- En tournée
- En tournée dans toute la France
Honneur à Notre élue

- Romain Cottard
- Patrick Chesnais
- Jean-Paul Muel
- Chantal Neuwirth
- Stéphane Roger
- Isabelle Carré
- Jan Hammenecker
- En tournée dans toute la France
C’est pourquoi il faut réfléchir différemment.
Marie NDiaye compose une fable politique, un conte poétique : Notre Élue, irréprochable, modèle absolu de probité, se trouve mise à mal par l’Opposant. Isabelle Carré et Patrick Chesnais plongent avec un humour féroce dans les rouages du pouvoir.
Dans une petite ville portuaire, Notre Élue, maire actuelle, s’impose en figure exemplaire de probité. Icône rêvée d’un pouvoir qu’on oserait dire pur. Notre Élue est irréprochable, modèle absolu. Mais l’Opposant, rétamé trois ans plus tôt, guette les élections. Il cherche par quelle faille déstabiliser Notre Élue. Il débusque pour finir le « truc franchement dégueulasse » qui changera la donne. Et le peuple fera son choix.
Prix Goncourt pour Trois femmes puissantes, prix Fémina pour Rosie Carpe, entrée au répertoire de la Comédie-Française avec Papa doit manger, Marie NDiaye compose une fable politique, un conte poétique, drôle et cruel, baigné d’un acide à l’élégance rare.
Honneur à notre élue ne fait pas honneur au spectateur.
Tout commence par une longue, longue, longue ... enfin interminable séquence vidéo dont on ne sait trop, sur le moment, où elle nous mène. Ce n'est que 20 minutes après (enfin pour ceux qui n'ont pas déjà décroché) que la lumière est faite. On reprend espoir et on se dit alors que l'histoire va démarrer.
Et en effet ... l'histoire démarre ... mais elle n'est qu'une succession de blabla. Le texte est certes bien écrit, mais il donne une sensation de prétention. Et ne comptez pas sur les comédiens pour sauver la pièce (et l'intérêt du spectateur). Leur jeu est froid et peu convaincant.
C'est dommage car l'idée de départ est intéressante. Pour une fois qu'une pièce traitant de politique s'intéresse à la vie locale, à la politique municipale. Oui, mais ici, la politique est caricaturée à l'excès. L'opposant n'est que vice, tandis que l'élue n'est que vertu. Un peu de nuance n’aurait pas fait de mal. Quant à la fin, elle est à la limite du risible.
Un rare moment d'ennui ...
Si Patrick Chesnais est crédible en "Opposant" roublard malgré lui (malgré plusieurs trous de mémoires), l'innocence et insouciance d'Isabelle Carré si convaincante sur grand écran passait ici pour de la froideur et de l'indifférence (pas aidée par le rôle d'anonyme de cette 'Notre Elue'). Quant aux personnages secondaires, ils sont tout simplement grossiers avec une mention spéciale pour les parents de "Notre Elue".
Dommage car le propos de la pièce, comment la politique peut faire sombrer la femme la plus honnête et intègre qu'il soit en construisant des scandales, est on ne peut plus d'actualité.
L’opposant invente donc « le truc franchement dégueulasse » qui mettra sa rivale au tapis. C’est alors que le plus inconcevable se produit : Notre Elue se laisse calomnier sans rétorquer. Drapée dans la posture de celle qui ne rend pas les coups, celle qui est incapable de faire de la politique autrement que de façon honnête.
En ces périodes pré-électorales, le spectacle pourrait nous offrir une fable délicieuse. Malheureusement, la mise en scène ne parvient pas à nous embarquer au cœur du système. Les luttes de pouvoir nous ennuient plus qu’elles ne nous passionnent, et ce n’est pas seulement parce qu’on est lassé de « Nos Elus »…
L’écriture théâtrale que développe cette auteure adroite, au langage plus écrit que parlé et dont le caractère littéraire apparait appuyé, nous conduit à nous demander quels sont, derrière les nombreux filtres obscurs ouvrant la voie à de multiples possibles, les messages portés par le texte.
Il ne peut pas s’agir d’une simple campagne électorale qui révèle les sentiments passionnels, aux contours de la dévotion, des adhérents comme des opposants au programme de la future maire élue. Nous assistons toutefois avec délice à ces sempiternelles discussions de coulisse, conventionnelles et savoureuses de ridicule, rappelant celles des combats renouvelés toujours et encore entre candidats aux élections.
Marie Ndiaye décrit avec une malice et un décalage permanents, une histoire qui nous apparait auréolée d’une mystique improbable et d’une amusante invraisemblance. À quoi donc rime tout cela ? À bien y regarder, la pièce revêt quelque peu les attributs esthétiques d’une « pastorale » moderne à la théâtralité crue et crédible.
La campagne électorale y serait alors une sorte d’évangélisation ? Son parcours parsemé d’embuches (insultes, coups bas, trahisons) surmonté sans mot dire par « Notre Élue » (quelle formule coïncidente !) lors de la campagne qui la conduira à l’échec, un chemin de croix ?. Echec qu’elle vivra par ailleurs avec abnégation et culpabilité, disant que tout est de sa faute…
Ah ça mais ! « Passion » et « Résurrection » ne se trouveraient-elles pas illustrées ici ?
Métaphore métaphysique voulue ou pas, conte philosophique cruel ou tragi-comédie fantastique, les personnages et leurs relations nous paraissent plus captivants que les situations développées et nous surprennent à chercher ce qui les animent, pourquoi sont-ils ainsi, pourquoi disent-ils cela. Les personnages de l'opposant et de notre élue sont particulièrement troublants.
La mise en scène de Frédéric Bélier-Garcia offre une structure théâtrale riche et variée : Jeux de lumières et de décors, vidéos en direct se fondant dans une mise en abyme des situations, mélange de sons directs et sonorisés.
Le tout, d’une richesse extrême et précise, est mis au service d’une interprétation toujours juste, entrainée par les compositions étonnantes de Patrick Chesnais et d’Isabelle Carré. Du très bel ouvrage.
Un spectacle étonnant par son originalité, dont l’intérêt s’effrite en allant. Admirablement mis en scène et bien joué.
Côté comédiens, on a franchement vu mieux.