- Théâtre contemporain
- La Scala
- Paris 10ème
Dans le jardin de l'Ogre
- La Scala
- 13, boulevard de Strasbourg
- 75010 Paris
- Strasbourg Saint-Denis (l.4, l.8, l.9)
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AVIGNON 2025
Adèle, journaliste, est mariée à Richard, chirurgien. Ils ont un enfant, Lucien. Ils vivent dans le beau 18ème arrondissement de Paris. Mais Adèle est addicte au sexe. Elle mène une double vie. Sa vie de mensonges va la plonger petit à petit dans le chaos. Jusqu’au jour où son mari découvre son terrible secret
… Adèle veut tout à la fois, le hasard et la liberté et répondre aux injonctions imposées aux femmes par la société (être une bonne épouse, une bonne mère, une femme indépendante, une fille sage, etc…) C’est un récit sombre et courageux mais non sans humour grâce à l’acuité dont Adèle fait preuve pour analyser le monde qui l’entoure, professionnel, familial et masculin.
AVIS DE LA REDACTION 7/10
Adèle a tout pour être heureuse. Un bon job, un mari aimant, un enfant et un bel appartement parisien. Mais Adèle n’est pas heureuse. Elle a besoin d’autre chose. Elle a besoin de sexe. Tout le temps. Pour cela, elle doit se cacher et mentir en permanence. Pour que personne ne s’aperçoive qu’elle mène une double vie, au gré de ses désirs, loin des injonctions de la société qui l’entoure.
Dans le jardin de l’Ogre nous plonge dans la psyché tourmentée de cette femme à travers le jeu très incarné d'Anne-Élodie Sorlin. Cette dernière incarne une Adèle pleine de ses contradictions, désespérée, enfermée par ses pulsions et libre à la fois de ses folies. Avec justesse, elle traverse tous les états de ce personnage singulier et nous en narre l’histoire rocambolesque avec sa voix captivante. Adaptation du roman éponyme de Leïla Slimani, cette pièce nous immerge, nous absorbe, pour mieux nous permettre d’adopter le point de vue décalé de sa protagoniste.
La mise en scène reste minimaliste, avec quelques lumières et des voix provenant de hauts parleurs. Un choix intéressant pour donner du relief autour du jeu des comédiens. Cependant, la simplicité et l’efficacité de l’intimité offerte par la scène paraît à certains moments étouffée par trop d’éléments extérieurs (musique un peu forte ou inadaptée, bruitages, etc…). L’utilisation de micro semble par ailleurs un peu étrange au vu de la taille de la salle.
Certains passages comme les diners en famille sont en même temps drôles et dérangeants. De même que les frasques d’Adèle, de plus en plus extrêmes, que nous suivons avec un mélange de fascination et d’écœurement devant les descriptions crues.
Par effet de miroir, elle nous interroge sur la sexualité évidemment, mais surtout sur les rapports de pouvoir, de domination et les injonctions qu’elle pose sur les individus, quel que soit leur genre. Adèle se met volontairement à l’écart. Elle cherche la passivité, l’abandon, dans un monde qui lui demande en permanence de s’accrocher, à sa famille, à son travail, à des traditions, etc. Sa réponse qu’on qualifierait intuitivement de pathologique est une addiction qui la pousse à bout et qui l’isole. Oui, mais pour mieux prendre du recul sur tout ce qui semble acquis.
Le contraste avec son mari notamment est le plus marquant, d’autant plus qu’il finit par s’incarner dans le dernier tiers de la pièce. Xavier Deranlot interprète sans artifices un Richard en apparence plus sain que sa partenaire, mais en réalité tout aussi fou au travers de ses propres illusions.
Ainsi, Dans le Jardin de l’Ogre nous donne à vivre un moment l’image de son héroïne.
Un peu fou. Dérangeant. Unique.
Thomas Benatar
