 75020 Paris
- Gambetta (l.3)
Tout commence dans le New York d’aujourd’hui où évoluent Monica, Charlie, Amy et Christophe, trentenaires aux amours brisées et aux destinées hasardeuses.
De New York à Berlin, sur fond de fête, de drogue, de sexe et de violence, tous quatre parviennent à se croiser, se séduire, s’aimer puis se haïr. Ces errances témoignent d’un sentiment d’échec que peut ressentir une génération en quête effrénée du plaisir et redéfinissant radicalement les paramètres de la liberté.
Ivan Viripaev débute sa carrière théâtrale au tournant des années 2000, lorsque son texte Oxygène le place au rang des dramaturges russes les plus représentés dans le monde.
Un long compagnonnage l’unit à Galin Stoev qui a mis en scène cinq de ses pièces traduites en français, parmi lesquelles Danse Delhi présentée en 2011 à La Colline.
Là, c'est Ivan Viripaev, qui a écrit cette dernière pièce en date, et qui a été créée en décembre au théâtre de la Cité, à Toulouse.
Là, il y aurait Galin Stoev, ami du précédent, un Galin Stoev qui a été l'un de premiers à le mettre en scène.
On connaît bien ce metteur-en-scène, artiste associé à La Colline, et qui notamment a déjà monté plusieurs spectacles à la Comédie Française. (On se souvient du beau Misanthrope interprété par Michel Vuillermoz.)
Là, c'est un étonnant plateau qui nous attend, entouré de trois grands murs d'étranges et très nombreux petits carrés gris foncé, avec chacun un numéro...
Nous en saurons plus sur ces drôles d'éléments au cours de la pièce. Et non, je n'en dirai pas plus...
Là, il y a quatre personnages qui vont se lancer dans une quête bien particulière.
Ce qu'ils cherchent avant tout, ces trentenaires déjà plus ou moins désabusés, c'est le plaisir par tous les moyens, le sexe, la violence, la drogue, et même le véganisme...
Ce voyage initiatique, ces insoutenables longues étreintes, il vont le poursuivre jusqu'à la plus inéluctable des extrémités : la mort.
Ivan Viripaev va nous proposer de nous confronter à cette expérience rendue seulement possible grâce au théâtre.
Ce sont évidemment une nouvelle fois ses thèmes de prédilection, la liberté, la quête du sens, la mort, qu'il va décliner de bien passionnante façon.
Là, il y a donc Amy, Christophe, Charlie et Monica.
Des trentenaires, donc, qui vont se croiser, se séduire, se quitter, se retrouver...
Se perdre !
Durant ces presque deux heures, nous allons assister à une sorte de talk-show qui va nous faire glisser dans une sorte d'espace-temps plus ou moins logique, plus ou moins réel...
Une sorte de "théâtre quantique", comme le décrit Stoev dans sa note d'intention.
Le texte est composé en permanence d'adresses au public.
Chaque personnage décrit ce qu'il fait, ce qu'il pense, ce qu'il ressent, comment il interagit avec les autres.
« Là, je te prends par la main et je te conduis à l'autel. »
Et puis là, il y aura un cinquième personnage, qui parlera à travers les autres.
Un être cosmique, venant d'une autre galaxie. Une connexion, une impulsion.
La Force ? (Pourquoi pas, si l'on en croit la petite référence à Star Wars qu'a glissée Viripaev dans la pièce.)
La mise en scène de Galin Stoev (qui a également traduit le texte) permet donc aux quatre comédiens d'évoluer dans une espèce de prison grisâtre, dans laquelle se trouvent deux bancs-coffres en bois, une espèce de chaire en plexiglas, surplombant le plateau, ainsi qu'une grande boîte elle aussi translucide.
Cette prison, il faudra la pulvériser !
Pauline Desmet, Sébastien Eveno, Nicolas Gonzales et Marie Kauffman sont tous habillés dans des tons de gris, à part une jupe rouge vermillon hautement symbolique.
Les quatre sont véritablement remarquables à dire ces petites phrases en apparence toutes simples, ces adresses au public, parfois graves, étranges, surréalistes, drôles, dans lesquelles s'invitent un dauphin et un serpent noir...
Ils parviennent parfaitement à nous captiver et à nous embarquer dans cette fascinante histoire dans laquelle il faut se laisser porter, se laisser aller sur les mots...
Ce spectacle ne peut donc laisser personne indifférent.
C'est un intense, intéressant et parfois déroutant mais toujours passionnant voyage qui nous est proposé.
Une quête au cours de laquelle nous est rappelée la question qui hante Ivan Viripaev : « Comment peut-on transformer la force destructrice du monde extérieur en une force de créativité ? »